3 juin 2012 7 03 /06 /juin /2012 19:01

"Les Nouveaux chemins de la connaissance, sur France Culture"

 

 

Podcast de l'émission et extrait des théories de Winniccott à travers le livre "La Honte" de Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste, directeur de Recherches à l'Université Paris Ouest Nanterre.

 

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 -Cliquez sur le logo France Culture-

 

 

Une attitude maternelle intrusive est susceptible de favoriser la mise en place de réponses de hontes aux difficultés de l'environnement...

 

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Winnicott, en insistant sur le rôle joué par la mère réelle dans les 
premiers soins, a montré comment le narcissisme de base se constitue à 
travers les premières interactions mère-enfant. L'organisation narcissique 
est liée dans sa structure à la consistance des liens que le sujet a établis 
en lui-même avec ses objets primordiaux. Et en étant liée au narcissisme 
dans ces différents états, la honte l'est aussi aux investissements narcissiques premiers dont l'enfant a été l'objet de la part de son environnement 
primaire. Ces investissements peuvent avoir été défaillants ou inadaptés.

   
Ainsi une attitude maternelle intrusive, en entravant le développement 
chez l'enfant d'une identité distincte, peut favoriser la mise en place 
de réponses de honte aux difficultés de l'environnement. Il s'agit par 
exemple de mères qui assortissent leur dressage éducatif de menaces 
telles que « tu ne peux rien me cacher », « je te vois même quand j'ai le 
dos tourné », « mon petit doigt me l'a dit », etc. L'effet de telles attitudes 
est évidemment d'autant plus grave que le père est plus effacé ou absent. 
De tels enfants, narcissiquement fragilisés, pourront avoir alors tendance 
à réagir par de la honte, avec une propension persécutive, là où d'autres 
réagissent avec culpabilité.

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23 mai 2012 3 23 /05 /mai /2012 17:47

"Découvrez l'émission choc de Mathieu Vidard, qui cloue au pilori les opposants de la psychanalyse !"

  

Sadness © flickr / CC - 2012 / fraencko

 

Depuis les années 1970, le nombre de personnes souffrant de dépression a explosé : une véritable épidémie. Comment expliquer un tel phénomène ? Un élément surprenant qui peut permettre de se faire une idée sur cette question : l'arrivée sur le marché de nouvelles familles d'antidépresseurs s'accompagne toujours d'une flambée des diagnostics. Les psychiatres, se détournant de la psychanalyse, ont opté pour la psychiatrie biologique et les psychotropes : l'origine de la dépression serait à chercher dans les neurones !

Cette hypothèse a mobilisé d'énormes moyens financiers, alors qu'aucun test biologique ne permet de diagnostiquer la dépression. Les industriels testent au hasard les substances et élargissent les définitions des différentes formes de dépression (toujours plus nombreuses) chaque fois qu'ils trouvent un médicament « efficace ».

 

Chacun se voit offrir la possibilité de traduire son mal-être en termes de « dépression » : la cause déclenchante - deuil, problèmes familiaux, harcèlement moral... - serait secondaire. Aussi est-il devenu inutile de s'intéresser à l'histoire personnelle du patient. Les antidépresseurs sont là pour redonner l'énergie qui manque...

  

Cliquez sur le logo pour écouter le podcast:

      

france inter  

-L'émission débute à la 14ème minute-

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19 mai 2012 6 19 /05 /mai /2012 06:56

A ce destin scandaleux, nul ne s’habitue jamais. Jusqu’où ce refus est-il normal ? Quand devient-il pathologique ? Comment l’idée de la mort s’ancre en nous ?... Réponse sous l'angle de la philosophie et de la psychanalyse:

 

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"Jusqu’à 32 ans, j’ai tenu la mort pour une abstraction, explique Sonia. Puis ma meilleure amie est décédée : un accident de voiture. Ce jour-là, j’ai vraiment réalisé que, moi aussi, j’étais concernée. Depuis, quand mes parents partent en voyage, je suis un peu anxieuse. Adepte de l’escalade, je prends moins de risques…"

 
Pour la psyché humaine, la mort est le paradoxe des paradoxes. C’est notre destin, donc un phénomène bien ordinaire, pourtant, écrit le philosophe Vladimir Jankélévitch dans La Mort (Flammarion, 1977), nul ne s’y habitue : "Chaque mort étonne ou scandalise, comme si elle était la première." En même temps, nous réussissons à vivre, à aimer, à agir malgré la menace quasi quotidienne de notre trépas… Serions-nous héroïques ou inconscients ? Rares sont ceux qui se disent : "Puisque je dois mourir, je commence dès aujourd’hui à me laisser dépérir, à refouler en moi tout désir." En fait, les pathologies directement liées à la peur de la mort sont peu nombreuses. Cependant, pour définir, dans la relation à la mort, la limite entre le normal et le pathologique, encore faut-il cerner les processus par lesquels elle s’ancre en nous, ainsi que leurs effets.

     

Naître à la mort

"L’expérience de la naissance est la première expérience de l’émergence de la mort", déclarait Françoise Dolto dans Parler de la mort (Mercure de France, 1998). Notre venue au monde nous installe parmi ceux qui vont mourir. Elle implique d’emblée une perte : celle du placenta protecteur vécu par le nouveau-né comme une part de lui-même. Dès l’âge de 2-3 ans, l’enfant peut réaliser qu’une personne de son entourage est morte. Mais il s’imagine qu’elle est partie habiter dans un autre univers d’où elle reviendra peut-être. Pour un petit, mourir c’est vivre autrement. Inutile de s’inquiéter s’il ne pleure pas toutes les larmes de son corps et manifeste surtout de la curiosité ("Où il est papy, maintenant ?"). La mort intrigue les enfants, comme la sexualité et la procréation. En revanche, une absence de questionnements de sa part signale une difficulté : l’enfant se tait pour ménager ses parents s’il saisit leur incapacité à parler de ce décès. Or ce silence risque de le rendre inapte, plus tard, à assumer la confrontation avec la mort… sans se mortifier.

     

La peur s’installe

C’est une étape normale du développement de l’enfant. Vers 7 ans, l’idée de la mort devient très active. "J’y pensais tous les soirs avant de m’endormir, se souvient Delphine. J’étais angoissée à l’idée que j’allais mourir un jour. Pour me rassurer, j’ai imaginé un personnage, Monsieur Tout-le-Monde, nécessairement promis à la mort. Puis je me suis identifiée à lui. Alors, j’ai pu me dire que mourir était une chose normale et ma peur s’est atténuée." Certains enfants, eux, ne cessent de craindre que "maman meurt". Cette inquiétude provient d’un malaise ressenti par le tout-petit qui, lorsque sa mère s’absente, a peur qu’elle ne revienne pas, analyse Ginette Raimbault, psychanalyste et auteur de L’Enfant et la mort (Dunod, 1998). D’ordinaire, ce type d’angoisse s’apaise avec l’apprentissage de la solitude.

  

Très tôt la conscience de la mort donne lieu à une peur des morts inspirée, selon Freud, par la culpabilité : nos relations aux autres sont toujours teintées d’ambivalence, l’être le mieux aimé est simultanément haï. Aussi, quand une personne proche s’en va, nous nous sentons coupables – plus ou moins consciemment – des sentiments hostiles que nous lui portions. D’où les scénarios d’enfants et les dessins campant monstres et fantômes. Ceux-là mêmes que nous retrouvons dans la littérature fantastique et les films d’épouvante. Toutefois, sauf situation névrotique où la culpabilité demeure inentamable, notre psychisme sait aussi se protéger et transformer les morts en êtres bienveillants. Mais, d’une façon générale, les morts impressionnent. Les précautions oratoires adoptées pour les désigner témoignent de notre embarras. D’un défunt, on préfère dire qu’il est parti ou plongé dans le sommeil de l’éternité. Saint Paul nommait les morts "ceux qui dorment".

 

Moi aussi, je vais mourir…

C’est la mort des autres qui nous fait prendre conscience de notre mortelle condition. "Moi aussi, je vais mourir." Un constat propre à l’homme et impossible pour l’animal qui vit dans l’ignorance du sort qui l’attend. Etre un homme c’est craindre la mort et inventer des rituels pour marquer son passage. Les spécialistes de la préhistoire ne parlent d’"hominisation" qu’à partir du moment où les grands singes velus que nous tenons pour nos premiers ancêtres se sont mis à honorer leurs morts par des rites funéraires. Pourquoi ont-ils, dans la foulée, inventé les religions ? Probablement pour essayer de donner un sens à la vie et des images à la mort, univers de l’invisible et du non-représentable par excellence. Ce n’est pas un hasard si la majeure partie de la littérature philosophique s’emploie à nous aider à la penser. Pour mieux la dénier. "Il est inutile d’y songer, déclare Epicure. Tant que nous sommes là, elle n’est pas ; quand elle est là, nous ne sommes plus." Ou pour nous persuader de l’accepter avec sérénité. Grâce à la philosophie. "On peut apprendre à mourir", assure Montaigne.

  

"A 40 ans, je constate qu’autour de moi on commence à développer des cancers, observe Emmanuel, la mort a cessé d’être un “accident” pour entrer dans un certain quotidien. Surtout, j’ai peur pour mes parents : ils vieillissent et j’imagine que d’ici à quelques années, ils seront impotents… Après, forcément, ce sera la mort." Si craindre la mort de parents, de proches, malades ou vieillissant, est légitime, être obsédé par la perspective du décès de tous les êtres qui nous entourent est névrotique. Tout comme la crainte perpétuelle de certaines mères pour la vie de leurs enfants. Pour la psychanalyse, ce type de symptômes est l’effet de vœux inconscients de mort transformés dans la conscience en obsession permanente de la mort.

  

Vouloir rester en vie, pour ceux qui ont besoin de nous, est une autre préoccupation très courante. "Quand mon mari et moi partons en voyage, nous ne prenons jamais le même avion, avoue Estelle, 40 ans, mère de deux garçons de 10 et 13 ans. Pour que nos enfants ne soient pas orphelins. Statistiquement, il est impossible que deux catastrophes aériennes surviennent coup sur coup." Eviter les situations susceptibles de causer prématurément notre décès n’a rien de pathologique. En revanche, se sentir en situation de danger permanent, sans raison, est plus problématique. On ne monte jamais dans une voiture, ni dans un bateau, on est obsédé par la pensée que nos proches vont disparaître… Certains individus, par superstition névrotique, frémissent d’horreur dès qu’ils lisent ou entendent le mot "mort", signe qu’il pourrait leur arriver une chose terrible.

 

En psychanalyse, la sensation constante de mort imminente, les angoisses morbides chroniques ont généralement leur source dans des conflits psychiques non résolus. "Grâce à ma thérapie, je me suis rendue compte que ma peur venait de la relation que j’avais eue avec ma mère, confie Sylvia. Enfant, je n’avais jamais pu me fier à elle. Adulte, je n’avais pas davantage confiance en la vie : j’imaginais que rien de bon ne pouvait m’arriver."

     

Que subsistera-t-il de notre moi ?

Pourquoi meurt-on ? Que se passe-t-il après ? De la mort dans sa concrétude, on ne sait rien. Nous n’avons que des fantasmes, c’est-à-dire un savoir inventé pour se rassurer, insiste Françoise Dolto. Les religions – fantasmes collectifs, selon Freud – nous font espérer un au-delà, une survie de "l’âme" : expliquer que Dieu rappelle très tôt à lui ceux qu’il aime est une façon de mieux supporter ce scandale absolu qu’est la mort d’un enfant. Elles ont aussi insufflé l’idée que la mort est, à l’occasion, une libération, le remède le plus efficace aux blessures de la vie. Mais leur perte d’influence laisse l’Occidental d’aujourd’hui plus démuni que jamais. Il ne dispose plus des mots et des gestes qui permettaient jadis de faire face à la Grande faucheuse. D’où sa tendance à cloîtrer dans les hôpitaux, à éloigner de son regard malades et vieillards et à négliger les rites funéraires.

 

Puisque la mort ne peut être pensée qu’à partir de l’unique expérience dont nous disposons – la vie –, l’illusion est nécessaire : après le moment fatal, quelque chose de notre moi subsistera. D’où nos préférences sur la façon dont sera traité notre cadavre.

 
"Je tiens à être enterrée pour qu’on vienne me voir, qu’on se souvienne. Le nom sur la tombe continue de maintenir une sorte d’existence", explique Marie. "Je voudrais être incinérée pour que mes cendres soient dispersées, pour être libre, explique Laure. Léguer mon corps à la science ? Pas question d’être charcutée !" Cette impossibilité de réaliser que, une fois morts, notre moi cessera d’exister, est à la base d’un fantasme très répandu : la peur d’être enterré vivant. Plus que la mort abstraite, c’est le "mourir" qui nous effraie. Evoquer ce moment de passage entre vie et trépas, où l’on se dirait "je meurs", donne le vertige.Mais au-delà de cette crainte métaphysique, il existe aussi la crainte très banale de la "sale" mort, celle qui fait souffrir. La plupart d’entre nous souhaite périr dans son sommeil, sans rien savoir de ce "mourir". Mieux vaut une crise cardiaque brutale à la lente agonie qui laisse le temps de penser à l’inévitable.

 

La mort, moteur de la vie

La mort impersonnelle, abstraite, nous la refusons tous : "Chaque individu veut mourir de sa mort “à lui”", constatait Freud dans ses Essais de psychanalyse (Payot, 1989). C’est pourquoi il agit, tente de se construire son propre destin. Selon les psychanalystes, c’est l’aiguillon de la mort qui nous pousse à faire des enfants grâce auxquels nous survivrons au-delà du néant. C’est lui aussi qui incite l’artiste à créer pour immortaliser son nom. James Joyce, auteur de textes particulièrement obscurs, l’affirmait clairement : "J’écris pour donner du travail aux universitaires pour les siècles à venir." En fait, vivre éternellement serait sans doute d’un ennui sans fin. Car le désir de vivre, de créer, d’aimer se nourrit d’obstacles. Et, sans l’horizon de la mort, cette énergie intérieure s’éteindrait probablement à tout jamais. Autrement dit, nous avons psychologiquement besoin de la mort pour vivre.

 

Eros contre Thanatos

Plus nos décennies filent, plus la conscience de notre statut de mortel s’ancre dans nos esprits. "Tant que j’avais mes parents, j’y pensais rarement, assure Louisa, 59 ans. Maintenant que je suis grand-mère, je me dis qu’est venu mon tour."

 
Rédiger son testament est sans doute l’acte qui nous confronte le plus à la mort. Néanmoins, nous n’y croyons jamais concrètement. "Dans l’inconscient, chacun est persuadé de son immortalité", écrit Freud dans ses Essais de psychanalyse (Payot, 1989) : l’inconscient ignore le temps et, par conséquent, la mort. Même si nous avons vu des parents, des amis disparaître, notre inconscient nous murmure à l’oreille : "Toi, tu ne mourras pas." Le malade qui demande à être euthanasié ne croit pas davantage qu’il va mourir : il veut surtout abréger ses souffrances. Mais, à cet élan qui nous jette parfois dans les bras de la mort, il existe une autre explication. Selon Freud, en nous s’affrontent deux types de pulsions : les pulsions sexuelles, d’auto-conservation (qu’il nomme "Eros") et la pulsion de mort (qu’il appelle "Thanatos") présente en nous dès la naissance.

  

Chez l’individu normal, les deux sont associées et c’est cette union qui produit un mouvement vers la création ou la procréation. Cependant, il arrive que les péripéties de l’histoire personnelle d’un individu (mauvais traitements, abandon ou deuils précoces mal surmontés) entraînent une disjonction de ces forces. Et là, la mort mène la danse…

 

Yasmina, 25 ans : “J’ai annoncé à mon père qu’il allait mourir”

"Plus que trois mois à vivre…" Ces mots, le jeune interne des hôpitaux de Paris n’a pas su les dire à mon père, qui, à 77 ans, entrait en phase terminale d’un cancer du fumeur. Ma mère non plus : "Je n’y arriverai jamais…"  Je lui ai répondu, la gorge serrée, que papa détestait le mensonge et qu’il avait le droit de savoir… Me voici assise devant lui, au salon. Le vide s’est fait autour de nous… "Papa, ils nous ont menti, il ne te reste pas beaucoup de temps, trois mois au mieux. Tu as une tumeur dans un poumon, en plus de celle dans ta gorge, et des métastases partout… Rien à faire, c’est fini…"

 
Il répond d’abord avec ses yeux, surpris que l’émissaire désigné soit la troisième de ses enfants : moi qui, à 25 ans, continue à refuser qu’il me quitte. J’ai su lire dans son regard : il n’était pas trop inquiet pour lui-même, il était enfin parvenu à accepter l’idée de la mort. Après ce silence, il me répond : "Je le sais bien : les brûlures sont de plus en plus fortes dans ma gorge, dans mon dos… Chaque jour, c’est pire, mais moi ça va, j’ai bien vécu." C’est décidé, il mourra à la maison, ne veut pas d’infirmière et demande qu’une belle grille soit mise autour de sa tombe. Ces paroles sans réserve nous ont permis à tous de mieux vivre ce passage vers l’inconnu. Sa mort a été comme un instant de grâce : dans sa maison, entouré de ceux qu’il a aimés, il a eu droit au bonheur, même au bord du trépas. Je suis sûre que mes mots y ont été pour quelque chose.

 

Isabelle Taubes.

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5 mai 2012 6 05 /05 /mai /2012 11:50

-A travers la psychanalyse et la mythologie Arthurienne, ce texte de Sofia Mazlic décrit avec précision les épreuves qui font d'un jeune adolescent, " Un Homme !". Véritable initiation et découverte du soi, selon les usages et les rites de l'ancienne tradition-

 

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  - Merlin BBC ONE 2008 - Canal +/Gulli - The sword in the stone -

 

LA DÉCOUVERTE DE SOI-MÊME, DE L'AMOUR ET DE L'AUTRE DANS LE ROMAN MÉDIEVAL "FLORIANT ET FLORETE"

 

Texte tiré de l'excellent site  "La littérature du monde.fr", à découvrir.


Floriant et Florete est un roman d’initiation. Au Moyen-Âge, le passage de l’adolescence à l’âge adulte est particulièrement symbolique et douloureux. Il est parsemé d’obstacles très différents. A chaque moment, le héros, chevalier solitaire, est soumis à des épreuves soit physiques soit morales. C’est un thème récurrent dans le roman arthurien. Bien souvent ce passage initiatique est chargé d’une symbolique spirituelle. Il représente la quête qui est celle de la découverte de soi-même, du monde, de l’univers, et de la symbiose avec lui. Tous les héros partagent plus ou moins le même destin : le roi  Arthur, Perceval, Lancelot, Yvain. Ils cherchent « le vrai soi » car il existe toujours  autour de leur naissance une aura de mystère entretenue par des êtres féeriques ou surnaturels. Dans le cas de Floriant il y a une forclusion du nom du père (pour utiliser le vocabulaire psychanalytique). Il ne connaît pas son identité et la récompense au  terme de son initiation sera la délivrance de cette identité. C’est en cela que consiste l’intention didactique du roman arthurien. Présenter symboliquement, voire de manière ludique les combats du héros, ses démons intérieurs et sa victoire sur les circonstances.
    
   
A la fin il devient "Maître de lui-même et de sa vie" et est amené à gouverner celle des autres. Dans les romans de ce genre il y a une forte tendance à émerveiller. Le but de l’auteur est de nous faire comprendre que nous nous trouvons dans un monde fantastique et merveilleux et qu’il s’agit d’un héros tout à fait exceptionnel. Comme le nom héros l’indique, nous sommes en présence de quelqu’un qui est mi-homme, mi-divinité. Par conséquent, au final, il devient immortel. L’initiation chevaleresque consiste en maintes péripéties. Elles se concrétisent en aventures. Ces dernières sont là pour aguerrir le héros et inciter son activité physique, mais aussi pour stimuler son mental. Le hasard n’existe pas et chacune d’elle apporte au héros une leçon inoubliable, tout en le menant vers une autre aventure, encore plus merveilleuse et plus fantastique que la précédente. Alors que tout gravite autour du chevalier errant et solitaire, on est amené à suivre son itinéraire qui commence par la découverte de lui-même, avant de faire celle de l’amour et des autres. Cette découverte est jalonnée de passions, de pulsions, de peurs et de rêves qui se fondent en un sublime idéal chevaleresque. Nous allons suivre l’évolution du héros en passant par toutes ces séquences et essayant de comprendre leurs sens le plus profond.            
                 
Étant donné que Floriant et Florete est un roman d’initiation, il a avant tout une intention didactique. Le topos est celui du roman initiatique : le héros est jeté  dans le monde tout seul, les voyages les plus extraordinaires marquent son progrès. Il part d’un château enchanté pour passer à travers toute l’Europe,  c’est-à-dire le monde connu de cette époque, pour revenir enfin à la source. Donc un mouvement circulaire, parfait. Il se cherche, cherche son identité, son origine qui lui est dévoilée une fois qu’il a surmonté les obstacles qui s’étaient dressés sur son chemin.            
            
Ces voyages sont la découverte de nouveaux lieux merveilleux, car c’est un récit fantastique (Floriant et Florete) : existence de châteaux médiévaux connotant un univers mystérieux, nef merveilleuse, atmosphère des fois très étrange et inquiétante, termes lugubres (Chevalier Noir, Chevalier coupeur de tresses…). Mais le roman est plus marqué par des endroits paradisiaques, qu’ils soient réels  (terrestres) ou qu’ils soient de l’Autre monde comme le château de Morgane. Ces  locus amoenus symbolisent la paix de l’âme du héros et sa récompense au bout du chemin.     
                    
Au topos fantastique se joint le topos surréaliste. La réalité mystérieuse est omniprésente. Les lieux de révélations sont toujours bien choisis : château du roi Arthur, celui de Morgane…       
                   
Tout cela contribue à la création des conditions nécessaires à l’évolution physique et spirituelle du héros qu’on appelle initiation. Cette dernière passe par plusieurs phases et comporte un réceptacle d’émotions, de sentiments et d’actions qu’éprouve le personnage principal, et le construit. Elle commence par la découverte du "soi-même" qui mène ensuite vers l’amour qui, lui, mène vers la découverte de l’autre, c’est-à-dire le monde réel. Chaque phase de l’initiation est accompagnée de passions, de peurs et de rêves contre lesquels le héros doit lutter pour accomplir sa mission. C’est de là que découle la rencontre de deux opposés : l’amour et les armes. Paradoxalement on doit lutter pour conquérir l’amour, on doit se battre pour le mériter. La victoire issue de la guerre contre les passions et les peurs libère la personne et lui confère l’amour universel et le respect des autres.      
                     
Alors pourquoi cette initiation ? Sa valeur, où se trouve-t-elle ? Parce que c’est la nature la plus fondamentale de l’homme, celle de chercher, d’exister et de coïncider avec le monde qui l’entoure. En découvrant lui-même par introspection et action il découvre toutes les lois qui régissent la nature. Tout est lié. "C’est le miracle de l’alchimie – la connaissance".      
                    
La vie de Floriant comporte quatre passages initiatiques de deux  grandes étapes, chacune de quinze ans approximativement. Il part et quitte Morgane à l’âge de quinze ans pour entamer sa quête et lui revient, après avoir rempli sa tâche, à l’âge de trente ans, environ. Ainsi son destin prend la forme d’un cercle, symbole de la perfection.   
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Floriant comme nous l’avons déjà dit, part à la découverte de son identité. La notion d’identité dans le roman arthurien est très symbolique, elle connote la découverte non seulement de la vraie origine mais aussi de la nature la  plus profonde du héros et son destin car le caractère, on le sait bien, détermine le sort de la personne. Donc, Floriant se lance à la découverte de son nom, ses origines, c’est-à-dire, soi-même. Il s’adresse à sa mère présumée, Morgane : « Madame, écoutez-moi ! Je crois bien que vous êtes ma mère mais je ne sais pas qui est mon père ! »  A ces mots, Morgane se met à pleurer et dit à Floriant qu’elle n’est pas sa mère et qu’un grand part de son destin consiste en la découverte de ses vraies origines. Et c’est cela le fil qui le dirigera tout au long de son initiation. Il doit se frayer un chemin tout seul, son aucune aide extérieure. Se prouver à lui-même et aux autres qu’avant d’être quelqu'un grâce à la renommée de sa famille, il est d’abord "quelqu'un" grâce à ses exploits et sa force intérieure. Il se construit lui-même. Et selon le vieux adage qui dit que la valeur d’un homme se mesure par l’importance des difficultés qu’il a rencontrées dans la vie, le héros est soumis à maintes épreuves qui lui permettront, chacune à leur tour, de lui montrer sa puissance physique et mentale. Il les rencontre dans l’ordre croissant de difficulté : il libère les quinze chevalier de la Table Ronde d’Arthur en vainquant Moradas , ensuite il tue le Pellican, bête cruelle qui mangeait des filles habitant à l’île aux belles Pucelles, il tue deux géants et finalement gagne dans le duel avec le chevalier coupeur de tresses.
  
C’est seulement à ce moment-là qu’il « mérite » de se présenter à la cour d’Arthur, lieu où l’on juge un chevalier d’après l’importance des batailles remportées et son courage. Sa valeur et sa  témérité lui valent la découverte de son identité. Il se montre digne du nom qui lui appartient de par sa naissance. La fée Morgane, sa mère adoptive lui reprend la nef enchantée mais lui dévoile son nom : il est prince, fils du roi Elyadus : « Mais maintenant elle [ Morgane ] veut t'apprendre en toute vérité qui fut ton père. C’était un homme de valeur, très réputé qui s’appelait le roi Elyadus. Il était roi d’une contrée prospère, la célèbre Sicile était à lui […] Mais Maragot, son sénéchal, un homme très perfide et déloyal, le tua un jour par traîtrise. Apprends pour quelle raison. […] » La lettre de Morgane contient deux choses : elle loue le mérite du père du héros éponyme et en décidant de lui dévoiler son identité véhicule le message qu’il est le fils digne de son père ; ensuite cette lettre représente l’étape suivante dans l’initiation de notre héros. Il doit venger la mort de son père et le malheur de sa mère qui se trouva dépourvue de tout. Car le héros évolue dans un système féodal et doit réaliser l’idéal chevaleresque qui dissimule un idéal mystique. Grâce à ses exploits guerriers il gagne l’estime du roi (ici du roi Arthur), découvre et accomplit sa mission ici-bas. Après s’être cherché il trouve le "soi-même" ou "être authentique" mais aussi tout un monde qui lui était jusqu’alors inconnu. En face de ce monde il réagit de façons différentes, éprouve des  sentiments différents.         
                 
Paradoxalement, sa lutte qui frôle la haine par moments, ses armes qui font de lui un tueur inlassable (car l’ouvrage abonde en épisodes violents et sanglants) le mène vers l’amour, le sentiment le plus pur. Les armes et les amours  se mélangent et seulement un vrai chevalier, un homme noble mérite d’être aimé par une belle et noble femme. Tout est dans le livre sous le signe du merveilleux : événements, objets, pouvoirs, créatures surnaturelles, lieux enchantés, malédictions, bénédictions… Et l’amour est la plus grande des magies. Grâce à lui le héros arrive à  surmonter tous les obstacles dont la plupart (sinon tous) se trouvent en lui-même. Le héros doit d’abord surmonter ses peurs, la peur de l’inconnu, de la mort, de la souffrance (ce qui est illustré par son désir d’aller à leur rencontre en cherchant sa vraie identité et constitue la première phase de l’initiation), cela le mène vers la maîtrise de ses propres passions incarnées dans l’amour, l’amitié, le sexe, le pouvoir et la richesse.
  
Une fois les obstacles abolis, les peurs dominées, les passions contrôlées, il est à même de réaliser ses rêves, à savoir son idéal chevaleresque, sa mission sur terre : il obtient la liberté et accède à l’immortalité. Sa quête du Saint Graal est terminée. Il a justifié le fait d’appartenir aux élus. L’éternelle s’étend devant  lui et partout où il va, l’abondance l’accompagne. Le Graal est le symbole de la vie éternelle, de la réunification des opposés : animusanima, conscient – inconscient,  haut – bas… Son contenu est indicible, il doit être cherché, trouvé, mérité. Il transcende la religion et touche aux sphères de la spiritualité. Le chevalier, qui est un  mâle, y arrive en réconciliant les opposés en lui-même, en devenant parfait. Son anima, c’est Morgane, le symbole du féminin, l’antipode de Merlin. Elle est mère <  mer < eau (le féminin dans l’alchimie). Nous voyons ces contrastes partout dans le roman, des substances aqueuses omniprésentes, symboles du féminin et des substances solides (château, tour), symboles du masculin.
 
On ne naît pas héros, on le devient. Et pour cela il faut traverser maintes épreuves, passer par un chemin parsemé d’embûches et de déboires où l’on apprend à se contrôler soi-même et à contrôler les autres et la vie. Surmonter ses peurs, triompher de ses passions permet au héros d’accéder à son idéal, de réaliser ses rêves et d’entrer dans le clan des grands, celui du roi Arthur, des chevalier de la Table ronde… Il devient immortel. Il devient un homme libre qui transcende le monde matériel pour entrer dans le monde des esprits (de la conscience). Mais cela, il doit le faire tout seul, par le biais de ses aventures, en découvrant l’amour. Il change, grandit, mûrit et finit par faire partie de la perfection.  
                                         
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27 avril 2012 5 27 /04 /avril /2012 15:59

François Noudelmann reçoit Pierre Bras à propos de la revue L'homme et la Société, qu'il coordonne avec Michel Kail, pour parler du n°179-180, "Simone de Beauvoir et la Psychanalyse" (l'Harmattan, février 2012).

 

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France-Culture

 

En 1976, Simone de Beauvoir déclare à Alice Schwarzer : « Il y a une autre chose que j'aimerais beaucoup faire si j'avais aujourd'hui 30 ou 40 ans : c'est un travail sur la psychanalyse. Pas en repartant de Freud, mais en retraçant le chemin d'un point de vue féministe : selon le regard d'une femme et non celui d'un homme » (Simone de Beauvoir aujourd'hui, 94). Par cette phrase, Simone de Beauvoir rappelle à la fois son intérêt pour la psychanalyse et sa position critique vis-à-vis de l'oeuvre de Sigmund Freud.

 

La célébrité de Simone de Beauvoir ne repose pas sur la psychanalyse. Elle n’y a pas laissé son nom. Aussi l’intitulé de cet article a-t-il pu surprendre. On constatera, à la lecture des Actes publiés dans ce volume, comment et combien les intervenants du colloque ont trouvé matière à ranimer l’actualité de la question : Beauvoir et la psychanalyse. Tout a commencé, en 2008, à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance, par des marques d’intérêt portées à la bibliographie raisonnée qu’elle consacre à la psychanalyse dans "Le Deuxième Sexe".

 

On pouvait aisément y percevoir, au-delà du souci méthodique et de la perspective critique, une résonance à l’œuvre de Freud, celle de ses contemporains et ses successeurs parmi lesquels, tout particulièrement, Jacques Lacan. On sait qu’historiquement, disons même socialement, Simone de Beauvoir a appartenu à une génération d’intellectuels qui tous, même ceux qui furent étrangers à la cause de la psychanalyse, avaient lu Freud et côtoyé Lacan à un moment ou à un autre de leur parcours. Dans les années vingt, aucun intellectuel engagé dans ses humanités n’ignora la psychanalyse et ses œuvres majeures.

 

 Simone de Beauvoir prolongea sa connaissance par des lectures, son passe-temps favori depuis l’enfance. L’article précoce de Lacan, paru en 1938 dans L’Encyclopédie française, sur  " Les complexes familiaux dans la formation de l’individu " retint son attention. On y trouve un argument essentiel relatif au Stade du miroir  que Lacan exposa brièvement deux ans plus tôt au congrès de psychanalyse à Marienbad. Ernest Jones, le biographe de Freud et président du congrès, ne lui permit pas de dépasser le temps de parole alloué à chaque orateur.

 

 Dans Le Deuxième Sexe, Simone de Beauvoir s’attarde sur le rapport de l’enfant au miroir. Elle l’inclut dans la genèse de ce qui, à ses yeux, fait obstacle au devenir de la femme. « Il semble, écrit-elle, que ce soit à partir du moment où il [l’enfant] saisit son reflet dans les glaces — moment qui coïncide avec celui du sevrage — qu’il commence à affirmer son identité : son moi se confond avec ce reflet si bien qu’il ne se forme qu’en s’aliénant.  

   

 En privilégiant cette partie du texte, Simone de Beauvoir entre spontanément en résonance avec le thème, cher à Lacan, de l’inévitable aliénation du petit d’homme dans le processus de sa découverte du semblable. Un thème ou plus exactement une thématique qu’il reprend dix ans plus tard dans deux congrès qui ont fait date, l’un à Bruxelles et l’autre à Zürich que Simone de Beauvoir, à l’évidence, ignora. Quoi qu’il en soit, une coïncidence de dates mérite d’être rappelée. On sait en effet, qu’elle achève son manuscrit en 1948 et elle appelle Lacan, qu’elle n’avait plus revu depuis des années pour avoir son avis sur la part psychanalytique de son texte, notamment sur la bibliographie et sur le long chapitre intitulé « Formation ».

 

Il est très occupé, préoccupé peut-être ou intéressé par la polémique que soulève Beauvoir, et il lui dit que leurs rencontres devront s’écouler sur quelques mois. Elle refuse. Elle et lui ont une vision différente du temps nécessaire à la rencontre : il lui parle de quelques mois, elle se dit prête à quatre rendez-vous. Quelque influence qu’ait pu exercer son livre sur la manière de concevoir la sexualité féminine ou, comme le rappelle Elisabeth Roudinesco, sur la tenue d’un congrès que Lacan consacra à cette question dix ans plus tard en 1958, les psychanalystes ne mentionneront jamais "Le Deuxième Sexe" que ce soit pour sa bibliographie raisonnée ou pour ses positions sur l’aliénation de la femme.

 

Il reste, autre fait marquant, que si Beauvoir a retenu le rôle du miroir et du reflet sur le moi de l’enfant, elle lui consacre une étonnante note de bas de page dans le chapitre intitulé « Formation » où elle privilégie une expression qu’emploie Lacan dans son texte selon laquelle « le moi garde la figure ambiguë du spectacle ». Il s’agit d’un rappel effectué de mémoire sans retour au texte où la phrase se dessine de façon différente. La voici : " Disons, écrit Lacan, que le moi gardera de cette origine la structure ambiguë du spectacle qui, manifeste dans les situations plus haut décrites du despotisme, de la séduction, de la parade, donne leur forme à des pulsions, sadomasochiste et scoptophilique (désir de voir et d’être vu), destructrices de l’autrui dans leur essence ".

  

S’agissant du spectacle, la confusion, sinon le lapsus, entre figure et structure est loin d’être indifférente. Car avec Beauvoir, nous ne sommes pas sortis du spectacle. Il traverse son histoire, sa pensée, sa vie, son œuvre et ses amitiés. C’est avec elle, pour et par le spectacle, que ce colloque a été conçu. Chacun, à sa manière, en a traité pour restituer l’originalité d’un propos et d’une structure, celle de Simone de Beauvoir, qui, à sa manière, marqua son époque et son siècle. Que tous les auteurs et intervenants en soient ici remerciés.

 

Daniel Brun pour Cairn.info

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25 avril 2012 3 25 /04 /avril /2012 09:36

Le psychothérapeute et psychanalyste Jungien Tristan Moir met à disposition des internautes le fruit d'un travail constant et laborieux: Soit un dictionnaire très riche des symboles et images vécu dans le rêve. "Un voyage fascinant vers les profondeurs de l'être !"

 

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Ce site dédié au rêve et à son interprétation psychanalytique se divise en deux parties principales :

 

  • Les différents aspects du rêve et ses fonctions :

Chaque onglet vous invite à découvrir différents thèmes spécifiques au rêve, à son fonctionnement et à son langage.

 

 

  • Le Dictionnaire Psychanalytique des Images et Symboles du Rêve :

Plus de neuf cents symboles définis pour vous aider à comprendre le sens de vos rêves dans une perspective d’introspection analytique.

 

 

Cliquez sur Tristan Moir pour accéder au site:

 

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20 avril 2012 5 20 /04 /avril /2012 11:39

Rappelons-nous les livres brûlés en 1933 sur la place publique au temps du national-socialisme, avec un emportement émotionnel sans précédent frôlant l'hystérie collective. Nous sommes en 2012... Et rien n'a changé ! Sinon que cette folie destructrice s'est déplacée vers "le numérique", où l'on brûle les idées comme les ouvrages d'autrefois, sans aucune forme de respect.

 

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"Les attaques répétées des médias contre les intellectuels, les psychanalystes et les professeurs peuvent rendre ce pays stérile et inculte...Cela doit cesser."

 

 

La psychanalyse est, avec le darwinisme et le marxisme, l’une des révolutions majeures de notre temps. Il va de soi que cela dérange profondément, puisque l'homme a toujours été, depuis ses origines, animé par un puissant désir « d'inertie » nourrit par un besoin impérieux de sécurité. Les psychanalystes pourraient y diagnostiquer un syndrome morbide d'infantilisme, doublé d'un refus de l’existence et de ses difficultés, conduisant parfois à la haine.

 

« Pour l’humain, faire face à la vie et s’adapter à de nouveaux concepts relève bien du miracle ! ». Souvenons-nous de Galilée et de ses déboires légendaires face à l'église ; ainsi que la vie d'Hypatie, brillante philosophe et astronome du IV siècle, mise à mort par des religieux fanatiques (eux-même manipulés par le pouvoir en place)… Le temps passe, la science avance, mais l’homme tourne en rond, fidèle à lui-même, dans sa logique de fermeture d’esprit et de turpitude.

 

Ainsi, l’on voit renaître des courants de pensées régressifs, tel que le comportementalisme conservateur, ou l’on conditionne les individus ; ou le créationnisme, pseudo-science prêchant  la création du monde en six jours par Dieu lui-même !

 

Tous ses courants sont issus des cercles ultraconservateurs d’extrême droite en provenance d’Amérique. Où l’on sait pertinemment qu’un peuple « gouvernable » ne doit pas être intelligent. La France a résisté jusqu’à aujourd’hui… C’est l’un des derniers pays prônant sa souveraineté intellectuelle et ne se soumettant pas encore au mode de pensée global imposé par l’idéologie anglo-saxonne.

 

Mais il semblerait bien que toute chose ait une fin ! Notre système social, éducatif et intellectuel, très envié, est en voie d’extinction… Et le peuple français qui jadis brilla par ses actes de résistances semble sombrer dans une forme de soumission, tel le régime de Vichy, qui fut la honte de notre pays.

 

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Les médias s’en mêlent, comme dirigés par une autorité qui souhaite avant tout semer la confusion et la division au sein même de la population. Ces idées extrémistes permettent de leurrer les individus afin qu’ils ne « voient pas et ne discernent pas » leurs véritables ennemis ! Les gens se retournent les uns contre les autres et il faut alors se poser la question suivante : La psychanalyse doit-elle se battre pour continuer d’exister aux yeux de ceux qui la dénigre ?

 

Si les citoyens estiment que le mode de pensée « linéaire et manichéen » anglo-saxon leur convient, Il serait peut-être judicieux que la psychanalyse se retire et laisse ses détracteurs se débattre dans le bourbier qu’ils ont eux-mêmes créé ! Au nom de quoi devrions-nous payer des fautes qui ne sont pas les nôtres… Etant donné l’état catastrophique de notre pays, autant économiquement que socialement, il serait sage de préserver « les sciences de l’ouverture d’esprit » pour servir et seulement servir ceux qui en sont dignes, quelque soit leurs positions sociales, leurs origines ou leurs cultures.

 

La psychanalyse ne triomphera pas face à la bêtise humaine ! Cette bêtise est d’ailleurs une forme d’autisme incurable ou seul le conditionnement peut redresser ses adeptes. L’analogie est surprenante, je l’admets… avec tout le respect que je dois aux vrais autistes, qui eux souffrent d’un mal bien réel et non pas d’une « sclérose de l’esprit ».

 

« Quand les peuples auront pris conscience de ce qu’ils ont perdu, il sera alors tant de refaire surface. » Mais tant que cette prise de conscience n’aura pas lieu, les idées extrémistes et les médias qui les véhiculent auront gain de cause. Attendre et espérer que ce monde « devenu fou » se relève, reste probablement la meilleure option !

 

L’idée de préserver cette science de la boue des idioties de notre temps est une priorité à étudier… Du moins jusqu’à un probable soulèvement citoyen. En attendant, prenons le temps de nous auto-analyser et d'apprendre de nos erreurs...

 

Note: Il est heureux de constater que le mouvement anti-psychanalytique ne fait plus recette, puisque cette parution du Nouvel Observateur ne s'est pas réellement bien vendue ! 

 

Voici le podcast de l'émission France Inter:

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16 avril 2012 1 16 /04 /avril /2012 13:23

Synopsis et vidéos du documentaire "Infrarouge", sur France 2.

 

La psychogénéalogie invite à travailler sur la question de la transmission des traumatismes de génération en génération. Beaucoup y trouvent une réponse à des souffrances récurrentes, un apaisement, un nouveau sens à leur vie. Créatrice de la discipline, la psychanalyste Anne Ancelin-Schützenberger évoque ces héritages qui manipulent nos vies, à travers l'expérience de quatre témoins. Des douleurs intimes empêchent Antoine, 26 ans, d'avancer dans sa vie professionnelle. Professeur de langues, Marie-Pierre, 53 ans, a souffert pendant des années de dépression. Nathalie, 38 ans, qui avait 2 ans et demi quand son père est mort dans un accident de la route, avait développé une phobie. Une fois grand-mère, Monique, 57 ans, a retrouvé les traces de son grand-père, juif déporté, qu'on avait voulu effacer de la mémoire familiale.

   

 




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11 avril 2012 3 11 /04 /avril /2012 12:14

"A mesure qu'ils avancent dans l'exploration de la machinerie cérébrale, les neurobiologistes découvrent qu'elle obéit à des lois beaucoup plus complexes qu'ils ne l'imaginaient. Et que la vie mentale dont elle est le terrain confirme, des rêves au langage ou à l'imagination, nombre des intuitions du père de la psychanalyse. La fin d'une vieille querelle !"

 

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Au centre «émotion» de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Depuis deux ans, une quarantaine de patients essaient d'y soigner leurs angoisses et leurs phobies en s'immergeant dans des mondes virtuels représentant leurs pires cauchemars...

 

Casque de réalité virtuelle vissé sur la tête, un homme en survêtement avance à tâtons dans une pièce plongée dans la pénombre au deuxième étage d'un pavillon de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. André, 40 ans, souffre depuis des années d'une phobie maladive des hauteurs: il panique à l'idée de s'approcher d'une fenêtre ou de traverser un pont. Médicaments, psychothérapies, il a tenté sans succès tous les traitements avant d'arriver ici, pour essayer de conjurer sa peur au milieu d'un paysage artificiel en trois dimensions. Depuis quelques minutes, front en sueur et gestes hésitants, il avance péniblement sur un chemin escarpé au bord d'une falaise, guidé par la voix du thérapeute qui l'encourage dans les écouteurs: «Allez-y, avancez encore quelques pas, vous pouvez y arriver.» 

 

Depuis deux ans, une quarantaine de patients souffrant de troubles d'angoisse et de phobies liés à la hauteur, à la foule, à l'enfermement sont soignés au centre «émotion» de la Pitié. Adressés par des psychiatres de l'hôpital ou du secteur privé, ils viennent s'immerger dans des mondes virtuels reproduisant leurs pires cauchemars: villes désertes, châteaux, ponts suspendus? Un monde habité par une sympathique araignée est même réservé aux arachnophobes. «Ces environnements stimulent toutes les formes de perception sensorielle et permettent aux malades de se confronter au plus près à leurs angoisses, explique Roland Jouvent, chercheur au CNRS et directeur du centre «émotion». On leur donne des missions à accomplir: ouvrir des portes, trouver le cinéma dans la ville, pour les inciter à avancer. L'essentiel est qu'ils arrivent ensuite à mieux gérer leur peur dans le monde réel.» 

 

«Neuros» et psys réconciliés ?

  

Malgré plus d'un siècle de divergences et d'invectives, le dialogue entre psychanalyse et neurosciences semble timidement se renouer. Sous l'impulsion de quelques spécialistes des deux bords, un nouveau courant interdisciplinaire lancé aux Etats-Unis est en train de se constituer, comme en témoigne la création, en juillet 2000, de la Société internationale de neuropsychanalyse, qui réunit des analystes, des neurologues et des cognitivistes décidés à rétablir des ponts entre eux. «Le divorce entre psychanalyse et neurosciences tient plus à l'ignorance et à la défiance réciproque qu'à une quelconque incompatibilité scientifique, explique le Pr Daniel Widlocher, un analyste qui travaille avec des neurologues à l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière pour soigner des patients cérébrolésés et qui vient de déposer les statuts de la première société de neuropsychologie française.

 
«Beaucoup de neurobiologistes se méfient de la théorie freudienne sans avoir fait l'effort de s'y plonger, comme beaucoup d'analystes refusent de s'intéresser aux travaux des neurologues, qu'ils jugent réductionnistes. Mais les deux disciplines ont pourtant tout à gagner à se parler!» Une bonne partie de ce malentendu tient au fait que la psychanalyse n'est pas à proprement parler une science, mais une méthode introspective et une relation personnelle que l'on ne peut transmettre. Cognitivistes et freudiens cherchent la même chose, comprendre l'esprit humain, mais les chercheurs ne sont pas des thérapeutes. «La science voudrait mettre tout le monde d'accord, remarque l'analyste Gérard Miller, mais la psychanalyse, elle, n'a pas de vocation consensuelle.»

 
G.C. 

 

Bon anniversaire, cher Sigmund Freud! Le père de la psychanalyse, dont on fêtait, le 6 mai, la naissance, il y a cent cinquante ans, doit se retourner dans sa tombe. Les neurobiologistes, qu'il avait toujours tenus en piètre estime, viennent désormais empiéter sur son territoire. Ils ne se contentent plus de soigner les lésions cérébrales, la maladie d'Alzheimer ou celle de Parkinson, voilà qu'ils s'intéressent à des troubles apparemment non organiques qui relevaient jusque-là surtout du divan des analystes. Comme les phobies, les obsessions, ou encore la dépression, la pathologie mentale la plus répandue, que des médecins canadiens ont entrepris de soigner à l'aide d'électrodes implantées dans le cerveau. 

 

Les chercheurs de l'université de Toronto ont en effet localisé un défaut d'activité dans des aires limbiques des patients neurasthéniques, dans une zone qui commande la satisfaction des besoins fondamentaux comme l'appétit, la libido et le sommeil. Ils ont proposé à des patients gravement dépressifs, rescapés du Prozac et des cabinets de psy, de les opérer pour installer dans cette zone un stimulateur électrique relié à un pacemaker - selon une technique mise au point pour arrêter les tremblements des parkinsoniens - afin de redonner du tonus à leurs neurones fatigués. Ces derniers mois, 12 malades ont été «branchés», dont 8 montrent les signes d'une nette amélioration. 

 

Les «neuros» auraient-ils définitivement pris le dessus sur les «psys»? A première vue, tout le laisse penser - mais les apparences peuvent être trompeuses. Depuis plus d'un siècle, ces frères ennemis n'ont cessé de se tourner le dos ou de s'affronter par doctrines interposées. Freud avait été un brillant neurologue dans sa jeunesse, avant d'abandonner brutalement cette voie et de mettre à l'index une bonne partie de ses écrits. Considérant que cette discipline balbutiante ne pouvait expliquer le fonctionnement de la pensée, il a préféré en chercher les rouages, non pas dans la machinerie cérébrale, mais à travers la parole de ses patients. Ses héritiers se sont repliés sur le dogme de l'inconscient en continuant à bouder les neurosciences, considérées comme réductionnistes et incapables de dire quoi que ce soit sur les émotions, la personnalité, la motivation. 

 

De leur côté, les scientifiques «durs» ont eu le même mouvement de rejet envers la théorie freudienne, jugée bavarde et fumeuse, défendant l'idée d'un «homme neuronal», produit de sa biologie et programmé pour penser, en promettant même de «tordre le cou aux beaux discours de la psychanalyse», comme l'a écrit l'un des pontes français de la discipline, Jean-Pierre Changeux. Aucun dialogue ne paraissait plus possible avec de tels anathèmes et le divorce entre les deux disciplines semblait s'être conclu au profit de la psychanalyse. 

 

Tristesse et passion intéressent les chercheurs

  

Jusqu'à la fin des années 1980, celle-ci a occupé une place dominante dans le monde de la pensée, aussi bien auprès des psychiatres et des spécialistes de santé mentale - à qui elle fournissait la seule théorie globale du sujet - qu'auprès des intellectuels et des artistes. Mais, depuis quelque temps, la vapeur s'est inversée, comme on a pu s'en rendre compte avec le récent battage médiatique autour du Livre noir de la psychanalyse, brûlot ouvertement destiné à déboulonner la statue de Freud. Les tenants de la théorie analytique paraissent, en effet, avoir perdu beaucoup de leur superbe. Suspectée à mots couverts d'inefficacité dans un rapport de l'Inserm, elle se trouve concurrencée, dans les cabinets de consultation comme dans les universités, par les partisans de doctrines en apparence plus scientifiques, telles les thérapies cognitives et comportementales, la pharmacologie ou la chirurgie, qui revendiquent une approche plus rationnelle et pragmatique des troubles mentaux. 

 

La messe semblait donc être dite, et le dogme freudien bon à ranger dans le placard des antiquités, comme une sympathique construction mentale déconnectée de la réalité, dépassée. D'autant plus que les sciences cognitives ont, elles, progressé de manière spectaculaire ces dix dernières années. Grâce au développement des scanners, des ordinateurs et de la biologie moléculaire, il est devenu possible d'observer l'activité du cerveau en direct, in vivo, et de cartographier des aires associées aux opérations mentales les plus diverses. Certaines installations d'imagerie cérébrale, comme celle d'Orsay, permettent littéralement de voir ce que voit le sujet installé dans la machine, en suivant sur l'écran l'activité de ses aires visuelles. 

 

Pionniers de la neuro-économie

 

Les neurosciences seraient-elles solubles? dans l'argent? Aux Etats-Unis, de plus en plus d'économistes s'inspirent des recherches sur le cerveau humain pour tenter de décrypter les comportements, souvent irrationnels, d'achat et d'investissement. Plusieurs études par IRM montrent ainsi qu'une prise de décision à court ou à long terme n'active pas les mêmes zones du cerveau, et qu'un calcul de coûts ou de bénéfices émoustille des réseaux neuronaux différents! A quoi ces zones correspondent-elles et comment les stimuler pour influencer la prise de décision? On est encore loin d'avoir les réponses. Mais, en attendant, la «neuro-économie», comme elle s'est baptisée outre-Atlantique, fait salle comble dans les colloques internationaux et a déjà permis à deux de ses pontes, Daniel Kahneman et Vernon Smith, de décrocher un prix Nobel. Même si elles sont encore balbutiantes, ces recherches intéressent évidemment au plus haut point les spécialistes du marketing, qui s'en inspirent pour tenter d'influer sur les comportements des consommateurs?

 
R. de C. 

 

A partir de l'étude de patients souffrant de lésions cérébrales et de l'enregistrement de l'activité neuronale de singes, les chercheurs ont identifié des réseaux synaptiques liés au langage, aux rêves, à la conscience, et s'intéressent désormais à des concepts subjectifs comme le sentiment de tristesse, l'empathie, la perception de la beauté, la passion amoureuse, voire le jugement moral, qui peut aussi s'expliquer par les neuromédiateurs et les synapses. Pour la première fois depuis longtemps, la neurobiologie s'aventure au coeur des concepts freudiens et commence à les mettre à l'épreuve des faits. On pourrait s'attendre au pire, mais, surprise, la vieille doctrine du Dr Sigmund ne s'en sort pas si mal. On pourrait même dire qu'elle reprend un coup de jeune à la sortie de cette confrontation. 

 

«Les technologies actuelles nous ont fait découvrir une vie mentale beaucoup plus riche et complexe qu'on ne l'imaginait, explique Lionel Naccache, neurologue et chercheur à l'Inserm. Freud a eu le génie de découvrir intuitivement cette complexité. Il a forgé des concepts parfois controversés, qui se révèlent finalement aujourd'hui très pertinents. Certes, il s'est trompé ailleurs, mais bon nombre de ses idées continuent de tenir la route.» La théorie des rêves, par exemple, considérés par la psychanalyse comme des aperçus de désirs inconscients ou de traumatismes enfouis, avait été discréditée dans les années 1950 par les travaux des neurologues sur le sommeil paradoxal. On attribuait alors le phénomène des visions nocturnes à un cycle mécanique contrôlé par le tronc cérébral, une partie du cerveau sans émotion. «On se rend compte aujourd'hui que cette vision était largement fausse, reconnaît Jean-Pol Tassin, directeur de recherche à l'Inserm et professeur au Collège de France. On a découvert récemment que le rêve n'est pas automatiquement lié au sommeil paradoxal.» 

 

Il est plutôt engendré par des structures du lobe frontal chargées de satisfaire les besoins fondamentaux comme la faim ou le sexe. Les visions nocturnes ramènent à la surface du cerveau des informations traitées inconsciemment, qui ne sont pas forcément sélectionnées intentionnellement, comme le soutenait Freud, mais prises au hasard sur la chaîne de montage mentale. Détail troublant: le neurologue et psychanalyste britannique Mark Solms a montré que les hallucinations des psychotiques se déclenchent dans la même zone qui produit les rêves. 

 

La parole, essentielle à la survie des neurones

 

Un autre concept forgé par Freud se retrouve lui aussi réhabilité: celui de l'amnésie infantile. Le médecin viennois avait, le premier, constaté l'absence de souvenirs avant l'âge de 2 ans, qu'il expliquait par le principe du refoulement. «On sait aujourd'hui que cette amnésie existe bel et bien, sans pour autant avoir besoin d'invoquer le refoulement, note Francis Eustache, professeur de neuropsychologie à l'université de Caen. Elle pourrait être liée à un processus de maturation cérébrale: la partie frontale du cerveau où se trouve la mémoire épisodique, celle qui permet de conserver les souvenirs et de faire le lien avec le passé, constitue l'un des systèmes les plus complexes, très lent à se mettre en place: il ne semble pas fonctionner entre 0 et 2 ans et n'atteint sa pleine puissance qu'à l'adolescence.» De même que le cerveau des enfants surdoués semble se développer plus lentement que les autres, si l'on en croit une grande étude de neuro-imagerie qui vient d'être publiée par le National Institute of Mental Health, l'institut américain de santé mentale. Le cortex supérieur des sujets les plus performants aux tests d'intelligence arrive en effet plus tardivement à maturation: il semble plus fin au départ, mais il s'épaissit ensuite plus vite et cette croissance se prolonge jusqu'à l'âge de 13 ans, alors que ce processus s'arrête en moyenne vers 8 ans chez les individus «moyennement» intelligents. 

 

Les psychanalystes, qui ont fait du langage la pierre de Rosette de la pensée, peuvent également se réjouir de voir que les neurologues arrivent à la même conclusion. Les travaux récents sur la plasticité neuronale montrent que l'usage de la parole apparaît essentiel au développement du cerveau et à la survie des neurones. Le petit d'homme naît avec des capacités mentales proches de celles du cochon d'Inde, pratiquement sans aucun comportement spontané, même pas celui de manger. L'esprit se construit essentiellement à travers l'entourage, parental puis social et culturel. «Si l'enfant ne se met pas à parler, les connexions correspondantes ne se mettent pas en place et il perd à jamais cette capacité», constate Lionel Naccache. Plus étonnant, les neurones se détruisent aussi quand on apprend, pour faire de la place aux nouvelles connexions. 

 

Autre exemple d'intuition freudienne confirmée par les faits: celui de l'imagination, c'est-à-dire le processus qui s'engage quand on est allongé sur un divan en laissant libre cours à ses pensées. Les psys ont toujours soutenu que les images mentales étaient produites sur le même principe que la perception visuelle. Autrement dit, que le cerveau traite de la même façon les choses vues dans la réalité et celles qu'on se représente intérieurement. Une conception longtemps contestée par les neurologues, et pourtant récemment confirmée par l'imagerie cérébrale: les visions intérieures activent bel et bien les aires visuelles. 

 

Le futur temple du cerveau

 

Le premier centre de recherche français consacré à l'exploration du cerveau humain a ouvert ses portes en 2009, à Saint-Aubin (Essonne). Financé par l'Etat et les collectivités locales et équipé de batteries d'appareils d'imagerie dernier cri répartis sur 8 500 mètres carrés, NeuroSpin doit permettre aux chercheurs - qui sont aujourd'hui contraints d'utiliser les scanners et les IRM des hôpitaux, réservés en priorité aux malades - de disposer d'un outil unique en Europe. Grâce à la puissance de leurs champs magnétiques, les nouvelles machines vont permettre de photographier des détails de l'ordre de 1 dixième de millimètre à travers la boîte crânienne (au lieu de 1 millimètre aujourd'hui) et de suivre l'activité des neurones quasi en temps réel, alors que les images des engins actuels les plus performants sont capturées toutes les quatre secondes, sans moyen de savoir ce qui se passe entre deux clichés?

 
R. de C. 

 

Un chercheur italien, le Pr Giacomo Rizzolatti, a même découvert le mécanisme précis par lequel notre cerveau simule intérieurement le monde extérieur pour se le représenter. Alors qu'il mesurait l'activité électrique du cortex prémoteur de macaques, à l'université de Parme, il a constaté que des groupes de neurones s'activaient de la même façon lorsque le singe faisait un geste et lorsqu'il regardait quelqu'un en train de le faire. Situés dans l'aire qui contrôle les mouvements corporels, ces «neurones miroirs» n'existent que chez l'homme et les primates supérieurs. Ils permettent de reproduire mentalement des actions, mais aussi d'imiter les autres, de deviner leurs états mentaux, bref de communiquer. Ce mécanisme réflexif est probablement à l'origine du langage, apparu d'abord sous forme de gestes, qui a permis la transmission du savoir et de la culture. Les neurones de l'empathie, comme on pourrait les appeler, semblent justement défaillants chez les autistes. Des chercheurs américains ont mis en évidence une onde cérébrale, dénommée «rythme mu», qui se déclenche quand les neurones miroirs entrent en action. Mais le signal reste muet lorsque ces malades voient quelqu'un faire un mouvement, contrairement aux personnes «normales», et n'apparaît que s'ils effectuent eux-mêmes réellement le geste. 

 

Les freudiens ont toujours soutenu que l'esprit n'est pas un ordinateur, ni le monde une cassette enregistrée. Ils sont aujourd'hui rejoints par des neurobiologistes aux idées larges qui considèrent le cerveau non plus comme un organe figé, une boîte noire d'où entrent et sortent des stimuli, mais comme un système de réseaux superposés et de connexions en perpétuel remaniement, sous l'influence de l'environnement extérieur et des émotions internes. Il a fallu attendre 1997 pour apprendre que, contrairement à un dogme bien ancré, les neurones peuvent se régénérer chez l'adulte et que de nouvelles connexions ne cessent de se former dans la matière grise. 

 

C'est ce qui a valu le prix Nobel de médecine, en 2000, à Erik Kandel, psychiatre américain formé à la psychanalyse qui s'est ensuite orienté vers la biologie: il a montré que les expériences vécues laissent une trace physique dans le cerveau, en modifiant la transmission synaptique entre les neurones. Ces traces mnésiques peuvent se fixer inconsciemment et se réassocier avec d'autres traces, parfois en interaction, parfois en contradiction. «Cette découverte constitue une énorme avancée en même temps qu'un pont entre la psychanalyse et les neurosciences, s'enthousiasme le psychiatre et analyste suisse François Ansermet, qui vient de publier A chacun son cerveau (Odile Jacob), avec le neurologue Pierre Magistretti, professeur à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. Ce concept de plasticité permet enfin aux biologistes de sortir du carcan du déterminisme et de la causalité organique: le cerveau ne sécrète pas la pensée comme le foie sécrète la bile, il est modelé aussi bien par le code génétique, qui programme la fabrication des neurones, que par l'environnement et l'expérience vécue.» Le Prix Nobel Eric Kandel paraît du même avis. Il considère que «la psychanalyse reste la vision du fonctionnement mental la plus cohérente et la plus satisfaisante sur le plan intellectuel», et plaide pour que la théorie de Freud soit adoptée par les neurobiologistes comme un équivalent de ce que représente la théorie de l'évolution de Darwin pour les biologistes et les généticiens: un cadre général permettant de ranger les données scientifiques de façon cohérente. 

 

Et l'inconscient, dans tout ça?

 

A défaut d'expliquer le concept central de la théorie freudienne, les neurobiologistes commencent à démonter les mécanismes de la conscience, la fonction mentale la plus élaborée, celle par laquelle on arrive à penser que l'on pense. En fait, celle-ci s'apparente à un phénomène exceptionnel: la plupart des tâches mentales sont effectuées de manière inconsciente par des aires spécialisées qui travaillent de manière indépendante: 90% des informations traitées par le cerveau échappent à notre attention. C'est valable pour des fonctions comme le contrôle du rythme cardiaque ou de la digestion, mais aussi pour des opérations plus complexes. Même les mouvements que nous effectuons en toute lucidité sont en fait déclenchés de façon inconsciente. Un chercheur londonien de l'University College, Patrick Haggard, est parvenu à décomposer les processus cérébraux mis en jeu lorsque nous effectuons un geste: il a constaté que le déclenchement des muscles précède de quelques fractions de seconde le moment où l'on croit avoir pris la décision de bouger. 

 

Tous les mots ne sont pas neutres

  

Encore plus fort: plusieurs expériences menées notamment par l'équipe du Pr Stanislas Dehaene au service hospitalier Frédéric-Joliot, à Orsay (Essonne), ont démontré que le cerveau peut non seulement percevoir inconsciemment des images et des symboles, mais aussi les déchiffrer et les mémoriser. L'une de ces «manips» consiste à faire défiler des listes de mots devant des volontaires en leur demandant d'en définir le sens, tout en intercalant d'autres mots, affichés de manière subliminale, c'est-à-dire trop brièvement pour pouvoir être perçus consciemment. «On se rend compte que les volontaires définissent plus rapidement le mot lorsqu'il a une relation avec l'image subliminale qui le précède, par exemple "rugissement" et "lion"», explique Claire Sergent, du laboratoire CEA-Inserm de neuro-imagerie cognitive d'Orsay, qui a publié en 2005 une étude démontant le processus cérébral de la conscience visuelle. Les zones du cerveau chargées de décoder le langage s'activent lorsque le mot subliminal est «flashé», preuve qu'il n'est pas seulement perçu inconsciemment, mais qu'il est aussi compris.» 

 

Tous les mots ne sont pas neutres. Ceux qui sont chargés d'une connotation négative apparaissent plus facilement identifiés que les autres parce qu'ils déclenchent des réactions quasi «épidermiques» dans le cerveau. On a ainsi constaté que des termes comme «danger» ou «mort» entraînent l'activation de l'amygdale cérébrale, siège des émotions primordiales comme la peur. 

 

En réalité, la conscience dépend non des choses que l'on perçoit, mais de celles qu'on parvient à se représenter. «Elle apparaît comme un espace de travail surchargé, constamment bombardé par des stimuli provenant d'une multitude de processeurs sensoriels non conscients, explique Claire Sergent. C'est seulement quand une stimulation parvient à envahir l'espace tout entier qu'elle devient consciente.» Il est alors possible non seulement de saisir le sens d'un mot, mais aussi de compter les lettres qui le composent, de le traduire en plusieurs langues, et de le mémoriser. 

  

Reste que ce mécanisme ne concerne que la forme la plus simple de la conscience, celle dite «d'accès», liée aux émotions et aux sentiments, qui gouverne la pensée rationnelle et le comportement. Mais les scientifiques distinguent aussi un niveau plus élevé, celui de la «conscience phénoménale», relative aux expériences et au vécu, qui enregistre la mémoire du passé et anticipe le futur. Une conscience beaucoup plus mystérieuse, indicible, faite de «qualia», c'est-à-dire d'états mentaux personnels, qui pourrait bien évoquer la psyché de Freud. Celle-ci risque d'échapper, pour un temps encore, aux scanners, aux ordinateurs et aux microscopes des neurobiologistes. 

 

Source: © J.-P. Guilloteau/L'Express - par Gilbert Charles, Régis de Closets.

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14 mars 2012 3 14 /03 /mars /2012 11:41

- Analyse d'une société en déclin par Roland Gori -

(Un document de valeur à écouter entièrement ).

  

Roland Gori - Psychanalyste, professeur de psychopathologie à l'université d'Aix-Marseille.

 

 
Note: Descriptif de la neuro-économie et de ses effets sur les patients à la 28ème minute.
  

Retrouvez l'interview de Roland Gori en intégralité dans le documentaire "Un monde sans fous?". Disponible sur ce site.

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