Santé, nouvelles techniques, nouvelles croyances
Association Médium philosophie, nº 26, 264 p., 16 €
- Quand la médecine envahit l'espace privé, elle pose des murs :
« Pour les petits budgets, Ubuntu 15.10 - et bientôt 16.04 LTS en avril 2016 - offre une expérience fluide et solide, tout en restant facile à utiliser », note Jane Silber, PDG de Canonical. « C’est une alternative viable et abordable pour les organisations ou les amateurs qui envisagent d’abandonner Microsoft... et en particulier ceux qui veulent remplacer Windows 8 ou se défaire de windows 10, version jugée trop commerciale, notamment par l'exploitation de vos données personnelles. »
Dans la rubrique solidarité de mon site, je partage un article important pour les internautes aux revenus faibles et fatigués des OS windows. Les nombreux messages d'erreurs ou la dernière version 10 de Microsoft, qui est davantage un appel à la consommation ou une collecte de données pour mieux vous manipuler (via les big data), provoquent un changement profond de paradigme et détournent les français des OS payants.
Dans ce contexte consumériste ou les usages numériques pilotent nos comportements, Ubuntu se présente comme un challenger de qualité face au géant Microsoft. De plus en plus facile à utiliser, les dernières versions offres de nouvelles fonctionnalités, un panel de logiciels élargi et la possibilité d'utiliser des programmes windows via le logiciel Wine.
Ubuntu 14.04 LTS (long-term support) est disponible en version stable pour les adeptes du système d’exploitation Linux-Débian. Sa version récente 15.10 est disponible depuis le 21 octobre 2015. Elle accentue une utilisation simple et familiale, pour les non-experts du langage informatique. Une communauté d'usagers est même à votre disposition pour les questions plus techniques :
Des tutoriels sont égalements accesibles en ligne pour intégrer des fonctionnalités élargies ou des installations complémentaires, certains apprécieront l'apprentissage du numérique par l'expérience directe avec les lignes de commandes...
Quelques exemples avec David Dias, informaticien :
Ubuntu 14.04 LTS est disponible pour les PC, les serveurs et est accompagné d’une mise à jour des versions d’Ubuntu pour smartphones et tablettes. Il inclut tous les outils nécessaires aux entreprises, y compris l’accès à distance aux applications, la compatibilité avec les formats Windows. La sécurité a été améliorée avec le cryptage complet du disque et la solution AppArmor pour les communications inter-processus entre les applications a été optimisée.
Cette version a été développée avec un accent sur la stabilité et la fiabilité. C’est pourquoi la convergence initiée dans la version précédente et qui devait s’achever avec cette version a été reportée à 2015. Pour rappel, Canonical voulait offrir un OS unique, pouvant fonctionner sur PC, smartphones et tablettes, tout en fournissant une expérience utilisateur fluide et adaptée pour chaque type de dispositif.
Tirant parti du noyau Linux 3.13, l’OS apporte une expérience fluide avec des améliorations de l’interface utilisateur Unity , dont l’introduction d’une nouvelle manière de chercher une fenêtre quand l’utilisateur a un grand nombre d’applications ouvertes. La prise en charge des écrans haute résolution est également au rendez-vous. Upstart a été mis à jour vers la version 1.12.1. Les paramètres systèmes ont été changés et simplifiés par le centre de contrôle Unity.
Du coté des applications, on note la présence du navigateur Firefox, de l’application de retouche d’images GIMP, de la suite bureautique LibreOffice (compatible Open-office) et du client de messagerie Thunberbird.
=> Télécharger Ubuntu 14.04 LTS
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" La France ne rit plus... " Stress, compétition professionnelle maladive, impacts médiatiques, décès, chômage, pathologies, pauvreté et attentats... nous sommes submergés ou intoxiqués ! En ces temps d'incertitude, c'est à peine si nous osons encore esquisser un sourire, peut-être par respect pour les victimes d'une société devenue folle ! On se force à rire, on finance des stages payants pour rire... mais le coeur n'y est plus... et la spontanéité non plus.
Vous riez dans la rue ? vous êtes désormais un marginal, ou au pire, un citoyen qui ne respecte rien ! Vous serez très rapidement recadré par un quidam au regard menaçant ou par un automobiliste furieux d'avoir à payer une amende supplémentaire, tant les radars foisonnent de tous côtés ! Pourtant, transgresser les règles et s'octroyer l'indécence de rire n'a rien de déplacé... Le rire casse les usages, dissipe les pensées négatives et restaure ce lien précieux des relations inter-individuelles. Il est l'instrument créateur de l'identité des français. Complicité, amitié, partage et chaleur humaine sont notre héritage, celui des résistants de la précédente époque sombre. Etonnement, ils demeurent cependant derrière nous, car nous avons tout oublié de ce passé funeste... mais il ne tient qu'aux générations présentes de les restaurer, de les faire revivre... en se payant l'audace de rire encore, pour mieux vivre... ou survivre... et ainsi briser définitivement les influences nauséabondes de cette époque désenchantée.
Par Fanny Bouvry
"On prend la mesure de la puissance du rire dès l'âge de 6 à 8 semaines. On chatouille bébé, il rit, on rit, il re-rit, et ainsi de suite. La communication est profonde parce qu'on rit ensemble." C'est ce qu'affirme Florence Servan-Schreiber dans son livre Power patate (Marabout). Persuadée des bienfaits de cette activité toute simple qui consiste à "manifester une gaieté soudaine par l'expression du visage et par certains mouvements de la bouche et des muscles faciaux, accompagnés d'expirations plus ou moins saccadées et bruyantes" - comme le définit le Larousse -, la spécialiste de la psychologie positive encourage tout un chacun à s'y adonner au minimum quinze minutes par jour.
Certes, il y a des individus plus réceptifs que d'autres. Certains, par leur esprit, font pouffer l'assemblée, alors que d'autres se marrent franchement mais sont incapables de raconter une blague. On recense aussi des personnes qui préfèrent ne pas manifester extérieurement leur amusement, et même quelques-unes qui restent imperméables à cette façon de croquer la vie... à pleines dents. Mais pas de panique, rien n'est perdu.
Si ce n'est quelques cas pathologiques - autisme, etc. - le rire, et même l'humour, sont à portée de tous ! Il suffit simplement, comme pour tout, de s'entraîner. "Ça se travaille clairement, même si l'envie de faire le pitre nous vient souvent de notre enfance, affirme l'humoriste belge Alex Vizorek, qui sera sur la scène de Wolubilis, à Bruxelles, en décembre prochain (*). Pour y arriver, le mieux est de regarder le sujet de biais et non frontalement pour trouver une idée. J'observe également ce qui se fait et ce qui marche. Je suis par exemple allé voir Mais qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? pour comprendre pourquoi ce film avait eu un tel succès en salles." La journaliste Charline Vanhoenacker, qui en compagnie d'Alex Vizorek propose quotidiennement sa vision décalée de l'actualité sur France Inter (Si tu écoutes, j'annule tout) et, le dimanche, sur La Une (Revu et corrigé), confirme : "Il y a selon moi une part d'inné - certains ont des dispositions à faire le clown depuis tout jeune -, mais en parallèle beaucoup d'acquis. Des mécanismes se développent. On reproduit des choses qu'on a entendues et appréciées. De mon côté, j'ai toujours été friande des Guignols de l'info, du Chat de Philippe Geluck et des sketches de Pierre Desproges." Plus aucune excuse donc pour ne pas se dérider, on a tout à y gagner ! La preuve par 6.
1. C'EST BON POUR LA SANTÉ
Même si l'ampleur du phénomène divise les scientifiques, il reste évident que l'hilarité a un impact positif sur notre corps. Ingrid Daschot, animatrice d'ateliers de yoga du rire dans le Brabant wallon (lire ci-dessous) souligne ainsi que cette activité "développe les capacités respiratoires". Elle se traduit par "une accélération cardiaque, ainsi qu'une augmentation de la sécrétion d'endorphine, elle active le système circulatoire et respiratoire et donc l'oxygénation générale et mobilise quatre cents muscles, énumère quant à elle la psychologue Marie Anaut dans son livre L'humour entre le rire et les larmes (Odile Jacob). La neurobiologie a démontré que cela favorise la production par l'organisme de neuromédiateurs comme la sérotonine et la dopamine qui sont des substances favorables à la santé."
Certaines études démontreraient d'ailleurs que les hôpitaux qui recourent aux services de cliniclowns par exemple, délivreraient moins d'antalgiques à leurs patients, "les endorphines soulageant naturellement la douleur", comme le rappelle Marie Anaut. Florence Servan-Schreiber va même plus loin, affirmant que "savoir transformer le stress en humour nous fait gagner quatre ans d'espérance de vie" !
2. ÇA BOOSTE LE MORAL
"Se bidonner, ou même juste sourire, seul devant son miroir peut déjà être très bénéfique, constate Ingrid Daschot. Cela donne confiance en soi et offre l'occasion de se positionner immédiatement en tant que personne heureuse. On décide volontairement de considérer le verre à moitié plein, on change sa vision sur la vie... et naturellement, le regard que posent les autres sur nous se modifie également." Ainsi rire serait une façon de voir la vie en rose... même quand elle ne l'est pas tout à fait. Et l'humour davantage encore car la démarche cognitive qui se cache derrière peut franchement aider à surmonter les tracas du quotidien. "L'attitude humoristique est un indicateur de créativité qui révèle les ressources mobilisables pour parer aux difficultés de l'adversité", souligne Marie Anaut.
L'idée serait ainsi finalement de renouer avec sa légèreté de môme et de blaguer pour dépasser les angoisses et autres barrières à notre épanouissement. "Ça révèle l'enfant que l'adulte porte encore en lui et qui s'est construit à partir du jeu et de l'imaginaire, analyse l'auteure de L'humour entre le rire et les larmes. Ça rappelle en outre nos tentatives infantiles pour maîtriser des situations frustrantes qui nous échappent ou qui nous font peur."
3. C'EST UN BOUCLIER EN CAS DE DRAME
Si l'humour aide très certainement à affronter les petits soucis journaliers, il peut s'avérer très utile dans des cas bien plus graves de traumatismes ou de catastrophes, comme le suggérait déjà Beaumarchais quant il écrivait "Je me presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer". "Dans ma pratique clinique, j'ai souvent observé que c'était une force vitale qui apparaissait dans des situations les plus inattendues, relate Marie Anaut. Des personnes l'utilisent spontanément pour raconter des histoires complètement délétères, de maltraitance par exemple. C'est une véritable ressource pour elles."
Parmi les exemples connus, on citera celui de Pierre Desproges qui, atteint d'un cancer, prenait un malin plaisir à le railler, lançant des sentences du genre "Noël au scanner, Pâques au cimetière" ou "Plus cancéreux que moi, tumeur !" Ou encore Elie Semoun qui, en interview, lorsqu'on lui demande pourquoi il est devenu humoriste, répond "parce que ma mère est morte", précisant que pour franchir cet obstacle de la vie il s'est mis à faire glousser les autres...
4. C'EST UN MOYEN D'AUTODÉFENSE
"C'est un roc ! C'est un pic ! C'est un cap ! Que dis-je, c'est un cap ? C'est une péninsule..." La tirade de Cyrano de Bergerac à propos de son nez est probablement le plus bel exemple que la littérature nous apporte en matière d'autodérision. Le héros au pif proéminant assaille son ennemi de plaisanteries qui auraient pu être les siennes avant de conclure : "Je me les sers moi-même, avec assez de verve. Mais je ne permets pas qu'un autre me les serve." Dans cette célèbre scène, les traits d'esprits donnent du panache et retournent l'agression vers son auteur pour le ridiculiser à son tour, avec élégance et manière. "C'est un bouclier face aux attaques potentielles des moqueries, confirme Marie Anaut. De ce fait, l'humour permet de retravailler les blessures en changeant leur représentation et transforme aussi l'image que l'on a de soi." Rigoler de ses erreurs et de ses failles serait donc la meilleure manière de transformer ses défauts en qualité.
5. ÇA FACILITE L'INTÉGRATION
"C'est un lubrifiant social, moins dangereux que l'alcool, affirme la journaliste Charline Vanhoenacker. Pour moi, que ce soit à l'antenne ou dans les couloirs, l'humour me facilite la tâche pour aborder les gens cash, les mettre à l'aise, qu'ils se sentent dans un environnement positif et donnent donc à leur tour le meilleur d'eux-mêmes." S'esclaffer connecte en effet positivement les individus en créant un climat de confiance et en rapprochant des personnes qui initialement auraient pu s'ignorer. C'est d'ailleurs un langage universel, au-delà des dialectes locaux.
C'est également une manière de captiver, voire de convaincre son assemblée. "Si j'avais été un grand séducteur, je ne serais pas devenu humoriste, plaisante Alex Vizorek. Plutôt que de draguer frontalement, que ce soit une femme ou plus largement mon entourage, je préfère oser un trait d'esprit. Au fur et à mesure, faire rigoler devient presque une drogue, je ne peux plus m'en passer." Et sa comparse Charline Van Hoenacker de confirmer : "C'est une sensation nouvelle pour moi, mais qui est assez jouissive. Le plus important : cela prouve que l'interlocuteur est attentif à ce qu'on dit et ça c'est déjà très agréable."
6. ON PEUT DÉNONCER SANS FROISSER
"L'humour offre une forme de pertinence pour mettre le doigt sur des faits de façon cinglante, en évitant la diffamation. Idéal pour faire passer un message", explique encore la journaliste. Un titre qu'elle revendique, estimant que dans ses humeurs "il y a de l'exactitude. Pour l'humoriste, le cahier des charges est de générer l'hilarité, la blague prime, quitte à partir dans la fiction. Moi, je m'inscris dans la réalité."
Tourner les choses en dérision, avec maîtrise, peut donc s'avérer une manière subtile de prendre position. Au risque de déraper ? "J'ai une barrière naturelle dans mon ADN, je m'interdis certains sujets comme le 11 septembre ou Mohamed Merah", rétorque la chroniqueuse. Et son complice d'aller plus loin : "On peut parler de tout mais avec le bon axe, ce qui est parfois très difficile. Personnellement, je n'ai pas encore trouvé le moyen d'aborder l'Etat islamique... Mais certains réussissent à traiter des sujets lourds avec beaucoup de tact." Un tact, primordial si l'on veut éviter les écueils : "L'humour mal utilisé peut être une source de malentendus, mais aussi de dénigrement haineux, met en garde Marie Anaut. Il devient alors un instrument nuisible de désocialisation, une arme de destruction et de conflit." D'autant qu'en fonction de la culture et de l'éducation, les frontières du politiquement correct sont mouvantes...
(*) Six personnages en quête de belgitude, avec Charline Van Hoenacker, Wolubilis, à Woluwe-Saint-Lambert. www.wolubilis.be Du 18 au 31 décembre prochain.
« La pratique de la disruption est militaire : c’est une technique de manipulation, de paralysie de l’adversaire face à une stupéfaction, une doctrine de la vitesse et de la tétanisation ! Aujourd’hui nous sommes absolument stupéfait, du clodo du coin à François Hollande, jusqu’à Madame Merkel, en passant par le patron d’Axel Springer, Mr. Döpfner, qui a écrit cette phrase incroyable « nous avons peur de Google ». C’est inconcevable de la part d’un PDG de dire qu’il a peur de quoi que ce soit. Qu’est ce que ça veut dire ? Ca veut dire que la disruption, c’est une stratégie du choc ! » B. Stiegler
" Vous ne vous rendez vraiment pas compte de ce qui nous arrive. Quand je parle avec des jeunes de ma génération, ceux qui ont deux ou trois ans de plus ou de moins que moi, ils disent tous la même chose : on n’a plus ce rêve de fonder une famille, d’avoir des enfants, un métier, des idéaux, comme vous l’aviez quand vous étiez adolescents. Tout ça, c’est fini, parce qu’on est convaincu qu’on est la dernière, ou une des dernières générations avant la fin. "
Par Florian 15 ANS. L'impansable, aux éditions Le Grand Souffle.
La disruption est une approche stratégique fondée sur la rupture et la vitesse, développée par le publicitaire français Jean-Marie Dru, cofondateur de l'agence BDDP et président de TBWA. L'approche disruptive commence par identifier les conventions (idées reçus, biais culturels, certitudes qui figent la pensée) qu'adoptent la plupart des acteurs d'un secteur et qui débouchent sur des approches communes, peu différenciantes. Une fois les conventions identifiées, on cherche à remettre en cause et à détourner celles qui permettraient d'ouvrir une nouvelle vision des marques.
Cette remise en cause est la disruption proprement dite, découlant en partie de la théorie de Joseph Schumpeter. Un des moyens d'engager la rupture est de poser la question "et si..." de tout remettre en cause et d'envisager un nouveau futur des marques, davantage prometteur (la vision disruptive). La disruption est un concept libertarien : Elle porte en elle la possibilité de détruire les systèmes sociaux et les réglementations qui protègent un état et ses citoyens, de fluidifier les normes afin de faciliter la libre circulation des services et des marchandises, de susciter des désirs de consommation, optimisant de fait l'économie de marché... Utilisée à l'extrême, elle est porteuse de finitude et de chaos.
En résumé :
- phase 1, convention : quelles sont les conventions d'un secteur, les points communs... ?
- phase 2, vision : qu'est-ce que je veux être demain, quelle est ma vision de la marque ?
- phase 3, disruption : quelle convention faut-il casser pour devenir ce que je veux être ?
- phase 4, destruction : quelles règles faut-il détourner pour parvenir à imposer la marque ?
C'est donc une technique qui joue le contre pied et privilégie par essence les idées non conventionnelles. Elle identifie les besoins pour créer la rupture, elle se libére des contraintes afin de donner aux marques une plus grande marge de manoeuvre. Dans le cerveau humain, elle consiste, par sa vitesse, à court-circuiter toutes les réflexions susceptibles de freiner les achats.
Qu’appelle-t-on penser dans la folie de l’Anthropocène, qui menace l'avenir ?
L'académie d’été 2015 d'Ars-Industrialis sera entièrement consacrée à l’interprétation de ce que dit le jeune Florian, à dévoiler le vrai visage de la disruption - et comment elle génère " La Folie " sur le plan psychique et social, en court circuitant les fonctions néocorticales humaines :
Cette « herméneutique » passera par la poursuite des réflexions sur le rêve que nous avions engagées durant l’académie d’été 2014, qui faisaient elles-mêmes suite à notre critique de l’anthropologie positive – en particulier celle de Maurice Godelier dans Métamorphoses de la parenté. Nous poursuivrons ces travaux par une reconsidération approfondie des théories de l’entropie et de la néguentropie en vue de ce que nous appelons une néguanthropologie, et à travers un dialogue avec L’événement Anthropocène (dont Jean-Baptiste Fressoz, l’un de ses auteurs, sera présent à Epineuil).
Le rêve est un moment majeur de toute bascule néguanthropologique : c’est ce que nous avons tenté d’approcher l’an passé. Florian ne rêve pas – du moins il ne fait pas de rêves diurnes, et il affirme que c’est le cas de toute sa génération – : « tout ça, c’est fini ». Et tout cela procède aussi de ce que Jonathan Crary appelle le capitalisme 24/7.
Les rêves diurnes que ne fait pas Florian supposent qu’existe ce que nous avons appelé, dans le séminaire de ce printemps, des protentions collectives constituant une époque. En nous disant qu’il n’a pas accès à ce type de protentions collectives « épokhales », qui sont constituées par des « protentions tertiaires », Florian exprime la réalité existentielle de ce qui aura été nommé au XXè siècle l’absence d’époque – dont Jacques Derrida posait dans De la grammatologie qu’elle s’annonçait à la veille de 1968 (et de New grass) comme la monstruosité.
L’absence d’époque, c’est le gouffre que creusent des protentions intrinsèquement négatives que l’Anthropocène engendre depuis le début du XXIè siècle, et que la production de protentions automatiques par le calcul intensif sur les traces de la différance machinique en quoi consiste la data economy dénie et dissimule systémiquement : tel est l’accomplissement du nihilisme par le capitalisme purement, simplement et absolument computationel.
Interpréter le témoignage de Florian, ce ne peut être que lui répondre – et, en l’occurrence, le contredire chaleureusement, et performativement (sinon prophétiquement), en lui faisant la promesse qu’il ne sera pas la dernière génération : nous affirmons que l’Anthtropocène doit engendrer le Néguanthropocène.
Nous étayerons cette thèse – cette affirmation – sur une reconsidération organologique des questions d’entropie et de néguentropie, de Sadi Carnot à nos jours, en passant par les bioéconomies de Nicholas Georgescu-Roegen et de René Passet, ainsi que par des travaux de Rudolf Boehm.
En savoir plus :
L'université populaire UPL : Une thérapeutique sociale, en réponse à la solitude induite par la modernité
Vous êtes fatigués des petites phrases, des analyses politiques et médiatiques incapables de se projeter au-delà du prochain sondage ? Pour rompre avec cette médiocrité récurrente, voici une interview fleuve du philosophe Bernard Stiegler... Entretien sans détour réalisé par la revue bastamag.net. Disciple de Derrida, il dirige l’Institut de recherche et d’innovation et a cofondé l’association Ars Industrialis. Face à la domination du marketing et à l’hégémonie du capitalisme financier, qui font régresser nos sociétés, il est urgent, pour Stiegler, de changer de modèle et de renouer avec les savoirs !
Peut-on sortir de l’ère industrielle ?
J’ai la conviction profonde que ce qu’on appelle humain, c’est la vie technicisée ! La forme de vie qui passe par la technique, qu’elle soit du silex taillé ou du silicium, organisée comme aujourd’hui par un microprocesseur ou par autre chose. Dans tous les cas, nous avons affaire à de la forme technique. L’individuation psychique, c’est-à-dire la manière de devenir ce que je suis, l’individuation collective, la manière dont se transforme la société dans laquelle je vis, et l’individuation technique, la manière dont les objets techniques se transforment, sont inséparables. Un homme qui vit sur une planète où il y a un million d’individus n’est pas le même homme que celui qui vit dans une société où il y a sept milliards d’individus. Sept milliards, cela veut dire sept mille fois plus ! Ce sont des facteurs colossaux.
Quand on appréhende les questions dans leur globalité, il est inconcevable de faire face à cette poussée démographique avec des moyens non industriels. Ce n’est pas possible. La question n’est pas de sortir du monde industriel, parce que ça, c’est du vent. Les gens qui disent cela sont des irresponsables ! La question est d’inventer une autre société industrielle, au service de l’humanité et non pas du capital. Des gens ont rêvé de cela. On les appelait des communistes. Marx est le premier philosophe à avoir dit que l’homme est un être technique. Mais Marx et le marxisme, c’est très différent ! Il faut repenser en profondeur, premièrement, qu’est-ce que la technique pour l’être humain ; deuxièmement, sa socialisation ; et troisièmement, le projet d’économie politique qui doit accompagner une industrialisation. Le problème n’est pas l’industrie, mais la manière dont on la gère. Elle est sous l’hégémonie du capitalisme financier.
D’où vient cette hégémonie du capitalisme financier ?
En 1977, au moment du mouvement punk, c’est l’enclenchement d’une catastrophe annoncée. La droite radicale pense : il faut remplacer l’État par le marketing. En 1979, arrivent Thatcher puis Reagan en Grande-Bretagne et aux États-Unis, les conservateurs tirent les conséquences de ce qu’on appelle la désindustrialisation. L’énorme RCA (Radio Corporation of America, ndlr) est rachetée une bouchée de pain par Thomson, l’électronique part au Japon, Thatcher a compris que la grande puissance du Commonwealth touche à sa fin. Donc, pour pallier à la déroute de la puissance industrielle, ils se lancent tous les deux dans la spéculation financière. Tout ce système qui s’est écroulé en 2008 a été mis en place à cette époque, c’est l’école de Chicago. Ils dérèglent tout, les puissances publiques, le système social, et de manière systématique. Ils vont tout dézinguer. La conséquence de tout cela, c’est la destruction des savoirs et une nouvelle prolétarisation généralisée.
Comment s’opère cette destruction des savoirs ?
Les institutions familiales, l’éducation, l’école, les systèmes de soin, la sécurité sociale, les partis politiques, les corps intermédiaires : tous les outils du savoir sont systématiquement détruits, le savoir-faire (les métiers, les techniques), le savoir-vivre (le comportement social, le sens commun), le savoir-penser (la théorisation de nos expériences). Les lieux où se développaient ce que les Grecs et les Romains nommaient la schola. Tout cela a cédé face au goût vers la satisfaction immédiate, à la pulsion infantile égoïste et antisociale. Alors que le désir est le départ d’un investissement social.
Aujourd’hui, 180 millions de Chinois sont dépressifs et partout ailleurs les gens sont dépressifs. C’est grave, plus personne n’est pilote, l’avion vole de lui-même. Nous ne sommes pas encore dans l’apocalypse, nous sommes dans un « ton apocalyptique » qui est perçu par tout le monde. Dans les rues à Paris, au bistro en face, là, vous discutez avec les gens, il y en a de toutes les nationalités et ils sont tous d’accord sur une chose, c’est que ça va mal et que personne ne voit comment sortir de là. L’organisation de la destruction de tout cela, c’est le marketing. C’est le fer de lance programmé depuis 1979 par les économistes libéraux de l’école de Chicago.
Le marketing triomphant… ?
Ce qui s’est mis en place dans les années 1950 avec le développement des médias de masse, c’est le projet d’Edward Bernays, le neveu de Sigmund Freud. Edward Bernays, concepteur du "public relation", est convaincu que pour faire adopter des idées ou des produits par des individus, il faut s’adresser à leur inconscient et non à leur conscience. Son idée est de faire consommer les Américains de plus en plus en détournant leurs désirs, en court-circuitant leurs pulsions. Sur la base d’une théorie freudienne, Bernays construit une stratégie de développement du capitalisme qui permet de capter, de contrôler, de canaliser chaque individu et de l’orienter vers les objets de l’investissement économique, les objets de consommation.
Le but est de prendre le pouvoir sur le psychisme de l’individu afin de l’amener à un comportement pulsionnel. Cette captation est évidemment destructrice. On canalise le désir vers des moyens industriels et pour ce faire, on est obligé de court-circuiter l’énergie libidinale et tout son dispositif, parce que l’énergie libidinale est produite dans un deuxième rang, ce n’est pas une énergie primaire, les énergies primaires ce sont les pulsions. C’est ce qui nous rapproche des animaux. Nous sommes tous habités par des pulsions et nous pouvons nous comporter comme des bêtes. Nous sommes témoins d’une régression des masses, qui n’est plus une régression des masses politiques mais une régression des masses de consommateurs. Le marketing est une des grandes causes de désaffection du public pour le progrès. Le marketing est responsable de la destruction progressive de tous les appareils de transformation de la pulsion en libido.
Comment enrayer cette régression, ne pas en rester à nos pulsions de consommateurs ?
Herbert Marcuse a fait un discours important en 1953 sur le processus de désublimation. À l’époque, ça fait six ans que la télévision fonctionne, et il voit déjà comment va s’accomplir le processus. En 2011, on observe avec une conscience planétaire ce processus de désublimation prédit par Marcuse il y a plus de cinquante ans. La sublimation, beaucoup sont d’avis de dire que c’est un cas un peu exceptionnel de la libido. Dans un texte précis, Freud dit : « La libido, c’est la sublimation. » C’est-à-dire que de près ou de loin, il n’y a pas de libido sans idéalisation de l’objet de celle-ci. Il n’y a pas d’idéalisation sans sublimation. Si j’aime un artiste ou si je suis prêt à libérer mon pays, c’est le même processus. Derrière cela, il y a le sacré. On en parlait couramment autrefois. Marcuse pose l’hypothèse qu’il n’y a pas de possibilité de lien social sans un processus de ce type-là, sans idéalisation.
Peut-on retrouver le goût de la sublimation, de l’idéalisation ?
Il faut profiter de cette prise de conscience pour renverser le processus, pour transformer la panique en nouvel investissement. La nouvelle lutte a commencé dans le nord de l’Afrique. Apprenons à faire de la thérapeutique. Il s’agit de reconstruire progressivement les savoirs et les saveurs. C’est le travail de l’artiste, c’est de la création et de la technique. L’artiste doit être un technicien. Ce que vous faites est très important. Même si l’art conceptuel semble avoir effacé toute la technicité de l’art. Le conceptuel est aussi de la technique. En tant que fabricant de concepts, je me considère comme un artisan. Je peux vous dire que mes concepts, je les usine. (Bernard Stiegler place ses deux mains en étau puis mime le façonnage d’une pièce). J’ai un établi, j’ai besoin d’un étau pour bien les serrer, ça se passe dans la matière. C’est une technologie matérielle. Je suis un manuel.
Qui sont ces artisans thérapeutes de nos sociétés en régression ?
Je compte moyennement sur le monde économique et le monde politique. Quand je dis « nous devons », je compte plus sur les scientifiques, les artistes, les philosophes et tous au sens large : les profs, les juristes, les psychologues, les soignants, tous ceux qui prennent soin du monde. Nous avons tous besoin d’ouvrir une discussion avec la vie parce que plus rien ne se fera sans une volonté indépendante des pouvoirs. Aujourd’hui, il est évident que l’utilisation des réseaux numériques est fondamentale parce qu’ils sont de nouveaux systèmes d’écriture et de publication. Nous vivons l’émergence d’une nouvelle politeia planétaire : nouveau temps, nouvel espace, qui se disent en latin respublica, la chose publique ; en grec politeia. Un retour aux origines de la démocratie.
Avec Internet et les nouvelles technologies de l’information comme outils ?
Le web, c’est l’ère industrielle de l’écriture. Le numérique, c’est de l’écriture. Une écriture faite avec l’assistance d’automates, de moteurs de recherches, de serveurs, d’ordinateurs, qui se propage à la vitesse de la lumière, est évidemment technique, et de dimension industrielle, car elle suppose des infrastructures de type Google. Soit trois millions de serveurs, trois pour cent de la consommation électrique de tous les États-Unis. C’est une industrie de dimension mondiale qui permet de développer toutes sortes de choses extrêmement intéressantes. La révolution numérique crée une situation nouvelle sur le plan économique et politique et c’est là que Marx regagne de l’intérêt, il ne pense pas la politique sans l’économie et réciproquement. Nous pensons, à Ars Industrialis, que cela rend possible l’émergence d’un nouveau modèle industriel. L’évolution humaine est indissociable de l’évolution technique.
La technique peut-elle aussi provoquer des régressions...
Pensons une pharmacologie générale où la technique est un remède (un facteur de progrès) si elle contribue à intensifier les possibilités d’évolution des individus psychiques et sociaux, et un poison (un facteur de régression) lorsqu’elle conduit à court-circuiter ces mêmes individus. Après le protocapitalisme que décrit Marx, puis le capitalisme consumériste, celui que décrit Marcuse, il y a maintenant un troisième modèle industriel qui émerge depuis la crise de 2008. Et je ne sais pas s’il restera capitaliste longtemps, je vous dirai que je m’en fous.
Microsoft a divulgué ses codes sources parce qu’il a fini par comprendre que la dynamique des logiciels libres est beaucoup plus forte que celle des propriétaires. Un rapport de la Commission européenne prévoit qu’en 2014 le logiciel libre sera majoritaire. Aujourd’hui une multitude de domaines s’établissent sur ce modèle libre (Linux, Wikipedia…). C’est ce que nous appelons l’économie de la contribution. C’est une reconquête du savoir, une déprolétarisation. De grands mouvements fondamentaux se mettent en place, et il est indispensable que nous, thérapeutes, accompagnions, théorisions, critiquions avec joie, courage et modestie !
Fort loin des philosophes " de foire ", qui imposent lourdement leurs présences sur toutes les chaines de France, voici un homme d'exception qui montre son vrai visage : Sérieux, humain et travailleur... Souvent torturé par ses inquiétudes concernant l'avenir des enfants (dont ses propres enfants). Il nous livre un récit profond des pensées qui le hantent... Pour son engagement et son labeur quotidien, je lui témoigne toute mon estime.
Qu’est-ce que cette économie de contribution ?
L’économie contributive existe déjà, elle est déjà extrêmement prospère et elle s’imposera parce qu’elle seule est rationnelle. Une politique industrielle contributive est en train de rompre avec le modèle consumériste. Elle s’est développée dans le domaine du logiciel, qui est aujourd’hui tiré par le modèle contributif. Toutes les grandes boîtes comme Google reposent sur cette culture. Et c’est ça qui est en train d’inventer l’avenir. Et nous pensons que ces modèles-là sont expansibles à beaucoup de secteurs. Y compris à la construction du monde énergétique.
Le problème n’est pas de passer du pétrole au nucléaire, ou du nucléaire aux énergies renouvelables. La question fondamentale, c’est de créer des réseaux, des « smart grids » (réseau intelligent, ndlr) contributifs. Là il y a du soleil, on va baisser les rideaux, ça va produire de la chaleur qu’on va canaliser et mettre en commun sur des serveurs d’énergie. Beaucoup de monde travaille là-dessus. Je connais deux architectes de l’école polytechnique de Zurich, une des meilleures écoles scientifiques du monde, qui soutiennent que le photovoltaïque suffit entièrement à satisfaire les besoins énergétiques. Mais cela ne se développe pas parce que c’est contraire aux intérêts des spéculateurs.
Je pense qu’il faut relancer une critique de l’économie politique qui repose sur la sublimation, et fait que les gens s’investissent dans des projets contributifs. En économie, il y en a de plus en plus. Comme Wikipedia. C’est inouï. Sept personnes font marcher Wikipedia – quatre-vingt treize salariés. Salariés au service de centaine de milliers de contributeurs, dont je fais partie, et des millions d’internautes dans le monde. Ils contribuent par amour de faire quelque chose de bien. Et ce bien qu’ils font produit beaucoup de valeur économique. Wikipedia produit une utilité sociale énorme. Et il faut trouver des moyens de le valoriser économiquement sans le monétariser ! Car sinon, ça devient du business, et les actionnaires rentrent…
Quel rôle pour les nouvelles générations ?
C’est le problème le plus urgent, le plus fondamental, il faut montrer aux jeunes générations ce recyclage possible. Avec eux, on peut devenir beaucoup plus intelligents. L’intelligence n’est pas une compétence mentale ou neurologique, c’est une compétence sociale. Il faut reconstruire une intelligence intergénérationnelle, ça passe par la technique parce que aujourd’hui, ce qui fait les générations, ce sont les mutations technologiques. Après l’analog native, dont je suis (les enfants du cinéma et de la télé), nous avons les enfants du Net, qui inventent des tas de choses. Il est urgent de faire la critique des générations successives, les analog natives, aussi les litterate natives, et les print natives ; Luther était natif de l’imprimerie, Socrate était natif de la lettre. La technique est fondamentale dans la construction de l’intergénérationnel. Autrement dit, de ce qui relie l’inconscient à la conscience.
Quand je parlais tout à l’heure des nouvelles technologies, je le prends au sens kantien. Kant, c’est la critique de la conscience. Je veux que l’on fasse une critique de l’inconscient. Je veux aussi laisser s’exprimer une critique qui vient de l’inconscient. Et ça c’est le problème de 68. N’avoir pas su penser une critique de l’inconscient. Le faire est urgent. Freud disait de lui-même qu’il était un grand rationaliste. Repensons la critique des Lumières à partir de la question de l’inconscient. Les seuls qui l’ont fait ce sont les capitalistes, les gens du marketing, qui sont de plus en plus aguerris sur ces questions. Ils en ont tiré un maximum, en ont fait de véritables instruments de domination.
Cette économie de la contribution passe-t-elle par l’éducation ?
À Ars Industrialis, nous disons que le modèle américain, the American Way of life, est épuisé. Nous considérons qu’une nouvelle industrie est en train de se mettre en place, une industrie de la contribution. Nous pensons que cette industrie de la contribution, il faut la mettre en œuvre en développant une politique de recherche. Une politique éducative d’un genre tout à fait nouveau. Non pas en faisant une dixième réforme de l’Éducation nationale, d’une manière ridicule et administrative, non. En posant les problèmes comme ils doivent être posés. Réunissons des philosophes, des mathématiciens, des physiciens, des historiens, des anthropologues… Cela ne se fait pas du jour au lendemain, mais il faut mettre en place les travaux de ce qu’a fait Jules Ferry à l’époque. Il faut se donner du temps et savoir raisonner à deux temporalités différentes. Le court terme et le long terme. Et là, il faut effectivement développer des pratiques tout à fait nouvelles, de nouveaux médias.
Fini, les universités ?
Comme je vous le disais, l’écriture se produit aujourd’hui à la vitesse de la lumière par l’intermédiaire d’une machine. Mais c’est toujours de l’écriture. Qu’est-ce qu’une université ? En fait, l’Université, qui est apparue au début du XIXe siècle en Europe, vient de l’Académie au sens de Platon. L’Université, appelons-la le monde académique, qu’est-ce que c’est ? C’est ce qui transforme le caractère empoisonnant de l’écriture en quelque chose de bénéfique. « On dit qu’avec l’écriture, les sophistes ont détruit la vie collective, et bien moi, répond Platon, je vais faire une école, que j’appellerai l’Académie, qui produit des livres, des manuels, et je fais en sorte que l’écriture soit mise au service des mathématiques, du droit et de la philosophie. » C’est ce qu’il faut faire aujourd’hui. On nous dit que cela va se faire par le marché, mais le marché, il ne faut pas y compter. Le marché, ce sont les sophistes.
Les profs ne sont pas armés intellectuellement pour suivre notre vie technicisée, ils n’ont actuellement aucune critique là-dessus. Il faut donc repenser en totalité l’Université. Il faut surtout comprendre que le numérique est en train de faire exploser ce qui est à la base de l’Université du XIXe siècle. Il faut repenser tout cela. En totalité. En fait, l’informatique est absolument partout, et on n’enseigne pas ça à l’école. On ne l’a pas même enseigné aux profs. Alors ils ne sont pas intellectuellement armés pour faire face à une génération bardée de smart phones, de caméras, de transformateurs. Il n’y a aucune réflexion sur ces changements, ni en France ni en Europe.
Et aux États-Unis ?
De par son histoire, l’Amérique a été confrontée au fait de développer une culture de l’adoption. Adoption des émigrants, des nouveautés technologiques. Cette culture de l’adoption a mis le développement de l’industrie et des industries culturelles au cœur des États-Unis, et le cinéma en particulier. L’Amérique a su accueillir les grands cinéastes qui fuyaient l’Allemagne, comme Fritz Lang, la Tchécoslovaquie, comme Milos Forman. Et l’Amérique a su aussi accueillir Derrida. Il faut quand même savoir qu’on lui a refusé un poste en France, à Jacques Derrida, et il s’est retrouvé prof aux USA. Ils ont aussi accueilli Foucault, Lyotard [3]. Aujourd’hui, mes meilleurs étudiants sont aux USA, chez Google.
L’intelligence, c’est ce qui manque à l’Europe ?
On veut supprimer l’enseignement de la philosophie. On avait au moins cela. Je peux vous dire qu’aux États-Unis, les Français ont une cote d’enfer, grâce à Derrida, Deleuze, Barthes, Foucault… Lorsque j’y enseigne, je suis un nabab, parce que je suis un philosophe français. En France, ils veulent flinguer la philosophie. Ils sont en train de rendre la philosophie optionnelle en première, pour pouvoir la supprimer en terminale. C’est absolument hallucinant. L’enseignement du grec et du latin aussi. C’est calamiteux. On a affaire à des benêts…
L’Amérique sait faire venir les intelligences. L’Europe, c’est une calamité. Elle n’a pas de politique industrielle, n’investit pas dans la culture et dans ce que l’on appelle « les nouveaux médias », alors que Google est devenu aujourd’hui la plus importante entreprise du monde. Je ne dis pas que c’est parce qu’elle gagne le plus d’argent, mais parce qu’elle détient les clefs de la nouvelle ère. Peut-être pas pour longtemps d’ailleurs, car cela va très vite. Pendant des années, Google perdait de l’argent, ils ont été soutenus. Essayez ici de monter une entreprise qui perd de l’argent. Vous ne pouvez pas. Parce que vous avez affaire à des crétins qui sont dans la logique « prends l’oseille et tire-toi ! ». Ils ne pensent qu’à se faire du fric comme de pauvres philistins…
Ce qui permettrait de transformer le poison en remède, c’est une politique industrielle publique qui ne consiste pas simplement à donner des réductions de charges sociales aux entreprises. Avoir une politique industrielle, c’est avoir une vision de son développement sur vingt ans. À une époque où la France était un très grand pays industriel, on n’a pas fait le TGV en réfléchissant sur dix-huit mois, il a fallu quarante ans d’anticipation. Cela a été massacré à partir de Giscard d’Estaing, puis par Mitterrand, Chirac et bien sûr Sarkozy. C’est l’effet du néolibéralisme, qui consiste à dire « moins il y a d’État et de politique, mieux on se porte ». C’est le vieux discours de Reagan et de Thatcher.
Recueilli par Thomas Johnson et Marc Borgers pour http://www.bastamag.net/
Excès de viandes, trop de sucre, pas assez de sport, pas assez d'exercice mental, pas assez d'ascétisme, etc... Les avertissements, prescriptions et autres études médicales sont partout ! La médecine devient-elle un moyen de régence au 21ème siècle ? Les patients sont-ils volontairement soumis aux directives médicales régulièrement assénées dans les médias ? réponses avec Régis Debray, Philosophe et écrivain.
La médecine exerce une emprise grandissante sur nos vies. Et la santé n'échappe pas au grand chambardement de nos démocraties. L'autorité du médecin ne va plus de soi, patient docile ou pas. Le brutal et pertinent Dr House a remplacé l'inquiétant et charlatan docteur Knock. L'automédication triomphe, la consultation numérique est autorisée et les internautes se livrent à de savants ou hasardeux autodiagnostics. Nos attitudes ont changé. Patients impatients, nous serions tous devenus des généralistes, des experts patentés. Pour ces raisons, la revue Médium philosophie, dirigée par l'écrivain, médiologue et philosophe Régis Debray, s'est emparée de ce passionnant sujet.
Le constat est partagé par tous les rédacteurs de cette publication trimestrielle : la médecine est partout. Pas un hebdo sans son palmarès des hôpitaux, pas une télé sans son émission de santé. Et le Mediator est d'abord un drame, mais également " un feuilleton ". Alors, que peut nous apprendre sur ce moment d'emballement sanitaire la "médiologie" (terme combiné du latin - medium, le véhicule - et du grec - logos, le discours), qui désigne une discipline qui s'attache au moyen de communication plutôt qu'au contenu que celle-ci véhicule et s'intéresse aux effets produits par l'innovation technique sur l'espace public ?
Tout d'abord un "effet jogging" : De même que le progrès des moyens de transport développe paradoxalement la marche et la course à pied dans un monde fortement urbanisé, de même l'hyper-technicité médicale provoque des retours aux médecines traditionnelles, expliquent Monique Sicard, coordinatrice du numéro, et Paul Soriano, rédacteur en chef de Médium. Ensuite un "effet wiki" : blog, forum, réseaux sociaux ou experts "on line" font que le savoir médical est participatif et interactif. Au point que Dominique Dupagne, médecin généraliste, célèbre l'avènement d'une "médecine 2.0". Car le Web permettrait de contourner les intérêts financiers et d'inventer un nouvel art de soigner. "Estompement des frontières du savoir et du pouvoir", du sachant et de l'ignorant, du médecin et du patient, le Net met une déterminante expérience en partage, celle du vécu de la maladie.
Directeur des ressources humaines du centre hospitalier de Senlis, Lucien Gérardin n'y voit pas qu'un progrès. Un " mouvement de consumérisme médical " est en marche, dit-il. Et les prescriptions des médecins sont souvent vérifiées sur des sites spécialisés par des patients inquiets des effets secondaires d'un médicament, ou dubitatifs sur le diagnostic établi par leur médecin traitant. Ainsi cette " hypochondrie généralisée " de la société où chaque citoyen se transforme en petit médecin appeuré par les maladies a, selon lui, "un côté orwellien". Il faut dire que les crises sanitaires (vache folle, vaccin H1N1, Mediator, etc.) ont inauguré une ère de la méfiance et de la défiance.
Mais attention à ne pas oublier que l'espérance de vie, dans les pays dits "développés", ne cesse d'augmenter, rappelle Jean de Kervasdoué, titulaire de la chaire d'économie et de gestion des services de santé du CNAM. Et que le système de santé français demeure l'un des plus performants. Inutile, pourtant, de dépenser plus. Car "plus de médecine ne veut pas dire plus de santé". Ainsi le Japon, pays qui dépense le moins pour ses soins, à l'exception de la Corée, est aussi celui où l'on vit le plus longtemps, écrit-il.
Gardons-nous donc de donner raison à Aldous Huxley, l'auteur du Meilleur des mondes (1931), qui disait que "la médecine a fait tellement de progrès que plus personne n'est en bonne santé" !
Source : Nicolas Truong sur http://www.lemonde.fr/
Santé, nouvelles techniques, nouvelles croyances
Association Médium philosophie, nº 26, 264 p., 16 €
" Même si votre vie n'a plus de sens, le droit de mourir libre vous est retiré ! "
Que se passe t-il quand on meurt ? Afin de tenter de répondre à cette question, des chercheurs de l'université de Southampton ont réalisé " la plus grande étude au monde sur les expériences de mort imminente ". Et selon eux, même quand le cerveau cesse de fonctionner, la conscience peut se poursuivre. Décryptage de ces résultats par le chroniqueur Jean-Paul Fritz.
Lorsqu'on veut opposer science et religion, on évoque souvent la question de la survie de l'esprit (ou de l'âme) après la mort.
Les deux extrêmes sont d'un côté ceux qui estiment que tout ce que nous pensons n'est que le résultat de réactions chimiques et que tout cesse après la mort du corps, de l'autre ceux qui estiment que nous sommes des êtres illuminés avec un fragment de divinité / ou de conscience universelle / à l'intérieur de nous.
" Bien sûr, il y a des conceptions intermédiaires, mais cela pose le problème."
L'élément le plus fascinant, d'un point de vue scientifique, c'est bien sûr ces expériences vécues par ceux qui ont frôlé la mort de près, au point d'avoir été "cliniquement morts" pendant un certain temps.
Les "expériences de mort imminente" (les fameuses NDE, Near Death Experiences chères aux Anglo-saxons) et les OBE (traduites en français par "expériences de hors-corps") font davantage l'objet de films et d'œuvres littéraires que de compte-rendus scientifiques.
Examiner les expériences mentales liées à la mort
Une étude exceptionnelle vient d'être publiée sur le sujet une étude exceptionnelle vient d'être publiée sur le sujet par un groupe de médecins de l'université de Southampton (Angleterre) dans la revue médicale "Resuscitation" (le terme est un faux ami, en anglais, il veut dire réanimation). Elle va peut-être apporter des éléments, non pas pour départager scientistes absolus et penseurs illuminés, mais au moins pour faire avancer le débat dans le domaine médical.
L'étude elle-même a pris plusieurs années. Débutée en 2008 dans quinze hôpitaux britanniques, américains et autrichiens, elle s'est penchée sur les cas de 2.060 patients afin d'examiner de manière la plus large possible les expériences mentales liées à la mort.
Cela leur a permis de tester la validité de ces expériences subjectives, afin de voir ce qui peut être attribué à des hallucinations ou ce qui, au contraire, correspond à une réelle conscience de leur environnement de la part de ces patients.
"Contrairement aux perceptions, la mort n'est pas un moment spécifique mais un processus potentiellement réversible qui se produit après qu'une maladie grave ou un accident amènent le cœur, les poumons et le cerveau à cesser de fonctionner", explique le Dr Sam Parnia, auteur principal de l'étude. "Si des tentatives sont faites pour renverser le processus, on parle alors 'd'arrêt cardiaque'."
Cependant, si ces tentatives ne sont pas couronnées de succès, on parle de "mort". Dans cette étude, nous avons voulu aller au-delà de l'expression émotionnellement chargée mais pauvrement définie de "expérience de mort imminente" pour explorer objectivement ce qui se passe quand on meurt".
Une perception de conscience après un arrêt cardiaque
Alors, que se passe-t-il quand on meurt ?
39% des patients qui ont survécu à un arrêt cardiaque et qui ont pu être soumis à des interviews structurés décrivent une perception de conscience, mais n'ont pas de souvenirs explicites des événements. Cela suggère que davantage de personnes doivent avoir une activité mentale, mais en perdent le souvenir une fois qu'ils se sont remis, à cause soit des effets de dommages au cerveau, soit des sédatifs sur la mémoire.
Parmi ceux qui rapportent une perception de conscience et ont pu compléter d'autres interviews, 46% ont expérimenté une palette étendue de souvenirs en relation avec la mort qui ne correspondaient pas à l'idée communément admise des NDE : par exemple, des expériences effrayantes, ou de persécution.
Seulement 9% ont eu des expériences compatibles avec la définition des NDE, et 2% ont eu une conscience de leur entourage compatible avec les OBE, avec des souvenirs précis de "voir" et "entendre" ce qui se passait. L'un de ces cas a même pu être validé grâce à des stimuli auditifs utilisés pendant l'arrêt cardiaque.
"C'est significatif parce que l'on avait souvent supposé que les expériences en relation avec la mort étaient probablement des hallucinations ou des illusions, se produisant soit avant que le cœur ne s'arrête, soit après qu'on l'ait redémarré avec succès, et pas une expérience correspondant à des événements réels lorsque le cœur a cessé de battre", précise le Dr. Parnia.
"Dans ce cas, la conscience semble se produire pendant une période de trois minutes pendant laquelle le coeur ne bat pas. C'est paradoxal, puisque le cerveau cesse habituellement de fonctionner dans les 20 à 30 secondes après l'arrêt cardiaque, et ne reprend pas ses fonctions jusqu'à ce que le coeur ait été redémarré. De plus, les souvenirs détaillés de conscience visuelle, dans ce cas, étaient en accord avec des événements vérifiés."
Il faut continuer à chercher et garder l'esprit ouvert
L'équipe du Dr. Parnia reconnaît avec beaucoup d'humilité les limites de leurs travaux, et l'impossibilité de démontrer de manière absolue la réalité ou la signification des expériences vécues par leurs patients. Mais ils sont également convaincus que ce domaine mérite davantage d'études précises, sans préjugés.
De mon point de vue, cette étude marque une étape essentielle : celle de l'examen scientifique des phénomènes de conscience dits "altérés" vécus durant la période entourant la mort.
Cela ne réconciliera probablement pas les athées dogmatiques avec les religieux antiscientifiques, mais pour le reste d'entre nous, il y aura certainement des enseignements à en tirer, et cela pourrait aussi limiter les abus de manipulateurs sectaires. Parfois, la spiritualité et la science ne sont pas contradictoires.
Je me souviens par exemple d'une discussion sur la nature de la réalité à laquelle j'ai eu la chance d'assister il y a quelques années de cela, entre le Dalaï-Lama et des chercheurs. De mon point de vue de simple observateur, les deux côtés parlaient de la même chose, ils employaient juste des mots différents. Leur point commun : ils faisaient tous preuve d'ouverture d'esprit.
"Si on nous démontre que le dogme a tort, nous changerons le dogme", avait dit le religieux tibétain à cette occasion...
Finalement, c'est encore Shakespeare qui avait raison : "Il y a plus de choses sur terre et dans les cieux, Horatio, qu'il n'en est rêvé dans votre philosophie."
Source: Jean-Paul Fritz pour http://leplus.nouvelobs.com/
Dans le cadre du cycle de conférences "Chercheurs à la BU", Cyrille Michon a donné une conférence intitulée "Libre arbitre et déterminisme". Cyrille Michon présente les principaux éléments du débat contemporain sur le libre arbitre, le déterminisme et la responsabilité morale, en se centrant sur un argument qui depuis plus de quarante ans alimente les discussions sur ce thème: le scénario imaginé par Harry Frankfurt en guise de contre-exemple "Principe des Possibilités Alternatives" (qui veut que la responsabilité morale pour une action requiert que l'agent ait pu agir autrement qu'il ne l'a fait). Frankfurt estime que le principe est faux, repose sur une confusion, explique la confusion, et prétend fournir ainsi une aide importante à ceux qui prétendent que la responsabilité morale (voire la liberté) et le déterminisme sont compatibles. Après l'avoir exposé, Cyrille Michon conteste l'argument de Frankfurt.
Comment bien nourrir son cerveau pour bien penser ? Le Dr Jean-Marie Bourre nous révèle comment "doper nos capacités cognitives". Membre de l'Académie de Médecine, ce spécialiste de neurologie et de nutrition explore la chimie qui relie notre intellect à notre assiette dans son ouvrage : Diététique du cerveau : la nouvelle donne.
Le cerveau a t-il des besoins nutritionnels spécifiques, voire indispensables ?
Dr. Jean-Marie Bourre : Avant tout, cet organe a besoin d'un juste équilibre en tous les nutriments. Au total, plus de 40 substances lui sont indispensables ! Parmi elles, les acides gras Omega 3 participent à la structure du cerveau, ce qui fait de lui l'organe le plus gras du corps, après le tissu adipeux. Pour bien fonctionner, les neurones ont besoin d'énergie : le glucose est le carburant principal du cerveau. Il provient des glucides qui devraient représenter plus de la moitié de notre apport énergétique quotidien. Pour utiliser ce glucose, la vitamine B1 contenue dans les céréales, légumes frais et secs, et fruits secs joue le rôle de la bougie pour faire fonctionner le moteur. Enfin le cerveau a besoin d'un comburant : l'oxygène. A ce titre, le fer est intimement lié à la capacité intellectuelle car il transporte l'oxygène via l'hémoglobine du sang jusqu'à l'encéphale. Certaines études ont d'ailleurs démontré que le quotient intellectuel des nourrissons dont la mère manquait de fer était plus faible. Ainsi, des aliments comme le boudin noir ou le foie sont à privilégier pour un apport de fer suffisant.
Les Omega 3 étant si importants, comment assurer leur apport quotidien pour ne pas risquer de déficience ?
Jean-Marie Bourre : En réalité, peu d'aliments contiennent ces acides gras essentiels… Ce qui explique leur apport insuffisant dans l'alimentation des Français : seulement la moitié des 2 g recommandés chaque jour chez l'adulte. Pourtant, il suffit de bien choisir ses produits : 1 cuillère à soupe d'huile de colza dans une salade suffit à couvrir la moitié des besoins quotidiens. De même pour les huiles végétales de noix ou de soja. Pour compléter cet apport, une portion de poissons gras deux fois par semaine, type sardines, maquereaux, harengs ou saumon. Mais attention, pour ce dernier, il existe de grandes disparités entre les espèces sauvages, jusqu'à 40 fois plus riches en Omega 3, et celles d'élevage. Les oeufs de poule sont aussi naturellement riches en Omega 3, à condition que les volatiles aient été bien nourris. Enfin, il existe aujourd'hui des produits enrichis en Omega 3 comme les oeufs, le jambon, le lait, grâce à la présence de ces acides gras dans l'alimentation de base des animaux.
Quelle alimentation faut-il recommander aux jeunes en phase d'apprentissage pour booster leurs performances intellectuelles ?
Jean-Marie Bourre : L'un des principaux dangers réside dans le grignotage : celui-ci provoque une hypoglycémie réactionnelle, c'est-à-dire une chute du taux de sucre dans le sang, et diminue de 30 à 35 % les capacités intellectuelles. Ainsi, en période d'examen par exemple, il est impératif de ne pas se laisser dépasser par le stress et de conserver des repas réguliers et complets. Les protéines en particulier doivent être présentes à chaque repas, car elles interviennent dans l'interconnexion des neurones. En pratique, cela signifie une portion de viande ou poisson au déjeuner et au dîner. Et du lait au petit déjeuner, source de protéines, mais aussi d'eau (pour la réhydratation) et de calcium (pour l'ossification). Par ailleurs, l'activité intellectuelle dépend directement du temps de sommeil et de sa qualité. Il faut donc dormir suffisamment longtemps, et éviter les baisses de glycémie durant la nuit en consommant par exemple quelques pruneaux riches en glucides le soir.
Certains aliments sont-ils à privilégier pour éviter ou ralentir la mort des neurones ?
Jean-Marie Bourre : L'essentiel pour les neurones, c'est d'être continuellement stimulé par une activité intellectuelle. Mais ils doivent aussi être nourris en permanence ! Un apport énergétique chaotique fragilise les neurones, voire même les détruit. Certaines substances consommées en excès comme les acides gras saturés (présents dans les lipides d'origine animale), s'oxydent et se transforment en radicaux libres, les pires ennemis des neurones. D'où l'intérêt des éléments antioxydants : la vitamine E présente dans les huiles végétales, le ß-carotène contenu dans les carottes, les épinards ou les abricots, la vitamine C des agrumes, et d'autres oligo-éléments comme le sélénium ou le cuivre.
... Finalement, bien nourrir son cerveau revient cher ?
Jean-Marie Bourre : Non, la santé mentale se réduit à un coût minimal : celui des aliments consommés. En partant des nutriments indispensables contenus dans les aliments et en les classant par ordre de coût, on obtient un résultat inédit et très intéressant. Par exemple, on remarque que les épinards apportent du magnésium et de la vitamine B9 en grandes quantités pour un prix dérisoire. Le magnésium limite la fatigue et contribue à lutter contre l'anxiété, tandis que la vitamine B9 intervient notamment dans la mémorisation. Autre exemple, le zinc des huîtres présente le meilleur rapport qualité /prix : il est 2 fois moins cher que celui des lentilles et 3 à 4 fois moins que celui du bifteck ! Quant aux oeufs, ils apportent pour un coût minimum des protéines de haute qualité, des acides gras essentiels, des vitamines A, B2, B5, B12 en quantités importantes. Au total, la moitié de ce dont l'organisme a besoin chaque jour revient à 3 euros par personne.
Bien manger pour être plus intelligent - futuris - Euronews
Psychanalyste, docteur en philosophie et en mathématiques, professeur à l’université Paris-VIII et écrivain, il a publié une vingtaine d’ouvrages, dont “La Haine du désir”(Bourgois, 1994), Les Trois Monothéismes, Violence, Perversions, Le Racisme, une haine identitaire (Le Seuil, 1997, 1998, 2000, 2001). Il a également publié Evénements III. Psychopathologie de l’actuel, au Seuil.
Au-delà de l’aspect politique, idéologique et religieux, les récents conflits et les mouvements de foules soulèvent la question des pulsions de haine et de destruction. D’où viennent ces élans mortifères qui peuvent pousser à se détruire, pourvu que cela nuise à l’autre ? Pouvons-nous tous être en proie à des flambées de haine ? Les réponses d’un psychanalyste.
Comment expliquer que des hommes aillent jusqu’au suicide pour en éliminer des milliers d’autres ?
Daniel Sibony : La haine totale, à l’état pur, rend prêt à engager sa propre vie, quitte à s’opposer à l’univers entier. Elle vient de la sensation de ne pouvoir « rien », et elle s’entretient d’elle-même, de sa propre impuissance. Mais, plus que l’expression d’un désespoir, elle témoigne de l’impuissance à toucher cet autre autrement. Quand elle atteint ce degré, elle vise l’être même de l’autre, exclut tout partage avec lui. Seule sa suppression peut l’apaiser. Le haineux décide qu’il ne veut plus jouer avec les autres. Parce qu’il veut gagner. Plus fou encore : il veut « avoir été gagnant » sans avoir eu à se confronter à aucun autre.
Dans "Perversions", vous consacrez un chapitre au thème “Terrorisme et perversion”. Pourquoi ?
Daniel Sibony : Dans les deux cas, l’altérité est intolérable. « Si je détruis des choses, c’est qu’elles méritent de l’être. La preuve, c’est que j’ai décidé de les détruire », disait un terroriste allemand. C’est un discours qui tourne en rond et ne tolère pas la réplique ou le dialogue. On commence à entendre les familles des terroristes des réseaux Ben Laden. Toutes disent de leur enfant : « On ne comprend pas, il allait bien, il était normal, il allait à la fac. Et puis un jour, on a appris qu’il était parti en Afghanistan. »
C’est très proche des discours des familles de toxicomanes : « Il était gentil, il avait une petite amie et, un jour, nous avons su… » Pour les toxicos, c’est l’ivresse solitaire, autosuffisante, du flash. Pour les terroristes, c’est la griserie, le sentiment de toute-puissance conférée par le pouvoir de tuer qui on veut.
Quel rapport entre le “j’ai la haine” des jeunes des banlieues, et les “je te hais” que l’on se lance au cours des scènes de ménage ?
Daniel Sibony : L’expression « j’ai la haine » traduit surtout la colère et l’impuissance de se sentir rejeté, hors jeu. Dans le « je te hais » des drames amoureux et familiaux, à l’inverse, les protagonistes sont liés par un même jeu : ils sont acteurs. Et leurs proclamations de haine ne valent qu’à l’instant où elles sont énoncées. Ensuite, on passe à autre chose. Il y a même souvent quelque chose de convivial dans cette haine : on a besoin de l’autre pour lui signifier qu’on le rejette ; donc, pas question de le tuer. Et s’il meurt, vous êtes malheureux.
On peut dire que ce type de haine, à l’œuvre dans les liens amoureux, familiaux, amicaux, professionnels, est de l’amour inversé. Comme si au dernier moment, l’amour était empêché : à cause de rancœurs, de ressentiments, de comptes à régler. D’ailleurs, à ce jeu-là, il y a toujours un moment où l’on se dit : « Non, en vrai, ce n’est pas toi que je hais, c’est quelque chose de toi, un comportement, une particularité de caractère. » Aussi, plutôt que de haine, je préfère parler ici de violence, de rejet violent. La haine radicale, elle, s’enkyste, elle ne passe pas.
Chacun de nous peut-il éprouver de la haine ?
Daniel Sibony : Je crois que c’est une fausse question. La psychanalyste Melanie Klein a repéré chez des tout-petits une agressivité absolument meurtrière, et donc mortifère pour eux. Mais nous n’arrivons pas dans l’existence dotés d’un capital d’amour et d’un capital de haine. Ce sont les événements qui inscrivent en nous des expériences de haine et des moments d’amour.
Quelles caractéristiques doit posséder l’autre pour que nous le haïssions ? Il est riche, je suis pauvre ?
Daniel Sibony : Il doit être perçu par vous comme ayant rapport à tout ce qui vous limite, vous fait de l’ombre, vous prive de quelque chose qui, selon vous, devrait vous revenir. Mais les pauvres ne haïssent pas totalement les riches, car presque toujours, ils conservent un petit espoir de devenir quand même un peu riches… En aucun cas, vous ne pouvez haïr les Martiens : ils sont sans rapport avec vous.
Peut-on haïr sans le savoir ?
Daniel Sibony : Evidemment. Les haines méconnues, refoulées sont même assez surprenantes. Ainsi, vous découvrez qu’un individu entièrement tourné vers la bonté, l’humilité, exprime – et combat – au moyen de ces comportements admirables une haine tenace. On déguise la haine, pour ne pas exploser, devenir fou ou passer à l’acte violemment. Une bonne partie des symptômes névrotiques les plus banals sont là pour travestir une haine inavouable. Et si elle l’est, c’est qu’elle concerne le soi : on ne se trouve pas assez bien, et l’avouer reviendrait à se taper dessus.
Depuis les attentats, on entend souvent des arguments du type : “Après tout, avec leur arrogance, les Américains méritent bien ‘quelque part’ ce qui leur est arrivé.” Selon vous, c’est de la haine dissimulée ?
Daniel Sibony : Ce discours signifie : pour que l’autre ne mérite pas le malheur, il faudrait qu’il soit parfait. Or, parfait, on ne le devient que dans la mort : plus de faille, plus de manque. En cela, effectivement, il y a de la haine dans ces propos. C’est une façon de dire que les Américains sont cause de ce qui s’est passé. Des arrogants, il en existe partout… On pourrait aussi considérer que les victimes des attentats étaient des individus comme vous et moi, avec du bon et du mauvais. Ils étaient imparfaits. Méritaient-ils pour autant cette mort ? Et de la main de ces justiciers-là ?
Notre société est-elle de plus en plus haineuse ?
Daniel Sibony : Je le pense. C’est une société où l’un des idéaux les plus forts est la petite niche, le cocon où l’on serait autosuffisant, inatteignable par l’autre. On s’efforce de nier les conflits au lieu de les affronter, de jouer le jeu. Et quand ils resurgissent, c’est avec une force décuplée. Au nom du refus de la violence, on produit des violences plus extrêmes.
La haine est-elle forcément au service de la destruction ?
Daniel Sibony : Le plus terrible, c’est que la haine est aussi facteur de vie, tout comme la jalousie dont elle n’est souvent qu’une variante. Un peu de haine de soi, de temps en temps, ça aide à bouger. Il faut pouvoir se dire : « J’en ai assez, je hais cet aspect de moi. » Comme passage vers autre chose, la haine peut être tout à fait stimulante. Le tout est de ne pas s’y enliser. Vous pouvez bien haïr des gens, si vous êtes capable de vous retourner sur vous et de considérer qu’après tout, c’était idiot de les haïr, que vous et eux méritez mieux !
L'explosion de la haine et des violences en France : Les chiffres !
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