24 mai 2013 5 24 /05 /mai /2013 09:46

Excellent débat sur l'avenir de l'esthétisme, au sein de la société consumériste.

 

France-Culture

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Brice Couturier: Il y a des penseurs apocalyptiques. Ce sont ceux qui vous décrivent l’abîme dans lequel est en train de sombrer le monde, sous les coups de – cochez le coupable – 1) la dissociation du lien social sous l’effet de la montée des égoïsmes individuels et/ou de celle des « communautarismes qui préparent la libanisation de nos vieilles nations », 2) l’hédonisme individualiste, l’irresponsabilité et l’absence d’esprit de sérieux, issus de Mai 68, 3), l’extension de la sphère du marché à des biens collectifs et jusqu’à la sphère affective, 4) la démographie galopante des pays du Sud, l’étalement urbain, les déséquilibres écologiques, l’effet de serre, le réchauffement climatique, la chute de météorites, 5) la confusion des sexes qui mine le principe même de réalité et, partant, les fondements anthropologiques de toute société civilisée, etc., etc…

 

Je laisse aux auditeurs le soin de compléter cette liste, en fonction des devises du jour, rapidement remplacées.

 

Bref, il existe plusieurs familles de penseurs qui prospèrent sur la promesse de terrifiants désastres. Ils ont repris à leur compte la fonction du prophète qui, selon Max Weber, offre une « image du monde »,  dans lequel nos souffrances actuelles prennent sens. ; et sont présentées comme des épreuves nécessaires sur la voie d’un Salut – au prix d’une conversion idéologique.

 

Et puis, de l’autre côté, il y a les penseurs comme Gilles Lipovetsky qui provoquent leurs concitoyens par une forme d’optimisme un peu cynique, une adhésion enthousiaste à l’esprit du temps, une célébration amusée de ce qu’il peut comporter de pire.

 

Dès votre premier livre, j’avais perçu un son nouveau et je crois bien avoir recueilli votre première interview pour France Culture. L’ère du vide, nous disiez-vous, vaut mieux que les religions sécularisées. L’individu hyper-moderne est un sceptique désabusé, tant mieux, il sera moins prompt à se laisser endoctriner par les pseudo-messies qui promettaient à ses ancêtres le Paradis sur terre au prix de quelques millions de morts…

 

Et vous n’avez cessé de récidiver, Gilles Lipovetsky, vous réjouissant de l’évanouissement des morales héritées, célébrant le luxe, l’éphémère, la jouissance, la mode et surtout l’individu émancipé de toutes contraintes… Votre dernier livre est consacré à un éloge de l’esthétique du capitalisme actuel : non content d’avoir inventé le design, afin de rendre plus désirables les objets de qu’il propose à notre avidité, il aurait inventé des arts nouveaux, hybrides, mêlant le spectacle de masse et les marchés de niche, les prestiges de la marque et ceux de l’art, la grande surface et le musée, l’art et la mode. Surtout, au cours des trente dernières années, ce « capitalisme artiste » se serait répandu de manière planétaire, grâce aux multinationales de la culture et du divertissement et ses productions auraient proliféré, nous proposant une offre démultipliée, d’une richesse inégalée dans l’histoire humaine.

 

Il y a bien des penseurs qu’on pourrait vous opposer. A commencer par tous ceux qui, depuis l’Ecole de Francfort, estiment que notre modernité, autrefois émancipatrice, s’est fourvoyée dans une impasse, qu’elle s’est trahie en route ; qu’elle a dégénéré en une « post-modernité », un « capitalisme liquide » qui noie toute forme sur son passage.

 

Prenons deux essais dont les thèses contredisent radicalement les vôtres, par hasard, tous deux publiés par les éditions du Cerf, d’obédience chrétienne. Dans « Le capitalisme esthétique. Essai sur l’industrialisation du goût », Olivier Assouly tente de reconstituer l’histoire de « la mobilisation industrielle du goût des consommateurs » qu’est devenue le marketing contemporain. Et il relève que la sphère de l’intime a été progressivement forcée, que le goût a été métamorphosé par des vendeurs d’objets inutiles, mais constamment redisigné, afin de les rendre désirables.

 

Dans « L’ère du consommateur », Laurent Fourquet voit dans la figure du Consommateur le digne héritier du Travailleur d’Ernst Jünger – l’incarnation de l’esprit du temps. Le Consommateur « perçoit l’univers comme une immense galerie marchande » et l’autre, comme un objet susceptible ou non de lui procurer de la jouissance. C’est la négation du Citoyen, qui se percevait comme partie d’un tout et pensait à ses devoirs envers sa patrie avant d’exiger, de l’Etat, de nouveaux droits.  « Chaque chose susceptible de lui procurer une jouissance est monnayable… commercialisable ». Or, qui a constamment besoin de jouir se condamne à la déception ; aussi le consommateur est un frustré ; il lui faut des doses de plus en plus fortes de nouveautés, des jouissances de plus en plus violentes. C’est pourquoi la figure du drogué constitue une sorte d’aboutissement. Est-ce là le modèle que vous proposeriez à l’édification des jeunes générations ?

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