12 mai 2014 1 12 /05 /mai /2014 15:59

Un « spin doctor » est un conseiller en communication et marketing politique agissant pour le compte d'une personnalité politique, le plus souvent lors de campagnes électorales. C'est, en quelque sorte, un « mercenaire » de la communication vendant ses services au plus offrant...

 

-Stéphane fouks : Lobbyiste et leader de l'agence d'influence Havas-

 

 

Le terme est généralement porteur d'une connotation négative : la pratique a montré que le spin doctor n'agit pas toujours de façon morale notamment du fait de l'emploi de la technique dite du Storytelling. Dignes héritiers d'Edward Bernays, le premier des voleurs des théories de Sigmund Freud, ils sont également des professionnels du détournement et du maquillage de la vérité.

 

Étymologie

 

Il est vrai que la fonction est ancienne et s'est formalisée depuis les années 1930, même si le mot lui-même, « spin », n’a vraiment été popularisé qu’à partir de 1984 et du débat Ronald Reagan / Walter Mondale.

 

«To spin, en anglais, signifie « faire tourner ». Spin fait donc allusion à l’« effet », comme celui que l’on donne à une balle de tennis ou à la façon de faire tourner une toupie  ». En imprimant une torsion aux faits ou aux informations pour les présenter sous un angle favorable, les spin doctors dirigent donc l’opinion en lui fournissant slogans, révélations et images susceptibles de l’influencer, en mettant en scène les événements qui la réorientent dans le sens souhaité. En ce sens, leurs techniques d'influence proches du marketing commercial renouvellent les techniques de propagande classiques.

 

La commission générale de terminologie et de néologie française recommande depuis 2007 l'emploi des termes « façonneur d'image » pour traduire cette fonction. Le spin doctor, officiellement « conseiller en relations publiques », reçoit d’autres surnoms, tels que gourou, mentor, éminence grise, faiseur de présidents, doreur d'images ou docteur Folimage.

 

Pratique des Spin doctors

 

La mission du «Spin Doctor» est simple et directe : elle consiste à « dire et faire dire du bien de… », à adapter le message de leur candidat aux attentes supposées de l’électorat, à « enjoliver » l’apparence de leurs clients, à les rendre séduisants et populaires. Pour ce faire elle met au service de la communication politique une combinaison faite de techniques de narration (raconter une «belle histoire ») avec les principes de la publicité ou du marketing.

 
Par ailleurs certains spin doctors n'hésitent pas à recourir à des stratégies indirectes et plus «sournoises» : méthodes de discrédit d’un concurrent, de désinformation, de production d’évènements, de montage artificiel d’affaires en vue de défendre une cause ou d'en dénigrer une autre.

 

Le spin doctor exerce une influence considérable sur le discours, le programme et les initiatives de son client. En la matière, deux professionnels célèbres ont acquis une réputation sulfureuse, liée à des affaires de fuites ou de désinformation de la presse. Il s’agit de Karl Rove le conseiller de G. W. Bush, surnommé son « baby genius » et de Alastair Campbell pour Tony Blair. Tous deux ont joué un rôle crucial dans le « marketing » de la guerre en Irak, et bien sûr dans le style et le programme de leurs clients.

 

  • Sous l'Allemagne nazie, le ministre Goebbels a été le précurseur et l'initiateur d'une propagande systématique à grande échelle en faveur d'un régime totalitaire. Son action se caractérise par la justification et la promotion d'une idéologie cohérente et particulière au service d'un « Reich de mille ans ».
  • Aux États-Unis, le spin doctor est un personnage bien identifié. Des livres, des sites comme sourcewatch.org ou prwatch.org tiennent la chronique de leurs activités. Ils apparaissent dans des films ou des téléfilms. La campagne présidentielle américaine de 2008, la plus chère de l’histoire, a mis en vedette de nouveaux spin doctors comme David Axelrod, le conseiller de Barack Obama.
  • Au Mexique, Rafael Guillén Vicente, dit le « sous-commandant Marcos », usa de ces méthodes pour se faire connaître.
  • En France, on peut prendre l'exemple de :
    • Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était Président de la République, a bénéficié de l'habileté de plusieurs « doreurs d'images », notamment Thierry Saussez, Patrick Buisson ou encore Henri Guaino
    • François Mitterrand avec Jacques Séguéla, Jacques Attali et Jacques Pilhan. 

 

 

Entretien avec Luc Hermann : « Les “spin doctors” sont un danger pour la démocratie » 

 

En regardant vos documentaires, on a l’impression que la plupart des journalistes sont sous l’influence des conseillers en communication. Qu’en est-il exactement ?

 

 Oui, les spin doctors sont malheureusement en train de gagner la bataille de la communication. Leur méthode est très au point. Ils abreuvent les journalistes de toutes sortes d’informations pour les noyer et orienter leurs recherches. Il leur est ainsi plus facile de faire passer des mensonges, notamment sur des dossiers délicats.

 

On l’a vu dans les affaires DSK ou Cahuzac. Ils jouent sur l’urgence des journalistes à fournir de l’information à leurs rédactions, notamment les sites Web qui font de l’information en continu. Ensuite, ils savent que les journalistes ont tendance à se copier. Il y a malheureusement une forme de capillarité entre tous les médias. Enfin, ils capitalisent sur le fait que la plupart des journalistes manquent de pugnacité pour vérifier une information et la confronter à d’autres sources.

 

"En soulignant tout cela, on se rend compte qu’ils sont un véritable danger pour la démocratie."

 

Les différents communicants ont-ils facilement accepté de parler devant votre caméra ?

 

 Oui, la plupart ont accepté de venir témoigner sans poser de conditions. Seuls deux d’entre eux ont refusé et un troisième n’a pas voulu donner suite, malgré une longue conversation pour tenter de le convaincre. Mais les principaux spin doctors français sont là.

 

Le fait de parler peut aussi être pour eux une manière de redorer leur blason tout en ne disant pas grand-chose que l’on ne sache déjà…

 

 Le danger existait, mais je pense que nous avons su l’éviter. J’ai noté que certains étaient flattés d’être sollicités et ont fait preuve d’une certaine arrogance… Nous avons essayé de tirer tous les fils des histoires dont ils s’étaient occupées. La plupart ont parlé ouvertement, sans cacher leurs desseins. Ils défendent des intérêts privés et ça ne leur pose aucun problème d’utiliser des moyens parfois complexes pour arriver à leurs fins. D’ailleurs, beaucoup d’entre eux sont d’anciens journalistes et connaissent par cœur le fonctionnement d’une rédaction. Ils savent très bien comment s’y prendre pour faire l’ouverture des journaux de 20 heures… A titre d’exemple, aux Etats-Unis, on compte 4,6 communicants pour un journaliste !

 

Ont-ils demandé à revoir leurs interventions avant la diffusion ?

 

 Non. Ils savent ce qu’il faut dire et ne pas dire et font, très rarement, des dérapages… Certains qui ont vu les documentaires nous ont même félicités pour notre travail !

 

Sources: Le Monde.fr et Wikipédia.fr

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
30 avril 2014 3 30 /04 /avril /2014 18:32

En mars dernier, "Romaine public.org" à tendu son micro au philosophe Bernard Stiegler dans les locaux parisiens de l’Institut de recherche et d’innovation qu’il dirige. 

Le logiciel libre, l'intellect libre, ses licences, le domaine public, les biens communs : autant de sujets qui intéressent hautement Bernard Stiegler. Mais pour lui, toutes ces problématiques s’inscrivent dans un cadre beaucoup plus vaste, qu’il est urgent de prendre à bras le corps : La révision totale de l’organisation de notre société !

 

 


 

L’économie de la contribution

 

Bernard Stiegler considère le logiciel libre comme la matrice de l’économie de la contribution ; c’est en effet une activité industrielle qui ne prive plus les gens de leur savoir mais au contraire développe des savoirs, individuels et collectifs, dans un processus de déprolétarisation. Or, cette matrice peut s’appliquer dans pratiquement toutes les activités industrielles de demain : réseaux énergétiques intelligents, où nous ne sommes plus consommateurs mais curateurs d’énergie, re-matérialisation (imprimante 3D...), agriculture (AMAP, Open Source Ecology...)

 

Par ailleurs, la numérisation est en train d’engendrer une automatisation colossale, bien plus importante que celle que l’on a connue par le passé. Il se prépare une mutation de la production : on n’aura plus besoin de producteurs, sauf dans des cas marginaux. C’en est fini de l’économie du XXe siècle, fini du modèle taylorien : captation de la propriété, exclusivité de l’exploitation, redistribution par le salaire, promesse de pouvoir d’achat, etc.

 

 

Il faut donc repenser complètement la redistribution ; on va plutôt vers une société du savoir nous permettant de retrouver et développer nos capacités (ce qui était auparavant empêché par la prolétarisation). Dans cette perspective, il ne faut surtout pas détruire le statut d’intermittent du spectacle mais au contraire... le généraliser, en proposant à tout le monde un revenu contributif de base. Je puis alors alterner et passer d’un statut où je suis en train de développer mes capacités à un statut de mise en production de ces capacités acquises (comme pour l’intermittence).

 

Il y a de légitimes réticences, notamment parce que cela peut favoriser la flexibilité de l’emploi, voire des dérives telles que le « human computing » (prolétarisation décentralisée où l’on paye les gens à la tâche sans aucune protection sociale). Il y a aussi des économies de la contribution négatives, comme Facebook par exemple, qui capte et monnaye nos données personnelles. L’emblématique Google est un modèle hybride mais toxique dans une société en transition : ultra-consumériste sur le marché publicitaire mais qui produit également une forte valeur d’usage très contributif.

 

Il ne s’agit pas de défendre le contributif en tant que tel. Mais, qu’on le veuille ou non, nous sommes en train de passer dans un système de production qui devient contributif (ainsi l’open source, qui n’est pas le logiciel libre, est devenue largement majoritaire aujourd’hui). Et à partir de là, il nous faut produire un modèle, juste, soutenable, de gauche même diront certains, qui impose de repenser les conditions du travail, la fiscalité, le droit... tout ce qui a constitué la société consumériste dans sa grande époque.

 

L’économie de la contribution est donc la généralisation des processus de déprolétarisation. Une grande source d’espoir, mais pour le moment trop peu de gens travaillent sérieusement et concrètement sur ces questions. C’est malheureusement l’économie de la contribution dans sa version californienne qui se développe, en en discréditant le concept plus général.

 


 

Aller au delà du choix des licences libres

 

Bernard Stiegler est favorable à l’extension générale de la licence libre, sans aucune réserve. Mais pour que ce faire, il convient de donner à cette matrice du logiciel libre toute son extension, en revoyant notamment toute la fiscalité.

 

Comme dit plus haut, il faut qu’il y ait un statut de l’intermittence non pas du spectacle mais du contributeur. Si je suis un contributeur intermittent, je n’ai pas besoin de toucher des droits d’auteurs puisque je touche une allocation qui m’est donnée par la puissance publique. Jean-Luc Godard l’affirmait déjà dans les années 60, en évoquant le droit d’auteur comme une arme du marché et de l’industrie culturelle.

 

Ce n’est pas une allocation chômage puisque le chômage n’est rien d’autre que le non emploi salarié et que le statut même du salarié change dans cette nouvelle économie peer-to-peer du savoir.

 

 

 

Dissolution du droit d’auteur ?

 

Le statut d’intermittent apparaît donc comme une solution à la question du droit d’auteur si on le généralise. En accordant un revenu contributif à l’auteur, on n’a plus besoin de cette rente patrimoniale bourgeoise que représente le droit d’auteur aujourd’hui.

Dès lors, il faut être non pas défensif, mais offensif : non pas défendre le statut d’intermittent auprès de la société du spectacle, mais partir à l’attaque de la société avec ce statut d’intermittent.

 

En toute logique Bernard Stiegler critique la durée excessive du droit d’auteur et sa succession aux héritiers. Il pointe par contre la question du droit moral pour soulever celle de la non-falsification, à savoir celle de la vérité.

 

 


 

Contradiction ?

 

Bernard Stiegler défend les logiciels libres et les licences libres mais utilise un Mac et publie ses livres chez de grands éditeurs sous le régime classique du droit d’auteur.

Il s’en explique : légitimité et visibilité pour les livres, ergonomie et efficacité pour les outils de travail.

 

 


 

Les biens communs

 

Bernard Stiegler est très favorable aux biens communs à condition de ne pas diluer la question de la Res Publica. La Chose Publique et les commons, ça n’est pas la même chose.

 

La base de la vie politique, c’est la publication et la formation citoyenne qui l’accompagne ou devrait l’accompagner. Or les commons ne répondent pas à cela.

Il évoque également ce qu’il appelle la maladie infantile du bottom-up qui pense naïvement pouvoir se passer du top-down. Il faut que l’inévitable top-down soit produit par le bottom-up et non par les plateformes Google, Facebook, etc.

 

 

 

Déprolétariser la musique

 

Bernard Stiegler est très sensible de l’éducation pouvant accompagner et aider l’écoute musicale.

 

Il évoque son travail au sein de l’IRCAM (avec le logiciel libre OpenMusic) ainsi qu’un projet avec Sony pour, suivant une prophétie de Glenn Gould, ne plus se contenter d’écouter de la musique mais de la jouer en la réinterprétant.

 

 


 

Pharmakon

 

Pour conclure, Bernard Stiegler nous invite à agir.

 

Le numérique n’est pas bon en soi. Même le logiciel libre n’est pas bon en soi. Toutes ces technologies ont leur part de toxicité. Il nous faut donc élaborer une thérapeutique s’appuyant sur une élévation de la responsabilité et une nouvelle intelligence du collectif.

Prenons garde à ne pas faire de technocentrisme, même libre. Les hacktivistes ne suffisent pas. Il faut des juristes, des scientifiques, des médecins, des philosophes... des citoyens tout simplement.


Peut-être que le « blue du Net » consécutif à l’affaire Snowden favorisera les prises de conscience et les mises en mouvement.

 

 

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
25 mars 2014 2 25 /03 /mars /2014 08:09

La concertation médiatique et la profusion de l’information contribue-t-elle à une meilleure connaissance des problèmes ? A une meilleure diffusion du savoir ? Contribue-t-elle à une amélioration du débat démocratique ? La surinformation favorise-t-elle l’information ou débouche-t-elle sur une désinformation ?

 

 

Dossier réalisé par l'écrivain et journaliste René Naba:

Ancien responsable du monde arabo-musulman au service diplomatique de l’Agence France Presse, ancien conseiller du Directeur Général de RMC/Moyen orient, expert chargé de l’information, est l’auteur notamment des ouvrages suivants: "Média et Démocraitie, La captation de l'imaginaire un enjeu du XXI me siècle", Golias Novembre 2012 -"Erhal (dégage), La  France face aux rebelles arabes" Golias Novembre 2011. Il nous livre, dans cet article, un témoignage géopolitique poignant d'un long vécu aux services des médias, qui exercent une hégémonie quasi-totalitaire sur les différentes populations du monde...

 

Média et Démocratie ?

 

Le développement de la diffusion satellitaire, la multiplication des chaînes transfrontières et d’autres canaux de diffusion tels l’Internet (Web), le courrier électronique, le blog ou encore le fax ou le mobile (téléphone portable) ont porté les sociologues et analystes politiques à célébrer l’avènement d’une "société de l’information" comme la marque caractéristique du XXIeme siècle, l’échec du totalitarisme et le terme ultime de la démocratie néo-libérale.

Toutefois, le contrôle accru des grands conglomérats industriels sur les vecteurs d’information, l’importance prise par ailleurs par les stratégies de communication, au détriment de l’information proprement dite, l’endogamie croissante au sein du couple médias et politique de même que l’interactivité des divers acteurs au sein de ce même couple, tendent à relativiser ce premier constat au point que se pose la question de la viabilité d’un débat démocratique dans une société où les principaux vecteurs d’information sont dominés par les puissances d’argent et la promotion des intérêts privés.

Dans ce contexte, le langage, moyen de communication et d’échange par excellence, devient un marqueur d’identité culturel de par la terminologie empruntée ou l’accent utilisé par le locuteur.

L’effondrement d’une idéologie à dimension humaniste, utile contrepoids à l’hégémonie capitaliste, a accéléré cette évolution au point que le langage apparaît désormais comme un redoutable instrument de sélection et de discrimination, de domination et d’exclusion.

 

I- Le débat démocratique face à la profusion d’information
La société de l’information ou le village planétaire.

 

Jamais dans l’histoire de l’humanité, l’information n’a été si abondante et si instantanée au point que l’information mondialisée, abolissant les frontières physiques et linguistiques, a transformé la planète en un « village planétaire ».

Tous les grands évènements mondiaux se vivent dans une quasi communion universelle, (Mondial du foot, Jeux olympiques, les grandes catastrophes naturelles, telles le Tsunami en Asie en Décembre 2004, l’ouragan Katrina durant l’été 2005 au sud des Etats-Unis, de même que les deux guerres d’Irak en 1990 et 2003, ainsi que la destitution de la statue du président irakien Saddam Hussein, en avril 2003.

Depuis la révolution technologique opérée il y a vingt ans, des chaînes d’information continue ont supplanté les chaînes généralistes (CNN aux Etats-Unis, LCI, BFM, I-TELE et France info et France TV, en France) développant des programmes interactifs avec interventions des auditeurs téléspectateurs dans les débats politiques, induisant avant le terme un débat participatif.

L’exemple le plus manifeste, en France, s’est déroulé sur TF1 à l’occasion du débat sur le referendum constitutionnel, en avril 2005, entre le président Jacques Chirac et un panel de jeunes, ainsi qu’à l’occasion de la campagne présidentielle française de 2007 toujours sur TF1 dans l’émission « j’ai une question à vous poser », où le candidat à l’élection présidentielle était confronté pendant 90 minutes à un échantillon représentatif de la population française.

 

Même la presse écrite a opéré une mutation, couplant son édition papier par une édition électronique donnant ainsi la possibilité à un plus large lectorat, au delà les océans, d’accéder aux informations du journal.

En France, par exemple, les grands quotidiens parisiens peuvent être consultés électroniquement depuis l’Afrique ou l’Asie, contournant la censure généralement en vigueur dans les pays autoritaires. Dans le Monde arabe, où la censure est la norme, le quotidien « Al-Qods Al-Arabi » journal critique trans-arabe, offre quotidiennement l’hospitalité de ses colonnes à certains des principaux proscrits intellectuels arabes et contourne ainsi depuis Londres les restrictions édictées par les gouvernements arabes.

De même, à coté de la presse payante, une presse gratuite s’est développée dans les pays occidentaux accentuant l’offre d’information. En outre, un service de messagerie à la demande (à la carte) a été aménagé pour les usagers des téléphones portables.

 

A. Surinformation ou désinformation ?

 

Toutefois, la concertation médiatique, la profusion de l’information contribue-t-elle pour autant à une meilleure connaissance des problèmes ? A une meilleure diffusion du savoir ? Contribue-t-elle à une amélioration du débat démocratique ? La surinformation favorise-t-elle l’information ou débouche-t-elle sur une désinformation ?

Dans les années 1980, cinquante méga-compagnies dominaient le paysage médiatique aux Etats-Unis, mais, moins de dix ans plus tard, il n’en restait plus que vingt trois pour une domination comparable. « La vague des énormes marchés conclus dans les années 1990 et la mondialisation rapide ont laissé l’industrie médiatique centralisée en neuf conglomérats internationaux: AOL-TimeWarner, Viacom CBS, News corporation, Bertelsman (Allemagne), General Electric (NBC), Sony, ATT-LIBERTY Media et Vivendi Universal France.

Quatre d’entre eux (Disney, AOL Time Warner, Viacom et News corporation) contrôlent tout le cycle de la production (films, livres, magazine, journaux, programmes de télévision, musique vidéo, jeux) ainsi que la distribution (radio, câble, grandes surfaces, salles de cinéma multiplex) (1).

Mais cette concentration médiatique, pour impressionnante qu’elle soit avec les immenses possibilités de diffusion qu’elle recèle, contribue-t-elle à une amélioration de l’information du citoyen et du débat démocratique ?

La réponse ne saurait être tranchée à en juger par les déboires enregistrés tant par les Etats-Unis que par la France dans deux moments clés de leur histoire contemporaine:la guerre d’Irak pour les Etats-Unis et le referendum sur le traité constitutionnel par la France.

 

B. Les Etats-Unis et la guerre d’Irak.

 

Les Etats-Unis ont baigné dans une ferveur nationaliste cimentée par l’horreur des attentats anti-américains du 11 septembre 2001 contre les symboles de l’hyper puissance américaine, les tours jumelles (Twin Tower) de New York et le Pentagone à Washington. Cette ferveur a d’ailleurs été attisée par les médias avec leur longue évocation des scènes d’horreur et leurs commentaires conséquents.

Cette unanimité nationale a atteint son paroxysme lors de la guerre d’Afghanistan, en Octobre-Novembre 2001, engagée par les Etats-Unis avec la caution de l’ONU et perçue dans l’opinion américaine et internationale comme des représailles aux attentats du 11 septembre.

Cette unanimité s’est reproduite avec la même ferveur lors de la guerre d’Irak, engagée deux ans plus tard, en mars 2003, grâce notamment au travail de mobilisation de la presse américaine, quand bien même la guerre d’Irak a été engagée sans la caution des Nations-Unies.

Les grands médias américains ont longtemps relayé les thèses de l’administration néoconservatrice américaine avant de reconsidérer leurs positions avec les déboires militaires américains sur le terrain, le pillage du Musée de Bagdad, les tortures de la prison d’Abou Ghraib et les révélations sur les mensonges de la guerre (absence d’armes de destruction massive, lien du régime de Saddam Hussein avec l’organisation Al-Qaîda)

Une journaliste vedette du New York Times, Judith Miller, l’une des plus actives propagatrices de la thèse mensongère des armes de destruction massive en Irak, a été licenciée de son journal et de grands journaux tels le Washington Post et le New York Times ont publiquement reconnu leurs erreurs.

Il n’empêche les médias américains dans la guerre d’Irak ont été complices de la plus grande mystification de l’opinion publique relayant sans la moindre retenue et sur une longue période, la propagande de guerre du président George Bush jr.

La guerre d’Irak a démontré au grand jour la connivence entre le pouvoir politique et le monde médiatique, au détriment de la Démocratie.

 

C. La France et le référendum sur le traité constitutionnel.

 

Les dirigeants des principales formations politiques et la quasi totalité des grands commentateurs des grands médias se sont prononcés en faveur du Traité européen, stigmatisant l’archaïsme de ses opposants, quand bien même le texte soumis à référendum était long, touffu, confus et inaccessible au lecteur de base.

Les partisans du Oui, -grands patrons de presse et grands dirigeants politiques- ont été désavoués d’une manière manifeste, sans que soient remis en cause leur mode de fonctionnement.

Dans le cas de la France, si la connivence est aussi manifeste qu’aux Etats-Unis, le désaveu est plus marqué.

Contrairement aux Etats-Unis, les grands médias français, tels Le Monde ou TFI, n’ont jamais formulé la moindre autocritique, pas plus pour la guerre d’Irak que pour la campagne référendaire européenne ou la couverture de la précédente campagne présidentielle française, celle de 2002, où déjouant tous les pronostics, le chef de l’extrême droite française, Jean Marie Le Pen, chef du Front National, avait dangereusement supplanté, au premier tour des élections, le premier ministre Lionel Jospin, candidat du parti socialiste, éliminant la gauche de la première compétition majeure du XXI me siècle.

 

Jamais le Journal « Le Monde » ne s’est expliqué sur cette emphatique sentence décrétée par son ambitieux directeur selon laquelle « Nous sommes tous Américains » après les attentats anti-américains du 11 septembre. Nul non plus ne l’a interpellé sur ce pouvoir prescripteur qu’il s’est arrogé de se faire le porte-parole des Français, sans le moindre mandat électif.

Six ans après cette profession de foi, alors que l’Amérique s’enlise dans le bourbier irakien, M. Colombani a été déchargé de ses responsabilités, en juin 2007, par un vote de défiance des journalistes de son établissement s’opposant à la reconduction de son mandat.

Auparavant, Patrick Poivre d’Arvor, présentateur vedette de TFI, la plus importante chaîne télévisuelle d’Europe, a été convaincu de « bidouillage », manipulation de l’information, sans que cela n’entraîne le moindre discrédit. Poivre d’Arvor s’était abusivement attribué une interview du dirigeant cubain Fidel Castro, en substituant son image à celle de l’interview et en reformulant les questions afin de donner à l’entretien un cachet personnel.

Jean Marie Colombani et Patrick Poivre d’Arvor ont été cités dans des procès en relation avec l’affaire Pierre Botton, l’ancien gendre de l’ancien député chiraquien de Lyon, Michel Noir, sans que cela, non plus, n’entrave leur fulgurante carrière. PPDA a même été décoré, en mars 2007, de l’ordre du mérite, au rang de chevalier, par le ministre de la culture Renaud Donnedieu de Vabres, sans doute à titre de reconnaissance pour sa contribution à la déontologique journalistique.

De son côté Serge July, fondateur de l’ancien journal de gauche « Libération », plutôt que de s’interroger sur sa fausse perception de la société française, a laissé percé son dépit après l’échec du referendum constitutionnel européen, en Mai 2005, fustigeant ses compatriotes de tous les maux, sans la moindre critique à l’égard de l‘élite dirigeante qui avait établi un texte long et complexe.

Sans chercher à faire œuvre de pédagogie politique sur la portée et la signification de la construction européenne, ou même sans chercher à mettre en cause le président Jacques Chirac pour sa manœuvre démagogique qui avait instrumentalisé l’enjeu européen et le référendum constitutionnel pour rebondir sur la scène politique locale après ses déboires électoraux.

Ainsi donc, deux fois, en cinq ans, la classe politico-médiatique française a été désavouée, sans que cela n’entraîne une réforme des rapports entre le Pouvoir politique et les Médias au point qu’une tendance à l’endogamie paraît se développer à en juger par le nombre de mariages croisés entre politiciens et journalistes.

 

« Les Médias français se proclament et se vivent comme un « contre pouvoir ». Mais « la presse écrite et audiovisuelle est dominée par un journalisme de révérence, par des groupes industriels et financiers, par une pensée de marché, par des réseaux de connivence ( ... ) Alors, dans un périmètre idéologique minuscule, se multiplient les informations oubliées, les intervenants permanents, les notoriétés indues, les affrontements factices, les services réciproques ( ... ) un petit groupe de journalistes omniprésents – et dont le pouvoir est conforté par la loi du silence- impose sa définition de l’information-marchandise à une profession de plus en plus fragilisée par la crainte du chômage. Ces appariteurs de l’ordre sont les nouveaux chiens de garde de notre système économique ».

 

Le constat, féroce, s’apparente, par moments, à la réalité. Il a été dressé par un journaliste du mensuel Le Monde diplomatique » Serge Halimi, dans un opuscule au titre ravageur, « Les Nouveaux Chiens de Garde », Editions « Raisons d’agir », 2eme édition-2005.

La forme la plus achevée de l’imbrication du journalisme au pouvoir politique aura été le journalisme embarqué « embedded », littéralement dans le même lit, durant la Guerre d’Irak. Cette proximité a été jugée malsaine par bon nombre des membres de la profession car elle faussait l’esprit critique dans la mesure où le journaliste était littéralement incorporé au sujet de son observation, sans la moindre distanciation.

En immersion totale avec son sujet et le combat de son colocataire du char, sa capacité d’appréciation était immanquablement biaisée. Cette technique a réussi à retarder, sans totalement l’annuler, l’appréciation objective d’une politique, comme ce fut le cas lors de l’invasion américaine de l’Irak, en mars 2003.

 

(Pour ce qui est de la France, cf à ce propos l’article du même auteur « Média et Démocratie I De la consanguinité entre Politique et Média en France ou « l’embedded à la française ».)

http://renenaba.blog.fr/2007/09/06/p2935657#more2935657

 

II) Les Chiffres de la publicité et le neuro-marketing

 

La communication tend à se substituer à l’information et ses dérives nous renvoient à la propagande de base des régimes totalitaires que les pays démocratiques sont censés combattre. « Spin doctor’s », c’est le nom que l’on donne aux Etats-Unis et au Royaume uni à ses « maîtres de l’embobine » chargés de gérer l’opinion publique.

A la fin des années 1990, le budget américain de l’industrie des relations publiques a dépassé celui de la publicité. Selon une étude de John Stauber et Sheldon Rampton, qui passent pour être les meilleurs spécialistes de la profession et co-auteurs d’un remarquable ouvrage sur la question (Toxic sludge is good for you- Common Courage presse 1995), le nombre des salariés des agences des relations publiques (150.000) dépasse celui des journalistes (130.000).

Aux Etats-Unis, 40 pour cent de ce qui est publié dans la presse est directement reproduit, sans altération, des communiqués des « Public relations » (3) soutient Paul Moreira, producteur de l’émission de référence de Canal + et auteur d’un ouvrage documenté sur « Les nouvelles censures- dans les coulisses de la manipulation de l’information » (Editions Robert Laffont février 2007).

Deux chiffres suffisent à caractériser l’Empire des Médias : il vit aux deux tiers de la publicité, et il dépense chaque année deux fois le budget de l’état français. Au niveau mondial, le chiffre d’affaires mondial de la télévision, hors subventions, est voisin de 220 milliards de dollars en 2006, dont environ 160 milliards financés par la publicité, soit 70%.

Le chiffre d’affaires mondial des journaux et magazines est voisin en 2006 de 275 milliards de dollars, dont environ 175 milliards financés par la publicité, soit 65%, en augmentation, avec un maximum de 88% aux Etats-Unis. En ajoutant les radios, cela fait environ 540 milliards de dollars par an, soit presque deux fois les dépenses annuelles de l’état français.

« Entertainment » (divertissement) comme outil et « advertising » (publicité) comme finalité. Le but n’est pas d’informer, mais d’attirer assez l’attention pour faire passer le vrai produit : la publicité. L’« information » là-dedans est un excipient comme un autre, dont le but n’est pas d’informer mais d’attirer l’attention et de véhiculer des messages publicitaires.

L’information devient « infotainement », une information de divertissement. Ce qui explique en France que les grandes émissions politiques des précédentes décennies, comme l’ « Heure de vérité » sur France 2, faite par des journalistes, a depuis longtemps cédé la place aux émissions de divertissement. Les hommes politiques préfèrent, et de loin, passer chez les animateurs Michel Drucker ou Marc Olivier Fogiel pour promouvoir leurs idées.

 

Le temps de cerveau disponible du lecteur ou téléspectateur humain ingurgite chaque année pour 400 milliards de dollars américains de messages intéressés. Emis par qui ? Sur les 360 milliards fournis aux anciens médias par la publicité, selon ce document du groupe Lagardère, 160 milliards, soit 44%, sont « attribués » par les sept premiers groupes de publicité, qui font un chiffre d’affaires direct d’environ 50 milliards.

La captation de l’imaginaire et le conditionnement psychologique des consommateurs se fait à un âge de plus en plus précoce. Selon une étude d’une équipe de chercheurs de l’Université de Stanford (Californie), 48 pour cent des enfants âgés entre 3 et 5 ans sont conditionnés par la publicité dans leur goût alimentaire.

Le directeur de l’équipe, le Docteur Thomas Robinson, chef du département de pédiatrie à la Faculté de médecine de Stanford, dont les conclusions ont été publiées, en Août 2007, dans la revue « The Archives of Pediatrics & Adolescent Medicine, préconise de « réguler voire de bannir la publicité et le marketing des produits hautes-calories et à faible valeur nutritionnelle, ou d’interdire tout marketing visant directement les jeunes enfants ». D’autant, estiment les chercheurs, qu’une telle pub est « par essence déloyale » (inherently unfair), parce que « les moins de 7/8 ans sont incapables de comprendre les visées persuasives de la publicité ».

Avec le lancement de la campagne présidentielle française, en 2007, les publicitaires ont affiné leurs recherches et leur ciblage. Ils se livrent désormais au « Neuromarketing », une technique qui permet de déterminer la combinaison média idéale qui permettre la meilleure pénétration du message. En gros, quels médias choisir pour que ma publicité rentre bien la tête du consommateur.

Dans le jargon professionnel, l’étude peut déterminer l’impact d’un message publicitaire sur la « mémoire explicite » (la mémoire consciente) ainsi que sur la « mémoire implicite », ce que le cerveau enregistre à l’insu de la personne.

Certes, la multiplication des sources d’information est la garantie de la démocratie car elle permet la formation d’une opinion libre par recoupement des connaissances.

Mais la profusion des vecteurs hégémoniques dans leur approche globalisante, (avec le contrôle du contenant et du contenu, la production et la distribution)porte en elle le risque d’un dévoiement de la démocratie, par les manipulations que les opérateurs du champ médiatique sont tentés de procéder en vue de la satisfaction d’objectifs personnels qui peuvent se révéler, par contrecoup, fatal tant pour la liberté de pensée que pour la démocratie.

 
III- Le Langage comme marqueur d’identité culturelle ou la guerre sémantique

 

"Le langage est un marqueur d’identité culturelle de la manière que les empreintes digitales, le code génétique, les mesures anthropométriques sont des marqueurs biologiques et physiques. L’accent, l’usage des termes, le ton révèlent l’identité culturelle de l’être."

Sous une apparence trompeuse, (des termes généraux, lisses et impersonnels,) le langage est codifié et pacifié. Il devient alors un redoutable instrument de sélection et de discrimination.
Un Plan social renvoie à une réalité immatérielle contrairement au terme douloureux de licenciement massif.

De même qu’ « externalisation et sous traitance » à des opérateurs fonctionnant en dehors des normes de la législation sociale ou encore « Délocalisation » et Optimiser rendement en exploitant une main d’œuvre bon marché et surexploitée des pays pauvres et souvent dictatoriaux, sans la moindre protection sociale, ou enfin « Privatisation » opération qui consiste souvent à transférer à des capitalistes d’entreprises du service public souvent renflouées par les deniers publics, c’est-à-dire les contribuables.

Même au niveau du discours politique le langage est aseptisé au point que l’ancien premier ministre socialiste Pierre Mauroy avait reproché au candidat socialiste aux présidentielles de 2002, Lionel Jospin, d’avoir gommé dans son discours le terme de « travailleurs ». Dans le langage convenu l’on préfère le terme pudique de « Gens de condition modeste » à celui plus parlant de « pauvres » de même pour le tandem « Exclus et « exploités ». Ou encore Classes (qui suggère idée de lutte) et couches sociales. Couches comme couches de peinture.

 

Le langage est connoté. Le seul licite est le LQR « Lingua Quintae Respublicae » (4), le langage en vogue sous la Vme République Française, homologué, estampillé. Gare à quiconque recourt à un langage personnalisé, forgé dans un vocabulaire qui lui est propre. L’homme risque l’ostracisme, aussitôt mis à l’index, affublé d’une tare absolue, irrémédiable : « ringard », « tricard », etc…..

La Langue substitue aux mots de l’émancipation et de la subversion, ceux de la conformité et de la soumission. L’on prône la fléxibilité au lieu de la précarité, dans un pays qui a érigé la rente de situation en un privilège à vie, notamment au sein de la haute fonction publique. Les Enarques ont une rente de situation à vie, mais quiconque ose relever cette incongruité est accusé de faire le lit du « populisme ».

Il en est de même au niveau diplomatique : Problème du Moyen Orient ou Question d’Orient.

Pour un problème, la réponse est unique, le problème ouvre la voie à des experts qui doivent techniquement apporter la solution. Mais la question d’Orient est plus floue. Une question suggère des réponses multiples, et induit l’absence de solution immédiate. Selon que vous utilisez un terme ou l’autre vous serez classé « moderne et dynamique » ou « ringard ».

Un exemple « Le Figaro » du 28 Août 2004 titre en manchettes « L’aveu du président Bush », sans que le journal ne précise en quoi consistait cet aveu, à propos de quoi. Dix ans auparavant, tout autre journal complaisant aurait titré :« Le président Bush admet son échec dans ses prévision sur l’Irak ». Mais si par malheur un journaliste audacieux avait titré la stricte vérité « Bush, le grand perdant de la guerre d’Irak », vous serez aussitôt accusé d’« anti-américanisme primaire ».

La « Novlangue » résulte de la présence de plus en plus manifeste de décideurs- économistes et publicitaires- dans le circuit de la communication, assurant une installation en douceur de la pensée néo-libérale.

Guerre psychologique autant que guerre sémantique, la guerre médiatique, vise à soumettre l’auditeur récepteur à la propre dialectique de l’émetteur, en l’occurrence la puissance émettrice en lui imposant son propre vocabulaire, et, au delà, sa propre conception du monde.

 

Si la diffusion hertzienne est la moins polluante des armes sur le plan de l’écologie, elle est, en revanche, la plus corrosive sur le plan de l’esprit. Son effet est à long terme. Le phénomène d’interférence opère un lent conditionnement pour finir par subvertir et façonner le mode de vie et l’imaginaire créatif de la collectivité humaine ciblée.

Nulle trace d’un dégât immédiat ou d’un dommage collatéral. Point besoin d’une frappe chirurgicale ou d’un choc frontal. Dans la guerre des ondes règne le domaine de l’imperceptible, de l’insidieux, du captieux et du subliminal. Qui se souvient encore de « Tal Ar-Rabih » (La colline du printemps) ?

Près d’un siècle d’émissions successives et répétitives a dissipé ce nom mélodieux, synonyme de douceur de vivre, pour lui substituer dans la mémoire collective une réalité nouvelle. “Tal AR-Rabih” est désormais mondialement connu, y compris au sein des nouvelles générations arabes, par sa nouvelle désignation hébraïque, Tel Aviv, la grande métropole israélienne. Le travail de sape est permanent et le combat inégal.

Il en est de même des expressions connotées : L’extermination d’une population en raison de ses origines s’appelle en français « génocide ». (génocide arménien en Turquie, génocide des tutsus au Rwanda). Lui préférer l’expression hébraïque du terme biblique de « Shoah » (holocauste) signe son appartenance au camp pro-israélien.

Israël n’a jamais reconnu le caractère de « génocide » aux massacres des Arméniens en Turquie au début du XX me siècle, sans doute pour marquer le caractère unique des persécutions dont les Juifs ont été victimes en Europe. D’abord en Russie, les « pogroms » de la fin du XIX me siècle, puis en Allemagne et en France durant la Seconde Guerre mondiale (1939-45).

Il en est aussi des termes antisémitisme et antiracisme. Arabes et Juifs sont des sémites, mais l’anti-sémitisme ne concerne que les Juifs, pour se distinguer des autres, alors que l’anti-racisme englobe Arabes, Noirs, Musulmans, Asiatiques etc.).

 

Le Président Jacques Chirac, lui-même, en fustigeant « l’antisémitisme et le racisme » dans son discours d’adieu, le 27 mars dernier, a consacré dans l’ordre subliminal un racisme institutionnel.

Jusqu’à présent, les pays occidentaux en général, les Etats-Unis en particulier, auront exercé le monopole du récit médiatique, un monopole considérablement propice aux manipulations de l’esprit, qui sera toutefois brisé à deux reprises avec fracas avec des conséquences dommageables pour la politique occidentale : la première fois en Iran, en 1978-79, lors de la « Révolution des cassettes » du nom de ces bandes enregistrées des sermons de l’Imam Ruhollah Khomeiny du temps de son exil en France et commercialisées depuis l’Allemagne pour soulever la population iranienne contre le Chah d’Iran,

La deuxième fois à l’occasion de l’Irangate en 1986, le scandale des ventes d’armes américaines à l’Iran pour le financement de la subversion contre le Nicaragua, qui a éclaté au grand jour par suite d’une fuite dans un quotidien de Beyrouth « As-Shirah », mettant sérieusement à mal l’administration républicaine du président Ronald Reagan.

 

Hormis ces deux cas, les Etats-Unis auront constamment cherché à rendre leurs ennemis inaudibles, au besoin en les discréditant avec des puissants relais locaux ou internationaux, tout en amplifiant leur offensive médiatique, noyant les auditeurs sous un flot d’informations, pratiquant la désinformation par une perte de repères due à la surinformation en vue de faire des auditeurs lecteurs de parfaits « analphabètes secondaires », pour reprendre l’expression de l’allemand Hans Magnus Einsensberger (5)

Non des illettrés, ou des incultes, mais des êtres étymologiquement en phase de processus de « désorientation », psychologiquement conditionné et réorienté dans le sens souhaité. Pur produit de la phase de l’industrialisation, de l’hégémonie culturelle du Nord sur le Sud, de l’imposition culturelle comme un préalable à l’envahissement et à l’enrichissement des marchés, « l’analphabète secondaire n’est pas à plaindre. La perte de mémoire dont il est affligé ne le fait point souffrir. Son manque d’obstination lui rend les choses faciles.

 

Une inversion radicale du schéma économique se produit et la loi de l’offre et de la demande se décline désormais selon un mode radicalement différent : la fabrication du désir de consommation détermine désormais l’activité d’une entreprise. Ce n’est plus le consommateur qui commande le rythme de la production mais le producteur qui orchestre désormais le désir de consommation. Le contrôle de l’appareil de production parait compter désormais moins que la maîtrise de la demande de consommation.

Le citoyen actif cède ainsi le pas au consommateur passif, l’aventurier de l’esprit au télé phage, le journaliste à l’animateur de divertissement, le patron de presse au capitaliste, entraînant du coup le glissement du journalisme vers le règne de l’« infotainement » néologisme provenant de la contraction de l’information et de l’entertainement (terme américain de divertissement). La mondialisation des flux d’information permet ainsi la mise sous perfusion éditoriale d’un organe de presse et par voie de conséquence la sédentarisation professionnelle de l’information, stade ultime de l’anaphabétisme secondaire.

Toutefois ce viol du monde par la publicité et la propagande par la profusion des sons et des images, dans le paysage urbain, sur les écrans dans la presse, au sein même des foyers, se heurte à des résistances éparses mais fermes.

De même que le monopole du savoir par la technocratie est battu en brèche, sur le plan international, par des contrepouvoirs notamment les acteurs paraétatiques (Greenpeace, Médecins sans frontières, Confédération paysanne), démultipliant les sources d’information non contrôlées, de même l’informatique a développé au niveau de l’information une sphère d’autonomie contestataire à l’ordre mondial américain.

Chaque percée technologique s’est accompagnée d’une parade. A la cassette du temps de la révolution khomeyniste, a succédé le fax puis les sites Internet enfin le blog, le journal électronique en ligne, dont le développement s’est accéléré depuis la guerre d’Irak et la dernière campagne présidentielle de George Bush jr (2004), des parades qui retentissent comme la marque d’une revanche de l’esprit contestataire et de la sphère de la liberté individuelle, en réaction au matraquage de la propagande et la concentration capitalistique des médias.

 

BIBLIOGRAPHIE

 

1- Noam Chomsky et Edward Herman « The manufacturing consent–La Fabrique de l’Opinion publique, la politique économique des médias américains » Ed. Le Serpent à plumes (2003) ».

2- Serge Halimi « Les Nouveaux Chiens de Garde », éditions « Raisons d’agir », 2me édition-2005.

3- Paul Moreira, producteur de l’émission de référence de Canal + et auteur d’un ouvrage documenté sur « Les nouvelles censures- dans les coulisses de la manipulation de l’information » (Editions Robert Laffont février 2007).
Nota bene : l’ouvrage de John Stauber et Sheldon Rampton (Toxic sludge is good for you- Common Courage presse 1995) est cité dans le livre de Paul Moreira cf supra.

4- LQR « Lingua Quintae Respublicae », par Eric Hazan, éditions « raisons d’agir »-2006

5- « Analphabètes secondaires », l’expression est de l’allemand Hans Magnus Enzensberger, auteur de « Médiocrité et folie » Editions Gallimard-1991. cf à ce propos « Aux ordres du Nord, l’ordre de l’information » de Jacques Decornoy dans le bimestriel du journal Le Monde « Manière de voir » N°74 « les 50 ans qui ont changé notre Monde ».

Source: http://oumma.com/

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
12 février 2014 3 12 /02 /février /2014 12:18

Elles ont fait un enfant toutes seules. Sans prévenir le futur père ou contre son gré. Comment les hommes vivent-ils cette paternité forcée quand ils le découvrent ? 

 

like_father_01.jpg

 

« C’était en 1986. J’avais 24 ans, j’étais célibataire. J’ai rencontré une femme mariée. Nous avons passé un après-midi ensemble. Il était clair qu’il ne serait pas suivi d’une liaison : elle ne voulait pas quitter son mari. Cinq mois plus tard, j’ai appris par des amis communs qu’elle était enceinte… de cinq mois. J’ai pensé à un hasard. Puis je l’ai revue, deux ou trois ans plus tard. Elle était avec sa fille. En regardant les yeux de l’enfant, j’ai eu un choc. Je me suis vu dedans. C’était mes yeux. J’ai fait part à sa mère de mes doutes. Elle a d’abord nié, puis elle a avoué, en m’assurant qu’elle ne pensait pas tomber enceinte.

 

Depuis, j’ai fondé une famille – j’ai deux enfants – et je pensais avoir oublié cette histoire. Pourtant, à la suite de problèmes dans mon couple, tout est remonté. J’ai parlé de cette paternité à ma compagne. Et j’ai demandé à cette femme des photos de ma fille, mais mes rapports avec cette enfant se sont arrêtés là. Quand je la croise dans la petite ville où nous vivons, ça me fait quelque chose, mais je n’ai pas envie de revenir en arrière, ni de semer la pagaille dans sa vie. A priori, son père officiel ne sait rien. Moi, j’ai le sentiment d’avoir été manipulé, violé. »

 

« Manipulé » ? « Violé » ? Face à cette paternité imposée, Christian emploie des mots plus durs que ceux qui s’appliquaient naguère aux « filles-mères ». On disait d’elles qu’elles avaient été « séduites » et « abandonnées ». Est-ce à dire que trente ans après la pilule et l’avortement, le rapport de force s’est inversé ? Que les hommes peuvent être renvoyés au rôle de simples géniteurs ? Que la paternité n’est plus leur affaire ?

 

Des femmes émancipées et autonomes

 
« Le problème n’est pas si manichéen, rétorque la psychanalyste Muriel Flis-Trèves. Bien sûr, on peut penser que l’expression “faire un bébé dans le dos” est le pendant revanchard du “polichinelle dans le tiroir” d’antan ; et se rappeler que pendant des siècles, les hommes pouvaient prendre la poudre d’escampette pendant une grossesse et laisser les femmes se débrouiller avec les enfants. Mais de nos jours, ce n’est plus par vengeance qu’elles font un bébé seules.

 

D’abord, elles sont très minoritaires à vouloir être mères célibataires. Ensuite, la plupart d’entre elles ont rêvé d’avoir un enfant en couple, mais cela n’a pas été possible. Elles se plaignent en général de n’avoir pas rencontré l’homme qu’il leur fallait… » Et leur désir d’enfanter est d’autant plus pressant que tourne leur « horloge biologique ».

 
Les femmes d’aujourd’hui, émancipées et autonomes, n’ont plus besoin d’attendre le compagnon idéal pour faire un enfant : il n’est plus honteux d’être mère célibataire ; et quand elles travaillent, elles peuvent assumer les charges financières liées à l’éducation d’un enfant.

 

Enfin, pour nombre d’entre elles, ajouter une maternité à une carrière professionnelle est un signe valorisant : celui de la réussite complète d’une vie de femme. Bref, faute d’un homme qui les accompagne dans leur désir d’enfant, elles peuvent décider d’enfanter toutes seules. Clochette témoigne anonymement sur Internet : « J’ai 30 ans et une grande envie d’un bébé. Mon copain n’est pas mature. Et pour lui, c’est hors de question ! Je sais qu’il partirait probablement, mais j’ai souvent envie d’en faire le père de mon enfant malgré lui ! Est-ce égoïste ? Ce n’est pas pire que les femmes qui vont à la banque du sperme ! Au moins, lui, je l’aurai connu et aimé. »

 

Ce discours d’autonomie, bien des « pères-malgré-eux » ont du mal à l’entendre, d’autant plus que eux aussi ont évolué. Contrairement aux hommes des générations précédentes, beaucoup ne supportent plus l’idée d’avoir des enfants qu’ils ignoreront et qui ne connaîtront pas leur père. « A défaut de pouvoir décider des naissances, les hommes veulent maintenant les assumer, sous peine de n’avoir plus aucune fonction. De n’être plus rien », résume Muriel Flis-Trèves.

 

Assumer malgré tout

 
Olivier, 42 ans, raconte : « Après une relation longue de quinze ans et une séparation douloureuse, je suis retourné vivre dans le village de ma famille. J’ai retrouvé là-bas une amie de jeunesse et nous avons entretenu des rapports amicaux-amoureux épisodiques.

 

Quand elle m’a annoncé sa grossesse et son désir de vivre avec moi, j’ai d’abord refusé : je ne me sentais pas prêt à me relancer dans une vie de couple et encore moins à être père. Je lui ai donc demandé d’avorter. Elle n’a pas voulu : à 37 ans, elle pensait qu’elle n’aurait peut-être plus la chance d’être de nouveau enceinte et me disait qu’elle était prête à élever l’enfant seule. J’ai passé quinze jours – les plus durs de ma vie – à réfléchir et j’ai décidé de l’assumer. Je ne supporte pas l’idée d’un enfant maltraité, mal aimé ou abandonné, et je n’aurais jamais pu vivre sereinement en sachant que la chair de ma chair vivait quelque part dans la nature.

 

Sans reprendre de relations amoureuses avec elle, j’ai donc accompagné la future maman dans toutes les étapes de sa grossesse, jusqu’à l’accouchement. J’ai reconnu l’enfant et j’ai pris un congé paternité pour les accueillir chez moi après la naissance. Nous habitons à trente-cinq kilomètres l’un de l’autre et, puisqu’elle ne conduit pas, je continue à aller les chercher tous les week-ends.

 

Comme elle n’a pas de gros moyens, je remplis aussi leur frigo. Elle ne me demande rien, mais c’est moi qui anticipe, car je veux que mon fils ne manque de rien. Ni de l’affection de chacun de ses parents, ni de confort. Bien sûr, cette situation m’empêche d’avoir une nouvelle vie sentimentale stable, car je ne connais pas de femme qui accepterait de voir débarquer mon fils et sa mère une fois par semaine. Il y a quelque temps, je lui ai demandé de reprendre la vie commune. Elle a refusé. Elle a dit : “Moi, mon homme, c’est mon fils.” Maintenant je souffre de ne pas voir le petit plus souvent. Comme un père divorcé. »

 

Certains, à l’opposé d’Olivier, perçoivent d’abord l’enfant non désiré comme un futur instrument de chantage affectif ou financier, et voient se profiler les exigences de pensions alimentaires. Ce qui les pousse dans leurs retranchements.

 

Une absence de recours

 
Didier, 39 ans, qui avait des relations « purement sexuelles » avec une jeune femme, est encore sous le choc : « Elle prenait la pilule, et un jour, il y a près de trois ans, elle me téléphone pour m’annoncer : “Ça y est, tu m’as remplie !” Elle m’avait affirmé qu’elle ne me causerait pas de problème, puisqu’elle savait que j’étais avec quelqu’un depuis plusieurs années… Et il n’y a pas longtemps, je reçois une lettre d’un tribunal pour une action de recherche en paternité… J’ai du mal à me mettre dans la tête d’assumer cette paternité. Pour moi, ce sera pour toujours l’enfant d’un mépris et d’un dégoût ! »

 

A ces hommes « victimisés » par l’autonomie des femmes, on pourrait répondre qu’ils n’ont qu’à prendre eux aussi leurs responsabilités en enfilant un préservatif. Ce n’est pas si simple, constate Martin Winckler, médecin et écrivain : « Pour avoir reçu des centaines de couples et d’individus des deux sexes, je sais que la vie est compliquée. Le désir change, les relations aussi, le dialogue n’est pas toujours plein et clair, ni d’un côté ni de l’autre. Ni les hommes ni les femmes ne sont des robots. Et si les hommes peuvent utiliser un préservatif, ils n’ont pas de raisons de le faire quand chacun des partenaires a fait un test VIH, ou que la femme indique qu’elle n’en veut pas, par exemple. » La pilule pour hommes aurait-elle un avenir ?

 

Témoignages


Annabelle, 34 ans, seule avec son fils de 3 ans:

« Je ne peux pas m’imaginer en mère de famille »

 

« Je ne me suis jamais suffisamment bien entendu avec un homme pour vivre avec. Je n’aime pas partager le quotidien, j’aime être amoureuse, séduire, m’amuser. Etre amante en somme. C’est pour ça que je ne peux pas m’imaginer en mère de famille avec mari et enfant, j’aurais l’impression de m’enterrer vivante. Mais ce n’est pas pour autant que j’avais envie de me priver d’enfant. Je gagne bien ma vie et je suis autonome économiquement.

 
De voir mes copines autour de moi avoir des bébés les unes après les autres, ça m’a donné un désir fou d’en faire autant. Mes amis m’ont mise en garde sur le fait qu’il serait lourd d’être une mère célibataire, mais moi, à les regarder vivre, ce que je trouvais lourd, c’était de s’organiser en famille. D’ailleurs, je ne voulais pas forcément que le père ne joue aucun rôle dans la vie de mon enfant, mais je refusais que cela crée un lien conjugal entre nous.

 
J’ai eu une liaison avec un comédien que je trouvais intelligent et fantasque. Je me suis dit que c’était le géniteur idéal et je me suis débrouillée pour tomber enceinte. Plus tard, lorsque je lui ai annoncé la nouvelle, je lui ai dit qu’il n’était obligé à rien. Il a disparu le temps de la grossesse, il n’a pas reconnu l’enfant mais, depuis sa naissance, il se débrouille pour passer régulièrement par la ville où j’habite pour le voir. Et l’autre jour, il lui a demandé de l’appeler “papa”. »

 

Fabien, 29 ans, fils unique:

« Qui est mon père ? »

 

« Je suis le fils unique d’une mère institutrice engagée dans la pédagogie Freinet, mouvement très tourné vers l’épanouissement de l’enfant. C’étaient les années 1970, elle avait 27 ans, envie d’indépendance, et ne se voyait pas vivre en couple. Elle n’a pas demandé son avis à mon père. Pour elle, c’était juste un géniteur. Il connaissait cependant mon existence puisqu’il m’a vu bébé, jusqu’à l’âge de 2 ou 3 ans.

 
Moi, il ne m’en reste qu’une image mentale. Ma mère a tenu à m’élever seule, sans présence masculine. Je ne peux pas dire que j’en ai souffert puisque je n’avais pas de point de comparaison – mon meilleur copain était dans le même cas – et que l’on ne m’a jamais caché l’histoire de ma naissance. Il n’y avait pas de zones d’ombre et je ne me posais pas de questions morales sur un supposé égoïsme de ma mère. Simplement, je n’imaginais pas l’existence de mon père.

 
Jusqu’à ces dernières années, lorsqu’un collègue de bureau – qui a l’âge de mon père – m’a dit : “Tu as un père.” Ç’a été une première prise de conscience. Elle a été renforcée par le fait que je suis en couple avec une jeune femme d’origine coréenne, qui a été adoptée et qui fait actuellement des recherches sur ses parents biologiques. Nous avons envie d’un enfant, et l’idée de paternité me taraude. Je ne me demande pas : “Qu’est-ce qu’un père ?”, mais “Qui est mon père ?”

 
Je me suis donc très récemment lancé à sa recherche. J’ai demandé des détails biographiques à ma mère. Elle m’a demandé pourquoi je le recherchais et s’est montrée inquiète et protectrice. Sa question était : “Qu’est-ce que tu vas trouver ?” Je n’en sais rien, mais cette quête est devenue une obsession. J’ai effectué un vrai travail de détective et j’ai enfin pu le localiser. Je lui ai téléphoné.

 
Il a tout de suite compris que j’étais son fils et il est resté très calme pendant cette conversation. Je ne lui ai rien demandé, je ne veux pas débouler dans sa vie et troubler sa famille. La balle est maintenant dans son camp. Il a mes coordonnées et il peut me rappeler quand il veut. Je sais que ça n’est pas facile pour lui. Il doit se demander ce que je peux bien lui vouloir. Mais je ne veux rien. Rien d’autre qu’un signe de sa part. »

 

Cliquez ci-dessous pour écouter l'émission :

 

France-Culture

Portrait de deux hommes – Antoine, 32 ans et Moshé, 68 ans.
Tous les deux sont assistés par la même avocate, maître Mary Plard.

 

Une "paternité imposée" désigne les cas de paternités non désirées, parfois subitement révélées, des mois ou des années après la naissance de l’enfant, par SMS, appel téléphonique ou une simple assignation en justice. Ces pères, piégés, se retrouvent alors confrontés à l’autorité judiciaire qui refuse de leur reconnaître la liberté de choisir d’être père ou non.

 

Ce sujet, au cœur de la question de l’égalité hommes-femmes, des décennies après les combats féministes consacrés par les lois sur la contraception et l’avortement, conduit à une question encore taboue dans notre société : un homme est-il obligé de reconnaître un enfant qu’il n’a pas désiré ? La loi doit-elle évoluer au nom de l’égalité hommes-femmes ?

 
Stanilas De Haldat pour psychologie.com / Document France Culture.

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
30 janvier 2014 4 30 /01 /janvier /2014 15:54

Crise sociale, crise environnementale et politique... perte de l'espoir et économie en dérive... Faut-il avoir peur d'une fin tragique de notre système ? D'un iceberg dans la trajectoire d'un " Titanic mondial "   ? Réponse du chroniqueur Brice Couturier, suivi d'un révision de la mondialisation "en trois minutes chrono".

 

titanic-redo.jpg

 

Ainsi, Ambrogio Lorenzetti avait peur que le moment « républicain » que connaissait la bonne ville de Sienne, ne dure pas. Il savait le bon gouvernement – celui du « Régime des Neufs », menacé de subversion, guetté par quelque conjuration nobiliaire, fragilisé par les révoltes populaires. Mais nous-même, en cette veille de nouvelle année, quelles sont nos peurs et sont-elles bien toutes rationnelles ? En surfant sur le net, j’ai relevé pour vous, chers auditeurs, quelques uns de ces thèmes d’angoisse et je vous laisse déterminer ceux qui sont dignes d’intérêt, et ceux qui ne méritent que votre incrédulité.

 

Je lis ici ou là qu’il est bien imprudent de laisser son argent en banque, alors que Standard’s & Poors estime que les 50 premières banques européennes, aux bilans insuffisamment épurés, auraient besoin d’une recapitalisation d’au moins 110 milliards d’euros. Qui nous dit qu’elles n’auront pas l’idée, en cas de risque systémique, de mettre leurs déposants à contribution ? Le Fmi n’a-t-il pas, de son côté, suggéré une taxe de 10 % sur tous les dépôts, afin de consolider les dettes des Etats ? Faut-il alors renoncer à économiser, comme le préconisent certains qui persistent à prédire une reprise soudaine autant qu’inattendue de l’inflation, pour cause d’injection massives de monnaie par les Banques centrales ? Ou convertir notre épargne, aussi modeste soit-elle, en or ?  C’était pour la presse économique.

 

Du côté politique, on le sait, la morosité confine au désespoir. La parole présidentielle est décrédibilisée par la litanie des engagements non tenus : pas de retour des déficits à 3%, pas de pause fiscale, pas de décrue du chômage. La crise de la démocratie représentative, je n’en parle même pas. Le divorce entre les peuples et leurs élites, c’est un thème tellement rebattu, y compris dans mes propres chroniques, qu’il finira, je le sens, par lasser...

  

Du côté des philosophes, certains redoutent un effondrement du système socio-politique tout entier. La crise, dit-on, n’est pas conjoncturelle, mais structurelle. Ce système, disent-ils, est d’autant plus fragile et vulnérable qu’il est complexe et totalement interdépendant. Un simple bug informatique au cœur d’un de ces réseaux pourrait provoquer un effondrement en chaîne. Nos sociétés, gouvernées par le « principe général d’incertitude » qu’avait bien décrit Baudrillard, ne s’en remettraient pas. Tout l’édifice de la civilisation serait à terre. De là à imaginer des hordes de survivants se livrant, dans un décor de fin du monde, à des combats sans pitié, c’est un thème qui n’est plus cantonné à la science-fiction – ce qui n’est pas bon signe pour notre état mental !

 

 

Question anthropocène: l'’état de la planète, on le sait, est inquiétant ! Des continents de déchets non biodégradables dérivent, tandis que les poissons sont victimes, non seulement de la pollution, mais aussi d’une pêche excessive, qui ne leur permet plus de se reproduire à un rythme compatible avec notre consommation. Quant au climat, les prévisions du GIEC sont toujours aussi alarmistes et si elles se vérifient, des centaines de millions de personnes auraient intérêt à quitter d’ores et déjà les régions où elles vivent, promises à l’immersion pour cause de hausse du niveau des océans, ou encore à la désertification.

 

Reste la seule question qui vaille : avons-nous de bonnes raisons d’avoir si peur ? Pourquoi vivons-nous dans cet état de panique aigüe, alors que le monde vit globalement en paix ? Alors qu’il n’a jamais été aussi prospère, quoique jamais aussi peuplé ?  Que des centaines de millions d’êtres humains sortent, chaque année, de la pauvreté ? Alors que les progrès de la médecine et de l’alimentation font que notre espérance de vie, ici en France, augmente de deux ans tous les dix ans – tandis que vos frères Lorenzetti sont mort tous deux jeunes, de la peste, en 1348 ? Pourquoi avons-nous davantage peur aujourd’hui qu’en 1962, lorsque la crise de Cuba a bien failli déclencher le feu nucléaire entre le bloc occidental et le bloc soviétique ?

 

Je suggère une hypothèse : cette peur ne concerne en réalité que nos sociétés européennes : elles sont terrifiées parce qu’elles sont vieillissantes ; elles se sentent larguées par un mouvement de  l’histoire mondiale dont elles ont perdu un leadership exercé pendant cinq siècles. Parce que, pour cause de « fatigue » européenne, le relais est passé à d’autres et que nous avons peur d’être laissés au bord du chemin. L’Europe n’est plus le continent de l’innovation scientifique et technique, le lieu privilégié de l’audace intellectuelle. Elle n’attend plus du futur le progrès, mais l’apocalypse ; elle a abandonné les Lumières pour le malthusianisme. Parce qu’elle a peur de son propre avenir, elle voudrait que les autres ralentissent. Elle a tort : la seule chose dont il faut avoir peur, c’est de la peur elle-même...

 

Alors comment refaire L'Histoire ?

 

Le constat est fait depuis longtemps : l'individu a triomphé dans la modernité. Mais ce triomphe s'achève sur un échec : celui du collectif qui peine désormais à se projeter dans l'avenir. Le morcellement des intérêts a fait éclater notre horizon d'attente. Nous avons des droits mais pas de perspective de progrès. La crise nous paraît sans fin car le temps lui-même s'est absenté du monde commun. Comment donc refaire Histoire sans écorner les acquis individuels ?

 

Raphaël Bourgois et Antoine Mercier posent cette semaine la question dans la deuxième partie de l'émission "LaGrandeTable" à cinq intellectuels : Cliquez sur le logo France Culture.

 

France-Culture

 

Chronique de Brice Couturier - France Culture.

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
28 janvier 2014 2 28 /01 /janvier /2014 16:03

En cas d’agression, il est important de conserver tous ses moyens physiques et mentaux pour réagir rapidement et efficacement. Surtout dans un environnement sociétal "toxique et de plus en plus pulsionnel". Voici donc quelques conseils simples de spécialistes en la matière :

 

agression.jpg


Travailler sur la gestion de son stress est une étape importante dans l’apprentissage de la défense personnelle, que celle-ci soit mentale ou, au pire, physique.

 

Une agression est un évènement stressant puisqu'il s'agit souvent d'une situation "rare", inconnue, imprévisible et dans laquelle notre intégrité physique est en jeu.

Face à ce genre de désagrément, notre cerveau peut évaluer très rapidement la dangerosité de la situation, cette évaluation déterminera la réponse émotionnelle et comportementale que nous adopterons.

 

Les réactions émotionnelles face à une agression

 

Le plus souvent, nous ressentons de la peur puisque notre cerveau perçoit l’agresseur comme une menace. Nous pouvons également ressentir de la colère lorsque les agressions ont tendances à se répéter. Dans ce cas-là, nous percevons plutôt l’agresseur comme un obstacle qui nous dérange. Un mélange des deux émotions peut nous envahir sur le moment, mais le plus souvent la colère survient après l’agression, une fois que la peur n’est plus présente. Ces deux émotions sont normales et elles vont déterminer notre façon de réagir.

 

Réaction comportementale face à une agression

  

Notre réaction face à l’agression va dépendre à la fois de notre évaluation de la situation et de notre réaction émotionnelle. En situation de peur, les animaux réagissent de 3 manières différentes :

 

1.      L’attaque

2.      La fuite

3.      L’immobilité

 

Cependant, en tant qu’humain, nous avons une gamme de comportements plus étendus :

 

·         L’attaque

·         La fuite

·         L’immobilité : sous la peur, on peut rester immobile et ne rien faire.

·         Coopérer : s’il s’agit d’un vol ou d’un racket avec ou sans armes, se laisser faire reste une bonne option pour rester en vie.

·         La négociation verbale : souvent la personne agressée va tenter de calmer le jeu pour éviter la violence physique.

 

Toutes ces façons de réagir sont une issue potentielle à un conflit, selon la configuration de l'agression ; à l’exception peut-être de l’immobilité qui est souvent inappropriée, puisqu’on subit la situation de manière passive souvent en raison d’un stress trop fort.

 

Les deux types de stress

 
Face à une situation délicate : on distingue globalement 2 types de stress différents.

·         Le stress positif(Eustress) : c’est un stress qui nous motive et qui nous donne de l’énergie, il nous aide à atteindre notre but.

·         Le stress négatif(Distress) : c’est un stress qui est paralysant et qui nous empêche d’atteindre notre but.

 

Dans le cas d’une agression, un stress positif vous donnera de l’énergie pour réagir très rapidement : il vous aidera à attaquer avec force ou à fuir avec vitesse, et diminuera la douleur ressenti si vous recevez des coups. Alors que le stress négatif aura tendance à vous paralyser et vous empêcher de réagir correctement.

 

Le type de stress ressenti dépend de notre évaluation inconsciente de la situation : si nous pensons que nos ressources sont suffisantes pour faire face à la situation, alors le stress deviendra positif et nous permettra de dominer mentalement ou physiquement le conflit. Si par contre nous percevons la situation comme trop importante et incontrôlable, alors le "Distress" nous envahira et il deviendra très difficile de réagir correctement.

 

Gérer son stress

 

Gérer son stress ne signifie pas ne pas ressentir "la peur", il s’agit plutôt de ne pas être débordé par nos émotions et de favoriser le stress positif facteur de maîtrise de soi.

Nous ressentons du stress positif si plusieurs critères sont rassemblés, exemple :

 

·         Nous connaissons déjà la situation(une situation inconnue et imprévisible augmente le stress)

·         Nous nous sentons capable de faire face à la situation (nous avons un contrôle sur elle)

 

"L’entraînement" reste la meilleure option pour générer du stress positif et faire face avec calme à un éventuel conflit. Un entraînement régulier et le plus réaliste possible permet de se confronter à une situation d’agression, ce ne sera donc plus une situation totalement inconnue, imprévisible et immanquablement effrayante.

 
Et de plus, le fait de se sentir compétent durant l’entraînement et de savoir que vous connaissez des techniques efficaces pour répondre à une agression vous donnera la confiance suffisante pour faire face à ce genre de situation stressante.

 
Il faut une évaluation équilibrée de la situation, car avoir un excès de confiance peut avoir des conséquences indésirables :

 

- Par exemple, se sentir trop compétent peut nous faire choisir "l’attaque" contre un adversaire armé, alors que c’est une décision très lourde de conséquences, et que la fuite ou la coopération sont parfois meilleures.

- Un excès de confiance peut aussi aboutir à un excès de violence de la part de l'agressé... ce qui aurait pour conséquence de blessé l'agresseur au delà de l'acte de légitime défense autorisé par la loi ! Des suites judiciaires s'en suivraient immédiatement.

 

La meilleure façon d’induire un stress positif se fait donc grâce à une bonne préparation et à un entraînement de qualité, cependant au moment de l’agression, vous pouvez éviter que le stress ne vous déborde et vous paralyse en agissant sur deux facteurs :

 

·         Vos pensées : tentez de vous calmer et de vous concentrer sur la situation afin d’anticiper ce qu’il va se passer plutôt que sur vos pensées intérieures. Essayez d’avoir une évaluation rationnelle au plus proche de la réalité, plutôt que d’imaginer le pire des scénarios possibles. Chassez toutes les pensées irrationnelles qui augmentent votre stress !

·         Votre respiration : le stress accélère notre respiration, éviter cela en respirant de plus en plus doucement et par le ventre. Cela vous apaisera et vous aidera à réfléchir et à agir.

 

Lorsqu’on est confronté à une agression, le stress inhibe notre capacité néocorticale à réfléchir de manière (à la fois) complexe et rapide, il est donc plus difficile de penser à un plan de secours ou à une suite logique de gestes d’attaque ou de défense.


Par conséquent, la réponse comportementale que vous risquez d'avoir est la réponse la plus instinctive... et la plus facile est celle que nous aurons le plus répété durant un entraînement. Il est donc important de répéter les bonnes techniques pour qu’elles deviennent un automatisme ancré dans votre mémoire comportementale.

 
Il faut également que les techniques répétées soient les plus simples possibles, sinon notre cerveau aura du mal à les mettre en place et privilégiera une réponse plus simple, c’est pourquoi même après quelques mois d’entraînement de self-défense, si vous êtes confronté à une agression réelle, ce ne sont pas ses techniques qui ressortirons mais simplement des automatismes plus anciens.

 

http://www.se-defendre.com/

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
30 décembre 2013 1 30 /12 /décembre /2013 13:26

La plateforme de vente en ligne Amazon réalise 70 % de son chiffre d'affaires pendant la période des fêtes de fin d'année, selon le syndicat allemand Verdi. Pour faire face à l'explosion de commandes passées en un clic à l'approche de Noël, la multinationale recrute des centaines d'intérimaires pour renforcer ses équipes. L'année dernière, Jean-Baptiste Malet a fait partie des 1 200 salariés embauchés pour travailler au sein de l'entrepôt de Montélimar. Ce journaliste révèle dans son livre, En Amazonie, infiltré dans le meilleur des mondes, les conditions de travail à la fois archaïques et ultramodernes en vigueur au sein des entrepôts d'Amazon, interdits d'accès aux journalistes.

 

entrepot-amazon.jpg

L'entrepôt d'Amazon de Swansea, au Royaume-Uni, est grand comme 10 terrains de foot.

  

Pourquoi avoir choisi Noël pour votre infiltration dans un entrepôt d'Amazon ?

 

Jean-Baptiste Malet : Tout simplement parce que j'avais de grandes chances d'être recruté. Amazon recourt massivement aux intérimaires pendant cette période, qui commence fin octobre et se termine fin décembre. A Montélimar, 1 200 intérimaires ont été recrutés pour Noël. Les travailleurs allemands [actuellement en grève] m'expliquaient cet été que certains entrepôts doublaient voire triplaient leurs effectifs [en fin d'année]. Je tiens à rappeler que je me suis infiltré parce que les employés ont refusé de me parler lorsque je les ai sollicités et qu'il est impossible de visiter les entrepôts en tant que journaliste.

 

A quel point la période de Noël est-elle importante pour Amazon ?

 

Amazon réalise 70 % de son chiffre d'affaires à Noël. Début décembre débute ce que l'entreprise appelle la période de « rush ». C'est assez impressionnant quand on se rend aux abords des entrepôts à ce moment-là, d'ailleurs. Des cars de travailleurs qui habitent à plusieurs dizaines de kilomètres sont spécialement affrétés, il y a un va-et-vient de camions poids lourds incessant.

 

Quel est l'objectif de votre livre ?

 

Pour beaucoup, Amazon est quelque chose de très virtuel. Or, même avec l'économie numérique, le travail est toujours présent. Je voulais également montrer que les potentialités d'Internet ont bouleversé le monde du travail sur ce secteur. Amazon, c'est une révolution dans le monde industriel. Les entrepôts logistiques sont régis par une organisation du travail très précise qui n'est pas simplement celle du taylorisme ou du fordisme. Elle inclut toutes les potentialités d'Internet et fournit des outils de contrôle de productivité parfaitement inédits.

 

Les méthodes de travail que vous décrivez dans votre livre, très semblables à celles du travail à la chaîne dans les usines dites traditionnelles, sont-elles en contradiction avec l'image 2.0 d'Amazon ?

 

Chacun à sa propre image d'Internet. Je ne veux pas tenir un discours moral, simplement rappeler des faits et décrire ce qui se passe dans une usine logistique. Les travailleurs chez Amazon, loin, très loin des progrès du XXIe siècle, ont des conditions de travail qui sont dignes du XIXe siècle. Que ce soit en ce qui concerne les conditions de travail des intérimaires, que ce soit dans les cadences qui sont imposées, dans les contrôles de productivité, dans les fouilles au corps qui sont réalisées chaque fois qu'un travailleur franchit les portiques. Les exemples foisonnent dans mon livre et tendent tous à montrer qu'Amazon, en ce qui concerne le respect des droits sociaux, est une entreprise qui n'est pas progressiste mais parfaitement réactionnaire.

 

Nous sommes loin du fameux slogan « Work hard, have fun, make history »...

 

Pour moi, ce n'est pas une contradiction. Car il faut garder en tête que Jeff Bezos (actuel PDG d'Amazon) est libertarien ! J'étais d'ailleurs surpris de voir le nombre de portraits apologistes qu'on a pu faire de cet homme. Dans le slogan il y a « make history », mais il faut voir qui écrit l'histoire. On ne peut se contenter d'une apologie des puissants et des milliardaires sous prétexte qu'ils arrivent à rassembler des énergies. Il faut voir à quel coût et à quelle société ils nous préparent. Pour l'heure, Amazon, avant de représenter un progrès, c'est d'abord une formidable régression en ce qui concerne le devenir de notre humanité.

 

 

  Comment Amazon gagne de l'argent ?

 

La force d'Amazon, vis-à-vis du commerce de proximité, c'est d'avoir des coûts de stockage et de distribution beaucoup plus faibles. Un entrepôt logistique en zone périurbaine, c'est un loyer qui est beaucoup plus faible que celui d'un commerce de proximité. Après, il est incontestable que ce qui fait l'efficacité d'Amazon, c'est son infrastructure informatique, qui permet l'expédition de colis au plus vite une fois la commande passée car tout est fluidifié par le réseau. Cette infrastructure permet un contrôle total de tout ce qui se passe dans les entrepôts, y compris au niveau des travailleurs, totalement robotisés par leurs scanners portatifs. Par ailleurs Amazon n'a pas besoin de machines complexes comme l'automobile : en réalité, Amazon ce sont de grand entrepôts avec des étagères métalliques, quelques ordinateurs et des bornes Wi-Fi. La machine la plus complexe étant l'être humain qui, grâce au levier informatique qui le maintien sous contrôle, peut générer des richesses incroyables. La multinationale réalise également des économies sur les pointeuses, placées non pas à l'entrée de l'entrepôt mais à trois minutes de marche, sur le recours outrancier à l'intérim et sur son évasion fiscale. Il faut savoir qu'Amazon doit 198 millions au fisc français.

 

Vous ne vous attendiez pas à tout ce que vous avez découvert ?

 

 Je m'attendais à un travail pénible, à la culture à l'américaine, mais pas à devoir subir des discours moralistes. Chaque jour on vous demande d'être meilleur que la veille. Il y a un aspect très idéologique au travail et on va applaudir ce qu'on appelle le « top performer », la résurgence de l'ouvrier Stakhanov en URSS, qui va au-delà de ce qu'on lui a demandé de faire. Les contre-pouvoirs sont complètement muselés. La plupart des syndicalistes ont la vie dure [la CGT a déposé plainte car ils étaient fouillés arbitrairement et pendant des heures]. Et c'est assez surprenant de voir qu'une multinationale, dans le cadre de son travail, une fois qu'elle a nié tous les droits les plus élémentaires contenus dans le code du travail, ensuite s'ingénie à reproduire une forme de collectivisme. Je pense que cela est dû au fait qu'Amazon est un univers qui est coupé du monde.

 

Comment voyez-vous ces conditions de travail évoluer ?

 

 Je pense qu'il y a un véritable espoir en Allemagne, où les syndicalistes ont réussi avec beaucoup d'intelligence à réinventer les outils du syndicalisme avec le simple argument du droit. Cela pourrait être un exemple pour d'autres entreprises en Europe. Je pense aussi qu'il y a une réponse politique à apporter, notamment au sujet de l'évasion fiscale. En dernier échelon, et ce n'est pas quelque chose de dérisoire, le consommateur lui-même peut se poser la question de savoir ce qu'il gagne en consommant sur Amazon et ce qu'il y perd. Je ne suis pas convaincu que la plupart des Français souhaitent voir le politique distribuer des subventions publiques pour l'implantation de tels entrepôts, d'autant qu'Amazon n'a pas besoin d'argent public aujourd'hui. D'ailleurs, lors de l'implantation du quatrième entrepôt dans le Nord-Pas-de-Calais, la région n'a pas donné d'aide publique.

 

La préparation de commandes vocale ou l'homme-machine ?

   

L'avenir appartient au guidage vocal des préparateurs de commande, qui offre des gains de productivité et de fiabilité. Mais il présente de nouveaux risques professionnels dont il faut être conscient :

 

Le ' voice picking " est un système de guidage du préparateur de commandes par la voix. La préparation de commandes vocale est arrivée il y a environ dix ans en France, d'abord dans les plates-formes logistiques de la grande distribution, où elle représenterait actuellement 70% des modes de préparation. Elle équipe aussi des PME logistiques, industrielles ou de la distribution, petites ou grandes. Citons GMR, distributeur d'équipements de robinetterie, avec 15 opérateurs équipés, autant que Guillot Jouani qui livre la restauration hors domicile, ou encore Royal Canin, France Loisirs ou Quo Vadis, qui ont une cinquantaine d'opérateurs équipés.

 

Le préparateur de commande, qui porte, souvent à la ceinture, un terminal qui assure la communication via le wi-fi, reçoit ses instructions via un casque, généralement mono-oreille ; il dialogue directement avec le système d'information par l'intermédiaire d'un micro et d'un logiciel de reconnaissance vocale. Une formation de quelques heures suffit pour que le préparateur soit opérationnel. La solution logicielle vocale s'interface avec le système de gestion d'entrepôt (Warehouse Management System, WMS), ou directement avec le système de gestion commerciale.

Mains et yeux libres: Des offreurs de solutions vocales en entrepôt en présentent les bénéfices. Pour Mehran Bachan, directeur commercial Europe du sud de Vocollect, qui a été le premier sur le marché français à fournir une solution logicielle et matérielle, qui équipe aujourd'hui 20000 opérateurs en France, ' il permet de travailler en mains libres et en yeux libres. " Frédéric Dittmar, directeur division identification automatique d'IER, qui propose une solution logicielle, en voit deux autres : ' Il permet d'accélérer le processus et donc de traiter plus de commandes à nombre de préparateurs égal. Il est utile dans les entrepôts grand froid, ou les gants épais rendent difficile la manipulation des terminaux portables classiques. " Jean-François Le Garrec, responsable BU logistique d'Aldata, qui propose sa solution logicielle Voice Directed Warehousing, utilisée par plus de 8000 opérateurs picking, met en avant ' la meilleure qualité de la préparation ; le taux d'erreur est divisé par huit par rapport à une solution de liste sur support papier. Et les gains de productivité moyens sont de 10 à 15%, jusqu'à 20 à 30% pour des produits où il faut relever les numéros de lot ou le poids. " Toutefois, les gains de productivité sont en partie contrebalancés par le nombre plus important de réagencements de colis pour assurer la qualité de la palette, induits par la chronologie imposée des prélèvements.

 

Prix en baisse...

 

Le prix pour équiper un opérateur (logiciel plus matériel) a baissé, il est aujourd'hui de l'ordre de 2500 à 3000 euros. ' Le retour sur investissement est très rapide, entre huit et quinze mois, " assure M. Le Garrec. Le guidage vocal, utilisé pour la préparation de commandes, s'étend ou va s'étendre progressivement aux autres processus en entrepôt : inventaire, expédition, chargement du camion, réception.

Si écouter une voix de synthèse plutôt déshumanisante à longueur de journée conduit parfois à une mauvaise compréhension des instructions et donc à des répétitions, les offreurs font des efforts en matière de confort et de convivialité. Ainsi, IER propose une voix féminine naturelle qui ' fait passer le taux de répétition, générateur de stress, de 15% à moins de 3%, conduisant à une meilleure acceptation de la solution vocale. " selon M. Dittmar. De plus, fondée sur le moteur de reconnaissance de l'allemand Topsystem, notre solution ne nécessite pas d'apprentissage (création d'un profil vocal par utilisateur par l'association d'un lexique à sa voix) dans 98% des cas. Vocollect consacre une bonne partie de sa recherche et développement à la reconnaissance vocale, le coeur de la solution, pour Mehran Bachan. Nous travaillons à la reconnaissance adaptative, qui s'adapte aux accents ou à une personne enrhumée. "

Attention aux risques Mais la préparation de commandes vocales présente des risques professionnels spécifiques. M. Dittmar en est conscient : ' on cloisonne les gens avec le casque, il y a un risque d'isolement. " D'ailleurs, c'est déjà arrivé dans la grande distribution qu'il y ait un mouvement social pour protester contre les solutions vocales. Pour Jack Bernon, responsable du département Santé Travail de l'Agence Nationale pour l'amélioration des Conditions de Travail (ANACT), : ' le guidage vocal réduit la marge de manoeuvre de l'opérateur. Une intelligence dictée de l'extérieur peut être vécue comme une intrusion psychologique. "
Les principaux risques sont identifiés dans la fiche pratique de sécurité ED 135 de l'Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS) " Préparation de commandes guidée par reconnaissance vocale " , publiée en 2009. Parmi ceux-ci, citons la fatigue auditive ou l'augmentation globale du rythme de travail accroissant la sollicitation physique et donc l'exposition aux accidents du travail et aux troubles musculosquelettiques (TMS). L'un des auteurs de la fiche, Philippe Morand, technicien conseil de la Carsat Rhône-Alpes, confie : ' Le préparateur n'ayant plus de visibilité sur le travail à venir, il lui est plus difficile de s'économiser. " La fiche met en exergue des risques psychosociaux comme la dépendance à la machine. Des impacts psychologiques tel l'effet de robotisation peuvent en découler. Se dirigerait-on vers un nouvel ' homme-machine ", 250 ans après l'ouvrage éponyme de La Mettrie ?

 

Elvire Camus pour Lemonde.fr
Christine Calais, journaliste - L'express.fr

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
24 décembre 2013 2 24 /12 /décembre /2013 10:55

La théorie critique des années 70, s’est efforcée de repenser l’Aufklärung (philosophie des Lumières) du 18ème siècle. Deux auteurs majeurs, Adorno et Horkheimer, ont critiqué de manière violente l’industrie culturelle, instrument de domination des foules. Leur projet consiste à : « comprendre pourquoi l’humanité, au lieu de s’engager dans des conditions vraiment humaines, sombre dans une nouvelle forme de barbarie » 

 

adorno.jpg

"Les industries culturelles support de l'idéologie normative dominante et responsables de la massification des esprits"

 

La Théorie Critique et les médias

  

La charge menée contre les médias est en effet lourde : ils leur reprochent de faire du public un “jouet passif”, réduit à opiner, à absorber toute la matière qu’on lui présente. Les médias (presse, télévisuels, divertissements, et aujourd'hui quelques sites internet) transformeraient les citoyens en consommateurs abêtis, objectivés, déshumanisés et égocentrique. Le spectateur serait une sorte d’homme générique, comme l’était l’ouvrier aliéné chez Marx, dont l’unité de condition consiste dans le fait qu’il a perdu toute fonction, et même toute capacité critique. Sa conscience devient à l’ère des mass media une machine qui effectuent des « opérations standardisées ». Le schématisme de l’entendement aurait disparu : les médiations entre les catégories et les phénomènes ne sont plus du ressort du sujet, mais de la « conscience des équipes de production » qui tracent pour les consommateurs, à leur place, les cadres leur permettant de saisir le réel. Même le moi au cœur de l’identité, qui se construit d’abord au sein de sphère d’intimité, est gangrenée par l’univers médiatique, ne serait plus qu’un « un produit breveté déterminé par la société », il se conforme à être ce que l’industrie culturelle lui impose. L’individu est intégré de force au système, il devient un maillon, une pièce d’une immense machine qu’il ne contrôle pas, il n’est plus qu’un « appareil ».

 

Pour ces deux penseurs, les médias sont la chute de l’homme moderne, la défaite du sujet pensant. Les médias semblent, selon eux, achever le mouvement d’ « autodestruction de la raison » prenant sa source chez les Lumières. Contre Kant, ils estiment que ce n’est pas le sujet qui est devenu majeur, mais c’est la domination qui est devenue adulte. Et cette défaite de la pensée est d’autant plus grande qu’elle semble, si l’on suit leur diagnostic, sans chance de rémission puisque « l’attachement funeste du peuple pour le mal qu’on lui fait va même au-devant de l’astuce des autorités ».

 

Les médias comme instrument de domination : la référence à Marx

 

Le second pivot de leur critique des médias se situe au niveau de la notion d’idéologie qu’ils leur attribuent. Car en sus de rendre les individus homogènes, ils véhiculent l’idéologie du « statu quo ». Les médias font triompher le divertissement. Or celui-ci produit du consensus qui aurait pour but de légitimer la société, contrairement au conflit et au dissensus qui la remettrait en question. L’exemple du fait divers, qui envahit tous les types de médias, est une « acclamation de l’ordre existant » qui, sous des dehors fatalisants (il montre aux citoyens « qu’il y a toujours plus défavorisés qu’eux », que leur condition, même mauvaise, est un moindre mal) interdisent aux individus de vouloir une modification de leurs conditions d’existence. Cette célébration quotidienne du vide, de l’anodin sert à masquer toute perspective de changement et à étouffer toute critique.

 

Au final les médias, devenus unique référent de la pensée publique, sont, du point de vue d’Adorno et Horkheimer, considérés comme anti-démocratiques car ils empêchent les sujets, par le biais de réseaux de manipulation et de coercition, de penser par eux-mêmes et de produire des opinions indépendantes... tout en compensant cette perte par une sur-valorisation narcissique des foules (alimentant par corollaire des pathologies liées à la perversion). L’entreprise conduite par les fondateurs de l’école de Francfort n’est en réalité fondée que sur la compréhension, puis la dénonciation des dérives de la modernité, mais pas sur la construction d’une théorie féconde qui chercherait à remédier à cette « barbarie » qu’est la raison instrumentale.  Ils condamnent définitivement la modernité dans son ensemble, elle ne donne rien à penser de fécond quant à la démocratie moderne et à l’espace public, puisque les individus sont déshumanisés et aliénés par les système médiatique.

 

« Kant a anticipé intuitivement ce que Hollywood fut le premier à réaliser consciemment : dans le processus de leur production, les images sont précensurées conformément aux normes de l’entendement qui, plus tard, décideront de la manière dont il faut les regarder »

   

Description de l'ouvrage "La Dialectique de la Raison"  

 
Selon le livre, le monde entier est structuré par l’industrie culturelle (la culture de masse), laquelle est un système formé par le film, la radio, la presse écrite. L’industrie culturelle tend non pas à l’émancipation ou à la libération de l’individu, mais au contraire à une uniformisation de ses modes de vie et à la domination d’une logique économique et d’un pouvoir autoritaire. C’est en cela que l’industrie culturelle participe d’une anti-Aufklärung. Le phénomène ne concerne pas seulement les pays totalitaires, mais également les autres pays, à commencer par les sociétés libérales.

 
Il y a une unité de la civilisation de masse, qui est dirigée d’en haut par un pouvoir économique qui dépasse celui de l’industrie culturelle et exerce sur elle son emprise. Il n’y a pas de différence de nature entre la propagande et l’industrie culturelle : la technique est la même. Le consommateur est considéré seulement comme client et comme employé, soit comme matériel statistique (comme un moyen et non comme une fin).

 
La « culture » propagée par l’industrie culturelle n’est pas quelque chose d’extérieur à l’existence de l’individu. Elle semble concerner uniquement ce qui relève du loisir ou du divertissement, mais c’est là qu’elle exerce en réalité son emprise la plus forte. On croit échapper dans le divertissement au processus de travail, mais en réalité, c’est dans le divertissement que l’individu est préparé et discipliné par l’industrie culturelle pour l’affronter. Les carrières des professions libérales sont déterminées par l’appartenance à la "culture" plus encore que par les savoirs techniques, car c’est dans la "culture" que se manifeste l’allégeance au pouvoir et à la hiérarchie sociale. S’amuser, c’est donc être en accord avec la société.

 
Le système de l’industrie culturelle marginalise, au contraire, ceux qui refusent cette uniformisation. Le pauvre est l’exclu par excellence du système. Bien que l’art se trouve également en dehors du système a priori, il n’échappe pas en fait à la logique de l’industrie culturelle, et se reconnaît même en elle comme un objet de consommation. En réalité, les individus sont imprégnés jusque dans leur langage, dans leurs gestes, dans leurs émotions les plus intimes par le pouvoir de l’industrie culturelle. Les consommateurs sont contraints de devenir non des sujets mais des produits.

 

A consulter :  Jeux vidéo - Un écran de l’économie globalisée

 

France-Culture-copie-1 
Émission présentée par Christophe Payet avec: 
Sébastien Genvo,  en duplex depuis Metz, maître de conférences à l’Université de Lorraine et membre du Centre de recherche sur les médiations. Auteur du blog "LoduLogique.com".

 

  https://fr.wikipedia.org/wiki/Dialectique_de_la_Raison

http://la-philosophie.com/

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
10 décembre 2013 2 10 /12 /décembre /2013 15:15

Hommage à “MADIBA” Nelson Rohlihlala Mandela (1918-2013) par le Dr. Pierrette Herzberger-Fofana. “Ceux qui morts ne sont jamais partis. Ils sont dans l’ombre qui s’éclaire. Et dans l’ombre qui s‘épaissit. Les morts ne sont pas sous la terre[..] Les morts ne sont pas morts. “ Birago Diop.

 

MADIBA.jpg

<< Avec tout mon respect pour un humaniste qui n'a d'égal que Gandhi. FT >>

 

Nelson Rohlihlala Mandela n'est plus. A la suite d’une longue maladie, il a tiré sa  révérence, le 5 décembre 2013, entouré de l’affection des membres de sa famille.  Au crépuscule de sa vie, Mandela s’était retiré de la vie politique et vivait entouré des  siens. Sa dernière apparition publique date de la Coupe du Monde de Football 2010 qui a  eu lieu en Afrique du Sud.

 
 Visiblement ému, Jacob Zuma, le président de l'Afrique du Sud, son ancien compagnon  de lutte qui avait également été incarcéré à Robben Island, a annoncé la terrible nouvelle du décès de Madiba, Nelson Mandela:

 
 “Nelson Mandela, le plus grand fils de notre pays est décédé”.

 
Même si l'on s’attendait à un décès plus ou moins imminent, cette nouvelle a provoqué une onde de choc dans le monde entier. Madiba, fait partie de notre mémoire collective maintenant, car nous avons suivi avec beaucoup d'émotion les grandes étapes de sa biographie depuis son incarcération dans les geôles de Robben Island, en 1962, en passant par sa libération, le 11 février 1990, au Prix Nobel de la Paix en 1993 jusqu’à son élection, le 26 avril 1994, en tant que premier Président de l’Afrique du Sud élu librement et démocratiquement par tous les Sudafricains et les Sudafricaines. Le monde entier avait salué cette élection qui a donné naissance à la nation arc-en-ciel. Durant son mandat, Madiba a mis en place une commission "Vérité et Réconciliation” qui a permis d’extirper les racines de l’Apartheid, ce racisme étatique établi depuis des siècles dans son pays.

 
Une légende a rejoint au royaume des ombres, tous ceux qui ont lutté pour un idéal et qui étaient prêts à donner leur vie pour cet idéal. Madiba fait partie des héros qui aspiraient à un monde meilleur où seules règneraient la justice, l’égalité des chances et la liberté pour tous. Il est une référence et nous sert de modèle.

 

       
Madiba ou Tata

  
Madiba, comme ses concitoyens l’appelaient, est un nom clanique et une formule de respect, empreinte d’affection. Tata signifie en khosa, sa langue maternelle “Père”. Mandela  a écrit en lettres d’or les plus belles pages de l’histoire contemporaine. De son vivant, il est entré de plain-pied dans l’histoire. Sa vision d’un monde sans racisme a été son combat de toute une vie. Il en a payé le prix fort. Ses bourreaux l’ont incarcéré durant 27 ans au pénitencier de Robben Island. Cependant, son charisme et son autorité morale ont obligé le pouvoir d’alors à entamer des pourpalers avec lui jusqu’à sa libération.

 
Le nom de Nelson Mandela restera gravé à jamais dans nos mémoires. Il a livré au monde un testament de paix, de pardon et d’amour du prochain qui touche le cœur de tout un chacun.

 
Nelson Mandela a résumé son engagement de la façon suivante :
 “J’ai dédié ma vie à la lutte pour le peuple africain. J’ai combattu la domination blanche et j’ai combattu la domination noire. J’ai chéri l’idéal d’une société démocratique et libre dans laquelle tous vivraient ensemble dans l’harmonie, avec d’égales opportunités. C’est un idéal que j’espère atteindre et pour lequel  j’espère vivre. Mais, si besoin est, c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir”.

 
 Mandela a eu le bonheur de voir son rêve se réaliser: celui de vivre dans sa patrie libérée officiellement des démons du racisme.

 

 

Au-revoir, Nelson Mandela    “les mots ne sont pas morts”

 
Une icône s’en est allée de l’autre bord rejoindre ses ancêtres. Paix à son âme!
Nous pleurons aujourd’hui l’humaniste qui a redonné à l’Afrique, et en particulier au monde noir, sa dignité.

 
 Nous pleurons le héros de la liberté qui a su réconcilier Blancs et Noirs en tissant des  liens de fraternité.

 
 Nous pleurons l’homme qui est le symbole de la lutte contre la discrimination raciale, de la recherche de la justice et de la paix et qui a été une source d’inspiration pour nous tous.

 
 Nous nous inclinons très respectueusement devant ce Père de la nation Sudafricaine, cet  illustre fils de l’Afrique qui a changé le cours de l’Histoire dans son pays et ému tous les peuples du monde. Tout le monde le pleure aujourd'hui et lui rend hommage.

 
A sa famille éplorée, à ses anciens compagnons de lutte, au peuple Sudafricain et à lANC (African National Congress), nous présentons nos sincères condoléances.

 
Que le ciel accueille Madiba parmi ses élus...
Que l’esprit de ses ancêtres l’accompagne dans l'au-delà!

 
„ N’KosiSsikel iAfrica!
 Par le Dr. Pierrette Herzberger-Fofana

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie
24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 11:16

L’hyperréalité caractérise la façon dont la conscience interagit avec la réalité. Tout particulièrement, quand la conscience perd sa capacité à distinguer la réalité de l’imaginaire et commence à s’engager avec ce dernier sans comprendre ce qu’il fait, elle s’introduit alors dans le monde de l’hyperréel. La nature du monde hyperréel se caractérise par une amélioration de la réalité. Jean Baudrillard, Daniel Boorstin, Albert Borgmann et Umberto Eco sont de célèbres théoriciens de l’hyperréalité. Selon Baudrillard, le monde dans lequel nous vivons a été remplacé par une copie du monde, nous y recherchons des stimuli simulés et rien de plus.  

Par Néo trouvetout, blogueur ingénieux.

 

baudrillard.jpg

 Jean Baudrillard - Sociologue et philosophe

 
SIMULACRE ET SIMULATIONS

 
Il est vain de tenter de résumer l’oeuvre de Baudrillard en quelques lignes, mais on pourra ici au moins s’essayer à une définition des termes simulation et simulacre.

La simulation se veut l’expérience du réel à travers ce qui nous en est rapporté (soit l’essentiel de l’expérience du réel tel que la vit un sujet contemporain), le simulacre en étant la représentation figurée (l’objet, l’image). Selon Baudrillard, les sociétés se sont à ce point reposées sur ces simulations, se sont à ce point constituées sur la base de ces signes de la réalité, qu’elles en ont perdu le contact avec le monde réel. Le simulacre, d’abord reconnu comme représentation du réel, s’est vu multiplié, systématisé par l’avènement industriel, contribuant à brouiller les repères entre l’image et ce qu’elle représente (ce qu’elle simule), jusqu’à ce que,  » dans la société post-moderne, le simulacre ne finisse par précéder et déterminer le réel.  »

 » Il ne s’agit plus d’imitation, ni de redoublement, ni même de parodie, mais d’une substitution au réel des signes du réel, c’est-à-dire d’une opération de dissuasion de tout processus réel par son double opératoire, machine signalétique métastable, programmatique, impeccable, qui offre tous les signes du réel et en court-circuite toutes les péripéties.  » (Jean Baudrillard. Simulacres et Simulation – Galilée 1981)

 

« VALEURS SIGNES » ET SOCIETE DE CONSOMMATION

 

Plusieurs aspects de l’hyperréalité peuvent être pensés comme une « réalité par proxy ». Par exemple, un amateur de films X vit dans le monde non-existant de la pornographie. Même si celle-ci n’est pas une description précise du sexe, pour les personnes qui les regardent, la réalité du sexe devient quelque chose de non-existant. Autre exemple : le M de McDonalds crée un monde avec la promesse d’une quantité sans fin de nourriture identique. En réalité, le M ne représente rien : la nourriture produite n’est ni infinie ni identique.
Les objets de consommation ont une valeur-signe, ce qui signifie qu’ils indiquent quelque chose au sujet du propriétaire, dans le contexte d’un système social (voir Baudrillard). Par exemple, un roi qui porte une couronne utilise celle-ci comme un signe indiquant qu’il est le roi (alors que dans la réalité, elle est dénuée de sens). La valeur-signe n’a pas de sens inhérent ou de valeur au-delà de ce qu’il convient. Ainsi, par exemple, les bijoux de la couronne ne valent rien jusqu’à ce que quelqu’un soit d’accord pour les vendre pour tant de diamants ou de pièces d’or. Alors que les valeurs-signes deviennent plus nombreuses, l’interaction devient de plus en plus basée sur des choses sans signification intrinsèque. Ainsi, la réalité devient de moins en moins importante, alors que l’échange des signes prend l’ascendant. Si des grains de sable sont mis un par un sur une table, à un certain moment arbitraire, les grains deviennent un tas de sable. De la même façon, quand la valeur-signe devient plus complexe, la réalité se transforme en hyperréalité et il devient alors de plus en plus difficile de distinguer ce qui est « réel ».

 

L’hyperréalité est significative comme paradigme éclairant la condition culturelle américaine. La consommation, parce qu’elle dépend de la valeur-signe (par exemple, une marque X montre que untel est à la mode, la voiture Y que untel est riche), peut être vue comme un facteur contribuant à la création de l’hyperréalité ou de la condition hyperréelle. L’hyperréalité trompe la conscience en la détachant de tout engagement émotionnel réel. A la place, elle opte pour des simulations artificielles et des reproductions sans fin d’apparences fondamentalement vides. Par essence (bien que Baudrillard lui-même s’opposerait à l’usage de ce mot), on trouve mieux l’épanouissement ou le bonheur dans la simulation et l’imitation d’un simulacre de la réalité, plutôt que confronté à une réalité « réelle ».

 

LIEUX HYPERREELS

 

Un lieu hyperréel, tel qu’un casino à Las Vegas, donne au sujet l’impression qu’il marche dans un monde imaginaire où tout le monde est en train de jouer. Le décor n’est pas authentique, tout est copie, l’ensemble ressemble à un rêve. Le casino, en revanche, encaisse l’argent et ceci n’est pas un rêve, mais on est plus disposé à le dépenser lorsque la conscience ne comprend pas réellement ce qui se passe. Autrement dit, bien que l’on puisse intellectuellement comprendre ce qui se passe dans un casino, la conscience n’arrive pas à concevoir la réalité de l’argent dépensé dans ce monde si loin du réel. Il est dans l’intérêt des décorateurs d’accentuer le caractère non-authentique du lieu, de sorte que l’expérience entière semble fausse. Le casino s’enrichit en faisant de l’argent un objet dénué de valeur intrinsèque. Il y a quelques temps sortait une application qui représente ce qui se fait de « mieux » dans le domaine de l’Hyperralité et l’on s’aperçoit combien les fabricants rivalisent d’ingéniosité pour nous y enfermer. On pouvait lire ceci sur un site traitant d’actualité des mobiles :

Qui ne s’est pas déjà perdu à Disneyland ou a fait un grand détour pour aller de Frontierland à Adventureland? (baissez tous la main). Soyez heureux, cela ne vous arrivera plus car la nouvelle application iPhone DisneyLand Paris est là pour vous aider. Outre un affichage du plan du parc, vous pourrez être guidé vers le point d’intérêt (POI) de votre choix (plus de 250) grâce à la réalité augmentée.

Et l’auteur poursuit : « je trouve l’idée sympa et on va voir de plus en plus d’applications de ce type et je pense surtout aux magasins/grandes surfaces. Il est toujours difficile de se repérer dans les rayons, acheter un paquet de pâtes devient un vrai parcours du combattant lorsque l’on ne connait pas l’endroit, et avec la réalité augmentée on pourrait enfin être guidés facilement (rappelez-vous des prototypes de caddies avec écran intégré) et pour les vendeurs un plus énorme : Mise en avant de promotions, proposition de produits similaires, … Les années à venir sont prometteuses » (Source : http://www.la-realite-augmentee.fr)

Effectivement tout est fait pour que nous évoluions comme un poisson dans l’eau ou plutôt dans un aquarium puisque bien évidemment tout est fait pour que nous restions dans les chemins balisés.

 

LE SEXE . UNE REALITE NON ASSUMEE ?

 
L’amour, la haine, etc…, ne sont pas en nous mais provoqués intentionnellement de l’extérieur. Nous croyons que c’est nous. Il en va de même pour le sexe qui est, avec l’argent, l’éducation et la politique, l’outil de contrôle principal. La progression de la pornographie, par la télévision et internet, est récente… les plus jeunes sont touchés, et très tôt dans les écoles, la question est abordée alors que les enfants ne comprennent pas même de quoi il s’agit. Le sexe occupe nos esprits, nous le voyons partout, nous en parlons et en pensons tout le temps. Or, tout est faux, le plaisir est « programmé » (mind control). Le « point G »… est entre le compas et l’équerre.

 

DE PLUS EN PLUS D’INFORMATIONS DE MOINS EN MOINS DE SENS

 

Selon Jean Baudrillard, « Nous sommes dans un univers où il y a de plus en plus d’information, et de moins en moins de sens. Trois hypothèses :
- ou l’information produit du sens (facteur néguentropique), mais n’arrive pas à comprendre la déperdition brutale de signification dans tous les domaines.
- Ou l’information n’a rien à voir avec la signification. C’est autre chose, un modèle opérationnel d’un autre ordre, extérieur au sens et à la circulation du sens proprement dit.
- Ou bien, au contraire, il y a corrélation rigoureuse et nécessaire entre les deux, dans la mesure où l’information est directement destructrice, ou neutralisatrice du sens et de la signification. La déperdition du sens est directement liée à l’action dissolvante, dissuasive, de l’information des media et des mass-media.
 

 
C’est l’hypothèse la plus intéressante, mais elle va à l’encontre de toute acception reçue. Partout la socialisation se mesure par l’exposition aux messages médiatiques. Est désocialisé, ou virtuellement asocial celui qui est sous-exposé aux media. Partout l’information est censée produire une circulation accélérée du sens, une plus-value de sens homologue à celle, économique, qui provient de la rotation accélérée du capital. L’information est donnée comme créatrice de communication, et même si le gaspillage est énorme, un consensus général veut qu’il y ait cependant au total un excédent de sens, qui se redistribue dans tous les interstices du social (…). Nous sommes tous complices de ce myhte. C’est l’alpha et l’oméga de notre modernité, sans lesquels la crédibilité de notre organisation sociale s’effondrerait. Or, le fait est qu’elle s’effondre, et pour cette raison même. Car là où nous pensons que l’information produit du sens, c’est l’inverse.

 

L’information dévore ses propres contenus. Elle dévore la communication et le social, et ceci pour deux raisons :
 
1. Au lieu de faire communiquer, elle s’épuise dans la mise en scène de la communication. Au lieu de produire du sens, elle s’épuise dans la mise en scène du sens. Gigantesque processus de simulation que nous connaissons bien. L’interview non directif, la parole, les téléphones d’auditeurs, la participation tous azimuts, le chantage à la parole : « Vous êtes concernés, c’est vous l’événement, etc. » De plus en plus l’information est envahie par cette sorte de contenu fantôme, de greffe homéopathique, de rêve éveillé de la communication. Agacement circulaire où on met en scène le désir de la salle, anti-théâtre de la communication, qui, comme on sait, n’est jamais que le recyclage en négatif de l’institution traditionnelle, le circuit intégré du négatif. Immenses énergies déployées pour tenir à bout de bras ce simulacre, pour éviter la dissimulation brutale qui nous confronterait à l’évidente réalité d’une perte radicale du sens.
[...]
 
2. Derrière cette mise en scène exacerbée de la communication, les mass-media, l’information au forcing poursuivent une irrésistible destructuration du social. Ainsi l’information dissout le sens et dissout le social, dans une sorte de nébuleuse vouée non pas du tout à un surcroît d’innovation, mais tout au contraire à l’entropie totale. Ainsi les media sont effecteurs non pas de la socialisation, mais juste à l’inverse de l’implosion du social dans les masses. Et ceci n’est que l’extension macroscopique de l’implosion du sens au niveau microscopique du signe. « 

   

LA ROUTINES DU MONDE « moderne » ET SES HABITUDES

  
Est-il normal d’aller au tribunal pour ne pas avoir attaché sa ceinture de sécurité pour sa propre vie ? D’avoir des points… que certains même, achètent et vendent… des points d’un papier contre d’autres papiers ! Est-il normal de regarde la météo ? Est-il normal d’avoir peur de la pluie, même si l’on est en train de nager dans la mer… est-il normal d’aller se protéger de la pluie alors que l’on sait que dans l’eau… on est mouillé ? Nous payons la douche… tandis que la pluie est gratuite… et nous achetons un parapluie ! Est-il normal de trouver un quelconque bonheur à cette vie ? Car il n’y a aucun plaisir, seulement la croyance au plaisir ! Est-il normal de ressentir de la tristesse si « Noël n’est pas réussi » ? Est-il normal de considérer cela comme réel ? Noël qui doit évidemment tomber exactement le 24 à minuit… pas le 23 ou le 25 ! Est-ce normal de devoir acheter des cadeaux à cette occasion, puisque tout le monde le fait ? Est-ce normal de ne jurer que par le tic tac de la montre ? Papier, religion, sexe et télé ! Tout est illusion, tout cela ne sert à rien, que l’on vive 10 ou 100 ans… Qu’aimons-nous dans la vie ? Puisque nous dormons 8 heures et travaillons 8 heures, il y a peu de chances que nous répondions « dormir » ou « travailler ». Alors pourquoi ne faisons-nous pas ce que nous aimons 24h/24 ? Et pourquoi, à midi pile, nous avons faim lorsqu’il « faut » manger ? « Il faut que j’y aille, c’est ma pause ! » Pourquoi, dès qu’il fait froid l’on entend « Couvre toi ! » alors que la sensation de froid est toute relative et la plupart du temps implantée ? Pourquoi dit-on « le travail c’est la santé », « il n’y a pas de sot métier » ?

Exemples d’hyperréalité:


Une boisson énergétique avec un parfum qui n’existe pas (« zeste de baies sauvages glacées »)
La pornographie (plus sexe que le sexe lui-même)
Un sapin de noël en plastique qui ressemble plus à un vrai sapin de noël
La photo de magazine d’un top modèle qui a été retouchée par ordinateur
Un jardin parfaitement taillé (naturel comme hyperréel)
Toute version massivement promue de faits présents ou historiques
La Guerre du Golfe, dans la mesure où l’Amérique l’a comprise : Baudrillard, en fait, prétend que la Guerre du Golfe n’a jamais eu lieu
Beaucoup de villes et endroits du monde qui n’ont pas évolué en tant qu’endroits fonctionnels, mais avec une certaine base de réalité, comme s’ils étaient des créations ex nihilo : Disney World, Célébration en Floride ou encore Las Vegas.
Télé et films en général, dû à la création d’un monde d’imagination et à la dépendance que le téléspectateur engage dans ces mondes imaginaires.
Les programmes de « télé réalité » qui n’ont rien à voir avec la réalité.

 

Le simulacre n’est jamais ce qui cache la vérité
-c’est la vérité qui cache qu’il n’y en a pas.
Le simulacre est vrai.

 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Hyperr%C3%A9alit%C3%A9

http://nemesisnom.info/conspirations/dans-les-entrailles-du-monde-reel/

Un blog à dévouvrir: http://www.neotrouve.com/

Partager cet article
Published by Cabinet.psy70-Luxeuil.fr - dans Dossier Actualité-sociologie

Soins conventionnels :

- Etat dépréssif

- Troubles anxieux

- Situations de crise

- Troubles compulsifs

- Hypnothérapie médicale

 

  Nouveau site internet :

  http://www.psychologie-luxeuil-70.com/

Rechercher

Soins spécifiques :

- Souffrances au travail 

- Fatigue sociale ou professionnelle

- Suivi scolaire et aide à l'orientation 

- Souffrance affective et relationnelle

- Perte des facultés de concentration

Université Populaire UPL :

AP_circle_logo.jpeg
              
 
France bleu - Trommenschlager / Neuromarketing
 

Liens

setonly.png     cerveau-et-psycho.jpeg

collège DF   France-Culture

Pages externes