9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 11:15

Suite à la lecture du livre de Matthieu Ricard et de bien d'autres livres qui pratiquent la pharmakosophie [c'est à dire la dénonciation systèmatique et l'accusation négative des différences théoriques ou idéologiques], je publie ce cours du groupe Ars-Industrialis qui vaut "à lui seul" tous les plaidoyers modernes.

 

 

De l'abandon des citoyens à l'analyse de la révolution conservatrice, en passant par les études du cerveau et le martyr de la langue ; Bernard Stiegler nous montre, à la hauteur de son talent, ce que peu de penseurs et scientifiques arrivent à peine à conceptualiser, en matière d'idées et d'influence des rétentions tertiaires sur l'être humain !

Bonne lecture à tous.

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31 août 2013 6 31 /08 /août /2013 11:15

" L’autorité n’est ni naturelle ni uniquement statutaire. Elle peut s’acquérir en analysant les pratiques et les savoirs d’action que les enseignants mobilisent dans des situations critiques."

  

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On estime souvent que certaines personnes possèdent une autorité naturelle et d’autres ne l’ont pas. À l’inverse, on considère aussi que l’autorité pourrait découler directement du statut et de la position de pouvoir occupé. Ce sont là deux mythes profondément ancrés dans les esprits. 


 

Dans le domaine de l’éducation, on retrouve ces deux positions symétriques. Pour les uns, l’autorité est affaire de statut et de savoir : c’est donc de sa place dans l’institution et du savoir qu’il détient que l’enseignant tire son autorité. Pour d’autres, l’autorité est une affaire de personnes : il y a ceux qui « savent s’y prendre » avec les élèves et d’autres qui se laissent déborder. Ces deux positions ne satisfont ni le chercheur ni l’enseignant aux prises avec les difficultés quotidiennes. 


 

Nous faisons l’hypothèse que l’autorité peut aussi s’apprendre, se développer, s’acquérir et se transmettre (1). Cet apprentissage doit s’appuyer notamment sur les « savoirs d’action » mis en œuvre par les enseignants eux-mêmes dans leur classe, savoirs d’action qu’ils acquièrent au fil du temps entre pairs et avec des formateurs lorsqu’ils analysent leurs pratiques dans des situations contextualisées. Pour mettre au jour ces savoirs effectivement mobilisés, nous avons mené une série entretiens avec des enseignants d’écoles maternelles et élémentaires, de collèges et de lycées (2). À partir d’un moment particulier de classe vécu où il a eu le sentiment d’avoir de l’autorité, chaque enseignant a fait le récit détaillé d’une situation précise où il s’est efforcé d’exercer son autorité dans une perspective éducative. Deux exemples, qui font partie du corpus recueilli au cours de notre enquête, vont nous permettre de mettre en lumière quelques caractéristiques de l’autorité éducative tel qu’on peut l’entendre et la pratiquer dans un cadre démocratique (3). 


 

Exercer une autorité éducative


 

Francine enseigne en classe de CM1-CM2. Au cours d’une séance d’entraînement pour une manifestation sportive, trois élèves perturbent la course de relais. Devant composer des équipes pour cette épreuve et cherchant une réponse appropriée à l’attitude des trois élèves, l’enseignante décide de différer l’annonce de sa décision… 


 

Le samedi qui précède la rencontre sportive, en fin de matinée, Francine évoque la composition des équipes du relais. Assise près de son bureau, elle s’adresse à la classe en commençant par indiquer la date de la rencontre. Elle prend ensuite le temps d’expliquer aux élèves qu’ils vont participer à trois épreuves. Francine parle également du relais, en insistant sur le fait qu’elle doit choisir huit élèves mais sans dire lesquels. Puis, elle explicite ses critères de choix : l’intérêt de l’équipe et la valorisation des efforts de certains élèves (des qualités morales), la vitesse de course (une qualité physique). Elle cible enfin à mots couverts les trois élèves. Ceux-ci réagissent : « Ah ben oui, c’est sûr que moi je serai pas pris. » Pour ne pas humilier d’autres élèves écartés, elle prend soin d’expliquer sa décision en justifiant son choix par les qualités physiques des élèves. À travers des paroles, des mouvements d’épaules et une grande écoute de la classe qui semblait attendre qu’elle réagisse, la professeure se dit qu’elle est soutenue. Quant aux trois élèves, Francine interprète leur absence de colère comme une acceptation de sa décision. Elle vise clairement à obtenir que sa décision soit reconnue comme légitime. Le lundi après-midi, la classe se rend à la rencontre sportive. Au moment du relais près de la ligne de départ, Francine sort une feuille et nomme les élèves qui vont y participer. La classe l’écoute. Elle ne perçoit aucune surprise. 


 

Analysons maintenant ce qui s’est passé dans cet épisode. Les réactions des élèves confirment l’expertise des observations de l’enseignante et la justesse de son interprétation de leurs intentions, véritables guides pour son action. L’efficacité du différé associé au déploiement d’une communication efficace est également à souligner. Si l’ordre a été perturbé dans sa classe, Francine a pris son temps pour réfléchir et réagir. Elle a sanctionné les élèves perturbateurs, mais la sanction n’a pas été immédiate. Pour être comprise, elle est passée par l’énoncé d’une règle valable pour tous. Enfin, Francine n’a pas pris à partie directement les élèves, mais ils ont pourtant bien compris le message : la règle n’a pas été respectée, une sanction s’applique. Ainsi, elle n’a pas fait du comportement des trois élèves perturbateurs un problème lié à sa personne, mais a situé l’enjeu de la situation au niveau des valeurs qu’elle cherchait à transmettre.


 

Ce faisant, elle a mis en œuvre quelques principes caractéristiques de l’autorité éducative. À savoir : énoncer une règle indiscutable et donc légitime ; sanctionner des actes et non des personnes ; ne pas humilier les élèves. 


 

L’appel à la raison et à 
la capacité de décision


 

Passons maintenant au second exemple. Alain est professeur de mathématiques et débute dans ce collège. Début septembre, cinq élèves de troisième technologique entrent en cours coiffés d’une casquette, passent devant lui en lui tournant le dos, s’assoient au fond de la classe, le regardent, se balancent sur leurs chaises…


 

Le professeur ressent cette entrée comme une provocation. Il va fermer la porte de la salle, sans savoir quoi faire. Il se dit d’abord qu’il peut débuter le cours de façon habituelle, permettre aux transgresseurs de se calmer et ne pas chercher l’affrontement. De retour au bureau, Alain demande à tous de sortir leurs affaires, tout en sachant qu’une majorité l’a déjà fait, mais pas les récalcitrants. La situation semble bloquée. Alain se lève et rappelle aux trois élèves l’interdiction des casquettes en classe, de se balancer sur la chaise et réitère sa demande de sortir leur matériel. Aucune réaction. Il s’interroge sur l’opportunité de l’exclusion, solution qui lui paraît mauvaise pour installer son autorité. De plus, il n’est pas certain de sortir vainqueur du rapport physique : « La seule solution est de les garder en cours. » Il se déplace alors lentement vers le fond de la classe. Puis il explique aux cinq élèves qu’il a bien perçu leurs comportements comme une provocation dirigée contre lui, mais qu’il veut leur donner la possibilité de changer d’attitude et de se comporter comme les autres.

 

Ces propos provoquent des discussions entre les cinq élèves. Alain reprend la parole. L’un des cinq décide alors d’enlever sa casquette et la pose sur son sac. Un autre, Willy, demande : « Et si on l’enlève pas, vous faites quoi ? » Alain parle tranquillement. Il s’adresse aux élèves sur le mode de la fausse alternative : soit ils obéissent en enlevant leur casquette et en la lui donnant ; soit ils refusent d’obéir en risquant à terme l’exclusion du collège, mais Alain ne les exclura pas du cours. Ainsi, le professeur cherche à faire mesurer à chacun les graves conséquences pour lui de l’infraction mineure commise. Il se déplace ensuite vers son bureau, puis commence son cours. Quelques instants plus tard, il observe que trois élèves ont enlevé leur casquette et l’ont posée sur leur sac. Seul Willy résiste. Alain le questionne d’une façon agressive sur ce qu’il compte faire. Willy le regarde et lui adresse un refus net : « Moi je l’enlèverai pas. » Puis il se lève, bouscule sa chaise avec colère. Cependant, Alain remarque sa position rentrante des épaules, comme soumise. Il se rapproche alors progressivement, parvient à clore la discussion en haussant le ton, et en se tenant bien droit.

 

Il s’adresse alors à Willy sur le mode de la fausse alternative : soit il décide seul de quitter la salle et par là même risque de se faire exclure du collège, soit il décide d’obéir. Un « moment de blanc » suit. Le regard de Willy décroche, sa tête se balance, il regarde ses camarades. Le professeur interprète ces informations comme une opportunité. Il avance, pousse physiquement l’élève vers la porte qu’il ouvre. Puis il se retourne et dit « maintenant, tu décides », en montrant l’une de ses mains ouverte vers la chaise, et l’autre tenant la poignée de la porte. Willy s’assoit et donne sa casquette au professeur, qui ferme la porte. De son bureau, Alain dit à Willy : « Je crois que tu as choisi la solution la plus intelligente, donc y’aura pas de sanction. »

Après analyse, quelques caractéristiques d’une relation d’autorité éducative apparaissent bien dans cet épisode critique. Alain a fait appel à plusieurs procédés.

 

D’abord, remarquons qu’il a refusé la sanction immédiate (l’exclusion de classe) et l’affrontement physique. Il s’est donné pour buts de rester dans une relation d’autorité – donc de ne pas recourir à la violence physique – et de maintenir le lien avec les élèves. Ainsi, il a engagé un dialogue en leur proposant de faire un choix : revenir à un comportement d’élève et rester parmi les autres. Face à Willy, l’élève récalcitrant, il le pousse dans ses retranchements, mais en lui donnant la possibilité de décider lui-même de l’issue : l’obéissance aux règles commune ou l’autoexclusion. Ce choix peut apparaître comme une fausse alternative et relever de la manipulation, mais on peut aussi voir les choses sous un autre angle : Alain fait appel à la raison et à la capacité de décision de l’élève. Quand celui-ci décide finalement d’accepter la règle, Alain lui adresse une parole de reconnaissance (« tu as pris une décision intelligente »), qui le replace en position de sujet.

 

Tout ne s’est pourtant pas passé courtoisement. Alain a su, à un moment donné, pousser l’élève vers la sortie en restant ferme quant au choix qui s’offrait à lui, adopter une posture surplombante, hausser ou baisser la voix sans perdre le contrôle… Cependant, il ne s’est pas acharné sur Willy dès lors qu’il avait atteint son but. Ce sont là autant de savoirs d’action qui participent de son autorité. 


 

De quoi parle-t-on ?


 

Essayons maintenant de tirer quelques enseignements généraux de ces exemples et d’approfondir la réflexion sur la notion d’autorité...


 

Trop souvent encore, le sens commun confond l’autorité avec le pouvoir d’un recours possible à la force, alors que l’autorité véritable est justement une influence qui s’exerce sans la force (4). L’autorité n’est donc pas l’autoritarisme, relation où le détenteur d’une position statutaire exerce une domination sur l’autre afin d’obtenir de lui une obéissance inconditionnelle, sous la forme d’une soumission. 


 

L’autorité ne peut être réduite non plus à cette qualité personnelle mystérieuse que l’on appelle le charisme et qui ferait que l’enseignant ne devrait compter que sur sa personne. L’autorité « charismatique », qui use en fait de la séduction au lieu de la force, vise au final à soumettre l’autre, à le garder dépendant et non à l’aider à acquérir son autonomie.


 

Enfin, il existe actuellement dans la relation éducative une tendance à refuser l’idée d’autorité au motif qu’elle est illégitime et antiéducative. Ce déni d’autorité se manifeste par le refus d’intervenir de certains professeurs lors d’incidents entre élèves, l’évitement de la mise en situation d’apprentissage s’il y a conflit, l’exclusion de classe ou d’établissement au prétexte que l’autorité professorale n’est pas acquise d’emblée, que l’élève réel n’est pas l’élève attendu. D’une manière générale, cette conception n’est pas sans risques pour l’enfant ou l’adolescent considéré comme prématurément responsable de ses actes. 


 

L’enjeu de l’exercice d’une autorité éducative consiste justement à maintenir quoiqu’il arrive la relation d’éducation, sans céder à l’autoritarisme, à la séduction charismatique ni « évacuer » l’autorité en laissant le jeune se chercher seul ses propres limites. Il en va, en un sens, de l’avenir de la fonction d’éducation dans nos sociétés.

 

www.scienceshumaines.com

 

NOTES

 

1. L’idée selon laquelle les enseignants doivent désormais être formés à l’exercice de l’autorité, à la conduite de classe, à la prévention des situations d’incidents ou de violence a incontestablement progressé, même si tous les dispositifs ne se valent pas. Voir Bruno Robbes, « Sauvons notre école… des professeurs “teneurs de classes” », Cahiers pédagogiques, n° 472, avril 2009, et « Former les enseignants des pays développés à prévenir les situations de violence à l’école. Quels résultats de recherche pour quelles pratiques de formation ? », in Benoît Galand, Cécile Carra et Marie Verhoeven (dir.), Prévenir les violences à l’école, Puf, 2012.


2. Pierre Vermersch, L’Entretien d’explicitation, ESF, 1996


3. Voir Bruno Robbes, L’Autorité éducative dans la classe. Douze situations pour apprendre à l’exercer, ESF, 2010.


4. Voir Hannah Arendt, « Qu’est-ce que l’autorité ? », in La Crise de la culture, Gallimard, 1972, et Georges Burdeau, « Autorité », in Encyclopædia Universalis, 1995.

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12 juin 2013 3 12 /06 /juin /2013 11:27

Parmi les nombreuses grilles d'intelligences qui ont été élaborées, la théorie des Intelligences Multiples d'Howard Gardner a le mérite d'être particulièrement simple à comprendre (car parlant bien à l'intuition) et pratique à utiliser dans une quelconque situation d'apprentissage.

 

Son succès depuis sa parution en 1983 a été considérable, en particulier dans les champs de l'éducation et de la formation permanente. Elle a fait l'objet de très nombreux livres d'application en langue anglaise.

 Intelligences-multiples.jpg

 

  • Les huit intelligences, selon Howard Gardner:
l'intelligence verbale / linguistique

C'est la capacité à être sensible aux structures linguistiques sous toutes ses formes. Elle est particulièrement développée chez les écrivains, les poètes, les orateurs, les hommes politiques, les publicitaires, les journalistes, etc.

On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui aime lire, qui parle facilement, aime raconter des histoires et aime en entendre, qui aime les jeux avec des mots (mots croisés, Scrabble, etc.), les jeux de mots, les calembours.
La plupart des systèmes d'enseignements reconnaissent cette intelligence. Si elle n'est pas suffisamment développée, on est facilement en échec scolaire.
Des manques dans cette capacité à mettre en mots sa pensée peut également créer le sentiment d'être incompris (en particulier face à ceux qui maîtrisent mieux cette intelligence) et engendrer des réactions de violence.

l'intelligence visuelle / spatiale

C'est la capacité à créer des images mentales, et à percevoir le monde visible avec précision dans ses trois dimensions.
Elle est particulièrement développée chez les architectes, les paysagistes, les peintres, les sculpteurs, les naturalistes, ceux qui tentent d'expliquer l'univers, les stratèges de champ de bataille, les metteurs en scène, etc.

On reconnaît particulièrement cette intelligence chez celui qui a un bon sens de l'orientation ; chez ceux qui créent facilement des images mentales ; ceux qui aiment l'art sous toutes ses formes ; ceux qui lisent facilement les cartes, les diagrammes, les graphiques ; ceux qui aiment les puzzles, ceux qui aiment arranger l'espace ; ceux qui se souviennent avec des images ; ceux qui ont un bon sens des couleurs ; ceux qui ont besoin d'un dessin pour comprendre ; etc.
Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on peut avoir des difficultés dans les processus de mémorisation et de résolution de problèmes. Car les images produites dans le cerveau aident à la pensée et à la réflexion. Pour beaucoup de scientifiques célèbres, leurs découvertes les plus fondamentales sont venues de modèles spatiaux et non de raisonnements mathématiques.

l'intelligence musicale / rythmique

C'est la capacité à être sensible aux structures rythmiques et musicales.
Elle est bien entendu particulièrement développée chez les musiciens (compositeurs, exécutants, chefs d'orchestre), et chez tous les " techniciens du son " (ingénieur du son, fabricant d'instruments de musique, accordeurs). Elle se trouve aussi chez les poètes, et dans les cultures à forte tradition orale.
On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui fredonne souvent, bat du pied, chante, se met à danser sur le moindre rythme ; chez ceux qui sont sensibles au pouvoir émotionnel de la musique, au son des voix et à leur rythme ; et ceux qui saisissent facilement les accents d'une langue étrangère.
Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on perd une partie des richesses transmises par les sons, à travers les sons organisés comme dans la musique ou dans les infinies variations du langage.

 

 

 

l'intelligence logique / mathématique

C'est la capacité à raisonner, à calculer, à tenir un raisonnement logique, à ordonner le monde, à compter. C'est l'intelligence qui a été décrite avec beaucoup de soin et de détails par Piaget en tant que " l'intelligence ".
Elle est particulièrement développée chez les mathématiciens et les scientifiques, les ingénieurs, les enquêteurs, les juristes, etc.

On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui aime résoudre des problèmes ; chez ceux qui veulent des raisons à tout, veulent des relations de cause à effet ; ceux qui aiment les structures logiques, et aiment expérimenter d'une manière logique ; chez ceux qui préfèrent la prise de notes linéaire ; etc.
Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on a du mal à organiser des tâches complexes, à donner un ordre de priorité à une succession d'actes ; à comprendre le sens d'une démarche scientifique, à comprendre la signification d'un phénomène ; à démonter un appareil ou un processus pour en comprendre les parties ; à utiliser le raisonnement déductif ; à se servir d'appareils fonctionnant avec une grande logique (comme un ordinateur).

l'intelligence corporelle / kinesthésique

C'est la capacité à utiliser son corps d'une manière fine et élaborée, à s'exprimer à travers le mouvement, d'être habile avec les objets.
Elle est particulièrement développée chez les danseurs, les acteurs, les athlètes, les mimes, les chirurgiens, les artisans, les mécaniciens.

On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui contrôle bien les mouvements de son corps ; chez ceux qui aiment toucher, sont habiles en travaux manuels ; ceux qui aiment faire du sport, aiment jouer la comédie ; chez ceux qui apprennent mieux en bougeant, qui aiment faire des expériences ; l'enseignant la reconnaîtra dans l'élève qui se trémousse s'il n'y a pas suffisamment d'occasions de bouger, chez celui qui se lève en classe pour tailler un crayon ou mettre un papier à la poubelle.
Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, l'enfant comme l'adulte risquent de ressentir leur corps comme une gêne dans de nombreuses circonstances de la vie courante.

l'intelligence intrapersonnelle

C'est la capacité à avoir une bonne connaissance de soi-même.
Elle est particulièrement développée chez les écrivains, les " sages ", les philosophes, les mystiques.

On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui a une bonne connaissance de ses forces et de ses faiblesses, de ses valeurs et de ses capacités ; chez ceux qui apprécient la solitude ; qui savent se motiver personnellement ; qui aiment lire, qui écrivent un journal intime ; qui ont une forte vie intérieure.
Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on a du mal à tirer partie des expériences, à réfléchir sur ce qui a bien marché et comment améliorer ce qui a moins bien marché ; à prendre le contrôle de sa vie, de son apprentissage, à se donner des buts ; on est plus sensible à l'opinion de groupes ; on cherche (et on trouve) un responsable extérieur à ses échecs.

l'intelligence interpersonnelle

C'est la capacité à entrer en relation avec les autres.
Elle est particulièrement développée chez les politiciens, les enseignants et les formateurs, les consultants et les conseillers, les vendeurs, les personnes chargées des relations publiques.

On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui entre bien et facilement en relation, se mélange et s'acclimate facilement ; chez ceux qui aiment être avec d'autres et ont beaucoup d'amis, ceux qui aiment bien les activités de groupe ; chez ceux qui communiquent bien (et parfois manipulent), chez ceux qui aiment résoudre les conflits, jouer au médiateur.
Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, il y a risque d'enfermement de la personnalité ; on se coupe du plaisir d'être avec d'autres, de travailler ensemble ; on perd des richesses issues du travail en coopération. On risque de devenir aigri, misanthrope, critique de l'humanité dans son ensemble.

l'intelligence (du) naturaliste

Elle a été rajoutée aux sept précédentes par Howard Gardner en 1996. C'est la capacité à reconnaître et à classer, à identifier des formes et des structures dans la nature, sous ses formes minérale, végétale ou animale.
Elle est particulièrement développée chez le naturaliste, qui sait reconnaître et classifier les plantes et les animaux ; chez tous ceux qui s'intéressent au fonctionnement de la nature, du biologiste au psychologue, du sociologue à l'astronome.

On la reconnaît chez ceux qui ceux qui savent organiser des données, sélectionner, regrouper, faire des listes ; chez ceux qui sont fascinés par les animaux et leurs comportements, qui sont sensibles à leur environnement naturel et aux plantes ; chez ceux qui cherchent à comprendre la nature et à en tirer parti (de l'élevage à la biologie) ; chez ceux qui se passionnent pour le fonctionnement du corps humain, qui ont une bonne conscience des facteurs sociaux, psychologiques et humains.

 

illustrations : Olivier Latyk pour www.mieux-apprendre.com

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24 mai 2013 5 24 /05 /mai /2013 09:46

Excellent débat sur l'avenir de l'esthétisme, au sein de la société consumériste.

 

France-Culture

-Cliquez sur le logo pour écouter le podcast-

 

Brice Couturier: Il y a des penseurs apocalyptiques. Ce sont ceux qui vous décrivent l’abîme dans lequel est en train de sombrer le monde, sous les coups de – cochez le coupable – 1) la dissociation du lien social sous l’effet de la montée des égoïsmes individuels et/ou de celle des « communautarismes qui préparent la libanisation de nos vieilles nations », 2) l’hédonisme individualiste, l’irresponsabilité et l’absence d’esprit de sérieux, issus de Mai 68, 3), l’extension de la sphère du marché à des biens collectifs et jusqu’à la sphère affective, 4) la démographie galopante des pays du Sud, l’étalement urbain, les déséquilibres écologiques, l’effet de serre, le réchauffement climatique, la chute de météorites, 5) la confusion des sexes qui mine le principe même de réalité et, partant, les fondements anthropologiques de toute société civilisée, etc., etc…

 

Je laisse aux auditeurs le soin de compléter cette liste, en fonction des devises du jour, rapidement remplacées.

 

Bref, il existe plusieurs familles de penseurs qui prospèrent sur la promesse de terrifiants désastres. Ils ont repris à leur compte la fonction du prophète qui, selon Max Weber, offre une « image du monde »,  dans lequel nos souffrances actuelles prennent sens. ; et sont présentées comme des épreuves nécessaires sur la voie d’un Salut – au prix d’une conversion idéologique.

 

Et puis, de l’autre côté, il y a les penseurs comme Gilles Lipovetsky qui provoquent leurs concitoyens par une forme d’optimisme un peu cynique, une adhésion enthousiaste à l’esprit du temps, une célébration amusée de ce qu’il peut comporter de pire.

 

Dès votre premier livre, j’avais perçu un son nouveau et je crois bien avoir recueilli votre première interview pour France Culture. L’ère du vide, nous disiez-vous, vaut mieux que les religions sécularisées. L’individu hyper-moderne est un sceptique désabusé, tant mieux, il sera moins prompt à se laisser endoctriner par les pseudo-messies qui promettaient à ses ancêtres le Paradis sur terre au prix de quelques millions de morts…

 

Et vous n’avez cessé de récidiver, Gilles Lipovetsky, vous réjouissant de l’évanouissement des morales héritées, célébrant le luxe, l’éphémère, la jouissance, la mode et surtout l’individu émancipé de toutes contraintes… Votre dernier livre est consacré à un éloge de l’esthétique du capitalisme actuel : non content d’avoir inventé le design, afin de rendre plus désirables les objets de qu’il propose à notre avidité, il aurait inventé des arts nouveaux, hybrides, mêlant le spectacle de masse et les marchés de niche, les prestiges de la marque et ceux de l’art, la grande surface et le musée, l’art et la mode. Surtout, au cours des trente dernières années, ce « capitalisme artiste » se serait répandu de manière planétaire, grâce aux multinationales de la culture et du divertissement et ses productions auraient proliféré, nous proposant une offre démultipliée, d’une richesse inégalée dans l’histoire humaine.

 

Il y a bien des penseurs qu’on pourrait vous opposer. A commencer par tous ceux qui, depuis l’Ecole de Francfort, estiment que notre modernité, autrefois émancipatrice, s’est fourvoyée dans une impasse, qu’elle s’est trahie en route ; qu’elle a dégénéré en une « post-modernité », un « capitalisme liquide » qui noie toute forme sur son passage.

 

Prenons deux essais dont les thèses contredisent radicalement les vôtres, par hasard, tous deux publiés par les éditions du Cerf, d’obédience chrétienne. Dans « Le capitalisme esthétique. Essai sur l’industrialisation du goût », Olivier Assouly tente de reconstituer l’histoire de « la mobilisation industrielle du goût des consommateurs » qu’est devenue le marketing contemporain. Et il relève que la sphère de l’intime a été progressivement forcée, que le goût a été métamorphosé par des vendeurs d’objets inutiles, mais constamment redisigné, afin de les rendre désirables.

 

Dans « L’ère du consommateur », Laurent Fourquet voit dans la figure du Consommateur le digne héritier du Travailleur d’Ernst Jünger – l’incarnation de l’esprit du temps. Le Consommateur « perçoit l’univers comme une immense galerie marchande » et l’autre, comme un objet susceptible ou non de lui procurer de la jouissance. C’est la négation du Citoyen, qui se percevait comme partie d’un tout et pensait à ses devoirs envers sa patrie avant d’exiger, de l’Etat, de nouveaux droits.  « Chaque chose susceptible de lui procurer une jouissance est monnayable… commercialisable ». Or, qui a constamment besoin de jouir se condamne à la déception ; aussi le consommateur est un frustré ; il lui faut des doses de plus en plus fortes de nouveautés, des jouissances de plus en plus violentes. C’est pourquoi la figure du drogué constitue une sorte d’aboutissement. Est-ce là le modèle que vous proposeriez à l’édification des jeunes générations ?

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23 avril 2013 2 23 /04 /avril /2013 10:41
"S'adapter et subir, ou adopter et choisir ?" Quel influence exerce le milieu social et environnemental sur l'homme ? Quel est son rôle dans celui-ci ? Voici deux grandes questions abordées avec finesse dans un extrait du vocabulaire d'Ars-Industrialis.
   
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Adaptation est un terme qui dérive d’« ad-aptare » qui signifie rendre apte à ou ajuster à ; joindre ou conformer.
 
C’est une idée banalement darwinienne que d’affirmer que plus un vivant est adapté moins il est adaptable, moins il peut adopter un nouveau milieu . Quant à l’homme, chacun sait bien qu’il ne s’adapte pas à son milieu puisque, bien plutôt, il adapte son milieu, qui, de ce fait, n’est plus seulement milieu de besoin mais milieu de désir.
 
Adoption est un terme qui dérive d’« ad-optare » qui signifie opter ou choisir, greffer ou acquérir.
 
Toute individuation  humaine est un processus d’adoption, et la santé d’une individuation se mesure à sa possibilité d’adoption – d’un mode de vie, d’une technique, d’une idée, d’un étranger, etc. Le « faire sien » qu’est l’adoption suppose une participation  de ce qui adopte à ce qui est adopté.
 
Adapter ou adopter: L’adoption est le processus d’une individuation, c’est à dire d’un enrichissement, tandis que l’adaptation est une désindividuation : une restriction des possibilités de l’individu. S’adapter à une norme n’est pas adopter une norme : dans le premier cas, la norme est posée indépendamment de celui qui s’adapte, dans le second, la norme n’existe que si elle est adoptée1. L’adaptation est un rapport entre deux termes qui préexistent à leur mise en rapport, tandis que l’adoption est une relation telle que les termes ne préexistent pas à leur mise en relation : celle-ci est créatrice des termes qu’elle relie – par exemple, le père et son enfant ne préexistent pas, en tant que tels, à la relation d’adoption2.
 
Tout ingénieur, tout artiste, tout penseur sait qu’on n’innove pas, qu’on ne crée pas, qu’on ne pense pas en s’adaptant, mais en adoptant de nouvelles normes d’usage et de fonctionnement. Dans une certaine mesure, l’opposition entre adaptation et adoption rejoint celles entre audience et public, entre consommateur et amateur, mais aussi entre usager et praticien. On ne s’adapte pas à une langue, on l’adopte, et c’est pourquoi il n’y a pas de mode d’emploi d’une langue. Ex: On n’utilise pas un piano, on le pratique, et la musique en tant qu’art est une relation d’adoption, non un rapport d’adaptation.
 
Critique de l’idéologie de l’adaptation: Trop fréquentes sont les philosophies qui tentent d’adapter l’individu et le milieu l’un à l’autre sans comprendre que l’individu et le milieu, pris séparément, n’existent pas. La philosophie de Simondon invite à « réformer tous les systèmes intellectuels fondés sur la notion d’adaptation »3. Cette réforme a une portée philosophique4 et épistémologique5, elle a aussi une portée politique qui est plus que jamais d’actualité6. D’une manière générale, le recours à l’adaptation nourrit un conservatisme politique, car s’adapter à un état de fait est renoncer à une politique des fins. Si on invoque l’adaptation comme seule solution, c’est pour asseoir le there is no alternative, à la manière de Spencer qui, refusant de briser l’adaptation naturelle au progrès, invoquait le « laissez-faire » – pourtant, on sait depuis combien l’Etat doit intervenir pour laissez-faire le marché… Il faudrait questionner la manière dont ce mot d’ordre de l’adaptation gouverne nos écoles, nos hôpitaux, nos prisons, nos entreprises, etc. Partout autour de nous, l’adaptation opère comme une pétition de principe aux effets néfastes, par exemple  dans les domaines psychiatrique7, scolaire ou universitaire8, managérial9, et dans ce qui fut notre triste Ministère identitaire10. Nous sommes nombreux à constater que ce dont on souffre n’est pas d’inadaptation mais bien d’hyperadaptation11. Et chacun sent bien que l’adaptation au milieu ne signifie plus, aujourd’hui, l’adoption de celui-ci.

Note:
  1 Pour parler dans les termes de Georges Canguilhem : l’adoption s’oppose à l’adaptation comme la « normativité » s’oppose à la « normalité ».
 
2 Cette distinction du rapport et de la relation que nous devons à Gilbert Simondon, fait écho à la distinction stieglerienne entre adaptation finitisante et adoption infinitisante.
 
3 Gilbert Simondon, L’individuation à la lumière des notions de forme et d’information, Grenoble, Éd. Jérôme Million, 2005, p. 210.
 
4 Sur le plan ontologique, il s’agit de substituer à une philosophie de l’individu (ontologie) une philosophie de l’individuation (ontogenèse), ce qui suppose de partir de la relation constituante plutôt que de l’individu constitué.
 
5 Sur le plan épistémologique, se méfier de l’adaptation consiste, entre autres, à se méfier de la vieille et tenace conception de la vérité comme adéquation de l’intellect à la chose.
 
6 Ce sens politique, qui présuppose de réévaluer la question de la norme, a été déployé par des auteurs comme Friedmann, Canguilhem, Foucault, etc.
 
7 Nous pensons au DSM ou Diagnostic and Statistical Manual, cette entreprise, par les psychiatres américains, de classification des troubles mentaux, qui repose sur un fond théorique supposé athéorique – Evidence Based Medicin. Cette nouvelle nosographie est faite de « troubles du comportement » et de « troubles de l’adaptation ». Or, comme le laissait déjà entendre Michel Tournier : « La médecine ferait bien de creuser cette notion nouvelle de suradaptation [ou d’hyperadaptation], et l’école devrait prendre garde qu’à force de craindre que les enfants ne souffrent d’une quelconque inadaptation, elle n’en fasse tout à coup des suradaptés » (Michel Tournier, Le Roi des Aulnes, Folio, p. 138).
 
8 Ici les exemples abondent, puisque le but de l’école est désormais d’adapter au marché de l’emploi. En outre, on peut sérieusement douter que l’appel incessant à la créativité comprise comme adaptabilité soit susceptible de dessiner quelque chose comme l’adoption d’une mémoire ou l’appropriation d’un savoir. cf. Julien Gautier, « De la créativité à l’école », consultable sur le site www.skhole.fr.

Quant à la récente réforme universitaire (LRU), son espriti initial est assez bien résumé par la citation suivante : « La France vit depuis 1968 dans la crainte des manifestations étudiantes. Aucun gouvernement n’a réussi à réformer depuis, en profondeur, un système qui n’est plus adapté au monde moderne. […]. Les aménagements postérieurs à 1968 n’ont pas rompu totalement avec cette idée bien française que la finalité de l’université n’est pas de s’adapter mais de transformer la société » (le député Claude Goasguen, dans Le Figaro du 3 octobre 2006). S’adapter ou mourir : s’adapter pour ne surtout rien transformer !
 
9 Ce fut récemment au prix de suicides humains qu’il fut rappelé aux Français combien est grand le malaise du management de l’adaptation qui ignore l’adoption des travailleurs, c’est-à-dire qui dépossède le travailleur de ses propres normes et de son savoir-faire.
 
10 Le mot d’ordre de l’adaptation nourrit la conviction, chez certains suradaptés, que notre pays est une marque normée, une norme de fonctionnement (NF) à l’aune de laquelle il serait possible de sélectionner ceux qui y sont ou non adaptés. Au nom d’un gouvernement de l’adaptation, ils nient toute possibilité d’adoption des immigrés et travailleurs sans-papiers (ceux qui se lèvent tôt !).
 
11 L’Appel des appels, réunissant des professionnels du soin, du travail social, de l’éducation, de la justice, de l’information et de la culture, peut être lu comme une tentative d’insurrection contre cette philosophie néo-libérale de l’adaptation (au progrès naturel, au marché naturel, etc.), à l’œuvre dans l’ensemble de nos institutions (cf. L’Appel des appels. Pour une insurrection des consciences, Paris, éd. Mille et une nuits, 2009). Notre Management public qui édifie actuellement de nombreuses nouvelles lois se présente comme « naturel » : il ne fait qu’adapter.
 
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20 avril 2013 6 20 /04 /avril /2013 11:47

 

L’école, le numérique et la société qui vient, c’est là le titre d’un ouvrage très récemment paru, sous forme d’entretiens et signé conjointement par Denis Kambouchner, Philippe Meirieu, Bernard Stiegler,  avec la collaboration de Julien Gautier et Guillaume Vergnes aux éditions des Mille et Une Nuits. Ouvrage à lire absolument pour quiconque essaie de porter un certain regard sur ce qui se passe actuellement à l’Education Nationale et d’avoir, peut-être, une envie d’espérance.

 

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Les auteurs, dépassant la guerre « pédagos » contre « républicains » au vu de la très grave crise du système scolaire, nous proposent de profiter de la révolution du numérique pour essayer de soigner un  malade dont on pourrait même penser qu’il est déjà à l’article de la mort. Des thérapeutiques sont d’ailleurs proposées. Souhaitons qu’elles puissent être entendues !!!

   

Souvent, parler de l’Ecole s’entend comme parler de l’école primaire, en oubliant que le système scolaire s’étend de l’école maternelle à l’université. Cela permet toutes les ambiguïtés et toutes les confusions. Mais, s’il faudra effectivement reprendre tout au début, c’est-à-dire dès la maternelle , c’est bien tout le système qui est malade et sur lequel, actuellement, on tire à boulets rouges pour l’achever. C’est donc bien de l’ensemble du système dont il sera question et dont il est question dans l’ouvrage cité.

  

L’Ecole doit avoir comme fonction d’ « assurer la continuité d’une société par la transmission intergénérationnelle de la mémoire collective » (J. Gautier et G. Vergnes). Elle devrait être, ce qu’elle n’est sans doute déjà plus, « un dispositif de construction et d’enseignement des savoirs »[1](Bernard Stiegler). Cela suppose des supports de la mémoire : l’écriture manuscrite ou imprimée et actuellement les supports numériques, révolutionnaires comme l’ont été en leur temps les deux premières. Le numérique apporte une multiplication des informations, leur mise à disposition de tous, c’est-à-dire leur utilisation et leur production possible par tous, ce qui n’était pas le cas pour l’analogique. Or, dans le cadre économique de ces dernières décennies, surtout dans le contexte du poids extrêmement lourd du financier, ces supports servent, marketing aidant, à une réelle destruction des savoirs et de l’intelligence à laquelle participe activement, depuis plus de vingt ans, le système scolaire dans son ensemble. Il suffit d’ailleurs, pour s’en convaincre, d’analyser programmes et manuels. Il suffit aussi de se rappeler du « temps de cerveau disponible » de l’ancien pdg de TF1 !

  

La transmission des savoirs est bien au coeur de la problématique actuelle, dans la mesure où elle est attaquée sans cesse par ce qui reste d’institution. Une telle transmission implique la reconnaissance de la différence des générations. Or cette transmission intergénérationnelle est aujourd’hui attaquée dans l’ensemble du corps social. A cela il faut ajouter une destruction de la notion de temps et de durée, le consumérisme et le marketing  impliquant  l’immédiateté du pulsionnel, le tout tout de suite. Ce qui se passe dans l’institution scolaire n’est qu’une caricature de ce qui se passe dans la société. Il est intéressant de mettre la pratique en collèges et lycées en contrepoint des justes analyses proposées. Les nouvelles techniques managériales dictées aux nouveaux chefs d’établissement font que, par principe, l’enseignant a tort. Les nouvelles réformes ainsi que les consignes données pour les examens mettent à mal les enseignements disciplinaires, notamment au lycée, et interdisent de s’appuyer sur des savoirs au profit de la mise en oeuvre de compétences purement répétitives et de tests purement quantitatifs dont les QCM ne sont qu’un parangon. Comment s’étonner alors d’entendre des élèves de lycée dire à leur professeur « ce n’est quand même pas vous qui savez !!! » (sic !), Cette remise en cause du savoir par des élèves, par ailleurs en très grande difficulté, n’est absolument pas récente. Elle n’est simplement que plus explicite, plus directement et plus sereinement affirmée. Lorsque B. Stiegler  évoque l’enseignement disciplinaire comme instrument de pensée donc d’autonomie et non comme simple juxtaposition de techniques, on ne peut, en tant qu’enseignant, que se pencher sur le désastre actuel et rêver de retrouver ce qui faisait et devrait faire le coeur du métier, sans être passéiste pour autant, bien au contraire. Lorsqu’il dit encore que « des fonds théoriques légitiment le fait que (des) disciplines s’enseignent et ne sont pas seulement des intuitions personnelles et individuelles », il est impossible de ne pas se souvenir de la gentillesse et de la tolérance de cette élève disant à son professeur « Non, mais vous avez tout à fait le droit d’avoir votre opinion » (sic !). Il ne s’agissait pourtant que  d’un cours de biologie sur l’évolution qui n’abordait que des notions théoriques de base. Ce ne sont là que quelques exemples parmi les plus innocents du quotidien d’un enseignant. Ils montrent combien les choses sont déjà bien ancrées dans les esprits.

 

 Le grand enjeu des nouvelles technologies

  

Le grand enjeu des nouvelles technologies est clair. En pleine révolution numérique, dans laquelle les jeunes sont nés, il s’agit de savoir si l’Ecole peut sortir la jeunesse de la prolétarisation des esprits , c’est-à-dire de la mise des neurones au service des  « industries » comme l’étaient les corps au siècle dernier, corps mis au service des machines. C’est ce qui caractérise cette nouvelle « société des connaissances ».  La finalité de l’Ecole doit être alors la déprolétarisation, c’est-à-dire une remise en valeur de la pensée. Les appareils technologiques actuels  permettent  « de résoudre des problèmes sans avoir appris des codes, sans avoir à connaître ». C’est bien ce que met actuellement en place l’institution. Ce qu’on demande dans certains examens en est une caricature, notamment en physique au baccalauréat dans certaines sections : des formules sont données, avec toutes les valeurs, toutes les unités, le résultat avec ses unités également, la seule demande étant de vérifier à la calculatrice si le résultat est juste !  Il est donc impératif de lutter contre la prolétarisation des esprits [2] et la bêtise ambiante, voulue et cultivée. Or « l’émancipation sociale et personnelle des individus, c’est bien ce dont l’économie et la finance ne veulent pas, ce qu’accepte clairement et passivement la société dans son ensemble. La destruction des esprits a déjà fait son oeuvre  et il faudra beaucoup de temps pour tout remettre à flot à partir de la maternelle » (J. Gautier et G. Vergnes). Citons à ce propos ces élèves de lycée qui sont incapables de diviser par 10 (absolument tous dans certaines sections, oui !), avouent ne pas savoir ce qu’est une division, confondent systématiquement addition et multiplication (en classe de terminale), ne savent pas ce qu’est un brin, qu’il soit de ficelle ou d’ADN, là où leurs congénères ne connaissent pas le sens des mots  « humide », « minerai », « respecter », « type », principal,  « circonstance », « alerte », « besoin » et autres « étiquetage » ou quand le mot  « effarant » dans un texte de français devient, dans leur bouche, le comble de la difficulté empêchant toute lecture. L’incapacité pour ces nombreux élèves de lycée de maîtriser le langage, de lire un texte simple par manque de maîtrise des mots [3] , donc d’écrire, est aujourd’hui un problème majeur, bloquant toute possibilité d’enseignement (certains élèves de lycée ne peuvent aujourd’hui pas recopier  plus de 5 mots à la minute). La notion même de temps peut être perdue, avec confusion généralisée entre temps précis et durée, entre espace et temps. C’est ainsi qu’une classe entière de terminale est absolument incapable de repérer des temps précis dans un phénomène physique ou biologique, donc de comprendre la notion d’intervalle, donc de cycle, ou donnent comme valeur d’un volume : 5 secondes. Oui c’est a priori surprenant, mais c’est bien la réalité, malgré l’omerta ambiante. Cela va de pair, bien sûr, avec l’impossibilité de se projeter dans l’avenir, donc l’impossibilité d’apprendre.

  

Les nouvelles technologies numériques pourraient permettre de sortir de ce marasme. Mais cela implique une formation des élèves qui dépasse leur simple utilisation mécanique. Le numérique ne doit pas être un moyen d’enseignement, mais un objet d’enseignement. Cela implique aussi une formation des professeurs à ces nouvelles technologies, mais avec « de vraies garanties, un haut niveau d’exigence intellectuelle et académique, ce qui n’est plus le cas » (J. Gautier et G. Vergnes). Il s’agit donc de former au numérique pour former des esprits libres et donc refuser de former des utilisateurs adroits mais sans esprit critique. Cela nécessite une vraie politique qui aille à l’encontre de la destruction de la pensée qui a lieu aujourd’hui à tous les niveaux de l’institution. La révolution numérique peut donner une telle chance. (Il suffit de penser à ce qui se passe au niveau des logiciels libres par exemple pour imaginer qu’il peut y avoir des solutions). Ces outils, actuellement très toxiques par l’utilisation qui en est faite, peuvent aussi être très bénéfiques si on sait s’en servir autrement, et si le niveau de révolte contre la prolétarisation des esprits est suffisant. Il faut que ces outils soient enfin au service du savoir et non  plus seulement aux mains des industriels, dont l’actuelle mainmise sur l’Ecole est beaucoup plus importante qu’on ne veut s’en aveugler. Il faut par exemple apprendre aux élèves à se servir de wikipédia (et non le dénigrer) et donc, dans le même temps, « défendre une culture lettrée » (P. Meirieu).

  

Dans « L’école, le numérique et la société qui vient » les auteurs proposent des solutions qui peuvent ouvrir les portes de nouvelles espérances. On peut cependant douter que le système se réforme de lui-même, les diverses volontés politiques allant dans le sens contraire. L’Ecole en effet participe depuis de nombreuses années, voire décennies,  à une destruction active et voulue de la transmission entre générations, notamment par le fait que, contrairement ce que beaucoup peuvent dire ou penser, le professeur a pratiquement toujours tort. Il subit, de la part de sa hiérarchie directe comme plus en hauteur, un dénigrement et une dévalorisation plus qu’insupportable, permanente et organisée à haut niveau, y compris devant les élèves. Beaucoup ne tiennent d’ailleurs plus le choc. Dans le même temps, il assiste à une destruction systématique des savoirs , donc de sa fonction première, dans le cadre de notre « société du désapprentissage », au profit de compétences comportementales purement mécaniques. Les jeunes, n’ayant plus aucune formation se retrouvent désarmés et impuissants devant des classes de plus en plus difficiles, face à des élèves et des parents de plus en plus consuméristes. Cela pose donc en fait le problème actuel d’une vraie révolution dans un système à la mort programmée.

  

[1] : il faut entendre par « savoirs » l’ensemble des savoirs théoriques, liés donc  à une capacité de théorisation, savoir-vivre et savoir-faire qui sont ensemble à la base d’une réelle vie de l’esprit, celle qui est si fort attaquée actuellement dans cette institution qu’est l ‘Education Nationale

[2] : la prolétarisation des esprits est, justement, cette destruction de l’ensemble des savoirs. (voir à ce propos la chronique « Tu ne mangeras point du fruit de l’arbre de la connaissance » sept 2011)

[3]: voir à ce propos la chronique de juillet 2008 « Des mots pour ne pas pouvoir le dire »

 

 Le Gypaète barbu, chroniqueur alsacien. Tiré de l'article "La petite chronique de l'enseignement ordinaire" - Lien: http://lewagges.fr/

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17 avril 2013 3 17 /04 /avril /2013 18:15

La peur de faire mal, la culpabilité, la crainte d’étouffer la personnalité de leurs enfants… De nombreux parents n’arrivent pas à imposer les règles et à se répartir les rôles. Claude Halmos redéfinit l'autorité "vraie", après une très mauvaise lecture, reprise par les médias, des travaux de Françoise Dolto !

 

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Psychologies : Dans votre cabinet, est-ce que vous avez le sentiment que les problèmes d’autorité sont importants ?

 

Claude Halmos : Les enfants, autrefois, venaient consulter avec des problèmes provenant des relations familiales, de l’histoire parentale. Aujourd’hui, c’est l’absence de repères et de limites qui, le plus souvent, les empêche de se développer normalement. Le malentendu vient de la croyance issue d’une dérive de la salutaire révolte de Mai 68, que toute autorité serait répressive, et d’une mauvaise lecture de Françoise Dolto. Elle a posé que l’enfant était une personne à respecter, mais a affirmé aussi qu’il avait un besoin vital d’éducation. On l’a oublié et on vit dans la peur de casser, si on l’éduque, sa personnalité. Tout cela fait que les parents ne se sentent plus de légitimité. Or il existe des règles de développement pour le corps, la santé des enfants. Et nous les appliquons sans nous poser de questions. Mais il en existe aussi pour leur construction psychique. Il y a des âges pour faire les choses, il faut avoir une place dans la famille, mais pas toute la place, on ne peut pas tout faire, pas tout avoir, etc. Si on ne respecte pas ces règles, l’enfant a des problèmes de comportement, d’image de lui-même, scolaires… Parce que rien n’est à sa place dans sa vie.

 

N’y a-t-il pas également, dans les couples parentaux, un équilibre qui a changé avec l’évolution de la place des femmes ?

 

C.H. : En consultation, quand je demande : « Et comment ça se passe, l’autorité, chez vous ? »,la réponse la plus générale est :« C’est nous deux. C’est pareil. » Il n’y a plus de différenciation de la place du père et de la mère. Car les combats féministes– et heureusement qu’ils existent ! –ont conduit à craindre que, en établissant des places, on rétablisse une hiérarchie. Or cela n’a rien à voir. Ce que l’on appelle la fonction paternelle, c’est un dispositif. Il permet à l’enfant de comprendre que, dans la vie,on n’est jamais deux (toi et moi), mais trois. Il y a toi, moi et, par exemple, la justice qui peut régler nos conflits et empêcher qu’ils se terminent en pugilat. La préfiguration dans la famille de cette instance tierce, c’est le père, auquel la mère peut faire appel dans ses conflits avec l’enfant.


Pourquoi la mère ne peut-elle pas tenir cette place ?

C.H. : Parce que l’enfant la vit déjà comme toute-puissante. Si elle avait en plus toute l’autorité, elle serait pour lui l’image d’un être sans limites, auquel il serait tentant de vouloir ressembler. Et puis, le père est là aussi pour aider mère et enfant à se séparer. Ce qui ne veut pas dire se quitter et ne plus s’aimer, mais comprendre que l’enfant n’est pas un prolongement de sa mère.C’est un être à part entière, qui doit grandir pour partir un jour.

 

Comment peut faire une mère seule ?


C.H. : Il y a toujours un père. La mère n’a pas fait l’enfant seule. Même si le père ne connaît pas l’enfant. Même s’il ne le voit plus. Même s’il est parti. Même s’il ne sait même pas qu’il existe… La mère seule doit s’appuyer là-dessus : « Ton père n’est pas là (parce que nous sommes séparés,parce qu’il est parti…), mais je te dis ce qu’il dirait s’il était là, comme le dirait n’importe quel père. Et d’ailleurs, on peut en parler avec ton oncle si tu veux. » Une mère peut faire exister un père dans la parole, quel que soit l’âge de l’enfant.


Il semble parfois que les hommes ont peur, en exprimant leur autorité, d’une forme de violence…

C.H. : Les hommes d’aujourd’hui ne veulent pas reproduire la toute-puissance du pater familias d’antan, et ils ont raison ! Mais il ne s’agit pas de ça. Hommes et femmes sont égaux, mais leurs tâches de mères et de pères sont différentes. Et puis, avoir de l’autorité, ce n’est pas être autoritaire. Être autoritaire, c’est imposer sa propre loi. C’est de l’abus de pouvoir. Or les parents ne font pas ça. S’il pleut, exiger d’un enfant qu’il mette un imperméable, c’est de l’autorité. Lui imposer l’imperméable vert qu’il déteste alors qu’il en a un autre, c’est de l’autoritarisme. L’autorité, ce n’est pas de la violence. Le parent ne fait que transmettre à l’enfant les règles nécessaires pour vivre en société que lui-même respecte. On ne tape pas sur les autres, on ne leur vole pas leurs affaires, on ne tire pas les cheveux de la petite voisine, même si c’est rigolo de la voir pleurer… On apprend à vivre avec les autres, à respecter les autres. C’est ça, l’éducation. Et c’est le devoir des parents d’éduquer. Parce que l’enfant ne naît pas civilisé, il le devient. Et il ne le devient que si des adultes l’éduquent. Il faut expliquer à l’enfant chaque règle et son utilité, puis la lui imposer. Il n’y a aucune éducation qui ne passe pas parle conflit. Et plus les parents sont déterminés, moins les conflits durent. Car ils ne durent que si l’enfant sent que ses parents ne sont pas sûrs d’eux.

 

Ne trouve-t-on pas également, chez certains pères, de la réjouissance devant un enfant qui a du caractère ?


C.H. : Il n’y a pas que chez les pères. Les mères également. Cela venge de la soumission que l’on a vécue enfant. Mais nous confondons avoir du caractère et transgresser impunément ou faire sa loi. Si, à 5 ans, il vous donne un coup de pied, à 15 ans, il fera quoi ? Parce qu’il n’y a aucune raison que l’enfant apprenne à se contrôler tout seul. Les parents projettent un vert paradis de l’enfance qui est leur paradis imaginaire d’un monde sans limites. Freud disait très bien que nous ne renonçons jamais à la toute-puissance infantile et que nous la transférons sur l’enfant. Inconsciemment, nous allons lui demander de récupérer ce à quoi nous avons dû renoncer dans notre enfance. C’est un leurre.


L’exercer ne risque-t-il pas de nuire à la créativité de l’enfant ?

C.H. : Respecter les lois de la société n’a jamais empêché personne de créer. En revanche, ne pas les respecter, cela ne donne pasd es créateurs, mais des adolescents à la dérive. D’ailleurs, la création suppose du travail, et le travail suppose de renoncer au principe du plaisir immédiat.

 

La relation d’autorité, pour un père, est-elle plus difficile avec une fille ?


C.H. : Les petites filles aiment faire du charme à leur papa. Mais, fille ou garçon, un père qui a compris à quoi servaient les limites et qui se sent la légitimité de les poser ne se laissera pas avoir. Car c’est leur vie adulte que nous construisons. Le problème n’est pas que notre enfant ait une vie d’enfant la plus heureuse possible – même si c’est essentiel d’avoir une vie d’enfant heureuse ! –mais qu’il ait une vie d’enfant qui lui permette d’avoir une vie adulte la plus heureuse possible. Quand les parents comprennent ça, ils assument parfaitement de fixer des limites et de poser un cadre. D’ailleurs, les enfants cherchent une limite, parce que sinon c’est trop angoissant. Avoir le sentiment que l’on pourrait être dépassé par ses pulsions, c’est terrifiant, c’est comme être sur un cheval emballé. L’autorité rassure.


Que répondriez-vous à un enfant qui vous demande ce qu’est l’autorité ?

C.H. : Je lui dirais : « Il y a deux sortes de grandes personnes. Il y a celles qui aiment les enfants comme elles aiment les petits chats. Pour jouer avec, leur faire des câlins, leur donner un joli panier et de bonnes croquettes. Le chaton ronronne, il est content. Et la grande personne aussi est contente. Peut-être parce que quand elle était petite, on ne lui a pas expliqué la différence entre les petits chats e tles petits enfants. Et puis il y a des grandes personnes qui t’aiment vraiment, pas comme un petit chat. Bien sûr, elles sont contentes de te faire des câlins, des bons gâteaux et de jouer avec toi. Mais surtout, elles ont envie que tu deviennes une grande personne qui soit heureuse, qui n’ait pas de problèmes avec les autres. Des parents qui grondent, c’est des parents qui aiment vraiment, parce qu’ils ont envie que tu deviennes quelqu’un de bien. Ton père te gronde parce que tu tapes sur ton petit frère ? Mais lui, s’il tape sur le voisin, on va appeler la police… Tu vois bien que ce n’est pas possible. Il t’apprend à devenir grand. » Et les enfants comprennent au quart de tour.

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21 mars 2013 4 21 /03 /mars /2013 15:35

Réflexion philosophique sur un extrait de "Protagoras", de Platon :

 

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C’était au temps où les dieux existaient, mais où n’existaient pas encore les races mortelles. Or, quand est arrivé pour celles-ci le temps où la destinée les appelait aussi à l’existence, à ce moment les dieux les modèlent en dedans de la terre, en faisant un mélange de terre, de feu et de tout ce qui peut encore se combiner avec le feu et la terre. Puis, quand ils voulurent les produire à la lumière, ils prescrivirent à Prométhée et à Epiméthée de les doter de qualités [dunameis ], en distribuant ces qualités à chacune de la façon convenable. Mais Epiméthée demande alors à Prométhée de lui laisser faire tout seul cette distribution : « Une fois la distribution faite par moi, dit-il, à toi de contrôler ! » Là-dessus, ayant convaincu l’autre, le distributeur se met à l’oeuvre. En distribuant les qualités, il donnait à certaines races la force sans la vélocité; d’autres, étant plus faibles, étaient par lui dotées de vélocité; il armait les unes, et, pour celles auxquelles il donnait une nature désarmée, il imaginait en vue de leur sauvegarde quelque autre qualité (…) En tout, la distribution consistait de sa part à égaliser les chances, et, dans tout ce qu’il imaginait, il prenait ses précautions pour éviter qu’aucune race ne s’éteignit.

 

… Mais, comme, chacun sait cela, Epiméthée n’était pas extrêmement avisé, il ne se rendit pas compte que, après avoir ainsi gaspillé le trésor des qualités au profit des êtres privés de raison [aloga ], il lui restait encore la race humaine [non-aloga] qui n’était point dotée [akosmeton]; et il était embarrassé de savoir qu’en faire. Or, tandis qu’il est dans cet embarras, arrive Prométhée pour contrôler la distribution; il voit les autres animaux convenablement pourvus sous tous les rapports, tandis que l’homme est tout nu, pas chaussé, dénué de couvertures, désarmé. Déjà, était arrivé cependant le jour où ce devait être le destin de l’homme, de sortir à son tour de la terre pour s’élever à la lumière. Alors Prométhée, en proie à l’embarras de savoir quel moyen il trouverait pour sauvegarder l’homme, dérobe à Héphaïstos et Athéna le génie créateur des arts [ten enteknen sophian ], en dérobant le feu (car, sans le feu, il n’y aurait moyen [amekhanon] pour personne d’acquérir ce génie ou de l’utiliser); et c’est en procédant ainsi qu’il fait à l’homme son cadeau. Voilà donc comment l’homme acquit l’intelligence qui s’applique aux besoins de la vie. Mais l’art [sophia ] d’administrer les cités, il ne le posséda pas! Cet art était en effet chez Zeus …. Dans la suite, Prométhée fut, dit-on, puni du larcin qu’il avait commis par la faute d’Epiméthée.

 

Or, puisque l’homme a eu sa part du lot divin, il fut, en premier lieu, le seul des animaux à croire à des dieux; il se mettait à élever des autels et des images de dieux. Ensuite, il eut vite fait d’articuler artistement les sons de la voix [phonen] et les parties du discours [onomata]. Les habitations, les vêtements, les chaussures, les couvertures, les aliments tirés de la terre, furent, après cela, ses inventions [eureto]. » Platon, Protagoras , 320d-322a

 

Les hommes, au début, vivaient dispersés [sporadès ] : il n’y avait pas de cités; ils étaient en conséquence détruits par les bêtes sauvages, du fait que, de toute manière, ils étaient plus faibles qu’elles; et si le travail de leurs arts leur était d’un secours suffisant pour assurer leur entretien, il ne leur donnait pas le moyen de faire la guerre aux animaux; car ils ne possédaient pas encore l’art [tekhnè ] politique, dont l’art de la guerre [polémikè] est une partie. Aussi cherchaient-ils à se rassembler, et, en fondant des cités, à assurer leur salut. Mais, quand ils se furent rassemblés, ils commettaient des injustices [étaient adikoun] les uns à l’égard des autres, précisément faute de posséder l’art d’administrer les cités [ten politikhen tekhnen]; si bien que, se répandant à nouveau de tous côtés, ils étaient anéantis. C’est alors que Zeus, craignant pour la disparition totale de notre espèce, envoie Hermès porter aux hommes l’aidô [ la pudeur, le respect, la honte- peut-être pourrions nous dire aujourd'hui le sentiment de la finitude] et la justice [dikè], afin qu’elles fussent la parure des cités [poleon kosmoï : le faire-monde des cités] et le lien [desmoi ] par lequel s’unissent les amitiés [philias sunagogoi : se rassemblent, se rapprochent]. Sur ce, Hermès demande à Zeus de quelle manière enfin il donnera aux hommes la justice et l’aidô : « faut-il que, ces tekhnaï aussi, j’en fasse entre eux la distribution [nenemestai] de la même façon qu’ont été distribuées [neimô] les autres techniques ?

 

Or, voici comment la distribution s’en est faite : un seul individu, qui est un spécialiste de la médecine, c’est assez pour un grand nombre d’individus étrangers à cette spécialité; de même pour les autres artisans [demiourgoï]. Eh bien! la justice et l’aidô, faut-il que je les établisse de cette façon dans l’humanité ? ou faut-il que je les distribue indistinctement à tous ? – A tous indistinctement, répondit Zeus, et que tous en aient leur part! Il n’y aurait pas en effet de cités, si un petit nombre d’hommes [oligoï ], comme c’est par ailleurs le cas avec les autres techniques, en avaient leur part. De plus, institue même, en mon nom, une loi, au terme de laquelle il faut mettre à mort, comme s’il constituait pour la cité une maladie, celui qui n’est pas capable de participer à l’aidô ni à la justice. » Protagoras , 322a-322e.

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23 février 2013 6 23 /02 /février /2013 09:23

Comment répondre aux questions des enfants portant sur la mort ?

  

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Il n'est jamais facile de répondre à ces questions car dans un sens, elles nous ramènent à notre propre difficulté à évoquer un tel sujet. Or, les enfants attendent des réponses claires, et nous obligent donc à être clairs envers nous-mêmes. Il existe aussi une idée trop répandue qu'il faut protéger les petits de tout ce qui est lourd et triste. C'est vrai pour certains problèmes qui ne les regardent pas, comme les difficultés d'un couple. Mais ce n'est pas vrai en ce qui concerne la mort, car c'est une question existentielle qu'ils se posent et ils ont besoin d'en parler.


Je pense donc qu'il est important de réfléchir à ce que l'on souhaite leur dire, de leur parler de manière simple, et de le faire à partir des questions posées et non pas en développant un grand discours sur la vie et la mort. Et surtout, nous adultes, sommes tout à fait en droit de dire aux enfants que l'on ne sait pas répondre à certaines interrogations et de leur expliquer pourquoi Mais des messages importants doivent être passés : la mort est naturelle, tout naît et tout meurt. On ne sait pas quand elle arrive : ne décèdent pas uniquement les gens âgés mais aussi des personnes jeunes. Enfin, la mort ne touche pas que les méchants.


Quand un enfant perd l'un de ses proches, de quelle façon le lui annoncer ?


Dans l'idéal, les gens les plus proches de l'enfant devraient lui faire cette annonce. Mais ce n'est pas toujours possible. Dans ce cas, il faut absolument que ce soit quelqu'un en qui l'enfant a confiance.
L'un des meilleurs moyens d'aider l'enfant est de lui parler avec des mots vrais. Ne lui dites que papa est parti, ou s'est endormi. J'ai vu trop d'enfants qui sont ensuite paniqués à la seule idée d'aller se coucher ou qui attendent vainement le retour du disparu. Etre mort, c'est ne plus bouger, ne plus parler, ne plus respirer, ne plus rire... C'est ce que l'on doit expliquer aux enfants.

 
Enfin, on dit qu'il est important de voir le corps. C'est tout à fait vrai à partir du moment où cela se fait dans de bonnes conditions. Cela ne doit pas être imposé à l'enfant, et s'il l'accepte, il doit être accompagné par un adulte. Une bonne chose est de le suggérer à l'enfant en lui proposant par exemple d'apporter une lettre, un dessin, une fleur. L'enfant dès lors participe, et cela aura un impact très fort sur l'après, sur le deuil. Il en va de même pour les funérailles. Il est important pour l'enfant d'y assister, mais s'il le souhaite et s'il est bien entouré.

 

Aider un enfant touché par le deuil est très important, comment s'y prendre ?

 

Il est essentiel que l'enfant puisse raconter, exprimer tout ce qu'il ressent, poser des questions et avoir une écoute et des réponses à ses questions. Le dessin, le jeu, les contes, les livres sont de bons outils pour l'aider à dire ses émotions. Car l'enfant sait très bien ce qu'il ressent mais il est important que l'on le lui demande.
Un enfant endeuillé est un enfant qu'il faut également rassurer : il a besoin de sentir l'amour que l'on a toujours pour lui, l'aide que l'on va lui apporter. Surtout quand la mort touche une fratrie: ce frère ou cette sœur décédé(e) va prendre toute la place, on ne parle que de lui ou d'elle, ce qui est tout à fait naturel tant le chagrin est immense. Mais l'enfant vivant doit être associé à ce chagrin : mieux vaut être triste tous ensemble que seul chacun dans son coin.


Enfin, il faut aider l'enfant à dire adieu, en retournant pourquoi pas sur la tombe après les obsèques, en y déposant un dessin ou une lettre. Car c'est aussi sa propre histoire qu'il écrit.


Quelques suggestions d'ouvrages pour vous aider :

A lire avec ses enfants :

 

• “Tu seras toujours avec nous Calinou” de Micheline Motte et Frédéric Mansot (Ed. Mame, 1993)
• ”Quelqu'un que tu aimais est mort” d'Agnès Auschitzka (Bayard editions, 1996)
• ”Tu me manques” de Paul Verrept (L'ecole des loisirs, 1999)

 

Pour parler de la mort avec ses enfants :

• “La mort, la vie de famille” de Marie-Hélène Encreve-Lambert (Bayard Editions, 1999)

 

Infos pratiques :

Unité François-Xavier Bagnoud / Fondation Croix Saint Simon
125 rue d'Avron, 75020 Paris. Tel : 01 44 64 43 50
( www.fxb.org )

 

Cette association possède un Centre de documentation richement fourni. Vous pouvez y obtenir par courrier ou par mail (afxbacdi@wanadoo.fr), une biblographie en fonction d'un thème (suicide, mort d'un bébé...), ou des conseils de lectures en fonction de l'âge.

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31 janvier 2013 4 31 /01 /janvier /2013 11:41

A l'heure où notre société devient une civilisation d'expertise, où domine une population suradaptée souvent normative, aseptisée par les structures régaliennes, et trop docile face aux aberrations provoquées par les institutions: Bernard Stiegler nous rappelle combien l'amatorat, véritable thérapeutique de soi - à travers la passion créatrice qu'il génère - permet par le principe des externalités positives, la guérison par l'oeuvre d'une époque désenchantée !

 

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 1- Il y a un temps de l’amateur, un rapport au temps qu’ignore celui qui n’est pas amateur — et c’est un temps de l’amour, c’est-à-dire de la fidélité : amateur vient d’amare, aimer. Socrate pose d’ailleurs dans Le Banquet que le philosophe est avant tout un amateur : l’amateur de sagesse. Et dans Ménon, il dit que ce rapport à la sagesse est fondé sur « un autre temps ».

  
L’amateur est prêt à donner beaucoup de temps à ce qui le passionne. Il est absolument disponible. Dans le contexte si spécifique et fatigué de notre époque, cela signifie que l’amateur est tout sauf un consommateur. L’amateur pratique ce qu’il aime, donc il le fréquente : par exemple, il est capable d’aller voir plusieurs fois le même spectacle. Proust le narre dans La recherche du temps perdu aussi bien à propos du théâtre que des œuvres plastiques (portraits des Guermantes, peintures d’Elstir) ou que de la « petite musique de Vinteuil ». Les artistes dont j’aime l’œuvre, c’est leur trajectoire qui m’intéresse, la série que forme cette œuvre, et son  inscription dans ce que j’appelle un circuit de transindividuation (ainsi, par exemple, ce qui relie Marcel Duchamp à Sophie Calle, en passant par Joseph Beuys).

 
L’amateur cultive un rapport au temps qui fonde un rapport aux œuvres. Même l’amant, qui est l’amateur le plus répandu qui soit, a un tel rapport – que l’on dit amoureux. Une histoire d’amour, c’est-à-dire d’amateur, est toujours l’histoire d’une altération par cet autre qu’est l’être aimé : œuvre, personne, discipline, pays, langue, etc. Celui que l’on aime, comme amant, est celui — ou celle — que l’on fréquente inlassablement et dont, en quelque sorte le mystère s’épaissit dans cette fréquentation par laquelle on se trouve trans-formé, à savoir aussi, individué (dans le langage de Simondon).

  

 Et s’il est vrai que les amateurs forment des communautés d’amateurs, et aiment à se rencontrer pour parler ensemble de ce qu’ils aiment, cette individuation psychique devient aussi une individuation collective à travers un processus de transindividuation, c’est cela qui constitue une époque, et dans ce processus, les tout premiers amateurs sont les artistes eux-mêmes (un artiste « professionnel », c’est, tout comme un philosophe « professionnel », une contradiction dans les termes, et ceci est un problème propre à notre temps, où les « professionnels » se satisfont si lamentablement du consumérisme qui les coupe des amateurs, par où ils perdent eux-mêmes leur amour des œuvres.

 
Un objet aimé — œuvre, personne — s’idéalise. L’idéalisation est coextensive à l’amour, soit à la forme plénière du désir. En cela, l’objet de l’amateur et de l’aimant s’infinitise. C’est ainsi que l’art conduit à ce que Kant désigne non seulement comme étant le beau, mais le sublime. Le passage de l’art au religieux — ou du religieux à l’art — se fait aussi par là.

 
Une œuvre est intrinsèquement inachevée, infinie, et renaît à chaque expérience du regard qui se pose sur elle, pour autant que le regard se pose sur elle, parce que mon œil peut fonctionner comme celui d’un poulpe : il peut voir qu’il y a du bleu et du rouge sans en être affecté. Il peut ne rien se passer : l’œuvre peut ne pas œuvrer. Et la plupart dutemps, elle n’œuvre pas. La plupart du temps, quand je suis devant une œuvre théâtrale, plastique, littéraire, musicale, je n’y entre pas — du moins pas d’emblée. Les œuvres sont comme d’Artagnan et Aramis : je les rencontre d’abord dans un combat. Les œuvres qui m’ont le plus marqué m’ont souvent d’abord blessé, heurté et contrarié. Et je me méfie des personnes qui disent entrer dans toute œuvre : je crains qu’elles n’entrent dans rien d’autre que leur narcissisme béat. On n’entre pas dans une œuvre comme dans un moulin. Peu de gens savent ce qu’est une œuvre : ceux qui le savent sont des amateurs, et il n’y a plus beaucoup d’amateurs parce qu’on en a détruit les conditions de possibilité.

  
Je parlais de temps et d’infini. L’autre temps, celui qui œuvre dans l’amateur, et qui l’ouvre, est un temps infini. Or, en principe, un temps infini n’est pas possible : le temps a un début et une fin. L’expérience du temps des œuvres a à voir en cela avec Dieu : l’œuvre n’œuvre que pour autant qu’elle n’est pas sur le même plan que moi, qui suis sur un plan d’immanence finie. Depuis l’art moderne, qui est aussi l’art de la mort de Dieu, c’est un plan d’immanence infinie. Je suis un immanentiste qui pense que nous sommes à jamais tombés dans l’immanence, qu’il n’y a plus de transcendance, mais je ne crois pas pour autant qu’on en ait fini avec l’infini. Il y a dans l’immanence une expérience de l’infini, s’il est vrai que l’immanence est l’expérience du désir dont l’objet est intrinsèquement infini, et ces questions constituent l’étoffe des œuvres de Nietzsche et de Freud.

 

 

"Les amateurs travaillent, ils n’ont rien à voir avec la consommation. Ils ne travaillent pas pour survivre, mais pour exister."

 

2- Ce travail, qui ne procure pas forcément un emploi, apparaît dans le cadre du post-consumérisme lequel passe aussi par une reterritorialisation. Les technologies réticulaires numériques sont des technologies territoriales, ou du moins qui peuvent se territorialiser à très peu de frais, non seulement grâce au gps, mais parce qu’elles permettent de développer localement des politiques relationnelles, et à travers une écologie relationnelle, permettant de lutter contre les effets calamiteux notamment du consumérisme.

 

Il est évident que ces technologies sont des pharmaka, c’est-à-dire des poisons autant que des remèdes. Mais il dépend de nous de savoir si ces poisons peuvent devenir des remèdes. La philosophie, en particulier celle des Stoïciens, consiste à confectionner des remèdes à partir de poisons. Ainsi de l’écriture, dont Platon montre — en écrivant — qu’elle est devenue un poison pour la cité grecque, à l’époque des sophistes, elle, qui est l’origine du droit, de la géométrie, de l’histoire, de la géographie, de la tragédie, etc.

  
"Il y a une thérapeutique des pharmaka en tous âges, dont Sénèque est un penseur. Cette thérapeutique est la façon dont une société fait du pharmakon un remède, et c’est ce qui caractérise chaque époque. Quant à nous, c’est la question d’une écologie relationnelle qui nous affecte dans le contexte de la réticularité territoriale nouvelle, et c’est pour les artistes et leurs amateurs un enjeu immense et planétaire."

 

Par Bernard Stiegler. Le temps de l’amatorat - p. 161-179.

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