Confronté à la névrose traumatique et au suicide de son disciple Victor tausk, Freud ouvre la voie à sa deuxième topique, où apparaît le concept "de pulsions". Concept qui marquera un tournant définitif dans sa vie suivi d'une remise à zéro de l'ensemble de ses travaux ! Aujourd'hui encore, cette seconde topique est prise très au sérieux par les cabinets de marketing américains, qui l'utilisent avec efficience [mais hélas à des fins purement mercantiles] pour dominer les cerveaux et engendrer les pulsions d'achat... La France, quant à elle, soumise à de violents combats idéologiques, reste prisonnière d'une vision déformée des travaux psychanalytiques de Freud et n'en comprend pas l'enjeu sur le long terme... En cela, c'est profondément lamentable.
Victor Delanoux: La réédition d’Au-delà du principe de plaisir (Payot, 2010) est l’occasion de revenir sur un texte majeur, qui marque un tournant dans la pensée de Freud. Nous sommes en 1920, juste après la Première Guerre mondiale. Depuis quelque temps déjà, Freud a été soumis au cas particulier des « névroses de guerre ». De nombreux soldats, de retour du front, ont été traumatisés. Ils souffrent de ce que l’on nomme alors la « névrose de guerre » (et qu’on appellerait aujourd’hui un « syndrome de stress post-traumatique »). Le soldat traumatisé connaît insomnies, angoisses nocturnes et dépression. Il est surtout en proie à ce que Freud nomme les « compulsions de répétition » : des images envahissantes d’épisodes morbides que le soldat se repasse en boucle, comme si sa mémoire était un disque rayé. Freud bute sur un problème. Comment expliquer ces névroses dans le cadre de la psychanalyse ? Jusque-là, l’analyse des névroses reposait sur un schéma univoque. Les névroses sont le produit d’un conflit psychique entre une pulsion inconsciente - de nature sexuelle - refoulée par une partie du psychisme (le moi). Or, le but de la pulsion est le plaisir : comment expliquer par la recherche de plaisir ce qui ressemble manifestement à un processus mental d’autodestruction ?
Freud expose sans détour son épineuse difficulté. Il émet des hypothèses, les discute, avoue sa perplexité. Puis il en vient à suggérer une nouvelle explication. La recherche de plaisir ne saurait suffire à expliquer le destin des pulsions. Il est possible que tout organisme soit animé une autre finalité : la recherche de la mort. Le fondateur de la psychanalyse vient d’introduire pour la première fois la « pulsion de mort » dans sa théorie. La « compulsion de répétition » (répétition des rêves) serait-elle une façon de dompter peu à peu sa douleur, comme dans le jeu de la bobine où l'enfant mime une situation déplaisante (la disparition d’un objet aimé) pour maîtriser sa douleur, et diminuer la souffrance éprouvée ? A moins que la compulsion de répétition ne se place « au-delà du principe de plaisir ».
En fait, il se pourrait aussi que la compulsion de répétition manifeste une tendance de l’organisme à rechercher sa propre destruction. C’est le cas notamment quand il souffre trop. Pour mettre fin à ses tensions, il n’a d’autre choix que de s’auto-supprimer, comme dans le cas des suicides. (On a suggéré à ce propos que le suicide récent de son disciple Victor Tausk, qui a beaucoup affecté Freud, a eu une influence sur l’élaboration de sa théorie de la pulsion de mort). Plus généralement, Freud évoque un hypothétique processus d’autodestruction plus fondamental proche de ce que l’on appellerait aujourd’hui « l’apoptose » ou « suicide cellulaire », et qui veut que la mort ne soit pas lié à des agressions extérieures mais bien à un mécanisme programmé d’autodestruction.
Freud en vient même à estimer que principe de plaisir et pulsion de mort ne sont pas contradictoires, puisque l’autodestruction est une façon de faire diminuer les tensions internes, et que la recherche du plaisir n’est parfois rien d’autre que la fin d’une douleur. « La compulsion de répétition et la satisfaction pulsionnels aboutissant directement au plaisir semblent ici se recouper en une intime association », écrit Freud.
Dans les mois qui suivent, Freud va approfondir sa réflexion sur la « pulsion de mort », qui siégera désormais au côté d’Eros et de la libido dans les limbes de l’inconscient.
(Une réédition est également sortie aux PUF en 2010).
Ce que le marketing fait avec les théories freudiennes :
Les grandes notions théoriques de la seconde topique :
La seconde topique est l'un des éléments fondamentaux de la théorie psychanalytique élaborée par Sigmund Freud. Tout comme la première topique, elle représente une tentative de cartographie de l'appareil psychique. Elle représente l'une des trois perspectives de l'approche psychanalytique : dynamique, économique et topique. Topique vient de topos qui signifie lieu en grec.
Formulée à partir de 1920, suite à l'apport de nombreuses notions théoriques dans la métapsychologie freudienne (dont les principales furent le Narcissisme, le principe de plaisir et le principe de réalité), elle comporte trois instances : le ça, le moi et le surmoi. Le principe isolé dans cette deuxième topique est le principe de répétition qu'il a théorisé à partir de l'observation de son petit-fils âgé de 18 mois W. Ernest Freud et son jeu de la bobine (fort, da décrit dans Au-delà du principe de plaisir).
Description de la seconde topique :
Cette seconde topique ne vient pas contredire la première topique, elle propose une diversification de l'explication et peut être superposée, sur certains points, à la précédente.
- Le Ça est la partie la plus chaotique de l'appareil psychique. C'est un espace qui ne connait pas le refus, il n'est pas soumis à la réalité externe. La temporalité n'est pas la même. Les pulsions exercent leur force. Le ça ne correspond pas vraiment à l'inconscient de la première topique, bien qu'il soit totalement inconscient.
- Le Moi est une partie du ça qui s'est organisée en raison des stimuli de la réalité externe. Il correspond au siège de la personnalité. Il serait une erreur cependant de le considérer comme l'équivalent du conscient de la première topique puisqu'une partie du moi est inconsciente. Le moi tente de trouver des compromis entre les pulsions du ça qui réclament satisfaction et les interdictions du surmoi, entre le principe de plaisir et le principe de réalité. C'est pourquoi "le moi n'est pas maître dans sa maison".
- Le Surmoi est l'instance psychique issue du complexe d'Œdipe. C'est l'intériorisation de l'interdit de l'inceste, des lois et des normes sociales. Selon ses exigences il peut être cruel, sadique ou protecteur. On constate après les travaux de Mélanie Klein que bien avant le complexe d'Œdipe, il existe les prémisses d'un surmoi, en tout cas d'une instance interdictrice. Le surmoi assure la non-satisfaction immédiate des pulsions, il représente donc une sorte de liant social.
Sources: http://fr.wikipedia.org et lecerclepsy.com