1 octobre 2014 3 01 /10 /octobre /2014 08:38

L’agro-écologie, solution pour que chacun se nourrisse sainement demain ? Oui, démontre ce documentaire ! Il présente des initiatives agro-écologiques réussies aux quatre coins du monde, augmentant les rendements et créant de nouveaux liens plus humains, entre producteurs et consommateurs... 

 

 

 

 

Comment nourrir la population mondiale en se détournant des pesticides ?

 

C'est à cette question que tente de répondre ce documentaire, en menant l'enquête sur quatre continents. S'appuyant sur les témoignages d'experts, d'éleveurs et de cultivateurs, il dresse un bilan de la révolution agricole qui, après un demi-siècle, n'est pas parvenue à nourrir le monde, alors qu'elle a largement participé au réchauffement climatique, épuisant les sols, les ressources en eau et la biodiversité, provoquant des allergies ou des maladies... Des expériences montrent aujourd'hui que l'agriculture familiale et biologique sur une large échelle est non seulement possible, mais efficace d'un point de vue économique.

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28 septembre 2014 7 28 /09 /septembre /2014 12:00

Qu'est-ce donc que l'honneur ? Une qualité qui porte à faire des actions nobles. La vertu pourrait ainsi être le fondement de l'honneur. Cicéron n'écrivait-il pas « verum decus in virtute positum est » – le véritable honneur réside dans la vertu. Mais c'est enlever au concept d'honneur une grande partie de son sens que d'en faire une qualité qui vaut seulement par rapport à sa propre conscience. L'honneur peut être une aspiration à un certain bien, il n'est reconnu comme tel que validé par les autres. Il engage certes celui qui y tend, mais c'est aussi un phénomène de société. En effet, c'est le groupe qui sanctionne, par l'estime glorieuse qu'il lui donne, l'homme d'honneur.

 

 

Définition

 

En Occident, l’honneur fut d’abord associé au fait d’être bien né et d’être ainsi capable, dans l’action, d’une grandeur pouvant dépasser les exigences du strict devoir.«Qu’est ce que l’honneur, c’est la force de l’âme animée ou réveillée par le devoir, et qui quelquefois même, nous porte au-delà de ce qu’il prescrit.» (Ste-Foix) Les honneurs devinrent ainsi les signes distinctifs du rang, de la place occupée dans la hiérarchie sociale.

Mais il ( le mot honneur) l'a esté usité aussi par les anciens pour la dignité qu'a le vassal d'estre fieffé par un Roy ou grand Seigneur, et consequemment pour le fief mesme duquel le vassal a esté par luy honoré. Ainsi on lit en Guy de Waruich: Je vous veux revestir de cette cité, et de toute la seigneurie et honneur qui y append pour estre vostre. Et quand un Roy haranguoit son armée pour donner la bataille, il concluoit ainsi. Avant mes Barons, qui me rendra mon ennemi mort, ou prins, je luy croistray son honneur d'une bonne ville.

Cette définition du Trésor de la langue française de Jean Nicot (1606) nous rappelle qu’à l’origine l’honneur était une chose bien concrète : «je lui croistray son honneur d’une bonne ville.»

1606 est aussi la date de naissance de Pierre Corneille, le poète de l’honneur en France, l’auteur du Cid, où pour venger l’honneur de son père, le héros doit vaincre Le Comte, père de celle qu’il aime, Chimène. Mais Le Comte a lui-même de l’honneur et il voudrait éviter à Don Rodrigue une mort certaine.

Le Comte !

Jeune présomptueux !

Don Rodrigue.

Parle sans t’émouvoir.
Je suis jeune il est vrai ; mais aux âmes bien nées
La valeur n’attend pas le nombre des années.

Le Comte.

Te mesurer à moi, qui t’as rendu si vain,
Toi qu’on a jamais vu les armes à la main ?

Don Rodrigue .

Mes pareils à deux fois ne se font point connaître,
Et pour leurs coups d’essai veulent des coups de maître.

Le Comte.
[...]
Ne cherche point à faire un coup d’essai fatal ;
Dispense ma valeur d’un combat inégal :
Trop peu d’honneur pour moi suivrait cette victoire ;
À vaincre sans péril on triomphe sans gloire.
On te croirait toujours abattu sans effort ;
Et j’aurais seulement le regret de ta mort.

Don Rodrigue

D’une indigne pitié ton audace est suivie :
Qui m’ose ôter l’honneur craint de m’ôter la vie!


Plus tard le mot honneur ne sera plus associé à la valeur, mais au simple fait d’être né. À la veille de la Révolution française, Chamfort, témoin de la montée de l’égalité, écrira:

«C'est une vérité reconnue que notre siècle a remis les mots à leur place; qu'en bannissant les subtilités scolastiques, dialecticiennes, métaphysiques, il est revenu au simple et au vrai, en physique, en morale et en politique. Pour ne parler que de morale, on sent combien ce mot, l'honneur, renferme d'idées complexes et métaphysiques. Notre siècle en a senti les inconvénients; et, pour ramener tout au simple, pour prévenir tout abus de mots, il a établi que l'honneur restait dans son intégrité à tout homme qui n'avait point été repris de justice. Autrefois ce mot était une source d'équivoques et de contestations; à présent, rien de plus clair. Un homme a-t-il été mis au carcan, n'y a-t-il pas été mis ? Voilà l'état de la question. C'est une simple question de fait, qui s'éclaircit facilement par les registres du greffe. Un homme n'a pas été mis au carcan : c'est un homme d'honneur, qui peut prétendre à tout, aux places du ministère, etc.; il entre dans les corps, dans les académies, dans les cours souveraines. On sent combien la netteté et la précision épargnent de querelles et de discussions, et combien le commerce de la vie devient commode et facile.» (Maximes)

Dans cette perspective, l’honneur appartient à tous les êtres humains. On ne peut pas le mériter, on ne peut que s’en montrer indigne en commettant un crime.

Si l'on a fait de l’honneur une chose si commune c’est parce qu’on voyait, à l'instar de Voltaire, plus de vanité que de vertu dans les actions accomplies sous le signe de l’honneur.

«Cet honneur étranger, parmi nous inconnu
N’est qu’un fantôme vain qu’on prend pour la vertu
C’est l’amour de la gloire et non de la justice
La crainte du reproche, et non celle du vice.» (Voltaire, Alzire)

À quoi Chamfort fera écho : «L'amour de la gloire, une vertu ! Étrange vertu qui se fait aider par l'action de tous les vices; qui reçoit pour stimulants l'orgueil, l'ambition, l'envie, la vanité, quelquefois l'avarice même !» (Maximes)

Un sentiment tel que l’honneur offre une longue résistance avant de disparaître. Après la révolution, Napoléon sentit la nécessité de rétablir l’honneur. Ce qu’il fit en donnant de nouveaux titres noblesse et en créant la Légion d’honneur. Il avait dans son armée trop de soldats courageux pour offrir une ville à chacun. Il leur offrit donc une médaille qui, aux yeux de certains, allait avoir autant de valeur qu’une ville. Telle est la force du besoin d’être reconnu.

Comme le rappelle P.J. Dessertine, à propos du mot ciel, «il n’y a pas d’oraison funèbre pour les mots qui tombent en désuétude,» on ne leur rend pas les derniers honneurs. Leur perte passe inaperçue. Le mot honneur, comme les mots ciels, vertu, grâce, gloire, a perdu son droit de cité.

Mais l’humanité peut-elle se passer d’un tel mot. Il semble bien que l’honneur sous une forme ou une autre ait existé dans toutes les cultures, comme chez les peuples de l'Amérique du Nord centrale que décrit Ruth Benedict dans Échantillons de civilisation. «L'honneur dans la guerre y est ce qu'il y a de plus important pour tous les hommes. Le thème constamment répété à celui qui arrive à l'âge d'homme, ainsi que celui qui doit être prêt pour la guerre à tout âge, est un rituel magique pour obtenir la victoire. Ils ne se torturent pas les uns les autres, mais ils s'infligent la torture à eux-mêmes; ils se découpent des bandes de chair aux bras et aux jambes, ils se tranchent des doigts, ils portent de lourds poids suspendus par des crocs à la poitrine ou aux muscles des jambes ; leur récompense, par la suite, ce seront des prouesses plus grandes encore sous la forme de prouesses guerrières.»

On peut estimer excessif ce prix à payer pour l’honneur, mais le prix de l’honneur a toujours été élevé, ce qui met en relief son caractère essentiel.

L’honneur authentique est l’éclat de la vertu, son aura. Cet éclat est l’écho de la vertu dans la société, le signe qu’elle est reconnue et admirée. Là où la vertu est condamnée à demeurer sans écho et donc sans éclat, elle n’est accessible qu’à quelques grands solitaires. D’où la nécessité de continuer à cultiver l’honneur, de considérer les critiques dont il a été l’objet comme des invitations à retrouver son vrai visage. L’honneur est un intermédiaire nécessaire entre les idéaux et le commun des mortels. Simone Weil l’a compris. C’est pourquoi elle a rangé l’honneur parmi les besoins de l’âme humaine.

«L’honneur est un besoin vital de l’âme humaine. Le respect dû à chaque être humain comme tel, même s’il est effectivement accordé, ne suffit pas à satisfaire ce besoin ; car il est identique pour tous et immuable ; au lieu que l’honneur a rapport à un être humain considéré, non pas simplement comme tel, mais dans son entourage social. Ce besoin est pleinement satisfait, si chacune des collectivités dont un être humain est membre lui offre une part à une tradition de grandeur enfermée dans son passé et publiquement reconnue au-dehors.

Par exemple, pour que le besoin d’honneur soit satisfait dans la vie professionnelle, il faut qu’à chaque profession corresponde quelque collectivité réellement capable de conserver vivant le souvenir des trésors de grandeur, d’héroïsme, de probité, de générosité, de génie, dépensés dans l’exercice de la profession.

Toute oppression crée une famine à l’égard du besoin d’honneur, car les traditions de grandeur possédées par les opprimés ne sont pas reconnues, faute de prestige social.
 
C’est toujours là l’effet de la conquête. Vercingetorix n’était pas un héros pour les Romains. Si les Anglais avaient conquis la France au XVe siècle, Jeanne d’Arc serait bien oubliée, même large mesure par nous. Actuellement, nous parlons d'elle aux Annamites, aux Arabes ; mais ils savent que chez nous on n'entend pas parler de leurs héros et de leurs saints ; ainsi l'état où nous les maintenons est une atteinte à l'honneur.

L'oppression sociale a les mêmes effets. Guynemer, Mermoz sont passés dans la conscience publique à la faveur du prestige social de l'aviation ; l'héroïsme parfois incroyable dépensé par des mineurs ou des pêcheurs a à peine une résonance dans les milieux de mineurs ou de pêcheurs.
 
Le degré extrême de la privation d'honneur est la privation totale de considération infligée à des catégories d'êtres humains. Tels sont en France, avec des modalités diverses, les prostituées, les repris de justice, les policiers, le sous-prolétariat d'immigrés et d'indigènes coloniaux... De telles catégories ne doivent pas exister.
Le crime seul doit placer l'être qui l'a commis hors de la considération sociale et le châtiment doit l'y réintégrer.»

Source: Simone Weil, L'Enracinement.


En Europe la patrie de l’honneur c’est l’Espagne, la terre du Cid et de Don Quichotte. Pour le philosophe Miguel de Unamuno, la renommée, voisine de l’honneur, est l’ombre de l’immortalité. À propos de Don Quichotte, son héros et son alter ego, il écrit : «Le pauvre et ingénieux hidalgo ne chercha pas un avantage passager, ni une récompense corporelle, mais un nom et une renommée éternelles, mettant ainsi son nom au-dessus de lui-même. (La vida de don Don Quijote y Sancho)

Un autre penseur méditerranéen, admirateur de l’Espagne, Gustave Thibon, aura contribué à réhabilité le mot honneur, en le situant à sa juste place, à l’abri des abus dont il a été l’objet.

Il suffit d’accorder un peu d’attention à ses pensées sur l’honneur, des bêtes...ou de l’âme, pour comprendre que ce mot est indispensable, que le perdre à jamais ce serait renoncer à un sentiment qui peut encore donner un sens à la vie quand les recours habituels ont été épuisés.

«Bande publicitaire d'un ouvrage sur le génocide du Cambodge : “ Il faut lire ces pages pour se faire une idée du degré d'animalité auquel l'homme peut descendre. ” Pour l'honneur des bêtes et par respect de la vérité, parlons de monstres ou de démons, mais n'évoquons pas l'animal. Pauvres bêtes dont la cruauté est si innocente dans sa cause et si limitée dans ses effets! Le mal, comme l’héroïsme, fait la preuve de la différence métaphysique entre l'homme et l'animal.»

«Dieu. Ne pas se plier devant sa puissance, se briser devant son innocence. Pour l'honneur de l'âme et non par orgueil du moi...» Source: Le voile et le masque.

C'est à l'honneur que selon Hannah Arendt, Ernst Jünger doit d'avoir pu d'avoir pu offrir une résistance au culte du chef.

«Les Journaux de guerre d'Ernst Jünger offrent peut-être l'exemple le meilleur et le plus honnête des immenses difficultés auxquelles l'individu s'expose quand il veut conserver intact son système de valeurs morales et son concept de vérité en un monde où vérité et morale ont perdu toute forme identifiable d'expression. Malgré l'indéniable influence que les premiers travaux de Jünger ont exercée sur certains membres de l'intelligentsia nazie, il a été du premier au dernier jour du régime un opposant actif au nazisme, montrant par là que le concept d'honneur, un peu désuet mais répandu jadis parmi le corps des officiers prussiens, suffisait amplement à motiver une résistance individuelle.»

Source: Ernst Jünger, L'Âge d'Homme, Les Dossiers, Lausanne, 2000.

 

Enjeux

 

Y a-t-il encore une place pour l'honneur dans cette démocratie libérale, telle que la présente Fukuyama, par exemple, où dans la perspective de la division tripartite de l'âme, l'on néglige le coeur, siège du sentiment de dignité, d'honneur, pour concentrer toute sa considération sur la tête qui calcule et le ventre qui consomme.

 

Essentiel

 

C'est à Platon, plus précisément à son grand ouvrage intitulé La République, que l'on remonte toujours pour trouver le modèle de la division tripartite de l'âme. «Mais ce qui est difficile, écrit-il, c'est de décider si tous nos actes sont produits par le même principe ou s'il y a trois principes chargés chacun de leur fonction respective, c'est-à-dire si l'un de ces principes qui est en nous fait que nous apprenons (Noos), un autre que nous nous mettons en colère (Thumos), un troisième que nous recherchons le plaisir de manger, d'engendrer... (Epithumia).» Voici donc de nouveau la tête, le cœur et le ventre, la tête étant le lieu de la raison, de la pensée, le ventre celui du désir. Il ne faudrait toutefois pas limiter le cœur à la colère au sens que nous donnons à ce mot. Le Thumos est en réalité le siège du courage, du sentiment de dignité, de fierté, d'honneur.

 

Documentation

 

Le sens de l'honneur d'Ernst Jünger, selon Hannah Arendt :

«Les Journaux de guerre d'Ernst Jünger offrent peut-être l'exemple le meilleur et le plus honnête des immenses difficultés auxquelles l'individu s'expose quand il veut conserver intact son système de valeurs morales et son concept de vérité en un monde où vérité et morale ont perdu toute forme identifiable d'expression. Malgré l'indéniable influence que les premiers travaux de Jünger ont exercée sur certains membres de l'intelligentsia nazie, il a été du premier au dernier jour du régime un opposant actif au nazisme, montrant par là que le concept d'honneur, un peu désuet mais répandu jadis parmi le corps des officiers prussiens, suffisait amplement à motiver une résistance individuelle.»

Sources: Ernst Jünger, L'Âge d'Homme, Les Dossiers, Lausanne, 2000.
http://agora.qc.ca/
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27 septembre 2014 6 27 /09 /septembre /2014 16:30

Pourquoi ne sommes-nous pas cognitivement plus attentifs aux effets du changement climatique qui se déploie sous nos yeux ? La façon dont fonctionne notre cerveau représente t-elle "un obstacle" à notre compréhension et à notre réaction vis-à-vis du désastre à venir ?

 

 

 

Telle est la nature des questions que pose Jon Gertner pour le New York Times (voir la traduction intégrale de l’article chez les Humains associés). Il s’appuie pour cela sur les travaux issus d’un colloque organisé par le Cred, le Centre de recherche sur les décisions environnementales de l’université de Columbia, un laboratoire de recherche comportementale situé à l’intersection de la psychologie, de l’économie et de la science, qui étudie les processus mentaux qui façonnent nos choix, nos comportements et nos attitudes.

 

Le Cred est né sous l’impulsion du professeur de psychologie David Krantz et a pour but d’étudier comment nous prenons des décisions par rapport aux questions environnementales. Si nous considérons que le changement climatique est anthropique, explique Elke Weber, professeure de psychologie et de management à l’université de Columbia et cofondatrice du Cred, “cela signifie que le changement climatique est causé par le comportement humain. Cela ne signifie pas que les solutions techniques ne sont pas importantes… Mais si ce phénomène est causé par le comportement humain, alors la solution réside sans doute aussi dans le changement du comportement humain.”

 

Pour les chercheurs du Cred, le réchauffement de la planète est une “occasion unique” d’étudier la façon dont nous réagissons à des enjeux à long terme. Elke Weber rappelle que notre cerveau est capable de gérer le risque de plusieurs manières. Un système d’analyse, impliquant un examen raisonné des coûts et des avantages. Et un système émotionnel et primitif, qui nous fait réagir au danger, quand on se réveille la nuit lorsqu’on sent une odeur de fumée par exemple… En mode analyse, nous ne sommes pas toujours adeptes de réflexion à long terme.

 

De nombreuses expériences ont montré que nous mesurons mal les bénéfices lointains et que nous sous-évaluons les résultats futurs : ainsi, généralement, on préfère prendre une somme d’argent tout de suite que prendre le double plus tard. Ecologiquement parlant cela signifie qu’il est peu probable que nous changions de mode de vie pour assurer l’avenir de notre planète. D’où le fait que nous sous-estimions le danger de la montée des eaux (qui noie pourtant déjà les îles Tuvalu, vidéo) ou celui de la multiplication des sécheresses et autres évènements que nous n’avons jamais connu et qui semblent bien éloignés dans le temps et dans l’espace.

 

Pire, explique Elke Weber, les chercheurs semblent d’accord pour penser que nous avons un “réservoir d’inquiétude limité”, ce qui signifierait que nous sommes dans l’incapacité cognitive de maintenir notre peur du changement climatique quand un autre problème (chute des marchés boursiers, urgence personnelle…) se présente à nous. Enfin, nous sommes prompts à rassurer nos paniques émotionnelles en accomplissant une action concrète (achat d’un matériel plus écologique, soutien ou vote de bonne conscience), qui a surtout comme effet de diminuer notre facteur de motivation… tout en laissant la planète à peu près là où elle était avant.

 

POUR VOIR PLUS LOIN, CHOISISSONS ENSEMBLE

 

Les débats pour comprendre pourquoi le changement climatique n’est pas une priorité dans les esprits américains, tendent à désigner les mêmes coupables : le doute et le scepticisme sur la réalité du changement climatique, le manque de communication des scientifiques, l’incapacité de nos systèmes politiques à faire face à un défi à long terme, notre façon de nous concentrer sur le futile plutôt que sur l’important (débattre du nombre de mètres dont vont monter les océans)…

 

Pour les chercheurs, il est essentiel de comprendre comment nous prenons des décisions en situation d’incertitude et ce qui les motive. Jon Gertner rapporte ainsi que lors d’une expérience visant à attribuer des labels écologiques à des produits, peu de participants se sentent concernés de prime abord, mais si vous les valorisez en leur expliquant qu’ils font partie du label, la participation grimpe de 35 à 50 %. Elle atteint même 75% quand vous asseyez les participants au test autour d’une table pour qu’ils définissent eux-mêmes le label…

 

“La coopération est un objectif que l’on peut activer”, explique encore Elke Weber. “Nous avons besoin de savoir que nous faisons partie de groupes. Cela nous donne un plaisir inhérent à faire. Et quand on nous rappelle que nous sommes des morceaux de communautés, alors la communauté devient une unité pour prendre des décisions.” Les travaux de Michel Handgraaf, professeur de psychologie à l’université d’Amsterdam, sur les différences de processus de décision entre les groupes et les individus vont dans le même sens. Les groupes sont mieux à même de prendre des décisions apportant des avantages à long terme, explique-t-il après avoir confronté des groupes tests où les cobayes devaient prendre des décisions d’abord individuellement puis en tant que groupes et inversement.

 

Des conclusions qui ne devraient pas être sans incidences directes sur la façon dont les décisions sont prises au sein de collectifs ou dans des entreprises par exemple. Jon Gertner souligne encore que l’essentiel du financement américain pour la recherche sur le climat va à la physique et aux sciences naturelles et très peu aux sciences sociales, donc très peu pour comprendre pourquoi l’on est écolo ou pas, pourquoi l’on change son comportement ou pas…

 

Pour Paul Stern, psychologue qui dirige la Commission sur les dimensions humaines du changement global au Nation Research Council de Washington, qui observe comment les gens consomment l’énergie chez eux, remarque qu’on s’intéresse souvent à une partie du problème alors qu’il se décompose en trois catégories : les activités humaines qui causent un changement environnemental, les impacts de ce changement sur les gens et les sociétés et les réponses à ces conséquences.

 

La plupart des recherches du Cred portent sur les réponses humaines au changement climatique, ce qui semble d’autant plus pertinent, car l’hostilité ou l’indifférence au changement climatique peut générer une boucle de rétroaction qui renforce le processus de réchauffement de la planète.

 

FAUDRA-T-IL ATTENDRE UN PEARL HARBOR CLIMATIQUE ?

 

Anthony Leiserowitz, un membre du Cred, qui dirige le projet de l’université de Yale sur les changements climatiques, a travaillé sur la perception du changement climatique par les Américains. Et les conclusions qu’il en tire sont claires : la plupart des Américains pensent que le changement climatique est un problème lointain, dans le temps et l’espace. “Mais en Alaska, on constate déjà la fonte du Permafrost, la poussée de la mortalité des arbres liée à la prolifération des insectes et la fonte des glaces.”

 

Notre société est-elle capable d’agir de manière décisive sur le réchauffement de la planète tant qu’elle ne connaîtra pas un “Pearl Harbor” climatique, comme le prophétise le blogueur Joe Romm, ancien responsable du département de l’énergie américain ? Parce que nous sommes plus à même de répondre à un stimulus émotionnel qu’à un risque que nous traitons analytiquement et autour duquel les incertitudes sont nombreuses. Mais là encore, il faudrait qu’on puisse attribuer ce Pearl Harbor au changement climatique, ce qui n’est pas aussi évident comme le montre ce qui est arrivé à La Nouvelle Orléans détruite par le cyclone Katrina.

 

Dans quelle mesure l’expérience canadienne pourrait-elle éclairer les mentalités ? Leiserowitz a voyagé à travers toute l’Alaska pour mesurer l’état de perception du changement climatique pour constater que celui-ci était plus limité en zone urbaine qu’en zone rurale, montrant que la population de l’Alaska n’était finalement pas plus inquiète que l’américain moyen quant au changement climatique, quand bien même il pourrait en constater les premiers effets à quelques kilomètres de chez elle. La moitié de la population étudiée considérait que le changement climatique était un problème à long terme qui exigeait une étude plus approfondie avant d’agir… L’expérience du changement climatique est une expérience relative et il n’est pas si simple de faire prendre conscience d’un sentiment d’urgence.

 

Richard Thaler et Cass Sunstein dans leur livre Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness (que l’on pourrait traduire littéralement par Coup de coude pour améliorer la décision sur la richesse, la santé et le bonheur) optent pour une stratégie de l’incitation (comme nous l’expliquait Rémi Sussan). Plutôt qu’imposer des règlements, il vaudrait mieux inciter les citoyens à choisir les meilleures options en leur proposant des solutions qui contournent notre inertie en satisfaisant notre volonté à court terme.

 

En Oregon par exemple, un programme d’aide à l’isolation des maisons et des fenêtres - assez proche de celui qu’Obama voudrait développer au niveau fédéral - a réussi à s’imposer en passant par une mobilisation active des conseils de citoyens, des enfants, des scouts qui ont fait du porte à porte pour que les gens y souscrivent. Résultat : 85 % des maisons du comté ont été rénovées. “Ce qui a marché a été de crééer un sentiment que nous étions tous dans le même bateau et que vous étiez un cas social si vous ne nous rejoigniez pas”, explique l’un des promoteurs de la solution. Les sénateurs américains comme les citoyens sont prêts au changement “s’il est facile, populaire et enrichissant”.

 

Reste à savoir si nous voulons utiliser les outils de la science de la décision pour essayer d’orienter les choix des gens… Pour Elke Weber, la piste à suivre est certainement là : il faut construire de nouvelles méthodes pour faire que nos préférences correspondent aux meilleurs choix à long terme. Comme elle l’expliquait dans la revue Climatic Change lors d’un article expliquant les raisons psychologiques liées au fait que le changement climatique ne nous effrayait pas : ce sont les preuves concrètes du réchauffement de la planète et son potentiel de conséquences dévastatrices qui seront les plus efficaces pour convaincre les gens. “Malheureusement, ces leçons risquent d’arriver trop tard pour prendre des mesures correctives.”

 

Par Hubert Guillaud pour lemonde.fr

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22 septembre 2014 1 22 /09 /septembre /2014 08:39

Eh oui ! Jeunesse s’est passée et le temps file vite... A mi-vie, hommes et femmes font le bilan. Une remise en question psychologiquement douloureuse, parfois brutale, mais souvent bénéfique.

 

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Il vient un jour où votre fils vous rétame lamentablement au tennis, où les passants qui admiraient d’ordinaire votre chute de reins se retournent sur les charmes naissants de votre adolescente, où une rencontre de hasard révèle les premiers fléchissements de votre virilité… Quand ce n’est pas un événement plus dramatique encore infarctus, licenciement, divorce, décès des parents, qui vous rappelle, de façon cruelle, que jeunesse se passe. Autant d’éléments perturbateurs susceptibles de déclencher ou d’amplifier, quand on atteint la barre fatidique des 40-50 ans, une profonde remise en question de soi-même. Parfois délétère, souvent bénéfique.

  

Maintenant ou jamais !

 

80 % des personnes de cette classe d’âge seraient concernées, selon le Dr Gilbert Tordjman, sexologue. Outre-Atlantique, on appelle ce tournant de la vie middle life crisis. Traduisez : « crise de milieu de vie ». Elle peut s’exprimer par une simple déprime passagère, ou entraîner des troubles psychologiques conséquents. Selon certains chercheurs américains, cette crise surviendrait entre 37 et 48 ans. En fait, on constate qu’elle se manifeste à la fois de plus en plus tôt et de plus en plus tard.

 

D’une part, la société n’imposant plus de modèle d’existence, chacun doit inventer beaucoup plus tôt un rapport à soi ou aux autres original. D’autre part, bien souvent, les pressions de la vie sociale et un emploi du temps surchargé empêchent de se poser des questions fondamentales avant 55 ans.Qu’est-ce qui caractérise cette crise par rapport aux précédentes ? « Tout simplement, l’idée que c’est maintenant ou jamais », explique le Dr François Lelord, psychiatre. Le compte à rebours a commencé, on a le sentiment qu’il faut agir maintenant, avant qu’il soit trop tard. D’où des réactions parfois surprenantes. Un quinqua sans histoires sera brutalement frappé par le démon de midi, une épouse modèle abandonnera son foyer pour les beaux yeux d’un galant de passage, une autre choisira, à la veille de la ménopause, d’engendrer un dernier enfant...

 

Du sens au non-sens

 

«A cette époque, j’ai eu une élève jeune, belle et intelligente, j’en ai été très amoureux et j’ai failli quitter femme et enfants.» Nombre d’hommes sont prêts à témoigner, sous le sceau du secret, de cette soudaine pulsion qui, à l’orée de l’âge mûr, les a entraînés dans un tourbillon de passion dont l’intensité les a surpris. L’inverse est aussi vrai. Ainsi Jacques, philosophe, le verbe haut, la faconde méditerranéenne, jouisseur invétéré «pour tromper l’ennui» : «A force de pratiquer le sexe à gogo, j’étais devenu cynique. Je confondais le plaisir et le bonheur. »

 

A 50 ans, il découvre la vie : «Je suis tombé sur plus fort que moi. J’ai voulu conquérir une fille, mais elle m’a rejeté... Parce que je vivais depuis l’adolescence dans le non-sens, j’ai décidé de fabriquer du sens...» Aujourd’hui, il est marié et père de famille. «Certains doivent penser que je suis un vieux con. Mais je m’en moque. J’ai renoncé à mon ego. Je n’exige plus rien. Je vis tranquille.»

 
Pour l’homme, la quarantaine, c’est l’apogée. Il est au top de sa carrière professionnelle, de son pouvoir, de ses capacités financières. Tout va bien... jusqu’au jour où il commence à se poser des questions, souvent à la faveur d’un événement déclencheur.

 

Les hommes deviennent des existentialistes

 

«J’avais deux emplois et je trouvais ça génial. J’ai perdu le second d’un seul coup, explique Patrick, 39 ans. Avant, je me serais dit : “Ce n’est pas grave, on va se relever.” Là, c’est peut-être l’âge, mais j’ai le sentiment que cette crise va beaucoup plus loin. Elle m’oblige à repenser mon mode d’existence, à ne plus foncer, à ne plus éluder les vraies questions. Aujourd’hui, je me demande si mon équilibre de jadis n’était pas bancal : faut-il vraiment deux boulots pour se sentir bien dans sa peau ?» Patrick se cherche. «J’ai été bien secoué», avoue-t-il. C’est pourquoi il vient de s’engager sur le chemin d’une meilleure compréhension de lui-même.

 

Chez l’homme, ce sont en effet souvent les difficultés professionnelles, la crainte d’un licenciement, l’approche de la retraite ou les premiers problèmes de santé qui suscitent un questionnement métaphysique. Bien souvent, il se rend compte que ses idéaux valables à 20 ans ne le sont plus à 40, et qu’il faut réajuster le tir. L’homme de 40-50 ans se retrouve au carrefour de deux générations : celle de ses enfants, à qui il n’est plus indispensable, et celle de ses parents, dont il devient responsable.

 

«Le midi de la vie est l’instant du déploiement extrême, où l’homme tout entier est à son œuvre avec tout son pouvoir et tout son vouloir, mais c’est aussi l’instant où naît le crépuscule», écrit Jung. Décès d’un parent ou d’un ami, infarctus d’un collègue, la mort entre par effraction dans la vie. C’est l’époque où «chaque homme devient un existentialiste», affirme ainsi Gilbert Tordjman.

  

Les femmes et le syndrome du nid vide

 

Et les femmes ? A l’aube de la cinquantaine, beaucoup de femmes font une «crise de féminisme» et rejettent les valeurs qu’elles respectaient jusqu’alors, constate François Lelord : «Une femme dotée d’un austère sens du devoir, qui a consacré toute son existence aux autres, va tout à coup s’interroger : “Où est mon plaisir dans tout cela ?”» Néanmoins, on a le sentiment que les femmes sont moins concernées que les hommes. En fait, chez elles, la crise de milieu de vie ne survient ni au même âge, ni pour les mêmes raisons.

 

A 50 ans, pour une femme, il est déjà trop tard. Elle ne peut plus envisager une nouvelle vie féconde et elle manque de modèles d’identification. «Même si nous avons quelques femmes au gouvernement, ce sont des hommes de 50 ou 60 ans qui détiennent le pouvoir politique et économique, remarque le Pr Quentin Debray, auteur de Les personnalités pathologiques (Masson, 1997) et de  L'idéalisme passionné (PUF, 1989). Chez une femme, la cinquantaine est associée à la stérilité et au vieillissement.» 

 

La femme, plus intérieure, davantage centrée sur la vie affective et sur ses enfants, vivra douloureusement la perte de sa fécondité – souvent associée à une perte de féminité – ainsi que le départ de ses enfants du foyer. «C’est ce qu’on appelle le “syndrome du nid vide”, explique le Pr Alain Braconnier, spécialiste de l’adolescence. Des femmes qui ont renoncé à leur vie professionnelle pour élever leurs enfants se retrouvent face à elles seules... et à la dépression.»

  

Une vraie crise “parentale”

 

La crise de milieu de vie, c’est aussi une «crise parentale». «Face à un enfant qui atteint sa maturité sexuelle, les parents développent inconsciemment une rivalité, manifestée par la jalousie ou par un désir de séduire, poursuit le Pr Braconnier. Parallèlement, les enfants rejettent les rêves et les espoirs que les parents ont projetés sur eux. Cela entre en résonance avec les blessures narcissiques que la vie inflige aux parents.»
Roger se souvient : "Quand mes fils sont partis, l’un pour les Etats-Unis, l’autre pour suivre des études de médecine, et que j’ai compris que je ne pourrais pas leur transmettre l’entreprise familiale, j’ai failli tout abandonner. En plus, ma femme abordait la ménopause. Elle était devenue irascible. Je n’en pouvais plus... J’ai été jusqu’à envisager une séparation pour entrer dans les ordres."

 

Certains passent le cap sans heurt

 

Heureusement, le monde ne s’écroule pas toujours sur les épaules des 40-50 ans. Christine, 48 ans, sans enfants, une vie réglée comme un métronome, ne se rappelle pas avoir connu les affres d’une remise en question métaphysique. Pourtant, ses dernières années ont été rythmées par des ruptures : ménopause précoce, décès du compagnon, dépistage d’un cancer chez son père. "Bien sûr, ce sont des deuils difficiles à vivre. Mais j’ai toujours su que j’étais de passage, que rien de ce que je construisais n’était éternel."

 

Une philosophie de la vie cultivée au fil des ans : travaillant dans une unité de polytraumatisés, Christine a toujours côtoyé la mort. Les drames confrontent la personne à la réalité. «J’ai vu des gens qui, après un infarctus, ont totalement modifié leur existence, souligne le Pr Debray. Ils ont consacré moins de temps à leur travail, davantage à leur famille, se sont découvert de nouvelles passions. Ils sont devenus plus créatifs.»
«Il y a aussi ceux qui traversent la mi-vie en niant la crise. En continuant, par exemple, au même régime, volontaires et hyperactifs jusqu’à l’épuisement, oubliant leur vie personnelle et familiale, note Christian Gaillard, psychanalyste. D’autres encore parient sur les lendemains qui chantent et forment des projets utopistes. Il y a surtout tous ceux qui compensent par le repli et le passéisme.»

  

De la réalisation de ses désirs à la réalisation de soi

 

Refuser la réalité, c’est risquer qu’elle s’impose avec d’autant plus de violence. Alors que, à l’inverse, accepté, réfléchi, mûri, le midi de la vie est le moment idéal pour passer de la période de réalisation des désirs, si abondamment décrite par Freud, à la réalisation de soi, chère à Jung: «Ce peut être un véritable renversement, car la réalisation de soi exige le renoncement à certains désirs.»

 
Avant 40 ans, Freud n’avait guère effectué que des recherches sur la cocaïne. Ce n’est qu’à 44 ans qu’il publie son “Interprétation des rêves” et devient le grand Sigmund Freud. Bach, lui, a composé ses plus grandes œuvres une fois nommé à Leipzig, à 38 ans. Beckett a quitté sa mère et son Irlande natale aux alentours de 40 ans et n’est devenu écrivain qu’à 46 ans, en arrivant à Paris. C’est aussi l’âge où Marx jette les premières bases de son “Capital”. Goya, Gauguin, Wagner, Monet, Hugo, Verdi, Rameau, et bien d’autres, ont attendu la maturité avant de produire leurs plus beaux chefs-d’œuvre.

 
Des œuvres plus intenses, plus profondes que leurs créations de jeunesse. « Il n’y a rien de comparable entre le jaillissement spontané de la musique de Mozart, qui procure une jouissance immédiate, et les opéras de Wagner », note Quentin Debray, pour qui la seconde partie de la vie est propice à la conceptualisation, à la réflexion.

  

Rééquilibrer sa vie et passer le flambeau

 

Pour tous ceux qui passent ce cap avec succès, l’âge mûr conduit à une autre façon d’être à soi et aux autres. Y compris en amour. On ne séduit plus forcément par son corps, par des regards troublants, mais par son discours, sa culture, sa gentillesse, son écoute. Le midi de la vie est l’occasion idéale de rééquilibrer sa vie amoureuse. Le Dr René Baux, sexologue, insiste : la quarantaine est la période d’épanouissement sexuel pour la femme. C’est l’heure de l’émancipation, tant sexuelle que sociale, où elle renforce sa confiance en elle et, donc, son autorité. L’homme, lui, accepte sa part féminine, son « anima ». Il se réconcilie avec lui-même et s’ouvre davantage aux autres.

 

Roger, soutenu par un groupe de prière pendant la longue maladie de son épouse, confirme : « Toute ma vie, le seul homme que j’aie jamais embrassé, c’est mon père. Mais avec retenue. Ici, on se touche, on se tutoie, et cette proximité des corps rend plus facile la proximité des âmes. » Il n’est pas rare que ce tournant de la vie soit l’occasion d’entreprendre, sous la conduite d’un professionnel, un retour sur soi. « La majeure partie des analyses débute vers 40 ans », confirme Christian Gaillard.

 

Et ce sont souvent les plus riches. La mi-vie est également l’occasion de passer le témoin à la génération suivante. L’être humain prend conscience que ce qu’il a réussi est limité, mais que, peut-être, ses enfants iront au-delà. Qu’il est temps pour lui de s’engager dans un processus d’individuation : penser à lui, être lui, devenir enfin ce qu’il est vraiment. Qu’il est temps de créer son propre cheminement, de trouver sa juste place. Ce n’est pas la perte des illusions, c’est le réajustement de l’illusoire.

 

Témoignage

 

“Depuis ma seconde naissance, je suis un homme en marche”

 

Jean-Marie, sexagénaire, divise sa vie en deux : « Jusqu’à 40 ans, ma vie a été un long sommeil. Mais, depuis ma seconde naissance, je suis un homme en marche. » Un mariage brillant, trois jeunes enfants, un poste à responsabilité... A 39 ans, tout se défait : son épouse le quitte, son agence de pub dépose son bilan, son père décède, lui-même échappe de peu à un grave accident de voiture. Alors, il part en quête de lui-même : il pratique le yoga et s’initie à l’astrologie. « Peu à peu, j’ai pris conscience que ce que je faisais dans la pub était le contraire de ce que je considérais comme essentiel : l’homme. J’ai alors commencé une psychanalyse, puis j’ai créé avec un psychiatre un centre de bilans dans le sud de la France. »

 

Le grand tournant, c’est un peu plus tard, quand il rencontre Dürckheim, à 55 ans : « Je me suis mis à devenir conscient, lucide, artisan de mon existence, que j’avais trop longtemps vécue poussé par la volonté paternelle. » La crise de milieu de vie s’est traduite pour Jean-Marie par une rupture brutale, mais qui, selon lui, s’est passée dans la continuité : « Déjà, quand j’avais 5 ans, j’avais déclaré : “Un jour, je serai moine-portier.” C’est un peu ce que je suis aujourd’hui : je fais l’interface entre le monde extérieur et le monde essentiel. »

  

L’avis de Gérard Mermet

 

Dur de changer de génération !

 

Gérard Mermet, sociologue, redoute que la crise de milieu de vie ne soit de plus en plus apparente. D’abord, parce que nous vivons dans une société qui demeure adolescente. Or les personnalités les plus vouées au culte de la jeunesse abordent l’âge mûr avec de nombreux handicaps. Ensuite, parce que le temps de la réussite est de plus en plus court : « Avant 30 ans, vous êtes rejeté par le monde de l’entreprise car vous êtes inexpérimenté ; après 45 ans, vous n’êtes plus bon. »

 

Pourtant, l’idée qu’au-delà d’un certain âge on ne serait plus créatif relève du mythe. « La créativité est au carrefour de nos expériences. Pour une meilleure efficacité des entreprises, il faudrait au contraire jouer sur l’hétérogénéité des générations. » Avant, chaque âge avait une fonction. Aujourd’hui, seule la jeunesse est célébrée. La crainte du déclin, dans un monde qui récuse la mort et oublie la personne âgée, rend cette crise d’autant plus violente. Sous d’autres latitudes, vieillir, c’est acquérir la sagesse et le respect. En Occident, c’est la décrépitude.

 

Nouvelle hypothèse

 

Et si la crise de milieu de vie était liée au vieillissement de notre cerveau ? C’est l’hypothèse émise récemment par un groupe de chercheurs, sous l’égide d’un grand laboratoire français. Le syndrome a même reçu un nom : déficit neurobiologique de la cinquantaine, ou DNBC. « Nous avons étudié les liens entre la dopamine, qui est plus ou moins le substrat du désir, et le vieillissement », explique le neurobiologiste Jean-Didier Vincent. 

 

A la fin des années 80, un colloque évoquait pour la première fois cette nouvelle pathologie caractérisée, selon un des orateurs, par « des difficultés de concentration, des difficultés à rassembler ses idées et à les exprimer clairement, ainsi qu’à prendre des décisions, une baisse des capacités intellectuelles, un défaut de performance, des difficultés à faire des projets d’avenir, une perte d’intérêt pour ses tâches habituelles, une diminution des contacts sociaux, un manque d’entrain, une grande fatigabilité ». Or les chercheurs avaient noté que ces symptômes étaient souvent associés à un déficit précoce de certains neurotransmetteurs, dopaminergiques en particulier. Diverses études ont, depuis, confirmé le rôle fondamental de la dopamine dans de très nombreux processus cérébraux, sans pour autant prouver que la crise de la cinquantaine serait la conséquence directe de ces carences. A suivre.

 

Cendrine Barruyer pour Psychologies.com

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16 septembre 2014 2 16 /09 /septembre /2014 13:16

La stasis est aujourd'hui un fait bien implanté, avec pour conséquences un quotidien difficilement supportable sur le plan des relations sociales, où domine la suspicion entre les communautés, entre les citoyens d'un coté et les décideurs de l'autre.

 

 

Sous l'angle de la psychanalyse et de la sociologie, je lance un appel en faveur du vivre ensemble et d'un devenir centré autour de l'interdisciplinarité. Un mea-culpa concernant l'autisme sera également tenté, probablement pour la première fois. Son but est clairement d'apaiser les esprits afin d'éviter des amalgames souvent porteurs d'idéaux radicaux et haineux. La psychanalyse a ses lettres de noblesse qu'il s'agit de sauver d'une opinion publique souvent faussée, débridée et illogique. J'interviens dans cette vidéo pour prouver que la stasis peut encore être jugulée... avec de l'indulgence et une attention rigoureuse, il est possible de recréer ce que Simondon appelle "du transindividuel" au sein de la société française, bien malade !

 

 

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14 septembre 2014 7 14 /09 /septembre /2014 12:40

Dormir moins pour consommer plus : c'est le XXIe siècle qui s'annonce dans "le Capitalisme à l'assaut du sommeil", de Jonathan Crary. Extraits et analyse d'un projet fourbe et contre nature...

    

"Orange Mécanique" de Stanley Kubrick (Sipa) "Orange Mécanique" de Stanley Kubrick (Sipa)

 

 Et si les bras doux et enveloppants de Morphée étaient au XXIème siècle l’ultime refuge face au cauchemar marketing et publicitaire? Dans un essai hardi tout juste traduit en français, «le Capitalisme à l’assaut du sommeil» (Zones-La Découverte), Jonathan Crary, professeur à l’université de Columbia, explique en quoi  passer une partie de notre vie à dormir serait au fond «le dernier affront fait à la voracité du capitalisme contemporain.» 

 

Le rythme des marchés financiers 24h/24 et 7j/7 serait en train de coloniser non seulement l’esprit humain mais surtout son repos. Dans un monde où l’on se lève désormais la nuit pour consulter ses mails, Homo connecticus,  à l’image de sa quincaillerie high tech, demeure en mode veille y compris la nuit, tandis qu’aux Etats-Unis s’invente en laboratoire l’homme sans sommeil, celui qui pourra consommer jour et nuit, dans une planète globale conçue comme un vaste supermarché. La fabrique de l’insomniaque est en marche. Grinçante dystopie ou lucidité ?

 

 

Jonathan Crary, auteur du
"Capitalisme à l'assaut du sommeil"
(DR)


EXTRAITS

Le bruant à gorge blanche

Quiconque a vécu sur la côte ouest, en Amérique du Nord, le sait sans doute: des centaines d’espèces d’oiseaux migrateurs s’envolent tous les ans à la même saison pour parcourir, du nord au sud et du sud au nord, des distances d’amplitude variable le long de ce plateau continental.

 

L’une de ces espèces est le bruant à gorge blanche. L’automne, le trajet de ces oiseaux les mène de l’Alaska jusqu’au Nord du Mexique, d’où ils reviennent chaque printemps. À la différence de la plupart de ses congénères, cette variété de bruant possède la capacité très inhabituelle de pouvoir rester éveillée jusqu’à sept jours d’affilée en période de migration. Ce comportement saisonnier leur permet de voler ou de naviguer de nuit et de se mettre en quête de nourriture la journée sans prendre de repos.

 

Ces cinq dernières années, aux États-Unis, le département de la Défense a alloué d’importantes sommes à l’étude de ces créatures. Des chercheurs de différentes universités, en particulier à Madison, dans le Wisconsin, ont bénéficié de financements publics conséquents afin d’étudier l’activité cérébrale de ces volatiles lors de leurs longues périodes de privation de sommeil, dans l’idée d’obtenir des connaissances transférables aux êtres humains.

 

On voudrait des gens capables de se passer de sommeil et de rester productifs et efficaces. Le but, en bref, est de créer un soldat qui ne dorme pas. L’étude du bruant à gorge blanche n’est qu’une toute petite partie d’un projet plus vaste visant à s’assurer la maîtrise, au moins partielle, du sommeil humain.

 

À l’initiative de l’Agence pour les projets de recherche avancée de défense du Pentagone (DARPA), des scientifiques mènent aujourd’hui, dans plusieurs laboratoires, des études expérimentales sur les techniques de l’insomnie, dont des essais sur des substances neurochimiques, la thérapie génique et la stimulation magnétique transcrânienne.

 

L’objectif à court terme est d’élaborer des méthodes permettant à un combattant de rester opérationnel sans dormir sur une période de sept jours minimum, avec l’idée, à plus long terme, de pouvoir doubler ce laps de temps tout en conservant des niveaux élevés de performances physiques et mentales.

 

Jusqu’ici, les moyens dont on disposait pour produire des états d’insomnie se sont toujours accompagnés de déficits cognitifs et psychiques indésirables (un niveau de vigilance réduit, par exemple). Ce fut le cas avec l’utilisation généralisée des amphétamines dans la plupart des guerres du XXe siècle, et, plus récemment, avec des médicaments tels que le Provigil. Sauf qu’il ne s’agit plus ici, pour la recherche scientifique, de découvrir des façons de stimuler l’éveil, mais plutôt de réduire le besoin corporel de sommeil. (…)

 

Des soldats britanniques, au Kosovo, en 1999 (AFP/ImageForum)

Le travailleur sans sommeil

C’est dans cette perspective que l’on a cherché à étudier les bruants à gorge blanche, en les coupant des rythmes saisonniers qui sont les leurs dans l’environnement de la côte pacifique: à terme, il s’agit d’imposer au corps humain un mode de fonctionnement machinique, aussi bien en termes de durée que d’efficacité.

 

Comme l’histoire l’a montré, des innovations nées dans la guerre tendent nécessairement ensuite à être transposées à une sphère sociale plus large: le soldat sans sommeil apparaît ainsi comme le précurseur du travailleur ou du consommateur sans sommeil. Les produits «sans sommeil», promus agressivement par les firmes pharmaceutiques, commenceraient par être présentés comme une simple option de mode de vie, avant de devenir, in fine, pour beaucoup, une nécessité.

 

Des marchés actifs 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, des infrastructures globales permettant de travailler et de consommer en continu – cela ne date pas d’hier; mais c’est à présent le sujet humain lui-même qu’il s’agit de faire coïncider de façon beaucoup plus intensive avec de tels impératifs.

 

À la fin des années 1990, un consortium russo-européen annonça son intention de construire et de lancer des satellites capables de capter la lumière du soleil pour la rediriger vers la terre. On prévoyait de mettre en orbite une chaîne de satellites, synchronisés avec le soleil à une altitude de 1700 kilomètres. (…)

 

Étant donné sa profonde inutilité et son caractère essentiellement passif, le sommeil, qui a aussi le tort d’occasionner des pertes incalculables en termes de temps de production, de circulation et de consommation, sera toujours en butte aux exigences d’un univers 24/7.

 

Passer ainsi une immense partie de notre vie endormis, dégagés du bourbier des besoins factices, demeure l’un des plus grands affronts que les êtres humains puissent faire à la voracité du capitalisme contemporain. Le sommeil est une interruption sans concession du vol de temps que le capitalisme commet à nos dépens.

 

La plupart des nécessités apparemment irréductibles de la vie humaine – la faim, la soif, le désir sexuel et, récemment, le besoin d’amitié – ont été converties en formes marchandes ou financiarisées. Le sommeil impose l’idée d’un besoin humain et d’un intervalle de temps qui ne peuvent être ni colonisés ni soumis à une opération de profitabilité massive – raison pour laquelle celui-ci demeure une anomalie et un lieu de crise dans le monde actuel.

 

"Fight Club", chef d'oeuvre insomniaque
de David Fincher (Sipa)

Etat d'urgence

Malgré tous les efforts de la recherche scientifique en ce domaine, le sommeil persiste à frustrer et à déconcerter les stratégies visant à l’exploiter ou à le remodeler. La réalité, aussi surprenante qu’impensable, est que l’on ne peut pas en extraire de la valeur.

 

Au regard de l’immensité des enjeux économiques, il n’est pas étonnant que le sommeil subisse aujourd’hui une érosion généralisée. Les assauts contre le temps de sommeil se sont intensifiés au cours du XXe siècle. L’adulte américain moyen dort aujourd’hui environ six heures et demie par nuit, soit une érosion importante par rapport à la génération précédente. (...)

 

Le régime 24/7 sape toujours davantage les distinctions entre le jour et la nuit, entre la lumière et l’obscurité, de même qu’entre l’action et le repos. Il définit une zone d’insensibilité, d’amnésie, qui défait la possibilité même de l’expérience. Pour paraphraser Maurice Blanchot, cela se produit à la fois après et «d’après» le désastre, c’est-à-dire un état qui se reconnaît à un ciel vide, où ne sont plus visibles aucun astre, aucune étoile ni aucun signe, où l’on a perdu tout repère, et où s’orienter est impossible.

 

Plus concrètement, c’est comme un état d’urgence: les projecteurs s’allument soudain au milieu de la nuit, sans doute en réponse à quelque situation extrême, mais personne ne les éteint jamais, et on finit par s’y habituer comme à une situation permanente.

 

La planète se trouve réimaginée comme un lieu de travail continu ou un centre commercial ouvert en permanence, avec ses choix infinis, ses tâches, ses sélections et ses digressions. L’insomnie est l’état dans lequel les activités de produire, de consommer et de jeter s’enchaînent sans la moindre pause, précipitant l’épuisement de la vie et des ressources.

 

Le sommeil, en tant qu’obstacle majeur – c’est lui qui constitue la dernière de ces «barrières naturelles» dont parlait Marx – à la pleine réalisation du capitalisme 24/7, ne saurait être éliminé. Mais il est toujours possible de le fracturer et de le saccager, sachant que, comme le montrent les exemples ci-des- sus, les méthodes et les mobiles nécessaires à cette vaste entre- prise de destruction sont déjà en place.

 

L’assaut lancé contre le sommeil est inséparable du processus de démantèlement des protections sociales qui fait rage dans d’autres sphères. De même que l’accès universel à l’eau potable a partout dans le monde été ravagé par une pollution et une privatisation programmée débouchant sur la marchandisation de l’eau en bouteille, il existe un phénomène similaire, aisément repérable, de construction de rareté eu égard au sommeil.

 

Tous les empiétements qu’on lui fait subir créent les conditions d’un état d’insomnie généralisé, où il ne nous reste plus à la limite qu’à acheter du sommeil (et ceci même si l’on paie pour un état chimiquement modifié qui n’est plus qu’une approximation du sommeil véritable).

 

Les statistiques sur l’usage exponentiel de somnifères montrent qu’en 2010, des composés médicamenteux tels que Ambien ou Lunesta ont été prescrits à environ 50 millions d’Américains, tandis que quelques millions d’autres achetaient des médicaments en vente libre.

 

Mais il serait faux de croire qu’une amélioration des conditions de vie actuelles pourrait permettre aux gens de mieux dormir et de goûter à un sommeil plus profond et réparateur. Au point où nous en sommes, il n’est même pas sûr qu’un monde organisé sur un mode moins oppressif parviendrait à éliminer l’insomnie.

 

L’insomnie ne prend sa signification historique et sa texture affective spécifique qu’en lien avec des expériences collectives qui lui sont extérieures, et elle s’accompagne aujourd’hui de nombreuses autres formes de dépossession et de ruine sociale qui se déroulent à l’échelle globale. En tant que manque individuel, l’insomnie s’inscrit aujourd’hui dans la continuité d’un état généralisé d’«absence de monde».

 

 

©Zones-La Découverte

24/ 7. Le Capitalisme à l’assaut du sommeil,
par Jonathan Crary
Traduit de l’américain par Grégoire Chamayou.
140 pages, 15 euros, éditions Zones-La Découverte.

 

Anne Crignon pour http://tempsreel.nouvelobs.com/

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8 septembre 2014 1 08 /09 /septembre /2014 14:08

Ils sont entre dix et quinze mille chaque année en France, jeunes ou moins jeunes, qui mettent fin à leurs jours. Et qui laissent derrière eux des parents, des enfants, des amours, des amis, des frères et soeurs, des collègues, effarés de n’avoir pas su, pas vu, pas compris, pas pu empêcher… Un suicide est toujours, pour ceux qui restent, le début d’un parcours long et douloureux, au cours duquel toutes les étapes du deuil, déjà si difficiles à vivre, s’alourdissent de sensations complexes, provoquées par cette disparition « pas comme les autres ». Enquête, et témoignages des proches d’Alexandre, 19 ans, disparu il y a deux ans.

 

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Le suicide met d’abord les proches en état de choc : comme pour un accident, la mort arrive sans prévenir et sans que l’on ait pu s’y préparer. En quelques instants, elle ravage tout et arrache chacun à sa vie du moment pour le précipiter dans une réalité terrible. À cette violence s’ajoutent le plus souvent une foule de « détails » concrets effroyables (la moitié des suicides ont lieu dans la maison et sont découverts par un proche, observe le psychiatre Christophe Fauré) et une enquête de police, obligatoire en cas de mort violente, qui vient elle aussi augmenter l’horreur de la situation. « Même si elles sont menées avec tact, ces investigations sont vécues par beaucoup de proches comme une agression supplémentaire », explique Christophe Fauré. La quête des familles, qui cherchent désespérément des indices dans les affaires du disparu, dure bien plus longtemps que l’enquête officielle. Qu’il ait ou pas laissé des explications ne change pas grand-chose : elles espèrent, pendant des années parfois, trouver des réponses introuvables. « C’est un long travail que d’accepter, finalement, de ne pas savoir », constate le psychiatre.

 

De la sidération à la colère

 

Une fois les premiers jours de sidération passés vient le temps de la colère, particulièrement compliquée à gérer. Comment s’emporter contre celui que l’on pleure ? Et puisque celui qui tue et celui qui est tué se confondent, qui peut-on haïr ? « Parfois, on retourne la colère contre soi, ou contre un tiers, parce que c’est moins douloureux », poursuit Christophe Fauré. D’autant que les proches ont le plus souvent à se débattre, aussi, avec un sentiment de culpabilité très complexe : il y a, bien sûr, la certitude de ne pas avoir été capable d’empêcher l’irréparable. Mais il arrive fréquemment que le suicide survienne après une longue période de malaise, qui a mis tout l’entourage à rude épreuve. Celui-ci peut alors se sentir aussi, d’une certaine manière, soulagé que « ce soit terminé » et coupable d’être soulagé. Parfois même honteux : si l’Église ne refuse plus d’enterrer les suicidés, mettre fin à ses jours a été longtemps, dans bien des cultures, un acte répréhensible dont les familles devaient supporter l’opprobre…

 

Briser le silence

 

Pour toutes ces raisons, faire le deuil de quelqu’un qui s’est suicidé est douloureux. Au coeur de leur souffrance, ceux qui restent ont souvent l’impression que personne, à part celui qu’ils pleurent, ne pourrait comprendre ce qu’ils endurent. Au point de renoncer à demander de l’aide, et même à en parler. Pourtant, la parole est un outil formidable et indispensable pour aller mieux. Des spécialistes, comme Christophe Fauré ou le psychiatre et psychanalyste Michel Hanus (auteur du Deuil après suicide in Études sur la mort n° 127 - L’Esprit du temps, 2005), se sont penchés sur ces deuils compliqués et ont appris à accompagner. Les associations proposent, elles aussi, un soutien et un espace de parole précieux. Mais si les parents, les conjoints et les enfants osent de plus en plus demander secours pour avancer dans leur deuil, les frères et soeurs, les amis et les collègues sont moins souvent accompagnés, et souffrent d’un isolement dont ils n’osent pas parler. Comme si leur douleur n’était pas aussi légitime. Pourtant, tous ceux qui ont fait le chemin le savent : c’est avec une aide appropriée et du temps que le deuil, même celui-là, se fait. Alors, la douleur finit par s’adoucir, et la vie redevient possible. Et belle, parfois.

 

La vie sans Alexandre

 

Alexandre avait 19 ans. Étudiant en électrotechnique, il vivait depuis deux ans une histoire d’amour houleuse et compliquée. Un dimanche après-midi de février 2007, il s’est pendu dans la chambre de ses parents. Quand son père l’a trouvé, il était dans le coma. Il est mort quatre jours plus tard, sans avoir repris connaissance. Ses parents, sa meilleure amie et sa soeur ont accepté de nous en parler.

 

Aurélie, sa grande soeur :

 

« C’est une énorme remise en question »

« Je ne savais pas que j’aimais mon frère à ce point-là. Je le découvre au fil de son absence. Mais je suis en rage contre lui aussi, parce qu’il nous a tous embarqués dans cet enfer. Sa mort est d’autant plus violente qu’il se l’est infligée, à lui et à nous… Depuis, tout est surréaliste. Six mois après la mort d’Alex, je me suis aperçue que j’étais enceinte de mon deuxième enfant. J’ai beaucoup pleuré, et j’étais inquiète pour ce bébé. Lui et son frère aîné vivent dans un deuil permanent. C’est comme si mes fils étaient la seule “vie” de cette famille; c’est lourd, pour eux. On est là, tous ensemble, mais chacun vit son deuil de son côté et avance comme il le peut. Mon mari, lui, refuse de parler de tout ça. Je respecte son silence, je sais qu’il lui faut du temps. Je prends soin de mes parents, du mieux que je peux. J’essaie de sortir maman de là, tout en sachant que ce n’est pas possible. Mais je ne m’imagine pas les laisser tant qu’ils ne peuvent pas tenir seuls. Et je ravale mon chagrin, parce qu’il faut avancer. J’ai été suivie par un psy jusqu’à mon accouchement. Je sais que je devrai y retourner, à un moment ou à un autre. On se disputait beaucoup avec Alex. Je n’en parle jamais, parce que c’est personnel, mais un jour, quelqu’un m’a dit : “Si tu avais été plus gentille avec ton frère…” J’espère que je n’y suis pour rien, mais comment en être sûre? C’est une énorme remise en question. Je crois qu’il va me falloir encore du temps pour pouvoir avancer. Beaucoup de temps. »

 

Dominique, son père :

 

« Je me cache pour pleurer »

« Je suis sûr que le jour où c’est arrivé, Alex espérait qu’on pourrait le sauver. Mais je l’ai trouvé trop tard. Depuis, j’ai dans la tête cette image atroce. Elle revient par flashs, nuit et jour. Je me repasse les événements en essayant de savoir comment j’aurais dû faire pour que cela n’arrive pas. On se pose des questions en boucle. Et on n’a pas les réponses… À l’enterrement d’Alex, l’église était pleine. Je n’aurais jamais pensé qu’autant de gens l’aimaient. Lui non plus, si ça se trouve. J’ai découvert toute une partie de sa vie que je ne connaissais pas. J’ai découvert la haine, aussi, pour cette fille qui l’a rendu fou de douleur. C’est un sentiment nouveau pour moi, et irréversible, avec lequel je vais devoir vivre jusqu’à la fin de mes jours! À l’hôpital, nous avons rencontré un psy qui nous a dirigés vers l’association d’aide aux “endeuillés” Phare. J’y suis allé sans conviction, surtout pour accompagner ma femme. Mais cela m’a fait beaucoup de bien. En partageant avec d’autres parents, on se sent moins seuls, on apprend de leur expérience. Cela n’empêche pas que ce soit très dur. J’arrive à me contenir en famille, mais je me cache pour pleurer. Beaucoup de couples cassent; nous, on tient le coup. On parle beaucoup d’Alex, rarement de notre chagrin. Pour en dire quoi ? Je ne sais pas si un jour j’accepterai. J’y pense tout le temps. La seule chose qui me fait un peu de bien, c’est de savoir que les organes de mon fils ont servi à sauver une vie. Et de voir grandir mes petits-fils. Mais sans leur oncle… »

 

Michèle, sa mère :

 

« Je passe mon temps dans les “si” et les “pourquoi” »

« Jamais je n’aurais imaginé vivre un tel drame. On ne donne pas la vie à un enfant pour qu’il n’en veuille plus. Avec Alex, j’étais une mère très protectrice. Trop, sans doute. Il a grandi dans un monde où l’amour ne peut pas faire mal. Le jour où il a fait cela, j’ai vu qu’il n’allait pas bien. Quand il est monté à l’étage, j’aurais dû le suivre, aller parler avec lui. Mais je ne voulais pas l’accaparer, l’étouffer… On a fait tout ce qu’on a pu, mais on a été impuissants. Je passe mon temps dans les “si” et dans les “pourquoi”. Il savait qu’on l’aimait et qu’il pouvait compter sur nous à cent pour cent. Mais on ne saura jamais ce qui s’est passé exactement ce jour-là : il n’a rien laissé pour expliquer… Depuis, c’est une torture incessante. Il ne pouvait pas imaginer qu’il nous mettrait dans une telle douleur. J’ai voulu prendre sur moi, mais, au printemps dernier, mon corps a lâché : j’ai fait une crise d’épilepsie. C’est difficile de tenir à l’extérieur quand on est détruite à l’intérieur. Il m’a fallu six ou sept mois pour réaliser qu’Alex ne reviendrait pas. Jamais. Alors j’ai compris que je devais prendre mon temps, pour m’habituer à cette nouvelle vie sans lui. C’est comme cela : il n’est plus là. Tout est incroyablement dur. Rien ne console, même si nous sommes très soutenus. Je sais pourtant que je vais arriver à traverser l’épreuve. Je vais moins mal. Je suis submergée, mais je ne me noie pas. J’avance dans mon deuil, pas à pas. Mais je suis amputée de lui. À vie. »

 

Priscilla, sa meilleure amie :

 

« Ça me met tellement en colère, parfois »

« Alex était mon meilleur ami. Mon seul ami même, quand j’y pense. Il n’y a personne d’autre dont je sois aussi intime. On se parlait pratiquement tous les jours. Et il ne parlait presque que de cette fille : elle le rendait malheureux, tout le temps… J’ai souvent réussi à lui ouvrir les yeux, mais il finissait toujours par retomber dans ses griffes. Une fois déjà, il s’était tailladé le poignet. Je crois que je suis la seule à le savoir. On avait discuté des heures et des heures, et il m’avait promis de ne jamais recommencer, et de m’appeler en cas d’urgence. Il ne l’a jamais fait. Il est parti comme cela, sans rien me dire. Et depuis, tout s’est arrêté. Ça me met tellement en colère, parfois… J’ai décroché de mes études de médecine. Il y a trop de choses qui se bousculent dans ma tête, je n’arrive plus à me concentrer. C’est comme si tout ce que je savais avait disparu. J’essaie de reprendre le cours de ma vie, mais la douleur est trop intense. La dernière fois que j’ai vu Alex, il m’a serrée très fort dans ses bras. Bien plus fort que d’habitude. Ce souvenir ne me quitte pas. Je me demande si c’était un signe que je n’ai pas compris. Je sais que je devrais en parler à mon médecin, mais je n’y arrive pas. Je ne pense pas que quelqu’un puisse m’aider. Je n’étais ni la petite amie d’Alex ni quelqu’un de sa famille. Pourtant, il me manque énormément. Même mon amoureux, je crois qu’il ne comprend pas que je puisse autant souffrir de l’absence d’Alex… Ce qui me fait le plus mal est de n’avoir eu ni le temps ni le droit de lui dire au revoir. »

 

Où trouver de l'aide ?

 

L’association Vivre son deuil a publié un livret en collaboration avec le psychiatre et psychanalyste Michel Hanus, pour aider les personnes endeuillées à la suite d’un suicide : il est téléchargeable gratuitement sur www.deuilapressuicide.fr. Elle propose aussi un accompagnement et des groupes de parole partout en France : vivresondeuil.asso.fr et 01 42 08 11 16.

Le site Traverser son deuil, conçu par le psychiatre Christophe Fauré, propose aussi un soutien spécifique, avec des informations pratiques (démarches à accomplir, associations…) et, première sur Internet, un véritable accompagnement sur la durée : traverserledeuil.com.

L’association Phare accueille plus spécialement les parents d’adolescents : phare.org et 08 10 81 09 87.

 

  Source: Valérie Péronnet pour Psychologies.com

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8 septembre 2014 1 08 /09 /septembre /2014 09:25

Voici l'article de presse UPL pour l'année 2014-2015, paru récemment, suivi du cours précédent en psychosociologie, bonne découverte à tous et venez nombreux pour écouter et dialoguer avec nos experts, professeurs et intervenants...

 

UPL est republicain 09.14

 

Voir le programme complet : cliquez ici

 

 

"Le cours précédent de l'université populaire traite de la maturité et des conditions de l'obtention de la maturation chez un individu, depuis son enfance jusqu'à l'état adulte... Un processus de développement souvent interrompu." par Mr. Trommenschlager - psychanalyste.

 

 

Quatre phases seront principalement abordées :


- Psychologie des foules (en préambule)
- Sécurité et développement
- Les apprentissages informels
- Le choc des grandes questions existentielles

 
---------------------

 
Annexe: Maturité et majorité

   
Au premier abord, il signifie l'achèvement d'une croissance. Or cet achèvement lui-même s'exprime par deux mots qui ne sont pas synonymes: maturité et majorité. La maturité, concept biologique et, par extension, psychologique, signifie l'état d'un organisme qui a atteint son plein développement; le signe le plus clair en est l'aptitude à la reproduction. La majorité, concept d'ordre juridique et social, est l'âge légal où l'on attribue à l'être humain l'entière responsabilité de ses actes, ainsi que les droits qu'elle implique; être majeur, c'est être homme ou femme à part entière, c'est pouvoir exercer les rôles essentiels à la vie sociale, dont les principaux sont le mariage, le métier, la citoyenneté, le plein usage de ses biens et pour l'homme, le service militaire. Il va de soi que l'âge de la maturité n'est pas toujours identique à la majorité; dans nos sociétés industrielles, l'âge où l'on peut exercer un métier, l'âge de la production est nettement postérieur à celui de la reproduction; et Rousseau voyait déjà dans ce décalage une des grandes sources de nos misères. Quant à la maturité psychologique, cette sûreté de jugement qu'on n'acquiert que par une longue expérience, elle n'arrive que fort tard, parfois même jamais.
 
Différents l'un de l'autre, ces deux concepts sont, chacun, relatifs. La maturité biologique varie avec les époques et les climats. Quant à la majorité, chaque civilisation et même chaque période de l'histoire la déterminent à leur manière. Dans les sociétés archaïques, l'accès à l'état adulte ne va pas de soi; l'individu doit authentifier son changement d'âge par des rites de passages, épreuves douloureuses et dangereuses, qui symbolisent à la fois la mort de l'enfant et la naissance de l'homme. Si, dans notre civilisation, les rites de passages (examens, initiations, service militaire, etc.) sont moins précis, il reste que l'état adulte est déterminé par un code, juridique ou moral; comme le dit Philibert, l'échelle des âges n'est jamais un tapis roulant. Il faut passer à l'âge adulte, et ce passage n'est pas garanti pour tous également. Ainsi, dans les civilisations antiques, il semble qu'on est plus ou moins «majeur» selon la fonction sociale qu'on assume; lorsque Platon affirme qu'il faut cinquante ans pour faire un homme, cet homme fait se limite à la caste des gardiens-philosophes; les autres terminent leur éducation bien plus tôt et sont par là même moins adultes puisque, n'ayant pas accès aux vertus supérieures (courage, sagesse), ils ne disposent pas de l'autorité qu'elles confèrent. Chez Aristote, le maître est plus adulte que l'esclave, le contemplateur que l'artisan, le sage que l'intempérant, le vieillard que le jeune homme, le mari que la femme.
 
Notre civilisation a sans doute "démocratisé" le concept d'adulte, mais plus dans les institutions que dans les consciences; on entend souvent dire que les prolétaires ne sont pas mûrs, que les femmes ne sont pas majeures, que les indigènes sont de grands enfants. Le plus révoltant dans ce genre d'affirmation est la part de vérité qu'elles comportent; une société qui traite toute une catégorie d'hommes en irresponsables peut se justifier ensuite en arguant de leur infantilisme. Et si tant d'opprimés s'avèrent finalement plus mûrs que leurs oppresseurs, ce n'est pas tant grâce à la société où ils vivent que contre elle.»
 
OLIVIER REBOUL, «L'adulte: mythe ou réalité», Revue Critère, juin 1973

 
--------------------- 

 

  Cours 2ème partie:

 

 
Université populaire de Saint-Sauveur, Luxeuil et CCPL.
Lien : http://ars-praeceptorum.over-blog.org/
Par Mr. Trommenschlager Franck, Psychanalyste et Psychosociologue.

Lien : http://www.psy-luxeuil.fr/

  Ouvrage paru en mars 2014 : http://www.anaproductions.com/

ou http://boutique.franceregion.fr/

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5 septembre 2014 5 05 /09 /septembre /2014 10:56

Confronté à la névrose traumatique et au suicide de son disciple Victor tausk, Freud ouvre la voie à sa deuxième topique, où apparaît le concept "de pulsions". Concept qui marquera un tournant définitif dans sa vie suivi d'une remise à zéro de l'ensemble de ses travaux ! Aujourd'hui encore, cette seconde topique est prise très au sérieux par les cabinets de marketing américains, qui l'utilisent avec efficience [mais hélas à des fins purement mercantiles] pour dominer les cerveaux et engendrer les pulsions d'achat... La France, quant à elle, soumise à de violents combats idéologiques, reste prisonnière d'une vision déformée des travaux psychanalytiques de Freud et n'en comprend pas l'enjeu sur le long terme... En cela, c'est profondément lamentable.

  
  
Victor Delanoux: La réédition d’Au-delà du principe de plaisir (Payot, 2010) est l’occasion de revenir sur un texte majeur, qui marque un tournant dans la pensée de Freud. Nous sommes en 1920, juste après la Première Guerre mondiale. Depuis quelque temps déjà, Freud a été soumis au cas particulier des « névroses de guerre ». De nombreux soldats, de retour du front, ont été traumatisés. Ils souffrent de ce que l’on nomme alors la « névrose de guerre » (et qu’on appellerait aujourd’hui un « syndrome de stress post-traumatique »). Le soldat traumatisé connaît insomnies, angoisses nocturnes et dépression. Il est surtout en proie à ce que Freud nomme les « compulsions de répétition » : des images envahissantes d’épisodes morbides que le soldat se repasse en boucle, comme si sa mémoire était un disque rayé. Freud bute sur un problème. Comment expliquer ces névroses dans le cadre de la psychanalyse ? Jusque-là, l’analyse des névroses reposait sur un schéma univoque. Les névroses sont le produit d’un conflit psychique entre une pulsion inconsciente - de nature sexuelle - refoulée par une partie du psychisme (le moi). Or, le but de la pulsion est le plaisir : comment expliquer par la recherche de plaisir ce qui ressemble manifestement à un processus mental d’autodestruction ?
 
Freud expose sans détour son épineuse difficulté. Il émet des hypothèses, les discute, avoue sa perplexité. Puis il en vient à suggérer une nouvelle explication. La recherche de plaisir ne saurait suffire à expliquer le destin des pulsions. Il est possible que tout organisme soit animé une autre finalité : la recherche de la mort. Le fondateur de la psychanalyse vient d’introduire pour la première fois la « pulsion de mort » dans sa théorie. La « compulsion de répétition » (répétition des rêves) serait-elle une façon de dompter peu à peu sa douleur, comme dans le jeu de la bobine où l'enfant mime une situation déplaisante (la disparition d’un objet aimé) pour maîtriser sa douleur, et diminuer la souffrance éprouvée ? A moins que la compulsion de répétition ne se place « au-delà du principe de plaisir ».
 
En fait, il se pourrait aussi que la compulsion de répétition manifeste une tendance de l’organisme à rechercher sa propre destruction. C’est le cas notamment quand il souffre trop. Pour mettre fin à ses tensions, il n’a d’autre choix que de s’auto-supprimer, comme dans le cas des suicides. (On a suggéré à ce propos que le suicide récent de son disciple Victor Tausk, qui a beaucoup affecté Freud, a eu une influence sur l’élaboration de sa théorie de la pulsion de mort). Plus généralement, Freud évoque un hypothétique processus d’autodestruction plus fondamental proche de ce que l’on appellerait aujourd’hui « l’apoptose » ou « suicide cellulaire », et qui veut que la mort ne soit pas lié à des agressions extérieures mais bien à un mécanisme programmé d’autodestruction.
 
Freud en vient même à estimer que principe de plaisir et pulsion de mort ne sont pas contradictoires, puisque l’autodestruction est une façon de faire diminuer les tensions internes, et que la recherche du plaisir n’est parfois rien d’autre que la fin d’une douleur. « La compulsion de répétition et la satisfaction pulsionnels aboutissant directement au plaisir semblent ici se recouper en une intime association », écrit Freud.
Dans les mois qui suivent, Freud va approfondir sa réflexion sur la « pulsion de mort », qui siégera désormais au côté d’Eros et de la libido dans les limbes de l’inconscient.
(Une réédition est également sortie aux PUF en 2010).
 
Ce que le marketing fait avec les théories freudiennes :
  
 
Les grandes notions théoriques de la seconde topique :
 
La seconde topique est l'un des éléments fondamentaux de la théorie psychanalytique élaborée par Sigmund Freud. Tout comme la première topique, elle représente une tentative de cartographie de l'appareil psychique. Elle représente l'une des trois perspectives de l'approche psychanalytique : dynamique, économique et topique. Topique vient de topos qui signifie lieu en grec.

 

Formulée à partir de 1920, suite à l'apport de nombreuses notions théoriques dans la métapsychologie freudienne (dont les principales furent le Narcissisme, le principe de plaisir et le principe de réalité), elle comporte trois instances : le ça, le moi et le surmoi. Le principe isolé dans cette deuxième topique est le principe de répétition qu'il a théorisé à partir de l'observation de son petit-fils âgé de 18 mois W. Ernest Freud et son jeu de la bobine (fort, da décrit dans Au-delà du principe de plaisir).

    

Description de la seconde topique :

 

Cette seconde topique ne vient pas contredire la première topique, elle propose une diversification de l'explication et peut être superposée, sur certains points, à la précédente.  

  • Le Ça est la partie la plus chaotique de l'appareil psychique. C'est un espace qui ne connait pas le refus, il n'est pas soumis à la réalité externe. La temporalité n'est pas la même. Les pulsions exercent leur force. Le ça ne correspond pas vraiment à l'inconscient de la première topique, bien qu'il soit totalement inconscient.
  • Le Moi est une partie du ça qui s'est organisée en raison des stimuli de la réalité externe. Il correspond au siège de la personnalité. Il serait une erreur cependant de le considérer comme l'équivalent du conscient de la première topique puisqu'une partie du moi est inconsciente. Le moi tente de trouver des compromis entre les pulsions du ça qui réclament satisfaction et les interdictions du surmoi, entre le principe de plaisir et le principe de réalité. C'est pourquoi "le moi n'est pas maître dans sa maison".
  • Le Surmoi est l'instance psychique issue du complexe d'Œdipe. C'est l'intériorisation de l'interdit de l'inceste, des lois et des normes sociales. Selon ses exigences il peut être cruel, sadique ou protecteur. On constate après les travaux de Mélanie Klein que bien avant le complexe d'Œdipe, il existe les prémisses d'un surmoi, en tout cas d'une instance interdictrice. Le surmoi assure la non-satisfaction immédiate des pulsions, il représente donc une sorte de liant social.

 

Sources: http://fr.wikipedia.org et lecerclepsy.com

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30 août 2014 6 30 /08 /août /2014 08:07

Comment les chaussures mènent-elles les femmes par le bout du pied ? De Paris à New York, une enquête pétillante et pertinente sur une relation passionnelle avec un outil de séduction... Une investigation soignée, accompagnée par des témoignages de femmes "shoes-addicts" et d'avis pertinents de psychanalystes.

 

 

Il y a celles qui leur donnent des sobriquets, celles qui courent en acheter à la moindre contrariété ou encore celles qui suivent des cours pour apprendre à marcher haut perché. Aux États-Unis, qui occupent le premier rang mondial, les femmes achètent en moyenne sept à huit paires par an, suivies de près par les Françaises. Comment expliquer ce désir irrépressible ?

 

 

De Dita von Teese à Kelly Rowland (ex-Destiny’s Child), de la danseuse étoile Marie-Agnès Gillot à la joueuse de poker Beth Shak, Julie Benasra est allée à la rencontre de fanatiques des chaussures pour tenter de comprendre les raisons de cette idylle. Pour Fergie, la chanteuse des Black Eyed Peas, "vos chaussures parlent de vous et disent qui vous êtes." Plus qu’un simple accessoire, les souliers de ces dames reflèteraient leur état d’esprit et leur permettraient de se distinguer, d’affirmer leur pouvoir et leur sensualité. Les grands créateurs du moment (Christian Louboutin, Manolo Blahnik, Pierre Hardy…), qui s’amusent à défier les lois de la gravité, mais aussi des historiennes, des rédactrices de mode, des psychanalystes, des sexologues et des fétichistes apportent également leur éclairage sur ce phénomène en expansion.

 

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