26 janvier 2016 2 26 /01 /janvier /2016 13:50

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Trommenschlager Franck

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26 janvier 2016 2 26 /01 /janvier /2016 12:10

Avoir mal est une expérience commune à tous, mais qui reste singulière à chacun. Peur, colère, refus, la douleur modifie toute notre relation au monde et aux autres… Elle peut aussi être une source de découverte de soi.

 

- La souffrance fait de nous des êtres que nous ne sommes pas ! -

Il a suffi d’une migraine terrible. « Ça devait être un séjour en amoureux à Venise, se souvient Caroline, 40 ans. Ce fut l’horreur : je ne pouvaisplus parler, ne voulais que le noir et le silence. J’étais annihilée. Plus rien ni personne n’existait, j’étais entièrement envahie par la pulsation de la douleur. » Une réaction que son compagnon n’a pas comprise et qu’il a interprétée comme du non-amour. « Je lui faisais le coup de la migraine ! » Il a fallu du temps pour qu’il réalise… Caroline a fait une découverte ce jourlà : l’immense difficulté de parler de la réalité de sa douleur. Expérience de traverser l’existence sans la moindre migraine ni la plus petite rage de dents ? –, la douleur physique n’en reste pas moins une aff aire singulière, propre à chacun. C’est bien là son principal paradoxe. Comment, dans ces conditions, réussir à en exprimer l’intensité ?

 

La douleur ne se laisse pas attraper facilement. Pulsative, sourde, aiguë, fulgurante, irradiante…, les médecins utilisent un vocabulaire varié pour tenter d’en cerner la nature. Une difficulté telle que la mise au point d’une échelle de quantification de la douleur, de un à dix, utilisée dans les services hospitaliers, a demandé des années de travail pour aboutir à un minimum commun. David Le Breton, sociologue et anthropologue, fait de cette difficulté de communication l’une des clés de voûte de sa réflexion dans son dernier ouvrage. « Même les ressentis peuvent être différents, observe-t-il. La souff rance par rapport à une même cause peut être immense ou dérisoire. » Selon l’âge, les conditions psychologiques, la prise en charge, mais aussi selon la culture. « Déjà dans les années 1960, une étude américaine démontrait qu’Irlandais et Italiens ne souffraient pas de la même manière, rapporte le chercheur. Pour une même cause, en l’occurrence une intervention ophtalmologique, les Italiens avaient tendance à exprimer plus de souffrance que les Irlandais, qui la niaient. » Au-delà des différences culturelles, le ressenti de la douleur n’est pas non plus identique d’un individu à l’autre, ni même d’un sexe à l’autre. « Lors d’expériences où la douleur est provoquée, on s’aperçoit qu’elle apparaît plus rapidement chez la femme, et que celle-ci la tolère moins bien », précise le docteur Alain Serrie, président de la Société française d’étude et de traitement de la douleur. Sans omettre la façon dont ont été accueillis nos maux d’enfant : « C’est rien, serre les dents », ou « Mon pauvre chéri, ça doit faire très mal… »

 

Éloignés les uns des autres

 

Dans ces conditions, rien de surprenant à ce que la douleur, « mal commun » mais pas « en commun », nous isole, nous enferme dans un monde intérieur dans lequel nous n’avons plus accès aux autres, et où les autres ne peuvent plus nous atteindre. Outre le repli sur le soi, la douleur peut engendrer de la colère et de l’agressivité, qui provoquent parfois l’incompréhension et le rejet des proches. Car cette inaccessibilité à l’autre génère à son tour de la souffrance dans l’entourage.

 

Les parents d’enfants malades témoignent aussi de leur incapacité à soulager ou à souffrir avec le petit malade. « À 10 mois, Mathilde a été opérée des intestins, confie Odile, sa maman, 37 ans. Mon impuissance face à sa douleur me déchirait. Elle ne voulait même plus mes bras. » Cette solitude-là nous rappelle que « nous sommes des êtres séparés. La douleur agit comme une coupure entre les êtres », souligne David Le Breton. Et cette coupure est particulièrement insupportable pour les mères, qui doivent abandonner la fusion avec l’enfant… tout en la recherchant comme si elles pouvaient prendre sur elles le mal. « Que l’on me coupe une jambe pour faire cesser sa souffrance ne m’aurait rien coûté ! » jure Odile. « La douleur de l’enfant réactive cette culpabilité fondamentale chez la mère de “jeter son enfant au monde”, selon le mot du philosophe Martin Heidegger », remarque Laure Bertrand, psychologue.

- La souffrance fait de nous des êtres que nous ne sommes pas ! -

Une nouvelle conscience de soi

 

Si la souffrance est solitude, elle est aussi perception aiguë de l’identité : ma souffrance m’indique les limites de mon être. « Partout où j’ai mal, c’est Fritz Zorn. Dans les grandes crises douloureuses, on investit son corps autant que l’on est investi par lui. Martine, 60 ans, en a fait l’expérience lors de son cancer du sein. « Mon corps s’est rappelé cruellement à moi. Je ne pouvais pas ignorer la “bête” qui me mordait sous l’aisselle. Je sentais parfaitement les contours de l’intervention chirurgicale. » Et si, heureusement, la douleur a disparu, la conscience de son corps est demeurée. « J’ai retenu la leçon. Je m’écoute. » Cette présence aiguë à soi-même peut nous ouvrir à une autre dimension de notre être. En nous arrachant à nous-même (le « nous » d’avant la douleur), la souff rance nous livre à une métamorphose, grande ou petite : pour le pire, si elle nous détruit dans une souffrance sans issue ; pour le meilleur, si elle nous fait nous poser des questions. « Elle nous parle de nous, de notre liberté, indique le philosophe Bertrand Vergely. Pourquoi subissons-nous ? Pourquoi ne supportons- nous pas ? Que se passe-t-il dans les profondeurs de notre être pour que nous soyons soudain paralysés ou libérés et plus forts ? »

 

En nous donnant parfois envie de mourir, la souffrance aiguë peut aussi nous faire passer dans le camp de ceux qui connaissent le prix de la vie. Ou, tout simplement, nous faire apprécier les moments sans souffrance, comme dans le cas des douleurs chroniques, de plus en plus présentes dans nos sociétés. Dans des cas moins extrêmes, la douleur peut devenir un défi , puisqu’il faut cohabiter avec elle. « J’aurai toujours mal, note Martine. Mais plus ou moins. Je vis avec. Je m’adapte : je ne porte plus de choses lourdes, j’évite certains gestes. Je suis assez fière d’avoir traversé cela, même si, bien sûr, j’aimerais bien rebasculer dans l’insouciance de mon corps d’avant. »

 

Trouver du sens pour dépasser la douleur

 

Les témoignages de déportés et de torturés le disent tous : selon que la victime accorde ou non une valeur à l’épreuve subie, elle la traversera plus ou moins bien. David Le Breton parle d’un « bouclier du sens ». Cette notion s’applique aussi à la douleur des sportifs de haut niveau, recherchée comme une mesure de l’intensité de l’entraînement, ou encore à la douleur de l’accouchement, intense mais supportée (voire voulue en cas de refus de la péridurale), pour ne pas manquer un instant de l’irruption de la vie. « C’est plus facile si on sait que cela va s’arrêter, mais même dans les cas de mal chronique, on peut parvenir à lui Psychothérapie, yoga, sophrologie, tout peut aider à chercher en soi la manière d’en « faire » quelque chose.

 

Y compris jusqu’aux portes de la mort. « Une patiente m’a dit que la maladie et la douleur avaient “désenfoui des vérités” », relate Laure Bertrand. La douleur modifie la perception que nous avons de nous-même et altère notre relation au monde, mais elle peut également devenir une « force ». À l’instar d’une épreuve, elle peut se traverser. Et ce voyage particulier au centre de nous-même, cette traversée de l’intime nous métamorphose et nous conduit à une connaissance de notre être le plus profond.

 

Christilla Pellé Douel pour psychologies.com

- Schéma global du cerveau et du système nerveux dans la prise en charge de la douleur -

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26 janvier 2016 2 26 /01 /janvier /2016 12:05

Les propositions qui seront au coeur de cet article se fondent sur les conclusions de mon ouvrage, La société automatique, que je viens de consacrer aux enjeux de l'automatisation intégrale et généralisée qui se déploie avec le numérique. J'y soutiens que l'automatisation algorithmique conduit au dépérissement du salariat et de l'emploi, et donc à la disparition prochaine du modèle keynésien de redistribution des gains de productivité qui était jusqu'alors et qui est encore la condition de solvabilité du système macro-économique... Un désastre progressif, provoquant dans son sillage la perte des savoirs théoriques, inhérents au bon développement de l'humain.

Un homme d'honneur, fatigué par une lutte qui enjambe les siècles... et menace notre avenir

Un homme d'honneur, fatigué par une lutte qui enjambe les siècles... et menace notre avenir

Entretien sur les transformations économiques radicales concernant notre avenir proche, réalisé par le magazine Society - Janvier 2015 - à télécharger ici :

http://arsindustrialis.org/sites/default/files/SOCIETY%5B2%5D.pdf

 

 

Automatisation et néguentropie

 

Après la " grande transformation " que décrivit Karl Polanyi en 1944, qui installa ce que l'on nomme à présent " l'Anthropocène ", une immense transformation se produit, qui ouvre une alternative. Soit elle conduit à une hyperprolétarisation et à un pilotage automatique généralisé qui engendreraient à la fois une insolvabilité structurelle et une augmentation vertigineuse de l'entropie. Soit elle nous conduit à sortir du processus de prolétarisation généralisée auquel le capitalisme industriel nous a conduits depuis 250 ans, et elle généralise le développement massif de capacités néguentropiques par une politique noétique de la réticulation mettant les automates au service de capacités individuelles et collectives de désautomatisation – c'est-à-dire de production de bifurcations néguentropiques.

L'immensité de la transformation en cours est liée à la fois à la vitesse de ses effets et à leur globalité. Ce que l'on appelle les big data est caractéristique de cette immense transformation, telle que le consumérisme planétaire y conduit à liquider toutes les formes de savoir (savoir-vivre, savoir-faire et savoir-conceptualiser).

L'Anthropocène est un " Entropocène ", c'est-à-dire une période de production massive d'entropie précisément en cela que les savoirs ayant été liquidés et automatisés, ce ne sont plus des savoirs, mais des systèmes fermés, c'est-à-dire entropiques. Un savoir est un système ouvert : il comporte toujours une capacité de désautomatisation productrice de néguentropie. Lorsque Chris Anderson annonce la fin de la théorie à l'ère des big data, il néglige gravement ce fait, en ignorant que la fermeture d'un système ouvert conduit systémiquement à sa disparition.


Fondé sur la prolétarisation et la destruction des savoirs, le modèle de redistribution des gains de productivité par l'emploi est lui-même condamné. Un autre modèle de redistribution doit être conçu et mis en oeuvre, qui garantisse la solvabilité macro-économique de l'automatisation numérique. Le critère de redistribution qui doit être adopté ne doit plus être fondé sur la productivité du travail. La productivité est désormais une question machinique, et l'actuelle machine numérique n'a plus besoin ni du travail, ni de l'emploi.

Le travail manuel qui produisait de la néguentropie et du savoir – celui dont parle Hegel à propos du Knecht – fut remplacé par l'emploi prolétarisé au XIXe siècle, c'est-à-dire par le prolétaire soumis à une machinerie qui était entropique non seulement par sa consommation d'énergie fossile, mais par la standardisation des chaînes opératoires et la perte de savoir qui en résultait du côté de l'employé. Cette perte de savoir s'est aujourd'hui généralisée, au point d'atteindre Alan Greenspan, comme j'ai tenté de le montrer dans La société automatique, et comme il le déclarait lui-même le 23 octobre 2008.

L'Anthropocène est insoutenable : c'est un processus de destruction massive, rapide et planétaire, dont le cours doit être inversé. La question et l'enjeu de l'Anthropocène, c'est donc le " Néguanthropocène ", c'est-àdire la voie qui doit permettre de sortir de cette impasse de dimension cosmique – qui requiert une nouvelle cosmologie spéculative dans le sillage de Whitehead.

Le nouveau critère de redistribution qu'il s'agit de mettre en oeuvre dans l'économie du Néguanthropocène doit être fondé sur une capacité de désautomatisation qu'il faut ressusciter. Cette résurrection doit être celle de ce qu'Amartya Sen appelle les " capacités ", qu'il met au fondement du développement humain – c'està- dire de l'individuation du genre humain.

 

Savoirs, libertés et agentivité

 

Amartya Sen rapporte la capacitation au développement des libertés, qu'il définit comme étant toujours à la fois individuelles et collectives : " La liberté individuelle est un engagement social ".[2] Sen est fidèle en cela aux points de vue kantien aussi bien que socratique. C'est comme liberté que la capacitation constitue la base du dynamisme économique et du développement : " La liberté apparaît comme la fin ultime du développement, mais aussi comme son principal moyen ".[3] Ainsi définie par Sen, la liberté est une agentivité (agency, cf. p. 16-17) : un pouvoir d'agir.

Dans le fameux exemple comparatif des effets incapacitants sur les habitants noirs de Harlem du consumérisme (c'est-à-dire pour lui des indicateurs de richesse fondés sur le PIB), qui, comparées aux habitants du Bengladesh, ont une moindre espérance de vie,
[4] c'est cette " agentivité " qui est en jeu. La liberté est ici constituée par le savoir en tant qu'il est une capacité toujours à la fois individuelle et collective – ce qui veut dire : individuée à la fois psychiquement et collectivement. C'est sur cette base que Sen a opposé aux indicateurs de croissance du PIB (p. 18) des indicateurs de développement humain (IDH).

Je voudrais prolonger ces propositions de Sen par une autre analyse, qui conduit à d'autres questions. Elle permet en particulier d'instruire le rapport que les individus psychiques et collectifs pourraient nouer avec les automates pour aboutir à des productions individuelles et collectives de bifurcations néguentropiques dans un système industriel et économique qui, en s'automatisant massivement, tend à se fermer.

L'Anthropocène, en tant qu'il est un " Entropocène ", accomplit le nihilisme comme le nivellement insoutenable de toutes les valeurs et le sursaut impératif d'une " transvaluation " faisant ressurgir une " économie générale " au sens de Georges Bataille, dont j'ai tenté de montrer ailleurs que c'est une économie libidinale revisitée. Le mouvement que je décris ici n'est sans doute pas une transvaluation en un sens strictement nietzschéen. C'est en revanche une invitation à relire Nietzsche au regard des questions de désordre et d'ordre que je vais à présent appréhender en termes de devenir et d'avenir.

 

Le savoir comme néguentropie

 

S'il y a un avenir, et non seulement un devenir, la valeur de demain sera la néguentropie constitutive de l'économie à venir du Néguanthropocène. Une telle économie doit faire de la différenciation pratique et fonctionnelle entre avenir et devenir son critère de valorisation – seul susceptible de surmonter l'entropie systémique en quoi consiste l'Anthropocène. Cette économie suppose de passer de l'anthropologie à la néguanthropologie, elle-même fondée sur une organologie générale et sur une pharmacologie : le pharmakon, c'est l'artefact qui est la condition de l'hominisation mais qui produit toujours à la fois de l'entropie et de la néguentropie, et qui menace toujours l'hominisation.

Le problème que pose un tel point de vue sur l'avenir est d'évaluer ou de mesurer la néguentropie. Appelée entropie négative par Erwin Schrödinger et anti-entropie par Francis Bailly et Giuseppe Longo, la néguentropie est toujours définie par rapport à son observateur (cf. Henri Atlan,
[5] Edgar Morin[6]) – c'est-à-dire qu'elle caractérise toujours une localité qu'elle produit comme telle, et qu'elle différencie dans un espace plus ou moins homogène (c'est pourquoi une néguanthropologie sera toujours aussi une géographie). Ce qui est entropique sous tel angle est néguentropique sous un autre angle.

Un savoir – comme savoir-faire, c'està- dire comme savoir faire que ce que je fais ne s'écroule pas et ne conduise pas au chaos, comme savoir-vivre, c'est-à-dire comme savoir enrichir et individuer l'organisation sociale dans laquelle je vis sans la détruire, et comme savoir conceptuel, c'est-à-dire comme savoir n'héritant de son passé qu'en le bouleversant, et ne le bouleversant qu'en le réactivant, ce que Socrate appelle l'anamnèse, et qui, en Occident, excède structurellement sa localité – un savoir, donc, quel qu'il soit, est toujours une façon de définir collectivement ce qui est néguentropique dans tel ou tel champ de l'existence humaine.

Ce que l'on appelle l'inhumain est une façon de nier les possibilités néguentropiques de l'humain, c'est-à-dire de sa liberté noétique et de son agentivité résultante. Ce que Sen décrit comme une liberté et une capacité, cela doit être conçu de ce point de vue cosmique, qui participe d'une cosmologie spéculative au sens de Whitehead, constituant une potentialité néguentropique – c'est-à-dire comme potentiel d'ouverture d'un système local qui, étant dit " humain ", peut toujours se refermer, ce que Whitehead décrit comme régression et devenir inhumain.[7]

Il ne peut en aller ainsi que parce que l'anthropologique est hyperentropique tout aussi bien que néguentropique à la puissance deux : l'anthropos est organologique, c'est-àdire pharmacologique, ou encore, comme le dit Jean-Pierre Vernant, constitutivement ambigu.

 

 

A still from Charlie Chaplin's Modern Times (1936). Photo: © 1936 - Warner Bros. Source: IMDb
 
 

L'anthropologie comme entropologie selon Lévi-Strauss et au-delà

 

Outre la localité qui le constitue fondamentalement, un système ouvert et néguentropique est caractérisé par sa durabilité relative – autrement dit par sa finitude. Ce qui est néguentropique – comme idiome, comme outil, comme institution, comme marché, comme désir, etc. – ne l'est jamais que dans le temps de son inéluctable dégradation.

En parlant de néguentropie, Morin et Atlan font l'impasse sur l'essentiel, à savoir la dimension organologique (technique et artificielle) de la néguentropie caractéristique de l'anthropos, telle qu'elle est aussi pharmacologique, c'est-à-dire un facteur d'entropie tout autant que de néguentropie, et telle qu'elle nécessite donc constamment des arbitrages – qui sont opérés par les savoirs en tant que thérapeutiques.

Cette impasse sur l'organologie et la pharmacologie caractérise aussi Claude Lévi-Strauss lorsque, dans la conclusion de Tristes tropiques, après avoir rappelé que " le monde a commencé sans l'homme et il s'achèvera sans lui " et que l'homme travaille " à la désagrégation d'un ordre originel et précipite une matière puissamment organisée vers une inertie toujours plus grande et qui sera un jour définitive ", il ajoute que :

" depuis qu'il a commencé à respirer et à se nourrir jusqu'à l'invention des engins atomiques et thermonucléaires, en passant par la découverte du feu – et sauf quand il se reproduit lui-même –, l'homme n'a rien fait d'autre qu'allègrement dissocier des milliards de structures pour les réduire à un état où elles ne sont plus susceptibles d'intégration. "[8]

Lévi-Strauss pose ainsi avec une radicalité rare la question du devenir sans être, c'està- dire du caractère inéluctablement éphémère du cosmos en totalité, tout aussi bien que des localités qui s'y forment à travers des processus néguentropiques toujours facteurs eux-mêmes d'accélérations entropiques.

Si l'on prenait au pied de la lettre ce que Lévi-Strauss écrit ici dans une veine profondément nihiliste (par exemple lorsqu'il écrit que " l'homme n'a rien fait d'autre qu'allègrement dissocier des milliards de structures pour les réduire à un état où elles ne sont plus susceptibles d'intégration "), on serait obligé de tenir pour tout à fait négligeable le temps qui nous sépare de la " fin des temps ". On serait obligé de réduire ce temps à néant, de l'annihiler, et d'annuler la néguentropie présente au motif qu'elle est éphémère : on serait obligé de dissoudre l'avenir dans le devenir, que l'on évaluerait comme nul et " non avenu ", c'est-à-dire comme n'étant finalement jamais arrivé, et fruit d'aucun avenir – comme devenir sans avenir.
[9] On serait d'ailleurs aussi obligé de dire qu'une éphémère, parce qu'elle est éphémère, n'est rien.

C'est à la lettre ce que nous dit l'anthropologue. Face à cela, je me définis moi-même comme " néguanthropologue ". Et j'objecte à Lévi-Strauss :

– D'une part, que la question de la raison, entendue comme pouvoir quasi-causal (au sens deleuzien) de bifurquer, c'est-à-dire de produire dans le fouillis des faits un ordre nécessaire formant un droit, est toujours d'être " digne de ce qui nous arrive ", ce qui est une autre façon de désigner la fonction de la raison telle que la définit Whitehead, à savoir comme ce qui fait de la survie un bien-vivre et du bien-vivre un mieux-vivre, c'est-à-dire une lutte contre la survie statique, qui n'est autre que la tendance entropique de toute forme de vie.

– D'autre part, que sa sophistique amère et désabusée néglige gravement deux points. Premièrement, la vie en général, comme " entropie négative ", c'est-à-dire comme néguentropie, produit elle-même toujours de l'entropie, et y reconduit invariablement : elle est un détour – comme le disent aussi Freud dans Au-delà du principe de plaisir et Blanchot dans L'entretien infini. Deuxièmement, la vie technique est une forme amplifiée et hyperbolique de néguentropie, c'est-à-dire d'organisation non seulement organique, mais organologique, qui produit une entropie tout aussi hyperbolique, et qui, comme le vivant, y reconduit, mais en accélérant les vitesses de différenciation et d'indifférenciation en quoi cet autre détour consiste, la vitesse constituant ici, dès lors, un facteur cosmique local.

Ce détour en quoi consiste la vie technique, c'est le désir comme pouvoir d'infinitiser.


Il est trompeur de donner à croire, comme le fait ici Lévi-Strauss, que l'homme serait d'essence entropique et qu'il détruirait une " création " qui serait d'essence néguentropique, en l'espèce " la nature " – vivante, profuse et féconde, végétale et animale. Les végétaux et les animaux sont des ordonnancements organiques de la matière inerte hautement improbables (comme l'est toute néguentropie), mais ils ne se déploient qu'en intensifiant euxmêmes des processus entropiques : ils ne font eux-mêmes qu'un détour, en cela tout aussi provisoire et vain dans le devenir.

En consommant et, ce faisant, en dissociant ce que Lévi-Strauss appelle des " structures ", toute créature vivante participe à une augmentation locale d'entropie tout en produisant de façon plus locale encore un ordre néguentropique. Ce que Derrida appelle la " différance ", si l'on pouvait rapporter la néguentropie à ce concept, c'est avant tout une affaire d'économie et de détour. S'il est vrai par ailleurs que la différance est un agencement de rétentions et de protentions, comme l'indique Derrida dans De la grammatologie, et s'il est vrai que chez les êtres dits humains, c'està- dire techniques et noétiques, les agencements de rétentions et de protentions sont transformés par les rétentions tertiaires, alors on devrait pouvoir redéfinir, à partir de ce concept de différance revisité, à la fois l'économie et le désir configurant les circuits qui se forment par ces détours comme spires et spirales.

À la différence des êtres purement organiques, les êtres dits humains sont organologiques, c'est-à-dire néguentropiques (et entropiques) à deux niveaux : à la fois comme êtres vivants, c'est-à-dire organiques, qui, en se reproduisant, induisent de " petites différences " à l'origine de l'évolution, et donc de ce que Schrödinger décrit comme l'entropie négative,
[10] et comme êtres artificiels, c'est-à-dire organologiques, qui différencient ce qui dès lors n'est plus simplement ce que l'on nomme une " espèce ", mais un " genre " – selon ce que Simondon appelle le processus d'individuation psychique et collective.

Les artifices sont d'autres détours, euxmêmes plus ou moins éphémères, comme les insectes nommés éphémères, et ils sont ni plus ni moins " sans pourquoi " que les roses tant appréciées en Grande Bretagne, qui sont d'ailleurs elles-mêmes artificielles pour l'essentiel.
[11] Mais ces artifices, en tant qu'ils donnent des arts et des oeuvres, d'art autant que de science, peuvent s'infinitiser et infinitiser leurs destinataires au-delà d'eux-mêmes, c'est-à-dire au-delà de leur propre fin, les projetant dans la protention infinie d'une promesse toujours encore à venir, seule capable de trouer l'horizon du devenir indifférencié.

On pourra rétorquer à ce que j'objecte à Lévi-Strauss que la néguentropie organologique, et non seulement organique, qui constitue ce que je décris ainsi comme le néguanthropos, est un accélérateur d'entropisation qui précipite la fin et qui, de ce point de vue, raccourcit ce qui est finalement l'essentiel, à savoir le temps de cette différance. Mais ce serait précisément ne pas comprendre de quoi je parle.

Il y a certes la question de la vitesse, qui est un facteur crucial en matière de physique thermodynamique aussi bien que de biologie et de zoologie. Mais la question est ici celle d'une politique de la vitesse, où se présentent des possibilités opposées, et où il s'agit de savoir en quoi, où, sur quel plan et pour combien de temps ce que Leroi-Gourhan, pour définir la dynamique de l'hominisation, appelle la " conquête de l'espace et du temps ", augmente ou réduit l'entropie.


Le numérique atteint de nos jours 200 000 km/s, soit 2/3 de la vitesse de la lumière, ce qui est quatre millions de fois plus rapide que l'influx nerveux. Dans la situation si exceptionnelle et insoutenable de l'Anthropocène, seule une assomption résolue de la condition organologique dans le sens d'une augmentation de néguentropie peut transformer la vitesse des vecteurs technologiques et – permettre, au sens strict, de gagner du temps, c'est-à-dire de la différenciation, pour autant précisément qu'une transvaluation de l'économie industrielle nous engage dans le néguanthropocène et nous dégage de l'Anthropocène.

Si la néguentropie hyperbolique en quoi consiste le devenir organologique de l'organique instaure une néguanthropologie qui accélère le devenir (entropique et anthropique), elle transforme aussi cette accélération en un avenir qui diffère ce devenir aux deux sens du verbe que Derrida mobilisait dans ce qu'il appelait la différance, laquelle installe un avenir (néguentropique et néguanthropique) qui constitue cette forme infinitisante de protention qu'est l'objet du désir comme facteur d'individuation et d'intégration (psychique, sociale et technique) – faute de quoi cette différance ne serait que formelle.

C'est à l'aune de ces questions – que le triste propos de Lévi-Strauss efface en écrasant l'indétermination de l'avenir sous le poids probabilitaire du devenir – qu'il faudrait aujourd'hui réinterpréter Spinoza.

 

Intermittence noétique et potlatch cosmique

 

Les êtres organologiques sont capables d'organiser délibérément ces oeuvres néguentropiques et organologiques que nous disons néguanthropiques. Selon la manière dont ils procèdent à cette organisation à la fois psychique et sociale, selon la manière dont ils prennent ou ne prennent pas soin du pouvoir à la fois anthropique et néguanthropique en quoi consistent leurs comportements, ils peuvent soit précipiter indifféremment le déchaînement entropique, soit au contraire le différer – constituant ainsi une différance que Simondon appelle une individuation et qu'il pense comme un processus ainsi que Whitehead.[12]

Nous soutenons nous-mêmes le projet d'une néguanthropologie conçue comme un soin et comme une économie en ce sens. Ce soin économe n'est pas un simple pouvoir de transformer anthropologiquement le monde (comme " maître et possesseur de la nature "). C'est un savoir pharmacologique constituant une néguanthropologie au service du Néguanthropocène, à la façon dont Canguilhem conçoit la fonction de la biologie comme connaissance de la vie dans la vie technique, et dont Whitehead conçoit la fonction de la raison dans une cosmologie spéculative.

On doit bien sûr qualifier et identifier les " externalités négatives " que la " néguanthropie " engendre au cours de l'anthropisation multipliant les milieux dits " anthropisés ". Mais la question n'est pas d'annuler la néguanthropie. Elle est au contraire et précisément de passer de l'anthropisation à la néguanthropisation en cultivant une pharmacologie positive ni plus ni moins éphémère que la vie emportée dans le devenir comme tout ce qui " est " dans l'univers – ce soin étant ce en quoi cette néguanthropologie consiste, toujours ignorée par un Lévi-Strauss ignorant et censurant délibérément la pensée de Leroi-Gourhan.
[13]

Cet état de fait tient à ce que l'anthropologie lévi-straussienne est fondée sur le refoulement de l'organologique mis en évidence par Leroi-Gourhan, et par l'ignorance de la question néguanthropologique qui l'emporte au-delà de toute anthropologie. Rapportons dès à présent cette répression de l'organologique à la notion de dépense, telle que la conçut Georges Bataille :

" Chaque fois que le sens d'un débat dépend de la valeur fondamentale du mot utile, c'est-à-dire chaque fois qu'une question essentielle touchant la vie des sociétés humaines est abordée [...], il est possible d'affirmer que le débat est nécessairement faussé et que la question fondamentale est éludée. Il n'existe aucun moyen correct [...] qui permette de définir ce qui est utile aux hommes. "[14]

Ici sont en jeu des " dépenses dites improductives "[15] qui se rapportent toutes au sacrifice, c'est-à-dire à la " production de choses sacrées [...] constituées par une opération de perte ".[16]

Toute perte sacrifie, sacralise et sanctifie un défaut d'être plus vieux que tout être (et c'est ainsi que je lirais Levinas). Dans cette teneur primordialement défectueuse se constitue une intermittence noétique, qui ne peut que se projeter spéculativement dans et comme totalité cosmique néguanthropologiquement conçue – c'est-à-dire comme savoir et pouvoir de bifurquer dans l'entropie.

Toute bifurcation noétique, c'est-à-dire quasi-causale, procède d'un potlatch cosmique qui détruit en effet de très grandes quantités de différences et d'ordres en projetant sur un autre plan une très grande différence, constituant un autre " ordre de grandeur " contre le désordre d'un kosmos en devenir qui, sans cette projection de l'encore-à-venir de l'insu, se réduirait à un univers sans singularité.

" La dépense, bien qu'elle soit une fonction sociale, aboutit immédiatement à un acte de séparation, d'apparence anti-sociale. L'homme riche consomme la perte de l'homme pauvre en créant pour lui une catégorie de déchéance et d'abjection qui ouvre la voie à l'esclavage. [...] De l'héritage indéfiniment transmis du monde somptuaire ancien, le monde moderne a reçu en partage cette catégorie, actuellement réservée aux prolétaires. "[17]

Dans ce monde prolétarisé, la dépense de " l'homme riche " devient cependant stérile :

" Les dépenses engagées par les capitalistes pour secourir les prolétaires et leur donner l'occasion de s'élever sur l'échelle humaine ne témoignent que d'une impuissance – par épuisement – à pousser jusqu'au bout un processus somptuaire. Une fois réalisée la perte de l'homme pauvre, le plaisir de l'homme riche se trouve peu à peu vidé de son contenu et neutralisé : il fait place à une sorte d'indifférence apathique. "[18]

À l'heure où le savoir devenu automatique est au coeur de l'économie, au risque de se nier lui-même comme computation a-théorique, nous reprendrons ce chantier sous les angles épistémique et épistémologique dans L'avenir du savoir. Nous y verrons que 1° la question de l'avenir du savoir est inséparable de celle de l'avenir du travail et que 2° elle doit se traduire par une politique industrielle alternative qui rende à la France et à l'Europe leur place dans le devenir – et comme trans-formations de ce devenir en avenirs.

 

Devenir, avenir et néguanthropologie

 

Notre question est l'avenir – du travail, du savoir et de tout ce que cela engendre, c'est-àdire tout – en tant qu'il n'est pas soluble dans le devenir. Qu'il n'y soit pas soluble ne signifie pas qu'il ne pourrait pas s'y dissoudre et s'y résoudre mais cette dissolution qui serait sa disparition serait aussi, du même coup, la nôtre. Cette possible dissolution en fait est ce qui n'est pas possible en droit : nous n'avons pas le droit de nous y résoudre.

Le devenir est soumis au plus probable. L'avenir est constitué par l'improbable. Il est difficile d'entendre cette différence entre devenir et avenir en anglais, puisque, dans cette langue, on traduit le mot avenir par future, qui veut aussi dire " futur " en français. Or pour nous, les Français, le futur englobe le devenir et l'avenir. Il n'est donc pas équivalent à ce que j'appelle ici l'avenir. En anglais, il faudrait plutôt traduire avenir par what is to come, ce qui est à venir.

Lévi-Strauss ne conçoit pas cette distinction entre ce qui reste radicalement indéterminé parce qu'étant strictement et constitutivement improbable et demeurant à venir, d'une part, et d'autre part, ce qui est le plus probable, qui est en cela statistiquement déterminable.

Si Lévi-Strauss n'ignore évidemment pas les nombreux discours issus de la philosophie qui affirment la supracausalité de la liberté – et donc de la volonté – dans et devant la nature, il n'y voit en dernier ressort qu'un pouvoir entropique qui accélère la dégradation du monde, bien loin de la différer en y faisant émerger de nouvelles différences. Ce faisant, Lévi-Strauss adopte le point de vue nihiliste dont Nietzsche annonce l'avènement soixante-dix ans avant lui.

Nous ne pouvons pas accepter le point de vue nihiliste lévistraussien. Nous ne pouvons pas et nous ne devons pas nous résoudre à nous dissoudre dans le devenir. Nous ne le pouvons pas parce que cela consisterait à ne plus promettre à nos descendants un avenir possible, et nous ne le devons pas parce que le raisonnement de Lévi-Strauss repose sur ce qui consiste depuis l'origine de la philosophie à refouler la dimension néguanthropologique de l'âme noétique et de ce que l'on appelle " l'être humain ", à savoir le passage de l'organique à l'organologique en quoi il consiste.

Lévi-Strauss propose d'appréhender l'anthropologie comme une entropologie. Mais il ne tient aucun compte de la néguentropie qu'engendre la forme technique de la vie telle que Canguilhem en spécifie le type, et qui caractérise l'âme noétique – dont la noèse même (productrice de ce que Lévi-Strauss appelle " les oeuvres " de l'homme) est le fruit intermittent.

Toute oeuvre noétique, en tant que fruit intermittent de la noèse, produit une bifurcation et une différence singulière dans le devenir, irréductible à ses lois (improbable, quasicausale et " libre " en ce sens – comme liberté de penser, liberté éthique, liberté esthétique). Il faudrait ici lire Schelling. Mais elle engendre ainsi un pharmakon qui peut se retourner contre son propre geste – et c'est pourquoi l'Aufklärung peut donner lieu à son contraire, à savoir ce qu'Adorno, Horkheimer puis Habermas décrivent après Weber comme la rationalisation.

Valéry, Freud et Husserl soulignèrent avant Lévi-Strauss cette duplicité de l'esprit qui était pour les Grecs de l'âge tragique leur lot prométhéen, épiméthéen et herméneutique. Mais à la différence de Lévi-Strauss, ni les Tragiques, ni Valéry, ni Freud, ni Husserl ne déniaient la fécondité néguanthropologique de la noèse et de sa condition organologique.


Ce déni est caractéristique d'un nihilisme subi par ceux qui ne conçoivent pas le nihilisme agi par le capitalisme absolument computationnel, c'est-à-dire ayant perdu l'esprit – et cela non seulement par sa rupture avec son origine religieuse et la dissolution de la croyance en confiance fiduciaire et numéraire, mais par la destruction qu'il opère à présent de toute théorie à travers l'idéologie corrélationniste fondée sur le calcul intensif appliqué aux " big data ".

La perte de l'esprit du capitalisme se traduit alors par la prolétarisation de l'esprit lui-même et intégralement. Combattre cet état de fait pour restaurer un état de droit, c'est prescrire au pharmakon numérique qui rend possible cet état de fait un nouvel état de droit reconnaissant cette situation pharmacologique, mais en lui prescrivant des thérapeutiques formant un nouvel âge du savoir.

Le discours de Lévi-Strauss est profondément nihiliste, littéralement désespéré, et foncièrement désespérant – et en tant que tel, il n'est ni lucide (éclairant), ni rationnel. La rationalité n'est pas soumise au devenir, et c'est en cela qu'elle est l'unité des diverses dimensions de la liberté, c'est-à-dire de l'improbable tel qu'il constitue l'horizon indéterminé de toutes fins dignes de ce nom dans le " règne des fins " qui est le plan d'interprétation de ce que nous appelons les " consistances ".

Celle-ci n'existent pas, au sens où " la raison est un facteur de l'expérience qui dirige et critique l'impulsion vers la réalisation d'une fin conçue dans l'imagination mais qui n'existe pas en fait ".
[19] La raison est un organe, dit Whitehead, et cet organe organise le passage du droit au fait, c'est-à-dire la réalisation du droit dans les faits, le droit étant le nouveau, c'està- dire la néguentropie : " La raison est l'organe qui met l'accent sur la nouveauté. Elle procure le jugement grâce auquel le nouveau se réalise en projet et ensuite dans les faits ".[20]

Les consistances sont des promesses, intrinsèquement improbables – et c'est comme telles qu'elles donnent à désirer un neguanthropos qui restera toujours à venir, c'est-à-dire improbable.[21] Cet improbable est un printemps qui ressurgit dans l'hiver de la dégradation universelle, l'univers localisé sur la terre habitée étant le site de

" deux tendances principales [... le] délabrement de la nature physique [... où] l'énergie se dégrade lentement mais sûrement [... cependant que] l'autre tendance se manifeste au printemps, dans le renouveau annuel de la nature et par le cours ascendant de l'évolution biologique. [...] La raison est la discipline que s'impose l'élément originaire dans le cours de l'histoire. "[22]

Cette discipline est ce qui manque à Lévi-Strauss et à son entropologie.

 

Notes:

 

  • [1] Ce texte est tiré d'une conférence donnée à l'université de Durham, UK, en janvier 2015.
  • [2] Amartya Sen, Un nouveau modèle économique. Développement, justice, liberté, Odile Jacob, Paris, 2003, p. 12
  • [3] Ibid.
  • [4] Ibid. p. 19.
  • [5] Henri Atlan, Le cristal et la fumée, Seuil, Paris, 1979.
  • [6] Edgar Morin, La nature de la nature, Seuil, Paris, 1977.
  • [7] Alfred North Whitehead, La fonction de la raison, Payot, Paris, 2007, p. 116.
  • [8] Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Plon, p. 495. Je remercie Benoît Dillet qui m'a rappelé ce texte au cours de son intervention dans le colloque Organologie générale qu'il a organisé à l'université de Canterbury avec le groupe Noötechnics, issu de pharmakon.fr, en novembre 2014. Ce " ne que " (" n'a rien fait d'autre ") est du même type que ce que Foucault produit à partir de Surveiller et punir sous la forme d'une rhétorique de ce qui "n'aura été que ", et que je crois définitoire du poststructuralisme constituant en cela l'accomplissement du nihilisme.
  • [9] Cf. la notice " Avenu ", Dictionnaire historique de la langue française, sous la direction d'Alain Rey, Le Robert.
  • [10] C'est pourquoi Lévi-Strauss dit que l'homme n'est pas entropique "quand il se reproduit lui-même ".
  • [11] C'est par ce trouble organologique de l'organique que commence le film Tiresia de Bertrand Bonello.
  • [12] C'est cet enjeu que le concert de singes et de perroquets qu'entonnent les petits derridiens dix ans après la mort de Jacques Derrida ignore lorsqu'ils croient pouvoir me reprocher de perdre la différance dans une perspective anthropocentrique.
  • [13] Sur ces questions, cf. le séminaire du printemps 2014 de pharmakon.fr.
  • [14] Georges Bataille, La part maudite (1949), Minuit, Paris, 1967, p. 29.
  • [15] Ibid., p. 33.
  • [16] Ibid., p. 34.
  • [17] Ibid., p. 47-48.
  • [18] Ibid.
  • [19] Whitehead, op. cit., p. 105.
  • [20] Ibid., p. 113.
  • [21] L'objet du désir est à la lettre improbable parce qu'incomparable – et c'est aussi à partir du désir que Maurice Blanchot revisite et discute l'improbable d'Yves Bonnefoy.
  • [22] Whitehead, op. cit., p. 99.

Source : http://www.eurozine.com/

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25 janvier 2016 1 25 /01 /janvier /2016 12:34

Et s’il fallait non pas considérer les aptitudes supérieures des "surdoués" mais plutôt se demander ce qui inhibe l’intelligence "normale" ? Et s’il n’y avait pas de "dons" particuliers, mais un type de positionnement psychique, un certain rapport au monde, qui produirait des résultats remarquables sans relever pour autant d’une faculté cérébrale ? En bout de ligne, que signifie vraiment "être intelligent" ?

 

Supporter la différence... un long parcours de vie !

Supporter la différence... un long parcours de vie !

Tous les grands peintres ne se coupent pas l’oreille, tous les grands compositeurs n’assassinent pas leur femme et tous les grands mathématiciens ne laissent pas leur peau dans un duel perdu d’avance. Pour les « surdoués », il en va de même : certains sont heureux, et beaucoup ne sont pas plus malheureux que la moyenne (ce qui, notamment à notre époque, n’est pas pour autant synonyme de bonheur). Évidemment, ceux que je reçois dans mon cabinet arrivent avec leur mal- être. C’est la loi du genre et, quand on est psy, il faut toujours conserver à l’esprit que la lentille à travers laquelle on voit le monde est trompeuse.

 

Le « surdouement » charrie cependant son lot de souffrances spécifiques. D’ailleurs, un des ouvrages notables de ces dernières années sur le sujet s’intitule : Trop intelligent pour être heureux ?

 

Beaucoup de « surdoués » expriment la certitude que leur difficulté à vivre provient de leur différence, de l’acuité de leur regard qui les condamnerait à la souffrance. Même si la fréquence de ce ressenti subjectif ne peut être prise pour preuve, il faut du moins l’interroger.

 

Quand ils parlent de leur malaise, que disent- ils ? Ce qui revient d’abord, c’est une moindre résistance à l’ennui. Avoir l’impression que le temps file sans raison, surtout quand cela leur est imposé, semble pour eux intolérable. Se mettent alors en place des stratégies, conscientes ou non, pour échapper à ce qui constitue une vraie angoisse. Le problème, c’est que certaines de ces stratégies ont elles- mêmes des répercussions coûteuses au sein des institutions qu’ils fréquentent, école ou entreprise.

 

La maîtresse de Gabriel n’avait jamais pu l’observer en dehors de l’école. Un jour, parce qu’elle est très appréciée par les parents de l’enfant, elle est conviée chez eux pour une fête. Là, Gabriel, tout fier de lui montrer son univers, sort son hautbois et joue pour elle. Interloquée, elle se tourne vers le père et murmure : « En un an et demi, c’est la première fois que je le vois se poser ! » À l’école, le corps tressaute, nerveusement. Parfois Gabriel détruit compulsivement ses crayons ou sa gomme.

 

Emmanuelle, venue me voir initialement pour son fils, reconnu « surdoué » mais ayant des difficultés d’apprentissage, notamment pour l’écriture, raconte : « J’ai peur que ça vienne de moi. Moi aussi j’étais lente, ça m’a été difficile d’apprendre à écrire. » Comme je l’interroge plus avant, elle continue : « Je passais beaucoup trop de temps à former les lettres, j’essayais de les rendre les plus belles possibles, c’était comme si chacune me racontait une histoire. » Avant même de se passionner pour la peinture, Emmanuelle était fascinée par les formes qu’elle observait autour d’elle et passait des heures dans le jardin de ses parents à scruter la courbe d’une feuille, le dessin d’une brindille.

 

Qu’y a- t-il de commun entre ces deux anecdotes ? Les deux peuvent être interprétées comme la mise en place d’une réaction à l’angoisse du vide provoquée par l’ennui. Agitation du corps, destruction des objets, ou surinvestissement du détail de l’opération demandée (écrire), sont autant de tentatives pour trouver une jouissance réparatrice. Mais Gabriel sera catalogué comme élève dissipé et Emmanuelle garde encore aujourd’hui le souvenir cuisant de ces premières années d’école où on a commencé à lui renvoyer l’image d’une incapable.

 

La relation aux autres constitue aussi un point névralgique. Elle a deux versants : la difficulté à établir des liens satisfaisants et l’angoisse de se sentir différent. Si les « surdoués » n’étaient caractérisés que par une plus grande habileté logique, les répercussions sur leurs relations sociales seraient mineures. Bien sûr, pour ceux qui sont très bons élèves, il y aurait toujours la jalousie que cela peut susciter chez les autres. Mais au moins les « surdoués » qui ne parviennent pas à être performants à l’école seraient- ils épargnés. Il n’en est rien.

 

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Les situations de harcèlement par leurs camarades, sinon par les adultes eux- mêmes, dépassent très largement les cas des bons élèves. C’est pourquoi l’explication par la jalousie est souvent inopérante à apaiser ceux qui sont objets de persécutions. Pour aller au fond des choses, la recherche des responsables ne suffit pas (persécuteurs, persécutés, tiers, institution), et il faudra chercher, derrière ce qui est présenté comme la confrontation de méchants et de victimes dans une école qui peine à jouer pleinement son rôle, tout ce qui rend inévitable la question de la violence.

 

Même quand il n’y a pas persécution, le sentiment d’isolement est souvent très grand chez les « surdoués ». Il est fréquemment lié à la différence des centres d’intérêt, en particulier quand le « surdoué » trouve dans son milieu familial des nourritures culturelles dont il s’empare avec appétit et qu’il peine à partager ensuite avec ses camarades de classe. La propension des enfants « surdoués » à engager des discussions avec leurs aînés et à raisonner sur des questions qui « ne sont pas de leur âge » accroît encore ce phénomène. Mais ces facteurs font écran au véritable problème. Si cela se résumait ainsi, il y aurait deux solutions aisées :

 

– soit se débrouiller pour insérer l’enfant dans un milieu scolaire où il rencontrera davantage de camarades culturellement nourris (après tout, il y a des univers sociaux où acheter des figurines de dinosaures à ses enfants et leur coller le système solaire au plafond font partie des gestes élémentaires du parent, au même titre que changer les couches), et au pire, attendre qu’en grandissant il puisse évoluer enfin dans des sphères qui lui conviennent mieux.

 

– soit éviter les nourritures spirituelles qui risquent de l’isoler, veiller à l’intéresser aux mêmes dessins animés que ses copains de classe et lui acheter une DS à la première occasion.

 

Ces deux stratégies peuvent avoir leur intérêt, peuvent même être nécessaires à telle étape du développement d’un enfant. Elles restent pourtant à la surface du problème.

 

Bien souvent, le sentiment d’isolement demeure, même au milieu de gens qui parlent de dinosaures toute la journée (dans le cas où le « surdoué » est devenu paléontologue – il y en a), et même quand les objets investis par le « surdoué » semblent de ceux qui devraient lui permettre de se fondre dans le nombre (quand il passe tout son temps à faire tourner des « Bey Blade », ou à jouer au foot ; quand il fait plus tard des choix d’étude et de vie tout à fait « normaux »). Quant à la question de la maturité, elle est tout aussi trompeuse : si Maxime a du mal aujourd’hui à partager ses interrogations sur la mort avec ses copains de classe, on peut le mettre sur le compte de leur jeunesse. Mais rien ne garantit que les années lui amèneront d’ellesmêmes des interlocuteurs.

 

Il aura fallu des semaines et de nombreuses séances pour que Maxime le formule ainsi : « Quand on joue, on dirait qu’on joue au même jeu, mais on joue pas pareil. » Pas pareil : un quelque chose qui crée un écart angoissant, parce qu’impossible à cerner, même par ceux qui ont été détectés comme « surdoués ». On leur a dit qu’ils étaient « surdoués » ou « précoces » ou « à haut potentiel », mais lorsqu’il n’est apparemment pas du tout question de logique, d’intelligence ou de raisonnement, on ne les a pas préparés à penser cette différence. Alors souvent, ils l’attribuent à autre chose et cela donne une certitude sur soi- même du type : « Je suis surdoué et anormal. »

 

D’ailleurs, même le « je suis surdoué » est mystérieux, puisqu’au fond, personne ne comprend vraiment de quoi il s’agit. On ne sait pas ce que c’est mais cela suscite tout de même chez les autres de l’effroi ou de l’admiration. Et puis il y a un score, un nombre, autour duquel s’élabore souvent un curieux fétichisme. Je vaux 135 ou 142 ou 153, qu’est- ce que cela peut bien signifier ? Qu’est- ce que cela induit ?

 

Adrien, comme beaucoup de « surdoués », est ivre de sa puissance. Quand il commence à faire quelque chose, il a l’impression que rien ne peut lui résister et le regard admiratif de ses parents le plonge dans une surexcitation qui masque mal l’angoisse qui l’accompagne. Car vient toujours le moment où les choses résistent, deviennent difficiles, même pour lui, et où il faudrait travailler pour franchir un cap. À ce moment il s’effondre, et doute encore beaucoup plus de lui- même que n’importe qui. Adrien a neuf ans, et encore le temps de surmonter cela. Mais s’il ne fait pas l’apprentissage de l’échec, comme étape indispensable de la progression, si on ne l’accompagne pas dans ce dur chemin qui consistera à accepter que soit remise en cause, momentanément, cette facilité autour de laquelle il a construit toute son identité, alors son existence entière, comme celle de très nombreux « surdoués », risque d’être une longue fuite pour maintenir, à un coût toujours plus élevé, l’illusion de la toute- puissance.

 

Cette liste de souffrances ne serait pas complète si l’on ne revenait pas sur l’une des plus importantes : le sentiment d’hébétude devant la marche dite « normale » du monde. Lorsqu’on a besoin de savoir à quoi sert quelque chose pour pouvoir le faire, il y a de quoi ressentir de la panique face à la maigreur des justifications habituelles. Finalement, pour qu’une société ou une institution fonctionne, il y a surtout besoin qu’elle reproduise mécaniquement un certain nombre de processus qui, absurdes ou pas, marcheront une fois mis bout à bout, et pour que cette reproduction mécanique se fasse, elle a besoin d’en inscrire la nécessité chez la plupart des individus, sous forme de réflexes. Il y a un âge où les enfants demandent le pourquoi des choses et le pourquoi du pourquoi. À poursuivre l’interrogation dans la vie quotidienne, il y a très vite un moment où plus personne n’a de réponse (en général, dès le pourquoi du pourquoi du pourquoi) et où tombe le dernier mot : parce que c’est comme ça ! Parce qu’on a toujours fait comme ça !

 

On pourrait s’en satisfaire, et d’ailleurs beaucoup s’en satisfont, mais celui qui a besoin d’une véritable explication est vite pris de vertige. Comment continuer à cheminer dans ce monde, y progresser, y agir ? Certains n’y parviennent pas.

 

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Carlos Tinoco est normalien, agrégé de philosophie, enseignant et psychanalyste. À l’âge de dix ans, il a intégré l’un des premiers centres en France dédiés aux enfants dits « précoces » : Jeunes Vocations artistiques, scientifiques et littéraires. Père de deux enfants, il vit à Paris.
 
Extrait de "Intelligents, trop intelligents",  de Carlos Tinoco, publié aux éditions JC Lattès, 2014. Source : http://www.atlantico.fr/
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23 janvier 2016 6 23 /01 /janvier /2016 11:27

Chaque amour a le sentiment de ne ressembler à aucun autre ! Dans la lignée des anciens philosophes grecs, les psys dégagent pourtant trois grands profils types de l’état amoureux, dans lesquels nous pouvons tous nous reconnaître.

 

Peinture d'Anton Raphael Mengs

Peinture d'Anton Raphael Mengs

Parler d’amour, c’est associer désir physique, échange et complicité. Pourtant l’amour se décline en une infinité de nuances : fusion, raison, dépendance, haine… Mais toujours le même mécanisme est à l’œuvre : « C’est dans la relation à la mère que l’on trouve la matrice de l’amour que l’on privilégiera ensuite », explique Didier Lauru, psychanalyste. Nos comportements d’adulte sont l’occasion de prolonger – ou de réparer – les expériences vécues dans les tout premiers moments de l’enfance. Le point commun entre les différentes façons d’aimer ?

 

L’idéalisation de l’autre et la dévalorisation de soi. Aveuglé par les émotions, on pare notre partenaire de toutes les qualités dont on se croit le plus souvent dépourvu. D’où l’expression « tomber amoureux » : on descend quelques marches et on installe l’autre sur un piédestal. « C’est l’estime de soi qui chute d’abord », explique Didier Lauru. Ensuite ? « Tout est une question de degrés » – d’idéalisation, de dénarcissisation, de dépendance vis-à-vis de l’autre – qui, selon les spécialistes, déterminent trois grands profils amoureux : Eros ; son opposé, Agapê ; et Philia.

 

 

" Eros L’amour passion "

 

Le cœur s’emballe, l’excitation alterne avec la peur, le désir physique est insatiable, le manque nous obsède dès les premières séparations. Nos repères sont bousculés, on se perd un peu. Cet état est propre à la rencontre amoureuse. « Ce qui nous guide vers une relation, c’est d’abord le désir d’exaltation et cette opportunité que nous offre le partenaire de vivre plus intensément, explique Claude-Marc Aubry, psychologue. Ce partenaire est alors moins vécu comme un sujet que comme un objet. » Objet support de nos manques et de nos fantasmes d’un amour idéal, objet chargé de combler nos manques affectifs… L’intensité et la durée de cet état passionnel varient en fonction de la force de ses projections sur l’autre. « Il dure entre six mois et deux ans », ajoute Claude-Marc Aubry.

 

Après ? « Il a changé », « Je ne la reconnais plus », se surprend-on à dire. « La réalité de l’autre finit toujours par s’imposer à nos yeux. » Soit on l’accepte et on entre dans un autre type de relation, soit on en est incapable et la déception, donc la souffrance, est irréversible. On peut alors basculer dans la haine : les émotions exacerbées demeurent, mais changent de pôle. Ou dans la dépendance : « Sans lui, je me sens vide », « Sans elle, je ne suis rien. » Resté à l’état d’objet, le partenaire devient indispensable pour vivre.

 

Aimer avec passion, c’est découvrir en soi une capacité à vivre des émotions dont on ignorait l’intensité, et rompre avec un quotidien parfois pauvre en émulation. La passion amoureuse a des vertus bénéfiques et instructives pour et sur soi, mais, parce qu’elle est fondée sur le narcissisme et l’égocentrisme, elle ne peut être le seul socle de construction d’une vraie relation à deux. Laquelle n’est possible qu’à condition de pouvoir regarder l’autre vraiment : c’est en décidant d’apprécier son partenaire avec ses défauts et ses qualités, mais aussi en reprenant conscience de ce que l’on est, soi, hors du couple, que l’on peut glisser d’une passion déraisonnée à un amour plus constructif et apaisé.

 

" Philia L’amour-amitié "

 

Autant l’amour passion incite au repli sur soi et sur le couple, autant cet amour-amitié invite à s’ouvrir sur l’extérieur. On est complice, on se comprend, on s’écoute, on s’intéresse l’un à l’autre et au monde… Et, tout à coup, cette amitié a priori sans ambiguïté se transforme : les regards changent, le désir s’installe. Selon Didier Lauru, « cet instant correspond à un moment d’idéalisation de l’autre qui, bien souvent, coïncide avec celui où l’on se sent – ou se croit – aimé de lui. » Cette « intuition » donne envie de se laisser aller à des sentiments amoureux jusque-là inhibés par un manque de confiance en soi ou par la crainte de pervertir la relation amicale. La relation amoureuse se fonde alors sur des bases solides : celles qui avaient conduit à l’amitié, du partage d’une passion commune à une communication très forte.

 

Un virage sans dérapage ? Pas toujours. Selon Didier Lauru, « la relation qui prévalait jusqu’à présent est oubliée au bénéfice d’une nouvelle rencontre sur le mode amoureux. “On perd la mémoire”… Preuve que l’amour, même le plus “calme” et progressif, est toujours un peu pathologique ! »

 

Cet amour-Philia, peut-on le retrouver dans toutes les relations ? « Oui, répond Claude-Marc Aubry, on peut tout à fait considérer que l’amitié sexuée est une définition du “bon amour”. » « Bon », car à la dépendance, cet amour oppose l’attachement nourri par une entente développée au fil du temps et des expériences partagées. Seule « dérive possible » : pris dans une connaissance mutuelle parfaite, les partenaires ne ressentent plus de curiosité ou de besoin de se séduire. La tiédeur émotionnelle s’installe, au risque de la lassitude et de l’envie de trouver ailleurs des « sensations » fortes.

 

" Agapê L’amour profond "

 

C ’est l’amour alliant désir et raison : on sait "bien vivre", on sait être “libres ensemble”, on s’aime, mais on ne s’appartient pas. « L’amour profond commence avec la prise de conscience de ce qu’est l’autre réellement, loin des fantasmes », explique Claude-Marc Aubry. Amour dit « mature » ou « éclairé », « il suppose une bonne compréhension de soi-même et de l’autre, mais aussi de savoir déjouer les pièges et mécanismes qui nous lient au passé et qui entraînent la dépendance. » L’imaginaire suggéré par les sentiments amoureux n’empêche ni de voir la réalité de l’autre, ni celle du couple. Et l’idéalisation du partenaire nous narcissise plutôt que de nous faire perdre confiance en nous.

 

Sylvie Bellaud-Caro rappelle que cet amour réunit trois éléments : moi, l’autre et la relation. « Il peut y avoir harmonie, conflit, joie, tristesse… peu importe. Ce qui est fondamental, c’est que les deux partenaires restent indépendants et se rejoignent ensuite dans le couple pour le nourrir de projets, d’envies, d’expériences à partager. »

 

Mais comment faire la différence entre un « je t’aime profondément » et un « je t’aime passionnément » ? « En réfléchissant à l’intensité de son ressenti », répond la thérapeute : me manque-t-il au point que, sans lui, j’ai l’impression de ne plus exister ? Ou simplement parce que j’aimerais partager ce moment, cette conversation avec lui ? « L’attachement n’est pas la dépendance. » C’est le respect qui fait la différence : respect de soi – être à l’écoute de ses propres désirs, ne pas s’oublier pour l’autre – et respect de l’autre. Si le mot respect ne fait pas écho à nos idéaux romantiques, il s’imposera pourtant vite comme le meilleur garde-fou de l’amour.

 

Anne-Laure Gannac pour psychologies.com

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22 janvier 2016 5 22 /01 /janvier /2016 20:01

A visionner : ce saisissant coup de gueule de Bernard Stiegler, en ouverture du colloque "Les enfants face aux écrans" qui s'est tenu à la mairie du XIXe arrondissement, à l'initiative de Jacques Brodeur, de Edupax. Le philosophe a martelé : « Nous sommes en guerre [...] et, quand on est en guerre, il faut former des combattants. »

  

- LE MASSACRE DES INNOCENTS version 2.0 -

''Le massacre des innocents 2.0 : pharmacologie des écrans, analyse de
leurs pouvoirs à la fois toxiques et curatifs.''

 

L'exposition aux écrans, mi-poison mi-médicament, requiert des prescriptions thérapeutiques issues d'études approfondies et de larges débats publics. La démission des décideurs équivaut à abandonner les enfants et leurs parents aux seuls intérêts du marché. Cette complaisance pourrait-elle conduire au pire ?

Bernard Stiegler a intitulé son intervention : « Le massacre des innocents ». Durée : 30 min

 

La résistance s'organise : le billet de Jacques Brodeur

 

 

Parents, enseignant-es, psychologues, psychanalystes, pédopsychiatres, philosophes et citoyen-nes refusent a complaisance devant des industries qui utilisent les plus récentes découvertes scientifiques pour capter l’attention des enfants et en faire le commerce.

 

Les enfants face aux écrans : le point ! (1)

 

Le 30 avril dernier se tenait à Paris un colloque destiné à à étudier les conséquences de l’augmentation du temps passé devant les écrans, à définir en quoi consiste la maîtrise des écrans, à débattre des moyens de réduire le temps-écrans des enfants et des adolescents, à partager les acquis en cette matière et à imaginer les façons de les propager en France et en Europe. C’est l’école 40bis Manin qui était l’hôte du colloque, une école où les parents et le personnel avaient proposé la Semaine sans écrans, chaque année depuis 2009. Plus de 200 participant-es et une quinzaine de conférenciers et conférencières se sont donc penché-es sur ce qui est devenu un enjeu majeur de santé publique.

 

La conférence d’ouverture avait été confiée au philosophe Bernard Stiegler, fondateur d’Ars Industrialis (2) et co-auteur de Faut-il interdire les écrans aux enfants ? (3)

 

Il avait intitulé sa présentation « Le massacre des innocents ». Selon lui, les écrans auquels les jeunes consacrent la presque totalité de leur temps libre possèdent des pouvoirs à la fois toxiques et curatifs. L’exposition aux écrans, mi-poison mi-médicament, requiert donc obligatoirement des prescriptions thérapeutiques issues d’études approfondies et de larges débats publics. Pour le philosophe, la démission des décideurs équivaut à abandonner les enfants et leurs parents aux seuls intérêts du marché. Cette complaisance pourra, selon lui, conduire à des dommages de plus en plus catastrophiques, d’où l’urgence d’adopter des politiques de prévention audacieuses et collectives.

 

En France, les enfants passent plus de 3h/jour devant un écran. Que se passe-t-il dans un cerveau inexpérimenté exposé 1200 h/année à la télé, Internet, jeux vidéo, SMS, Facebook ? C’est pas mal plus que les 900 heures de fréquentation scolaire. Les parents ont bien raison de s’inquiéter. Les contenus violents utilisés pour les garder attachés à la télé ou aux jeux vidéo les désensibilise, des centaines d’études l’ont démontré. Plusieurs enfants deviennent dépendants. On sait pertinemment que les écrans freinent leur développement intellectuel et émotionnel et influencent leur négativement leur réussite scolaire. Les dessins animés regardés le matin avant de partir à l’école sont particulièrement nocifs. Le temps-écrans des jeunes pose désormais un problème de santé publique incontournable. Pour Bernard Stiegler, les écrans sont des amis peu recommandables pour nos enfants et requièrent une mobilisation massive de la société civile et des décideurs.

 

Conversations familiales : dépassées ?

 

Faut-il s’étonner que le temps consacré aux conversations familiales diminue ? Des chercheurs du Michigan ont évalué qu’il était passé de 1h12/semaine en 1981 à 34 minutes/semaine en 1997. La diminution du temps consacré par les parents à converser avec leurs enfants a fondu dans la plupart des régions du monde.

 

Et inévitablement, les dommages engendrés par la hausse du temps-écrans s’étendent : des milliers d’études ont démontré que ces dommages sont (hélas) réels, nombreux, variés et profonds. Force est de constater que lorsque les jeunes sont privés d’un entraînement à la maîtrise des écrans, ce sont les écrans qui deviennent leurs maîtres. Et les écrans, comme l’argent, sont de bien mauvais maîtres.

 

Rétrospective

 

Que s’est-il passé entre 1950 et 2010 ?

 

En revoyant l’histoire de la progression de l’emprise des écrans sur la vie des familles et de la jeunesse, on constate que, depuis l’arrivée de la télévision, l’attention des enfants a été captée par des chaînes de diffusion qui ont rivalisé entre elles pour augmenter leur auditoire-jeunesse, qu’elles ont appelé “leur part de marché”. C’est le volume de l’auditoire qui détermine le prix versé par les agences de marketing pour y avoir accès et annoncer les produits de leurs clientèles, notamment les producteurs d’aliments et de jouets. Les écrans qu’on avait accueilli dans nos foyers en croyant que nous étions leurs clients étaient, en fait, des outils au service des industries publicitaires pour inciter nos enfants à les regarder toujours plus souvent et plus longtemps. C’était donc pour augmenter le « temps de cerveau disponible » à vendre que les diffuseurs se sont arrogés le pouvoir de choisir les contenus qui vont divertir les enfants.

 

Le pouvoir de séduction : financement en hausse

 

Cette augmentation est le fruit d’investissements publicitaires accrus pour cibler les enfants. Aux États-Unis, ils sont passés de 100 millions$ en 1980 à 17 milliards$ en 2007. Une hausse énorme quand on la compare aux coupures en éducation. Puisque le nombre d’enfants attirés devant l’écran détermine le flux de revenus publicitaires des diffuseurs, le trio des diffuseurs-producteur-publicitaires a recours aux plus récentes découvertes en psychologie et en neurologie pour capter l’attention des enfants, à un âge de plus en plus précoce. La chaise Fisher-Price (4) donne une idée de l’appétit commercial pour capter l’attention du bébé naissant.

 

La question qui se pose aujourd’hui à la société et aux parents se précise : l’appétit des industries médiatiques et publicitaires mérite-t-il préséance sur la protection des jeunes contre les matériels qui nuisent à leur bien-être, tel que stipulé dans la Convention internationale des droits de l’enfant ? (5)

 

Devant l’impuissance des décideurs publics, des chercheurs ont eu l’idée d’expérimenter les effets de la réduction du temps-écrans.

 

La réduction du temps-écrans

 

En 2010, le Gouvernement des États-Unis mettait sur pied un comité interministériel avec le mandat de neutraliser la progression de la pandémie d’obésité en moins d’une génération. La Première Dame acceptait d’y jouer un rôle de premier plan en devant porte-parole de « Lets Move » (6), un programme consacrant un volet important à la réduction du temps-écrans.

 

En août 2013, le Japon annonçait la mise sur pied de camps de désintoxication numériques pour adolescents : on estimait le nombre de jeunes atteints à un demi-million (7). La Chine et la Corée du Sud annoncaient qu’ils allaient faire de même.

 

Quelques jours plus tard, l’Université Harvard ouvrait dans un centre hopitalier de Pennsylvanie des cures de désintoxication moyennant 14 000$ pour une thérapie de dix jours (8).

 

Pour une portion croissante de nos concitoyens et concitoyennes, les nouvelles technologies sont faussement libératrices. C’est parce que le pouvoir de séduction des écrans conduit autant de personnes à se déconnecter de la réalité que les décideurs publics se voient dans l’obligation d’imaginer des mesures pour atténuer les impacts de cette déconnexion sur la santé.

 

Les dommages sont particulièrement dramatiques chez les enfants et les adolescents qui finissent par se percevoir plus comme des consommateurs et moins comme des citoyens, perception qui entraînera des conséquences négatives sur le déficit démocratique.

 

Réduire le temps-écrans des jeunes : possible ou illusoire ?

 

Lorsqu’on propose de réduire le temps-écrans des enfants, la plupart des parents jugent l’objectif louable mais irréaliste. Leur intérêt renaît lorsqu’ils apprennent qu’au cours des 12 dernières années, on a mis au point des modes de reconnexion des enfants avec la réalité qui produisent des résultats formidables. Après une décennie d’ajustements, la déconnexion des écrans peut maintenant atteindre des taux de participation qui dépassent 95%. Au moment d’écrire ces lignes, plus de 191 établissements éducatifs ont proposé aux élèves le Défi sans écrans. On verra dans un article à venir comment la réduction du temps-écrans est devenue possible et quels bienfaits elle a produits.

 

Notes

1. Colloque « Les enfants face aux écrans : le point ! », Paris, 30 avril 2014.
2. Ars Industrialis.
3. « Faut-il interdire les écrans aux enfants ? »
4. Fisher-Price, La chaise App-tivity avec écran.
5. Convention relative aux Droits de l’enfant.
6. « Lets Move ».
7. Camps de désintoxication numérique pour adolescents japonais.
8.
Pennsylvanie, cures de désintoxication.

 

Jacques Brodeur, consultant en prévention de la violence

Source - http://sisyphe.org/article.php3?id_article=4776

 

Les Enfants face aux Ecrans - 03 - Témoignages d'élèves du collège Georges Rouault

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18 janvier 2016 1 18 /01 /janvier /2016 17:56

Selon Michel Bonhomme, la complexité et la pluralité des sexualités de l’homme s’expriment aussi  bien dans les dysfonctionnements sexuels que nous rencontrons en sexologie que dans les problématiques des hommes vivants en couple. Les créations sexuelles des hommes ne sont pas fondamentalement différentes de celles des femmes. Elles ont pris racines dans la relation à la mère primaire dont il a fallu se défaire pour devenir un sujet sexué " différencié "

Putain des Palaces, by Nathalie Feisthauer

Putain des Palaces, by Nathalie Feisthauer

Elles se différencient  essentiellement par les contre investissements du surmoi en lien avec la place de la femme dans la culture et dans la religion. Faire l’amour pour l’homme a toujours renforcé son narcissisme phallique. Aimer faire l’amour  place la femme dans une forme de dévalorisation narcissique associée à l’image de la putain en contradiction avec celle plus valorisante de la maman.

 

L’homme s’est ainsi retrouvé pris entre deux scènes opposées. Dans l’une, on trouve un macho phallocrate qui vit sa sexualité dans le mépris et l’humiliation de la femme, la putain et dans l’autre, un bon père de famille, copain, pro-féministe, respectueux de la femme, la madone.

 

Le mot “ Putain ” désigne une femme capable d’être féminine, sexy et érotique. Elle sait être désirable et séduisante et ose montrer son envie. Elle recherche le plaisir autant pour le recevoir que pour le donner. La putain associée à l’image de la prostituée a de tout temps exercée une grande fascination chez l’homme. Elle est au centre des images pornographiques. Elle s’exprime également dans les violences  sexuelles presque exclusivement le fait des hommes.

 

L’attraction et l’emprise de la femme sur l’homme ont fait qu’il a dû se protéger d’elle en la diabolisant. Il lui a opposé  l’image de la pureté de la madone et  du sacrifice de la femme qui enfante dans la douleur.  Cette image   renvoie à la sainte vierge et au cliché de la mère de famille parfaite, excellente et indispensable. La madone peut tout contrôler, dominer et diriger, tout en culpabilisant son entourage et  en se prenant souvent pour une victime.

 

La libération sexuelle de la femme dans nos sociétés occidentales a changé la donne. L’évolution actuelle est difficile à saisir, mais elle va dans le sens d’une moindre différence dans les comportements sexuels. Néanmoins, les déterminants biologiques du désir font que la sexualité de l’homme restera probablement  toujours plus agressive.

 

Entre l’amour et la haine

 

Dès la naissance l’enfant est en lutte entre deux forces contraires qui engendrent son angoisse.  Le désir de rester indifférencié à  la mère au risque de ne pas exister, et la nécessité  de s’individualiser au risque de se sentir menacé d’abandon et d’être insécurisé. La relation inscrite dans la présence maternante  de  la mère est érotisée. Pour calmer l’angoisse liée à ses absences, il crée un espace transitionnel dans lequel des fantasmes évoqués sont associés à des stimulations physique, engendrant des mouvements aussi bien tendres qu’hostiles.- fantasmes masturbatoires. Son monde interne se construit sur un mode clivé. Il éprouve de  l’amour lorsque son désir est satisfait. Il se sent détruit et ressent de la rage lorsque l’environnement n’est pas conforme à son désir.

 

Dans ce modèle simplifié, la présence d’une mère suffisamment bonne qui ne se laisse pas détruire par l’angoisse et l’hostilité de son bébé,  favorise l’intégration de la gratitude et de l’hostilité à la mère. Les représentations de cette dernière seront pour l’essentiel  plus ou moins refoulées sous la pression des différents processus éducatifs. Les affects hostiles resteront inscrits comme un proto-langage s’exprimant sur un mode préverbal dans la communication érotique. Cela va déterminer la  manière dont l’homme va gérer ses angoisses et sa capacité à les érotiser.

 

Dès les premiers mois de la vie, l’enfant est  en présence de l’ailleurs de la mère intéressée par un autre, le père et d’éventuels frères et sœurs.   Il renonce à son omnipotence  au profit de la toute puissance de la mère. Pour supporter l’angoisse, il se place dans une  position masochiste. « Si c’est son désir, c’est bon pour moi. »

 

Puis il subit l’épreuve de la différence des sexes et des exigences de la réalité. Il s’inscrit dans  le jeu des identifications croisées aux deux parents sexués. Il est confronté à une nouvelle castration en  renonçant à posséder sexuellement les parents. Ses constructions incestueuses imaginaires feront partie de ses proto-fantasmes faits de mouvements fusionnels et anti-fusionnels et s’intègreront plus tard dans les exigences sexuelles du  MOI.  Celles-ci permettront à l’homme de s’abandonner à des expériences de possession, de perte, d’effacement des limites et à la jouissance sexuelle.

 

L’identité sexuelle du garçon…

 

Pour intégrer les schémas socioculturels  de la masculinité, le garçon doit se défaire de la féminité primaire rencontrée dans l’expérience de maternage avec maman. Pour cela il  doit changer d’objet d’identification et s’éloigner de la mère en mettant  à l’écart ses besoins fusionnels. L’acquisition de l’identité de genre serait donc plus difficile chez le garçon. Il  n’est pas du même sexe que sa mère. En se différenciant et en  s’éloignant d’elle, il s’expose aux  anxiétés d’abandon, en restant trop proche il se sent englouti et ne peut accéder à la masculinité. De là s’inscrit en lui le complexe fusionnel, anti-fusionnel basé sur le clivage amour haine. On le  retrouve dans la dualité sexuelle de l’homme faite de l’attraction et du refus de la maman et de la putain.

 

A l’adolescence cette dualité se transfère sur la  femme aimée   et désirée. Les premières  expériences sexuelles viennent souvent  renforcer l’anxiété liée aux risques de la masculinité.  L’érection est insuffisante ou l’éjaculation est prématurée. L’angoisse liée au désir d’investir la femme peut alors être contrée par une masturbation très défensive. Pour le garçon investissant plus le pôle agressif,  la génitalité servirait à protéger et à affirmer son identité sexuelle masculine. L’intimité avec la femme lui fait courir le risque de rencontrer l’anxiété de ré engloutissement.  Ce qui explique que certains hommes ne parviennent pas à établir cette intimité affective.  En évitant  la fusion et la tendresse  associées à la féminisation,  l’homme à l’impression qu’il peut mieux  maîtriser  sa sexualité.

 

Mais elle s’expose à celle de la jeune femme, à son anxiété liée à la désirabilité et aux peurs profondes de se sentir objectivée et prise pour une putain. Toutefois, la gestion des besoins fusionnels semble moins ardue pour la fille. Ce qui explique qu’en général, les femmes s’engagent avec plus d’aisance que les hommes dans un rapport d’intimité affective. Mais confondue à la mère, elles ne peuvent advenir à leur propre jouissance de femme nécessaire à l’accueil de l’agressivité phallique de l’homme.

 

La femme est diabolique !

 

La domination de l’homme présente dans la plupart des sociétés renvoie à la nécessaire fonction phallique paternelle qui permet de séparer l’enfant de la mère pour sociabiliser l’enfant. L’amant de jouissance vient aussi en position de tiers séparateur pour arracher la femme à sa relation archaïque à la mère, condition pour qu’elle accède à sa  sexualité de femelle.

 

La division de la femme aurait été renforcée par le patriarcat qui réside dans le désir de l’homme de transmettre ses biens et le fruit de son travail à ses fils naturels et légitimes. Cela a donné naissance à une organisation socio-économique où la femme trouvait d’abord sa place comme objet de reproduction ou comme objet de satisfaction des besoins sexuels de l’homme. La femme perçue comme objet sexuel était associée à la prostitution et la mère au mariage. Ce double  statut a amené l’homme à vouloir la posséder, l’exploiter, la contrôler. Il lui fallait absolument contrer les risques d’infidélité, au risque de lui faire perdre sa désirabilité. Les positions de l’église ont amplifié le clivage et nourri  la méfiance, allant jusqu’à décréter que le sexe de la femme était dangereux et maléfique. La femme par son sexe basé sur le plaisir pouvait posséder l’homme et lui faire perdre tout contrôle sur la chair. Elle devient diabolique. Le sexe incarné par Eve est coupable, punissable, méprisable. La femme  pouvait ainsi servir d’exutoire à la haine de l’homme rejoignant celle éprouvée par la castration à la mère.

 

" Ma mère n’est pas une putain "

 

Les tabous autour de la sexualité font que la mère dans sa parure de madone ne se présente  pas à l’enfant comme une femelle qui a fait et fait l’amour avec un autre. Celui-ci n’associe pas la procréation au plaisir de sa mère.

 

La plupart des patients,  rencontrés en thérapie, ont du mal à pouvoir imaginer leur mère faire l’amour. Ils ne savent rien de sa sexualité plaisir. L’imaginer dans cette position de jouissance les dérange profondément.

 

L’enfant découvre, parfois très tard, que sa mère  a fait l’amour pour qu’il puisse naître à la vie. L’amour, au sens du coït, est associé aux ébats corporels de nature animale et triviale. Il découvre la sexualité dans le secret angoissant. C’est  propice à toutes les créations imaginaires, souvent excitantes, fascinantes et inquiétantes, parfois même dégoutantes.

 

Il recherche plus tard une femme digne comme sa mère, en mesure de lui faire des enfants parfaits.  L’investissement d’objet apparenté à une putain s’oppose fondamentalement à la pureté morale de la mère. Cette opposition puissante  fonde la fantasmatique de l’homme. Elle est au cœur de sa sexualité.

 

Je revois l’exemple de cet homme qui vivait sa mère comme une sainte, mère qui a eu 9 enfants. Il avait dit à sa femme « si tu veux être heureuse avec moi, tu dois aimer ma mère ». Il a choisi une femme  frigide ayant peur de la sexualité. Il a assumé pendant 20 ans son rôle de père au prix d’une profonde frustration qu’il a compensé par de nombreuses maitresses.  Il respectait sa femme disait-il et pourtant il ne pouvait faire autrement que de la « baiser ».  Puis ils ont fait chambre à part. Cette période de sa vie a été dominée par  beaucoup de colère et d’angoisse.

 

L’infidélité activateur du désir

 

Dans l’inconscient de l’homme il y a toujours un autre possible, réel ou imaginaire qui donne à la femme sa force d’attraction et active le désir. La femme  séduisante est  susceptible d’être convoitée par d’autres. Elle est potentiellement infidèle, l’infidélité étant de tout temps associée à la putain. La femme  fidèle, bonne épouse et  mère de ses enfants perd son pouvoir d’attraction. La jalousie de l’homme repose sur l’angoisse de la perte de l’objet aimé et désiré, mais aussi sur l’attraction répulsion représentée par le rival. A la source, le rival du même sexe, le père ou le frère, est devenu plus ou moins le premier objet d’amour homosexuel. L’homosexualité latente sera souvent présente dans la fantasmatique de l’homme.

 

La jalousie est un des moteurs de la passion amoureuse. L’homme découvre partout des amants. Pour calmer sa douleur jalouse, il fait des enfants et se rassure. Il transforme sa femme en mère au foyer. Perdant ses pouvoirs de femme, elle revêt alors  ses attributs de madone, une façon d’exprimer  son hostilité en se  désinvestissant de la sexualité.

 

Je rencontre des hommes qui ont perdu tout désir sexuel pour leur femme. Visionner des films pornos ou engager  des liaisons virtuelles  avec « ces salopes » rencontrées sur internet mobilise leur désir sexuel. Faire l’amour avec leur femme qui n’aimerait pas suffisamment le sexe n’est plus suffisant.

 

D’autres hommes s’organisent discrètement des soirées en club libertin où ils peuvent mettre parfois leurs fantasmes en actes. Beaucoup  en rêve seulement. Des femmes qui ont  découvert que leur mari regardait  des films pornos ou entretenait  des échanges virtuels avec des femmes sur internet ont été très blessées.

 

Par exemple, une femme n’aimait pas faire l’amour. Elle est très belle. Après une longue période de désinvestissement total de la sexualité, elle surprend son mari sur internet engagé dans un dialogue avec des femmes qui le font sexuellement rêver. Passé le temps de la colère, elle s’engage avec lui dans un travail de psychothérapie de couple pour ne pas le perdre. Plus tard en découvrant sa fantasmatique profonde, elle reprend contact avec « la putain » et reprend goût à l’érotisme et à l’amour, son mari aussi.

 

L’hyper sexualisation de l’homme

 

L’hyper sexualisation de certains hommes s’oppose  le plus souvent à la sexualité de la femme. « Il a trop de désir » disent-elles. Elles estiment que le trop de désir a tué leur désir. L’agressivité de la demande sexuelle des hommes engendre des réactions comme : « Il fait l’amour sans me respecter », « il ne prend pas  le temps des préliminaires. » Pour l’homme, amener sa femme à la jouissance représente un double triomphe. Cela répond à la frigidité supposée de la mère et à la prise de pouvoir sur  le rival. Plus elle jouit moins elle ira voir un autre et plus elle sera convoitée comme une femme jouissive. L’enjeu entraîne souvent  des comportements envahissants et d’urgence. La putain agit comme moteur de son impatience en réaction à la madone primitive et à l’impuissance psychique face au rival. L’agressivité que cela révèle fait que l’homme  érotise  plus facilement l’hostilité présente dans  la sexualité. Alors que la femme a le plus souvent besoin de contacter le lien fusionnel et la tendresse pour accueillir l’hostilité de l’homme. Cette généralité  est souvent  nuancée par la clinique.

 

La position plus passive et masochiste de la femme recouvre souvent une agressivité latente. En se sentant sécurisée par la complicité avec l’homme, elle peut plus facilement être active et laisser vivre son agressivité. L’homme  ne pouvant s’investir dans une intimité avec sa femme, se heurtera au refus de celle-ci à être objectivée. Il ne peut ni assumer, encore moins exprimer ses désirs coupables dans la relation. Ses comportements sont ambivalents et muets comme ceux des parents.

 

 

Photo La Madone Florentine

La madone Florentine - portrait

 

 

La maman et la putain sont dissociées...

 

D’après Freud, les  courants  tendres et sensuels sont dissociés chez les hommes et plus associés chez les femmes. Pour l’homme il sera difficile de rencontrer ces deux courants chez une femme qui doit être l’épouse, la compagne, la mère des enfants et l’amante. Le clivage maman/putain pousse certains hommes à dissocier dans leur vie réelle l’épouse respectable et la femme objet de désirs, la maîtresse ou la prostituée.

 

Chez beaucoup de femmes ce clivage est insupportable. Chez elles l’amour est nécessaire pour accueillir les aspects transgressifs du désir et de l’excitation. Dans la passion amoureuse, l’homme et  la femme  peuvent faire vivre les deux courants. En l’absence des aspects fusionnels de la passion, la sexualité plus agressive est vécue comme une déchéance par la femme. Elle déserte alors la sexualité.

 

Je vois plusieurs hommes, qui après plusieurs années de passion, rencontrent des difficultés à installer ou à maintenir l’érection. La femme dans sa  demande de tendresse ne suscite pas l’excitation. Certaines se sont réfugiées dans des courants qui prônent la sexualité sacrée. L’homme se sent castré. La perte symbolique de l’érection de l’homme la blesse dans sa désirabilité et la conduit à la frigidité.

 

L’insatisfaction sexuelle est interactive

 

La sexualité de l’homme se manifeste selon  le cycle de la réponse sexuelle : désir du désir sexuel, mobilisation vers l’objet de désir, sexualisation de la rencontre, orgasme, résolution et retrait, puis  période réfractaire. Celle-ci sera marquée soit par une rupture de contact, soit par une continuité tendre animée par la gratitude de la jouissance. Les difficultés érectiles et l’éjaculation prématurée sont bien connues et marquent souvent une communication érotique discordante. J’insisterais particulièrement  sur deux étapes du cycle, celle de la résolution-satisfaction et la gestion de la période réfractaire.

 

La satisfaction sexuelle à la fin du cycle dépendra pour l’homme de sa propre jouissance suscitée par celle de la femme. Le rythme, l’intensité de l’excitation portés par la fantasmatique la plus souvent inconsciente de chacun devront suffisamment s’ajuster pour que la réponse sexuelle commune soit satisfaisante. L’insatisfaction de l’un rejaillira forcément sur l’insatisfaction de l’autre et induira de nouveaux comportements sexuels.

 

Par exemple si l’éjaculation de l’homme intervient trop vite, la femme sera insatisfaite. Si la femme ne jouit pas intensément, l’homme sera insatisfait. L’ajustement dépend aussi  du processus de satisfaction sexuelle de la partenaire et de la nature psychophysiologique de son orgasme. La sexualité ne sera réjouissante pour les partenaires que lorsque l’ajustement entre les partenaires permet la réalisation d’une sexualité satisfaisante pour les deux. Or dans les faits les insatisfactions des partenaires sont rarement dévoilées. Exprimer son insatisfaction peut  toucher  la fragilité narcissique de l’autre.

 

Il en est de même de l’interprétation des comportements au cours de la période réfractaire. L’homme après l’éjaculation perd souvent de son dynamisme et de sa présence au regard de sa partenaire. Ne pas gérer son rythme éjaculatoire est un risque pour le couple. Après l’amour, l’homme peut être amené à désinvestir l’intimité et l’érotisme relationnel du quotidien.  Ce qui engendre une profonde insatisfaction chez certaines femmes qui le feront payer à l’homme en se refusant à lui.

 

Désir et maternité ?

 

La sexualité lorsqu’elle est associée au désir de procréation et de création d’une famille devient, le plus souvent, compliquée. La majorité des difficultés sexuelles et relationnelles rencontrées dans les couples commencent à partir de la grossesse du premier enfant. Le regard de l’homme sur sa femme change. Elle devient mère comme sa mère ou comme la mère de sa femme. Le corps change. Les moteurs de l’excitation sexuelle de l’homme se déplacent. Ce changement de regard de l’homme,  coupe la femme de sa représentation fantasmatique profonde de la « salope »  et l’inhibe sexuellement.  Ne se sentant plus désirable, cela renforce le processus de madonisation dans lequel l’investissement exclusivement maternel est privilégié. Pour l’homme,  la difficulté concomitante ou conséquente de la femme à exprimer son intérêt pour le sexe l’inhibe également. Les freins au désir engendrés durant la maternité peuvent s’inscrire  durablement dans la dynamique du couple. La femme continuera après la naissance à se réfugier dans le maternage et l’homme désinvestira le foyer envahi par trop de maternel. La sexualité restera le plus souvent défensive et s’éteindra peu à peu.

 

Pour l’homme, avoir un enfant peut réactiver le désir infantile du petit garçon pour  la mère, désir auquel il a dû  renoncer. Lorsque la désidentification avec la mère n’est pas suffisante l’arrivée d’un enfant est toujours une épreuve susceptible d’accentuer le clivage sur lequel repose sa sexualité.  L’homme aurait besoin  de dématernaliser la femme pour pouvoir la désirer. Dans les fantasmes sexuels des hommes, la mère et la femme ne cohabitent jamais. Les images de la féminité aiguisent les désirs sexuels, celles de la maternité les inhibent.

 

Les fantasmes de l’homme

 

L’exploration des fantasmes sexuels montre  l’intérêt profond de l’homme comme de la femme pour une sexualité fantasmatiquement transgressive. Les fantasmes porteurs d’une forte excitation sexuelle font appel à une sexualité hors de la chambre et  à des tiers. Ils font le plus souvent apparaître une sexualité non conventionnelle où apparaissent des scènes faites de trio, de partouze, de voyeurisme, d’exhibitionnisme. L’exploration plus approfondie de la fantasmatique fait souvent  apparaître des scénarios dans lesquels s’expriment des pulsions  sadomasochistes.  Dans l’imaginaire de l’homme, son excitation sexuelle  est révélée par la jouissance de femmes qui s’abandonnent et se perdent dans une sexualité déshumanisante.

 

L’étude des scénarios érotiques montre que pour qu’il y ait excitation sexuelle, le metteur en scène est toujours dans une double position. L’homme est porté par ses pulsions et les représentations de lui-même, mais aussi par ses projections dans l’espace intérieur de la femme. On retrouve ainsi la nature toujours double du fantasme, de l’enfant avec la mère ou de l’adulte avec la femme.

 

Le fantasme inconscient ou conscient à travers des scénarios érotiques est toujours présent dans la sexualité de l’homme comme de la femme. Il repose sur le désir de réparation et le renversement des traumatismes vécus dans la dyade mère/enfant,  contrariée par la présence réelle, imaginaire ou symbolique du père.

 

Le caractère triomphant de l’excitation sexuelle générée par les scénarios fantasmatiques de l’adulte condense l’histoire personnelle du garçon dans ses découvertes de l’érotisme et de la sexualité.

 

Dans la fantasmatique de l’homme, la « putain » est perçue comme un animal sexuel permettant à l’homme d’exprimer  l’urgence et la violence de son désir. Il y accède en se déconnectant de la culpabilité à objectiver les femmes. Accolée au mépris, existe aussi l’idée de la séduction. La putain semble plus accessible comme source de rêves et de fantasmes érotiques. Elle se présente comme  une femme expérimentée et délurée, disposée à accomplir  des actes sexuels que l’on s’interdit de demander à son épouse ou à sa partenaire officielle. L’homme dans ses fantasmes domine la femme et répare ainsi la violence faite par la mère à l’omnipotence de l’enfant, en lui préférant un autre. Dans la réalité la femme reconnue comme une madone, lui fait perdre souvent sa toute puissance, en le renvoyant  profondément à l’impuissance psychique et érectile.

 

La violence sexuelle des hommes

 

Parler de la sexualité de l’homme amène à se questionner sur les violences sexuelles.  Dans un contexte de violence, les hommes sont soit envahis par leur fantasmes ou soit animés par des pulsions qui s’expriment dans l’acte en dehors de toutes formes de représentations.

 

La perversité sexuelle de l’homme passe souvent par la  relation incestuelle d’une mère avec son garçon. La relation est   narcissique. Le garçon est un objet fétiche investi comme une idole qui doit illuminer la vie de sa mère. Il  a pour mission de combler le vide intérieur de la mère désexualisée (désexualisation réelle  ou imaginée). Le père n’est pas reconnu dans sa fonction d’homme. Le garçon pris dans les mailles de la mère se perd dans des  fantasmes portés par  le désir de faire peau commune et le besoin de déchirure de cette peau ou de pénétrer, d’envahir, de faire effraction dans l’objet d’amour pouvant conduire à la passivité, à l’immersion, voir à la dissolution. Ces fantasmes sont au service de visées défensives puissantes. Le combat titanesque du moi contre la peur et la mort trouve son origine dans l’emprise incestuelle. De là éclate une « rage narcissique » s’exprimant comme une immense protestation à vouloir exister. Elle s’exprime  dans le passage à l’acte violent occultant la conscience fantasmatique. On entre dans la démesure sous l’effet d’une passion narcissique où l’autre n’est plus reconnu. L’acte dans le réel fait rupture avec la pensée. Il est proprement insensé.

 

Le problème de la limite dedans/dehors est illustré par le viol. Il faut un sujet à forme humaine à pénétrer. L’acte  est effectué sous l’emprise d’une exigence intérieure, automatique tandis que la conscience reste extérieure à ce qui se déroule. Le sexuel est au service de la violence par effraction de l’objet indispensable pour exister.

 

On est constamment à la limite du dedans et du dehors, dans l’indétermination entre fantasme, hallucination et perception. La mère est à l’intérieur du sujet. L’indifférenciation est  animée par un mouvement contradictoire de refus et d’incorporation de l’autre. On n’est pas encore dans le clivage entre la madone et l’anti-madone. Ce n’est pas d’angoisse de castration qu’il s’agit mais d’angoisse d’inexistence.

 

Dans la clinique on rencontre des défenses contre ces risques hallucinatoires. Ils se traduisent  dans des formes d’impuissance à vivre ou à investir sexuellement la femme. La peur inconsciente d’être un violeur ou de prendre la femme comme une putain obère le désir et l’agressivité sexuelle.

 

L’homme en couple  sous l’emprise de la madone

 

Dans la dynamique d’un couple, l’homme fusionnel et peu agressif sexuellement a souvent une fonction rassurante au début de la relation. Après quelques temps, les femmes détectant les anxiétés d’abandon de leur partenaire éteignent  leurs propres pulsions sexuelles, leurs fantasmes et leur créativité érotique, par loyauté pour celui-ci. Le manque de masculinité du mari ne leur permet pas d’assumer leur propre besoins anti-fusionnels, de peur de se percevoir dans leur propre regard et le sien, comme une putain. Le désir est affecté. Le conjoint fusionnel devenant inquiet du manque d’enthousiasme de  sa partenaire, intensifie ses avances sexuelles. L’anxiété liée à la non reconnaissance de sa masculinité est amplifiée. Elle engendre le plus souvent une réactivité sexuelle maladroite ou la perte de son désir. Le message capté par la femme est que le sexe est susceptible d’entacher l’amour. La femme étouffe ses désirs de femme  et déplace alors sa libido sur ses enfants en se réfugiant dans son rôle de mère, endroit où elle peut exercer un pouvoir sans limite. La castration exercée par la femme qui se dérobe au désir de l’homme  tend soit à l’infantiliser un peu plus soit à engendrer une violence intérieure réactualisant celle qu’il a connu et étouffé avec la mère. Elle peut s’exprimer  dans la colère ou la violence conjugale. Mais après que la femme ait assumé ses devoir de mère, la putain peut resurgir, mais rarement  avec le mari disqualifié dans son rôle d’homme. Elle rencontrera peut-être un amant de jouissance qui lui révélera son potentiel. Sinon la sexualité lui deviendra inaccessible et étrange.

 

La putain et l’actrice porno !

 

Dans les fantasmes de l’homme, l’image de la putain est étroitement associée à celle de la prostituée. Dans la prostitution, il n’existe aucune attente. Les hommes sont libres d’aller leur chemin après avoir payé. Il n’existe aucun investissement émotionnel et aucun lien.

 

L’homme se réfugie souvent dans des offres sexuelles codifiées représentatives de la « putain ». L’actrice porno, comme la prostituée le fascinent bien au-delà de l’offre. Elles resplendissent comme un mirage par leur disponibilité permanente et une profonde représentation de la transgression. L’image de la « putain » attire, mais  c’est d’abord parce que le sexe attire. Et si le sexe attire, c’est qu’il renvoie à un manque puissant, moteur du désir de l’homme.

 

Ni madone, ni putain...

 

Le rapport madone anti-madone dans les jeux de pouvoir du couple s’exprime de façon complexe. Les difficultés rencontrées montrent le caractère pernicieux d’un système à deux qui conduit à la  désexualisation de la relation. Elles s’accompagnent d’un climat d’angoisse, de somatisations diverses ou d’une desaffectisation de la relation. Les ajustements entre l’homme et la femme dépendent de leur complémentarité intrapsychique, s’exprimant dans un proto-langage discordant ou concordant, reposant sur une structure fantasmatique profonde et personnelle de chaque partenaire.

 

Les aspects discordants profonds sont souvent dépassés au début d’une relation. Avec le temps, ils envahissent la relation à l’insu des partenaires. Les crises sont alors inévitables. Pour déjouer  les pièges le couple devra se dévoiler, se parler afin d’instaurer une bonne complicité sexuelle nécessaire à la créativité.  Les ajustements passent par la création d’un espace fantasmatique commun, s’exprimant  par des jeux interactifs passifs, actifs entre  l’homme et la femme. Beaucoup d’hommes s’y refusent, ne voulant déroger aux rôles qu’ils ont introjectés depuis longtemps. Pourtant l’homme devra à la fois mobiliser son agressivité sexuelle et élargir ses plaisirs dans une passivité plus féminine. Les hommes pouvant avoir des fantasmes plus féminins de soumission et de désirabilité associés à des fantasmes plus masculins de domination bénéficient de multiples possibilités qu’offre une genralité  riche et complexe qui sort des schémas relatifs à la seule identité biologique. Cela  laisse un grand espace pour la créativité et l’ajustement avec une ou un partenaire, pour que vive une seule libido au service de la jouissance de chaque partenaire, devenant tantôt mâle, tantôt femelle...L’attractivité agressive de la putain est alors assumée et distanciée par les deux partenaires. L’accueil et la tendresse plus féminine sont dissociés des aspects régressifs du lien maternel.

 

L’équilibre  mobile entre l’agressivité phallique et  la désirabilité de l’un et de l’autre passe par la création d’un  « nous » érotique fait d’une fantasmatique concordante. Celui-ci dépend le plus souvent du dévoilement à l’autre de sa fantasmatique profonde et de l’élargissement de celle-ci à celle de l’autre.  La complicité érotique, qui en résulte, est alors propice  à la créativité sexuelle et relationnelle et  de surcroît à la gratitude.

 

Il va de soi, qu’aucun schéma ne peut définir une quelconque normalité sexuelle de l’homme. Seul une acceptation profonde de soi-même, dans ses préférences érotiques et ses pratiques sexuelles, et l’acceptation de l’autre,  vu comme un amplificateur de la jouissance, peut définir une certaine vision de la santé sexuelle. Elle s’inscrit toujours dans la qualité d’une relation.

 

Michel Bonhomme pour http://www.couple-amour-sexualite.com

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3 janvier 2016 7 03 /01 /janvier /2016 12:09

Voici une sélection des meilleurs vidéos de nostalgie, de bonheur et de souvenirs en compagnie de quelques-uns des grands symboles de notre temps. Sous forme d'entretien, ils témoignent en aparté de leurs vies, de la richesse de leurs expériences et de la sagesse acquise au fil du temps et des épreuves... A ce jour, aucun personnage connu, médiatique soit-il, ne s'est montré à la hauteur du courage et de la force de conviction de leurs aïeux ! Pour ceux qui tentent encore aujourd'hui de passer pour des saints ou des icônes, notamment à travers des ouvrages ou des conférences publiques - tels des sophistes - voici de quoi leur rappeler ce qu'est une vie " simple, digne mais exemplaire ".

- En aparté avec les grands symboles contemporains -

Ci-dessous : Daniel Balavoine, Coluche, Abbé Pierre, Soeur Emmanuelle, Jacques Brel, Georges Brassens, Nelson Mandela, le père Pedro et Bourvil... et tous ceux que je n'ai pas encore publié.

 

DANIEL BALAVOINE - Interview avant sa mort

Coluche sur la politique... un discours d'actualité !

L'abbé pierre - Un saint parmi les hommes

Soeur Emmanuelle : La vie difficile dans les bidonvilles !

Brel Parle : Entretien avec Henri Lemaire à Knokke en 1971

Brassens : Un saltimbanque assoiffé de l'amour de ces semblables

Nelson Mandela, une voix porteuse de grands messages

Père Pedro, son soutien sans failles envers les pauvres.

Bourvil : La bonne humeur de la France !

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27 décembre 2015 7 27 /12 /décembre /2015 17:27

Le monde actuel nécessite d'urgence une nouvelle sorte d’élites dirigeantes : souples, renouvelées, équitablement issues de cursus académiques et contributifs (mouvements des commons, amatorat et savoirs libres), représentatives de la société civile, en phase avec les inquiétudes légitimes du peuple et capables d’imaginer de nouveaux moyens de le protéger.

 

" Les élites en salon, un portrait régressif "

" Les élites en salon, un portrait régressif "

Des élites coupées du peuple et incapables de le protéger :

 

 

Brice couturier - France culture : En 1999, dans un essai en avance sur son temps, le regretté Philippe Cohen faisait le constat suivant : le peuple, dans nos sociétés post-industrielles, a consenti un pouvoir immense aux élites, en échange d’une promesse : le protéger. Sécurité sociale, stabilité de l’emploi et donc des revenus, sécurité physique et personnelle. Cette promesse ne pouvait être tenue, selon lui, que dans le cadre des Etats-nations. Or, prévenait Philippe Cohen, les élites, au nom d’un progressisme new look, appellent à présent à faire preuve de souplesse et de mobilité dans un monde où les Etats-nations sont appelés à perdre leur centralité.

 

Dans la mesure où elles renoncent à protéger le peuple, ces élites ne doivent pas s’étonner de voir leur légitimité de plus en plus contestée, concluait l’essayiste.

 

Depuis, il y a eu bien d’autres livres, comme celui d’Eric Conan, La gauche sans le peuple (2004), lui aussi journaliste à Marianne. Aussi n’est-ce pas un hasard qu’on trouve dans Marianne l’un des meilleurs résumés disponibles de la situation, sous la plume de Jacques Julliard. « Le peuple et les élites », écrit Julliard, n’ont plus les mêmes valeurs, ni les mêmes priorités. »

 

Primo, poursuit-il, « Pour le peuple, le danger principal est le terrorisme islamiste. Pour les élites, c’est le fascisme d’extrême droite. » Et en effet, les élites, elles, sont favorables au multiculturalisme, quand le peuple y voit l’abandon du social au profit du culturel. Je renvoie aux thèses de Laurent Bouvet, dans son livre L’insécurité culturelle.

 

« Secundo, écrit encore Julliard, Pour le peuple, l’objectif principal est la sécurité : Sécurité sociale, sécurité de l’emploi, sécurité individuelle. Pour les élites, l’objectif principal est le progrès, grâce à la mondialisation, au commerce, aux droits de l’homme. » Et de poursuivre : « le peuple se reconnaît dans la nation », parce qu’il a « la nostalgie de l’unité ». Les élites, elles, encouragent la diversité, soutiennent les minorités et maintiennent leur confiance à l’instance européenne.

 

Enfin, les élites restent attachées aux partis de gouvernement existants. Mais la vague populiste, qui traverse l’Europe comme les Etats-Unis, montre qu’un nombre croissant d’électeurs les considèrent à présent comme des castes fermées sur elles-mêmes et défendant leurs propres intérêts, et non l’intérêt général. D’où le succès de formations aussi aberrantes que le Mouvement 5 Etoiles de Beppe Grillo (27 % d’intention de vote ce mois-ci, contre seulement 30, au Parti Démocratique de Matteo Renzi), du PIS polonais, de Donald Trump aux Etats-Unis… et bien sûr du Front national, chez nous.

 

Dans un article demeuré fameux, Raymond Aron a discuté la notion de classe dirigeante. Il la juge trop idéologique. Dans toute société, même celles qui se vantent d’être démocratiques, c’est une minorité qui commande et le grand nombre obéit. Dans tout régime, aussi, existe un personnel politique, qui est engagé dans une compétition pour l’exercice du pouvoir.

 

Mais ce qui caractérise nos sociétés démocratiques modernes, c’est « la pluralité des catégories dirigeantes ». Le directeur général de General Motors n’est pas le président des Etats-Unis. En régime démocratique, enfin, le pouvoir est l’objet d’une compétition régulière entre des partis. Face au « pouvoir temporel », celui des gestionnaires des moyens de production, des meneurs des masses, ou des hauts fonctionnaires, existe un « pouvoir spirituel », celui des dirigeants religieux, des savants et des intellectuels.

 

Notre problème est double. Nous avons hérité de la monarchie absolue une tradition autoritaire et centralisatrice : c’est l’Etat qui, à Paris, décide de tout. Lorsque le pays va bien, qu’il jouit d’une certaine prospérité et de la paix, cette autorité est tolérée parce que la société se sent protégée. Lorsque le chômage est effrayant et que plane le risque de la guerre civile, on ne le supporte plus.

 

D’autre part, chez nous, les élites sociales se sont fondues en une caste unifiée, à la manière de la nomenklatura des pays communistes ce sont les mêmes fonctionnaires, interchangeables et formatés, qui dirigent les partis politiques, les administrations publiques, les banques, les grandes formations universitaires.

 

Des dirigeants politiques coupés du peuple et conseillés par des experts nous rejouent le despotisme éclairé – cette utopie des intellectuels progressistes, depuis nos philosophes du XVIII° siècle qui, on l’oublie trop souvent, tenaient le peuple en suspicion, le jugeant victime de ses préjugés et de ses superstitions, insuffisamment ouvert aux idées modernes... Ils savent mieux que nous ce qui est bon pour nous…

 

Le monde actuel nécessite une nouvelle sorte d’élites dirigeantes : souples, renouvelées, équitablement issues de cursus académiques et contributifs (mouvements des commons, amatorat et savoirs libres), représentatives de la société civile, en phase avec les inquiétudes légitimes du peuple et capables d’imaginer de nouveaux moyens de le protéger.

 

La critique en direct sur France Culture :

 

  • Les élites ont-elles tous les torts ?
  • Quelles rôles jouent les élites dans la vie politique française ?
  • Les élites doivent-elles se remettre en cause ? et doivent-elles se renouveler ?

 

 

Hervé Gardette reçoit :

 

Jacques Attali, polytechnicien, énarque et inclu au sein des controversées " élites politiques ", ancien conseiller spécial du président Mitterrand pendant onze ans. Il a publié en août dernier Peut-on prévoir l’avenir (Fayard).

 

Rejoint en seconde partie par Agnès Van Zanten, sociologue de l’éducation, directrice de recherche au CNRS, elle travaille à l'Observatoire Sociologique du Changement de Sciences Po Paris.

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27 décembre 2015 7 27 /12 /décembre /2015 16:44

Le Cours public est un cycle de conférences que l’Université Rennes 2 organise depuis 20 ans. Ouvertes en priorité aux étudiants et aux personnels, ces conférences de prestige s’adressent aussi à l’importante communauté scientifique rennaise et au grand public. Le cycle sur " la perversion " est proposé par Alain Abelhauser, professeur des universités en psychologie clinique, directeur scientifique du cours public 2015-2016.

<< Sous le masque du paraître... aux sources de la perversion >>

<< Sous le masque du paraître... aux sources de la perversion >>

Est réputé pervers, depuis l’apparition du mot au Moyen Âge, celui qui jouit du mal et de la destruction de soi ou de l’autre. Si l’expérience de la perversion est universelle, chaque époque la considère et la traite à sa façon.

 

L’histoire des pervers en Occident est complexe, depuis l’époque médiévale jusqu’à nos jours se sont distingués des singularités et des systèmes : Sade invente la perversion au sens moderne tandis que le XIXe siècle isole les trois figures de l’enfant masturbateur, de l’homosexuel et la femme hystérique. Le nazisme sera l’essence même d’un système pervers de type exterminateur. Notre époque feint de croire que la science nous permettra bientôt d’en finir avec la perversion. Mais en prétendant l’éradiquer, nous prenons le risque de détruire l’idée d’une possible distinction entre le bien et le mal, qui est au fondement même de la civilisation.


Elisabeth Roudinesco est docteur ès lettres et historienne, directrice de recherches (HDR) au département d’histoire de l’Université de Paris VII où elle dirige des thèses depuis vingt ans.

 

Généalogie de la perversion version mp3 : Conférence d'Elisabeth Roudinesco

 
 

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Élisabeth Roudinesco, née le à Paris, est une universitaire, historienne et psychanalyste française, biographe de Jacques Lacan et de Sigmund Freud, et auteur d'une vingtaine d'ouvrages sur l'histoire de la Révolution française, de la psychanalyse, de la philosophie et du judaïsme. Elle est lauréate du Prix Décembre 2014, puis du Prix des prix littéraires 2014, pour sa biographie Sigmund Freud en son temps et dans le nôtre, publié au Seuil.

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