10 décembre 2013 2 10 /12 /décembre /2013 15:15

Hommage à “MADIBA” Nelson Rohlihlala Mandela (1918-2013) par le Dr. Pierrette Herzberger-Fofana. “Ceux qui morts ne sont jamais partis. Ils sont dans l’ombre qui s’éclaire. Et dans l’ombre qui s‘épaissit. Les morts ne sont pas sous la terre[..] Les morts ne sont pas morts. “ Birago Diop.

 

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<< Avec tout mon respect pour un humaniste qui n'a d'égal que Gandhi. FT >>

 

Nelson Rohlihlala Mandela n'est plus. A la suite d’une longue maladie, il a tiré sa  révérence, le 5 décembre 2013, entouré de l’affection des membres de sa famille.  Au crépuscule de sa vie, Mandela s’était retiré de la vie politique et vivait entouré des  siens. Sa dernière apparition publique date de la Coupe du Monde de Football 2010 qui a  eu lieu en Afrique du Sud.

 
 Visiblement ému, Jacob Zuma, le président de l'Afrique du Sud, son ancien compagnon  de lutte qui avait également été incarcéré à Robben Island, a annoncé la terrible nouvelle du décès de Madiba, Nelson Mandela:

 
 “Nelson Mandela, le plus grand fils de notre pays est décédé”.

 
Même si l'on s’attendait à un décès plus ou moins imminent, cette nouvelle a provoqué une onde de choc dans le monde entier. Madiba, fait partie de notre mémoire collective maintenant, car nous avons suivi avec beaucoup d'émotion les grandes étapes de sa biographie depuis son incarcération dans les geôles de Robben Island, en 1962, en passant par sa libération, le 11 février 1990, au Prix Nobel de la Paix en 1993 jusqu’à son élection, le 26 avril 1994, en tant que premier Président de l’Afrique du Sud élu librement et démocratiquement par tous les Sudafricains et les Sudafricaines. Le monde entier avait salué cette élection qui a donné naissance à la nation arc-en-ciel. Durant son mandat, Madiba a mis en place une commission "Vérité et Réconciliation” qui a permis d’extirper les racines de l’Apartheid, ce racisme étatique établi depuis des siècles dans son pays.

 
Une légende a rejoint au royaume des ombres, tous ceux qui ont lutté pour un idéal et qui étaient prêts à donner leur vie pour cet idéal. Madiba fait partie des héros qui aspiraient à un monde meilleur où seules règneraient la justice, l’égalité des chances et la liberté pour tous. Il est une référence et nous sert de modèle.

 

       
Madiba ou Tata

  
Madiba, comme ses concitoyens l’appelaient, est un nom clanique et une formule de respect, empreinte d’affection. Tata signifie en khosa, sa langue maternelle “Père”. Mandela  a écrit en lettres d’or les plus belles pages de l’histoire contemporaine. De son vivant, il est entré de plain-pied dans l’histoire. Sa vision d’un monde sans racisme a été son combat de toute une vie. Il en a payé le prix fort. Ses bourreaux l’ont incarcéré durant 27 ans au pénitencier de Robben Island. Cependant, son charisme et son autorité morale ont obligé le pouvoir d’alors à entamer des pourpalers avec lui jusqu’à sa libération.

 
Le nom de Nelson Mandela restera gravé à jamais dans nos mémoires. Il a livré au monde un testament de paix, de pardon et d’amour du prochain qui touche le cœur de tout un chacun.

 
Nelson Mandela a résumé son engagement de la façon suivante :
 “J’ai dédié ma vie à la lutte pour le peuple africain. J’ai combattu la domination blanche et j’ai combattu la domination noire. J’ai chéri l’idéal d’une société démocratique et libre dans laquelle tous vivraient ensemble dans l’harmonie, avec d’égales opportunités. C’est un idéal que j’espère atteindre et pour lequel  j’espère vivre. Mais, si besoin est, c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir”.

 
 Mandela a eu le bonheur de voir son rêve se réaliser: celui de vivre dans sa patrie libérée officiellement des démons du racisme.

 

 

Au-revoir, Nelson Mandela    “les mots ne sont pas morts”

 
Une icône s’en est allée de l’autre bord rejoindre ses ancêtres. Paix à son âme!
Nous pleurons aujourd’hui l’humaniste qui a redonné à l’Afrique, et en particulier au monde noir, sa dignité.

 
 Nous pleurons le héros de la liberté qui a su réconcilier Blancs et Noirs en tissant des  liens de fraternité.

 
 Nous pleurons l’homme qui est le symbole de la lutte contre la discrimination raciale, de la recherche de la justice et de la paix et qui a été une source d’inspiration pour nous tous.

 
 Nous nous inclinons très respectueusement devant ce Père de la nation Sudafricaine, cet  illustre fils de l’Afrique qui a changé le cours de l’Histoire dans son pays et ému tous les peuples du monde. Tout le monde le pleure aujourd'hui et lui rend hommage.

 
A sa famille éplorée, à ses anciens compagnons de lutte, au peuple Sudafricain et à lANC (African National Congress), nous présentons nos sincères condoléances.

 
Que le ciel accueille Madiba parmi ses élus...
Que l’esprit de ses ancêtres l’accompagne dans l'au-delà!

 
„ N’KosiSsikel iAfrica!
 Par le Dr. Pierrette Herzberger-Fofana

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8 décembre 2013 7 08 /12 /décembre /2013 11:53

Le mystère, la peur, l’aventure, le désir, le sentiment d’exister pleinement : cinq critères pour aider à mieux cerner ce qu’est l’amour vrai !

 

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«Mais pourquoi restes-tu avec lui (ou avec elle) ? » Combien de fois avons-nous posé cette question à nos amis enlisés dans des histoires douloureuses ? Combien de fois nous sommes-nous demandés ce qui les poussait à persévérer dans des relations insatisfaisantes ? Non, c’est sûr, ce n’est pas ça, l’amour. Qu’est-ce que c’est, alors ? Un sentiment qui nous rendrait immuablement heureux ?

 

Certainement pas, nous dit la psychanalyse. L’amour, le « vrai », n’a rien à voir avec la sérénité. Même après le cap de la fusion des débuts, et contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, l’amour, ce n’est pas pépère; ça chavire, ça secoue, ça nous lie mystérieusement à l’autre dans une épopée qui échappe à toute rationalité. Exploration de quelques signes révélateurs.

 

Trouver l’autre mystérieux

 

L’amour est un mystère pour ceux qui le vivent, un mystère pour ceux qui le regardent. Nous constatons, mais nous ne comprenons pas. Pourquoi ? Parce que ce qui nous lie à l’autre est inexplicable. Aimer vraiment, c’est aller vers quelqu’un, non pas seulement pour son image (sa beauté, sa ressemblance avec tel ou tel), ni pour ce qu’il symbolise (un père, une mère, le pouvoir, l’argent), mais pour son secret. Ce secret que nous ne savons pas nommer, et qui va rencontrer le nôtre : un manque ressenti depuis l’enfance, une souffrance singulière, indéfinissable. « L’amour s’adresse à notre part d’inconnu, explique le psychanalyste Patrick Lambouley.

 

Il y a un vide en nous qui peut causer notre perte, nous pousser à nous tuer. Eh bien, l’amour, c’est la rencontre de deux blessures, de deux failles, le partage avec quelqu’un de ce qui nous manque radicalement et que l’on ne pourra jamais dire. » L’amour vrai, ce n’est pas « Montre-moi ce que tu as » ou « Donne-moi ce que tu as pour combler ce qui me manque », mais plutôt « J’aime la manière dont tu essaies de guérir, ta cicatrice me plaît ».

 

Rien à voir avec l’hypothèse de la « moitié d’orange », déclinaison du Banquet de Platon (LGF, “Le Livre de poche”, 2008), qui nous voudrait incomplets parce que coupés en deux. L’amour nous rendrait alors « un » et heureux ! « C’est la cause de la faillite forcée de bien des couples, observe Patrick Lambouley. Quand certains s’aperçoivent qu’ils ressentent encore une insatisfaction, ils s’imaginent que c’est parce qu’ils n’ont pas trouvé l’homme ou la femme qu’il leur “fallait”, et qu’ils doivent en changer. Ce n’est évidemment pas le cas. » Aimer vraiment, c’est dire à l’autre : « Tu m’intéresses. »

 

Avoir peur de le perdre

 

Aimer, c’est avoir peur. Tout le temps. Freud, dans Malaise dans la civilisation, l’explique ainsi : nous devenons dépendants parce qu’il faudra que l’autre nous soutienne toujours dans l’existence. D’où la peur de le perdre. Explication lumineuse de Monique Schneider, philosophe et psychanalyste : « L’amour implique une prise de risque. Il suscite un phénomène de vertige, parfois même de rejet : on peut casser l’amour parce que l’on en a trop peur, le saboter tout en essayant de se confier, réduire son importance en s’attachant à une activité où tout repose sur soi-même. Tout cela revient à se protéger du pouvoir exorbitant de l’autre sur nous. »

 

D’autant, souligne encore Freud, qu’Éros et Thanatos vont de pair. Je t’aime, je te détruis. Éros, c’est notre désir de nous lier amoureusement les uns aux autres?; Thanatos, c’est la pulsion de mort qui nous pousse à rompre le lien pour que notre moi reste tout-puissant. L’amour poussant à sortir de soi, le moi le combat. « C’est difficile de renoncer à soi, décrypte le psychanalyste Jean-Jacques Moscovitz. On sent bien quand on aime que quelque chose nous tiraille.

 

L’amour touche à notre être, à ce que nous sommes au monde. Peu de gens s’en rendent compte. Ils se retrouvent seuls et se sentent bien dans cette solitude puisqu’ils sont désormais à l’abri de cette pulsion de mort. Mais quand, dans l’amour, on a survécu aux déchirements, aux conflits, on atteint une zone formidable où rejaillit le sentiment. » L’amour vrai n’est pas un contrat d’affaires : c’est un sentiment violent qui fait courir un danger aux deux partenaires. Il ne faut jamais l’oublier quand on doute, quand l’autre semble nous « désaimer ». « Quand quelqu’un se défend, explique Monique Schneider, ça ne veut pas dire qu’il n’est pas amoureux. Il peut juste redouter de se retrouver les mains liées. »

  

Accepter de s’engager avec lui dans l’inconnu

 

Rien n’est écrit. Le romantisme de la passion qui flamberait puis irait vers une prévisible extinction est un mythe. L’amour ne prend pas systématiquement le chemin d’une pente déclinante. Il peut emprunter une route inverse. Nous devons accepter de ne pas avoir de maîtrise sur nos sentiments. « On n’entre pas dans un univers volontariste ou méthodique, ajoute Monique Schneider. On peut passer par des épisodes contrastés. Traverser des instants de bonheur extatiques fait que l’on peut ensuite tomber de très haut, bien sûr.

Mais être persuadé que l’amour n’est jamais certain signifie que l’on a hérité d’un passé qui nous empêche de croire en nous et en l’autre. Pour aimer vraiment, il faut presque croire en une sorte de miracle. Freud parle d’attente croyante. Il faut entretenir le feu qui peut redémarrer, ne pas exiger de satisfaction immédiate. » Accepter l’inconnu, être patient…

  

Éprouver du désir

 

Aucun doute : aimer, c’est avoir envie de l’autre. Mieux, confirme Jean-Jacques Moscovitz : « Faire l’amour aide à aimer. Sans échange corporel, quelque chose dans l’amour ne se fait pas. L’amour demande du plaisir parce qu’il y a du désir. Et les amants qui s’aiment connaissent une jouissance supplémentaire. La différence des sexes s’annule dans le rapport. On ne sait plus qui est l’un et qui est l’autre. Les deux se confondent. Il y a désinvestissement de la valeur de l’organe. On fait corps. C’est une jouissance qui écrase. » Sans amour, le plaisir se vit comme un moyen de se débarrasser d’une tension, tandis que pour jouir dans une émotion qui dégage des ondes, des vibrations, une expérience forte, il faut aimer vraiment : « Dans l’amour, on obtient une jouissance autre », renchérit Monique Schneider.

 

Une baisse de désir signifie-t-elle un désamour ? Pas du tout : « Il est des moments de bonheur où l’on est tellement heureux que l’autre soit ce qu’il est que l’on peut simplement se satisfaire du fait qu’il existe », rappelle Monique Schneider. Au-delà de ces instants de contemplation, d’autres femmes dissocient amour et désir. « Ce n’est pas qu’il y ait moins de sentiments, développe Jean-Jacques Moscovitz. Au contraire. C’est un peu comme si se donner trop allait les faire disparaître. Intervient ici quelque chose de l’enfant qui n’est pas réglé, un idéal de l’amour beaucoup trop ancré dans l’idéal paternel. Elles ont été femmes et redeviennent des petites filles : la relation leur apparaît incestueuse. La dimension paternelle reprend le dessus, peut-être pour se protéger de cette peur de se voir dissoutes dans le corps à corps. »

 
Ces femmes se réfugient dans un amour adorateur, se défient de la relation sexuelle, qui doit à nouveau être apprivoisée. Elles peuvent alors passer par une autre forme de rapport physique, celle de l’étreinte : envelopper l’autre, le porter comme s’il était à l’intérieur de soi. Et quand l’envie revient, le désir suit. Rien de figé dans ces flux et reflux. Tout va et vient.

 

Se sentir exister

 

« Être aimé, c’est se sentir justifié d’exister », disait en substance Sartre. L’amour vrai, c’est cette expérience de légitimation au monde, cette illusion que notre amour est unique. L’autre est l’idéal incarné, et nous existons grâce à son regard. L’amour nous redonne un statut d’enfant convaincu de sa toute-puissance, convaincu que s’il n’existait pas, le monde raterait quelque chose. On s’élit l’un l’autre.

 

Ce thème biblique de l’Élu, Freud le reprend à son compte pour bien distinguer l’amour vrai de l’amour charité tourné vers le bien. Nous investissons l’autre. Nous lui reconnaissons son importance radicale : nous l’estimons, nous le valorisons, nous le croyons irremplaçable. Nous avons fait une trouvaille, découvert un trésor. Nous ne sommes plus seuls.

 

L’autre nous apporte aussi son monde, une ouverture vers d’autres horizons, des émotions que nous ne percevions pas avec la même intensité auparavant. Nous sommes davantage « réveillés ». Nous avons le sentiment d’être à l’abri puisqu’il a su nous découvrir. « Aimer vraiment intensifie notre sensation d’exister », conclut Monique Schneider.

 

Hélène Fresnel pour www.psychologies.com

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8 décembre 2013 7 08 /12 /décembre /2013 09:01

Laurent Aigon représente cette nouvelle génération capable des paris les plus fous, devenus réalisables grâce aux technologies réticulaires ! Avec son cockpit de Boeing 737 à la maison, ce Médocain passionné d’aviation est devenu la star d'une publicité pour Google. Le géant du net se lance désormais dans le soutien de ces élites d'un nouveau genre.

 

Laurent Aigon cherche des financements pour créer sa société et vivre de sa passion.

Laurent Aigon cherche des financements pour vivre de sa passion. (Photo J. Lestage)

  

Paradigme vivant de des théories Stigleriennes

 

Son smartphone n’arrête plus de sonner… et surtout de vibrer. Son compte Facebook a lui aussi explosé. Les demandes d’amis ne cessent d’affluer. Depuis l’été dernier, Laurent Aigon, jusqu’alors parfaitement inconnu, est sollicité comme peut l’être une rock star. Il enchaîne les reportages et les interviews. Avec un sourire, il évoque son «tableau de chasse». On y trouve nos confrères de la radio, de la télévision et de la presse écrite. Le rayonnement est même international. «C’est comme si j’avais gagné au loto», dit-il... Bernard Stiegler avait prévu l'émergence de ces talents, qui, en dehors des grandes écoles et autres institutions d'état, réussissent à gravir l'échelle sociale, au nez et à la barbe de nos élites conventionnelles, qui rejettent toutes différences.

 

DOCUMENT A CONSULTER: Vers une politique des amateurs ?

 

 

(OU Voir l'article: http://www.psy-luxeuil.fr/article-la-puissance-de-l-amatorat-114912650.html)

  

L’apogée de ce très récent parcours médiatique est une publicité réalisée par le moteur de recherche Google. Sa « success story » passe en boucle sur les médias. Il est l’autodidacte qui, en allant au bout de sa passion, sera parvenu à devenir une sorte de pilote de ligne hors norme tout en restant dans le monde virtuel.

 

Ainsi, Google aurait été frappé et bluffé par sa détermination. Et aurait aussi saisi l’occasion de montrer que le Web peut permettre de réaliser bien des prouesses et des escapades à l’autre bout de la planète. Laurent Aigon ne cache pas que, à l’origine de ce décollage, un article paru dans les colonnes du quotidien «Sud Ouest» (le 18 juillet), a certainement contribué à attirer l’attention sur son aventure. Au départ, il y a surtout le talent de ce quadragénaire. Lequel a réussi une performance qualifiée d’exceptionnelle par le milieu de l’aéronautique.

  

Dingue d’aviation depuis son plus jeune âge, ce serveur, qui travaille dans un bar-restaurant de Lacanau-Océan, a monté un cockpit de Boeing 737 dans la chambre de ses enfants.

Son tour de force est que la «plateforme» n’est pas inerte. Elle est reliée à des ordinateurs. Tous les boutons sont actifs. Les commandes répondent. L’avionique fonctionne comme dans une vraie machine qui serait prête à prendre son envol.

  

Dominique Blangarin, 53 ans, instructeur pilote de ligne à Air France, ancien de l’armée de l’air, ne tarit pas d’éloges sur la performance réalisée par Laurent Aigon : «Ça correspond véritablement à ce qui se passe dans un Boeing 737-800. Dans un vrai cockpit, il serait capable d’assurer la mise en œuvre.» L’instructeur s’émerveille : «Pour construire son simulateur, on n’imagine pas la somme de travail engagée par ce passionné. C’est tout simplement exceptionnel, et invraisemblable.»

 

Construire l'avenir...

  

Et Laurent Aigon n’a pas l’intention de s’arrêter en si bon chemin. S’il a fait une croix sur son rêve de gosse de devenir un jour pilote «dans le réel», c’est un autre objectif tout aussi ambitieux qu’il veut atteindre. Il s’agit de créer une société lui permettant d’exploiter le modèle de simulateur de vol qu’il a mis au point. « L’idée est de proposer une machine performante et plus accessible financièrement aux écoles de pilotage. Je vise aussi un public d’entreprises pour des stages de cohésion, et puis des particuliers dans le cadre du loisir ou de sessions antistress en avion », dit-il. Le concept est d’ailleurs bien avancé. Laurent Aigon affirme : « J’ai des lettres d’intention de structures de formation qui sont prêtes à travailler avec moi. Je pourrais commencer dès demain. »

 

Laurent Aigon a déjà confectionné la maquette du nouveau simulateur qu’il compte créer. «Quelque chose qui sera plus mobile que le prototype fixe d’aujourd’hui», avance-t-il. Une lueur dans les yeux, il dévoile son plan. Mais, avant de pouvoir concrétiser la dernière partie de son projet et lancer sa société, c’est un nouveau tour de force qu’il va devoir accomplir.

 

Avec l’aide du Club des entrepreneurs du Médoc, il a constitué un dossier et fait le point sur toutes les compétences nécessaires. En éclaireur, il est aussi allé à la rencontre des banques. «J’ai besoin de 200 000 euros pour mettre en place mon entreprise, ce qui comprend la construction du simulateur. Pour obtenir le financement, on me demande d’apporter 40 % de cette somme. Pour le moment, c’est là que l’on bloque, dit-il. Il m’en manque une bonne partie.»

 

Aujourd’hui, Laurent Aigon, qui continue de peaufiner son dossier, cherche donc des bailleurs de fonds susceptibles de l’aider à accéder à la dernière marche. Il compte d’ailleurs taper à toutes les portes. « Google m’a apporté une certaine notoriété. Et j’ai rencontré plusieurs représentants et techniciens du monde de l’aéronautique. Ils m’ont donné leur avis. Ils m’ont tous encouragé à aller au bout. Je ne suis pas parti à l’aveugle. J’ai consulté et j’ai pris des précautions. »

 

Dans cette dernière ligne droite, Laurent Aigon se dit que «tout est possible ». Et les nombreux contacts obtenus sur sa page professionnelle Facebook ne font que le motiver à ne pas lâcher prise.Tout en avouant «avoir peur», le pilote confie «s’être découvert une âme d’entrepreneur. Un moteur de plus pour réussir à finaliser ce rêve». En attendant le dénouement de cette aventure, il profite de quelques invitations à «monter à bord dans de vrais avions». Les pilotes veulent savoir à qui ils ont affaire.

 

«Son projet est viable»

 

Selon Dominique Blangarin, «le projet de Laurent est viable». L’instructeur fait observer que «seules les grandes compagnies ont des simulateurs. En parallèle, il y a des écoles et des pilotes qui ont besoin d’outils de formation pour acquérir ou maintenir leurs compétences. Dans ce sens, il y a un vrai créneau à prendre». Toujours selon lui, «la difficulté consistera à faire certifier la machine par la Direction générale de l’aviation civile, ce qui n’est pas insurmontable».

 

http://www.sudouest.fr/

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4 décembre 2013 3 04 /12 /décembre /2013 12:45

" Nous avons besoin d'une éducation qui permette aux enfants de décélerer et d'apprendre à penser. Les parents, le tissu associatif et culturel, l'école doivent prendre la mesure de l'enjeu. La démocratie, la constitution du bien commun, le sauvetage de notre planète menacée nécessitent de nouvelles pratiques éducatives et une nouvelle place à la réflexion, au livre, au débat. " 

 

Une rencontre animée par Michel Tozzi dans le cadre des conférences web de la MAIF

 

Dans quelle mesure l'évolution de nos sociétés ébranle-t-elle les conditions de possibilité de l'entreprise éducative ?

 

Marcel Gauchet : Nous sommes en proie à une erreur de diagnostic : on demande à l'école de résoudre par des moyens pédagogiques des problèmes civilisationnels résultant du mouvement même de nos sociétés, et on s'étonne qu'elle n'y parvienne pas... Quelles sont ces transformations collectives qui aujourd'hui posent à la tâche éducative des défis entièrement nouveaux ? Ils concernent au moins quatre fronts : les rapports entre la famille et l'école, le sens des savoirs, le statut de l'autorité, la place de l'école dans la société.

A priori, famille et école ont la même visée d'élever les enfants : la famille éduque, l'école instruit, disait-on jadis. En pratique, les choses sont devenues bien plus compliquées.

 

Aujourd'hui, la famille tend à se défausser sur l'école, censée à la fois éduquer et instruire. Jadis pilier de la collectivité, la famille s'est privatisée, elle repose désormais sur le rapport personnel et affectif entre des êtres à leur bénéfice intime exclusif. La tâche éducative est difficile à intégrer à ce cadre visant à l'épanouissement affectif des personnes.

 

Philippe Meirieu : Nous vivons, pour la première fois, dans une société où l'immense majorité des enfants qui viennent au monde sont des enfants désirés. Cela entraîne un renversement radical : jadis, la famille "faisait des enfants", aujourd'hui, c'est l'enfant qui fait la famille. En venant combler notre désir, l'enfant a changé de statut et est devenu notre maître : nous ne pouvons rien lui refuser, au risque de devenir de "mauvais parents"...

 

Ce phénomène a été enrôlé par le libéralisme marchand : la société de consommation met, en effet, à notre disposition une infinité de gadgets que nous n'avons qu'à acheter pour satisfaire les caprices de notre progéniture.

 

Cette conjonction entre un phénomène démographique et l'émergence du caprice mondialisé, dans une économie qui fait de la pulsion d'achat la matrice du comportement humain, ébranle les configurations traditionnelles du système scolaire.

 Dans quelle mesure le face-à-face pédagogique est-il bouleversé par cette nouvelle donne ?


P. M. : Pour avoir enseigné récemment en CM2 après une interruption de plusieurs années, je n'ai pas tant été frappé par la baisse du niveau que par l'extraordinaire difficulté à contenir une classe qui s'apparente à une cocotte-minute.

 

Dans l'ensemble, les élèves ne sont pas violents ou agressifs, mais ils ne tiennent pas en place. Le professeur doit passer son temps à tenter de construire ou de rétablir un cadre structurant. Il est souvent acculé à pratiquer une "pédagogie de garçon de café", courant de l'un à l'autre pour répéter individuellement une consigne pourtant donnée collectivement, calmant les uns, remettant les autres au travail.

 

Il est vampirisé par une demande permanente d'interlocution individuée. Il s'épuise à faire baisser la tension pour obtenir l'attention. Dans le monde du zapping et de la communication "en temps réel", avec une surenchère permanente des effets qui sollicite la réaction pulsionnelle immédiate, il devient de plus en plus difficile de "faire l'école". Beaucoup de collègues buttent au quotidien sur l'impossibilité de procéder à ce que Gabriel Madinier définissait comme l'expression même de l'intelligence, "l'inversion de la dispersion".

Dès lors que certains parents n'élèvent plus leurs enfants dans le souci du collectif, mais en vue de leur épanouissement personnel, faut-il déplorer que la culture ne soit plus une valeur partagée en Europe et comment faire en sorte qu'elle retrouve sa centralité ?

 

M. G. : Le savoir et la culture étaient posés comme les instruments permettant d'accéder à la pleine humanité, dans un continuum allant de la simple civilité à la compréhension du monde dans lequel nous vivons. C'est ce qui nourrissait l'idéal du citoyen démocratique. Ils ont perdu ce statut. Ils sont réduits à un rôle utilitaire (ou distractif).

 

L'idée d'humanité s'est dissociée de l'idée de culture. Nous n'avons pas besoin d'elle pour exister. Nous sommes submergés par une vague de privatisation qui nous enjoint de vivre pour nous-mêmes et, surtout, de ne pas perdre notre temps à chercher à comprendre ce qui nous environne.

 

Derrière le slogan apparemment libertaire "faites ce que vous voulez !", il y a un postulat nihiliste : il ne sert à rien de savoir, aucune maîtrise du monde n'est possible. Contentez-vous de ce qui est nécessaire pour faire tourner la boutique, et pour le reste, occupez-vous de vous !

 

L'école est prise dans ce grand mouvement de déculturation et de désintellectualisation de nos sociétés qui ne lui rend pas la tâche facile. Les élèves ne font que le répercuter avec leur objection lancinante : à quoi ça sert ? Car c'est le grand paradoxe de nos sociétés qui se veulent des "sociétés de la connaissance" : elles ont perdu de vue la fonction véritable de la connaissance.

 

C'est pourquoi nous avons l'impression d'une société sans pilote. Il n'y a plus de tête pour essayer de comprendre ce qui se passe : on réagit, on gère, on s'adapte. Ce dont nous avons besoin, c'est de retrouver le sens des savoirs et de la culture.

 

Est-ce à dire que l'autorité du savoir et de la culture ne va plus de soi, classe difficile ou pas ? Et comment peut-on la réinventer ?

 

M. G. : L'autoritarisme est mort, le problème de l'autorité commence ! Le modèle de l'autorité a longtemps été véhiculé par la religion (puisque les mystères de la foi vous échappent, remettez-vous en au clergé) et par l'armée (chercher à comprendre, c'est déjà désobéir). Ces formes d'imposition sans discussion se sont écroulées, et c'est tant mieux ! Mais il faut bien constater qu'une fois qu'on les a mises à bas, la question de l'autorité se repose à nouveaux frais. Pourquoi cette question est-elle si importante à l'école ?

 

Tout simplement parce que l'école n'a pas d'autre moyen d'action que l'autorité : l'emploi de la force y est exclu et aucune contrainte institutionnelle n'obligera jamais quelqu'un à apprendre. La capacité de convaincre de l'enseignant dans sa classe repose sur la confiance qui lui est faite en fonction du mandat qui lui est conféré par la société et garanti par l'institution. Nous sommes là pour l'appuyer dans ce qui est une mission collective.

Or ce pacte est aujourd'hui remis en question. Les enseignants en sont réduits à leur seul charisme. Ils travaillent sans filet et sans mandat institutionnel clair. La société n'est plus derrière eux, à commencer par leur administration. C'est ce qui aboutit à la crise de l'autorité à l'école : les enseignants sont là au nom d'une collectivité qui ne reconnaît pas le rôle qu'ils exercent.

 

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P. M. : L'autorité est en crise parce qu'elle est individuée et qu'elle n'est plus soutenue par une promesse sociale partagée. Le professeur tenait son autorité de son institution. Aujourd'hui, il ne la tient plus que de lui. L'école garantissait que l'autorité du professeur était promesse de réussite - différée, mais réelle - pour celui qui s'y soumettait.

 

Aujourd'hui, la promesse scolaire est éventée et le "travaille et tu réussiras" ne fait plus recette. L'école, qui était une institution, est devenue un service : les échanges y sont régis par les calculs d'intérêts à court terme. Le pacte de confiance entre l'institution scolaire et les parents est rompu. Ces derniers considèrent souvent l'école comme un marché dans lequel ils cherchent le meilleur rapport qualité/prix.

 

Le défi qui s'ensuit est double. Nous devons d'abord réinstitutionnaliser l'école jusque dans son architecture. Si les lycées napoléoniens ont si bien fonctionné, c'est qu'à mi-chemin entre la caserne et le couvent, ils alliaient l'ordre et la méditation. Réinstitutionnaliser l'école, c'est y aménager des situations susceptibles de susciter les postures mentales du travail intellectuel.

 

Il est essentiel d'y scander l'espace et le temps, d'y structurer des collectifs, d'y instituer des rituels capables de supporter l'attention et d'engager l'intention d'apprendre...

 

Nous devons ensuite, contre le savoir immédiat et utilitaire, contre toutes les dérives de la "pédagogie bancaire", reconquérir le plaisir de l'accès à l'oeuvre. La mission de l'école ne doit pas se réduire à l'acquisition d'une somme de compétences, aussi nécessaires soient-elles, mais elle relève de l'accès à la pensée. Et c'est par la médiation de l'oeuvre artistique, scientifique ou technologique que la pensée se structure et découvre une jouissance qui n'est pas de domination, mais de partage.

 

La réinvention de l'école passe donc aussi par un réexamen critique de nos outils pédagogiques ?

 

P. M. : L'accès à l'oeuvre, parce qu'elle exige de différer l'instrumentalisation de la connaissance et d'entrer dans une aventure intellectuelle, se heurte à notre frénésie de savoir immédiat. Car les enfants de la modernité veulent savoir. Ils veulent même tout savoir.

 

Mais ils ne veulent pas vraiment apprendre. Ils sont nés dans un monde où le progrès technique est censé nous permettre de savoir sans apprendre : aujourd'hui, pour faire une photographie nette, nul n'a besoin de calculer le rapport entre la profondeur de champ et le diaphragme, puisque l'appareil le fait tout seul...

Ainsi, le système scolaire s'adresse-t-il à des élèves qui désirent savoir, mais ne veulent plus vraiment apprendre. Des élèves qui ne se doutent pas le moins de monde qu'apprendre peut être occasion de jouissance.

 

Des élèves rivés sur l'efficacité immédiate de savoirs instrumentaux acquis au moindre coût, et qui n'ont jamais rencontré les satisfactions fabuleuses d'une recherche exigeante. C'est pourquoi l'obsession de compétences nous fait faire fausse route. Elle relève du "productivisme scolaire", réduit la transmission à une transaction et oublie que tout apprentissage est une histoire...

 

En réalité, la culture française a toujours été rétive aux théories de l'apprentissage, pour leur préférer les théories de la connaissance : "l'exposé des savoirs en vérité" apparaît ainsi comme la seule méthode d'enseignement, qu'elle prenne la forme de l'encyclopédisme classique ou des référentiels de compétences béhavioristes.

 

Dans cette perspective, le savoir programmatique est à lui-même sa propre pédagogie, et toute médiation, tout travail sur le désir, relèvent d'un pédagogisme méprisable. Je regrette profondément l'ignorance de l'histoire de la pédagogie dans la culture française : elle nous aiderait à débusquer nos contradictions et nos insuffisances, et à réinventer l'école.

 

M. G. : Que savons-nous de ce que veut dire "apprendre" ? Presque rien, en réalité : nous passons sans transition du rat de laboratoire et de la psychologie cognitive aux compétences qui intéressent les entreprises. Mais l'essentiel se trouve entre les deux, c'est-à-dire l'acte d'apprendre, distinct de connaître, auquel nous ne cessons, à tort, de le ramener. Apprendre, à la base, pour l'enfant, c'est d'abord entrer dans l'univers des signes graphiques par la lecture et l'écriture, et accéder par ce moyen aux ressources du langage que fait apparaître son objectivation écrite.

 

Une opération infiniment difficile avec laquelle nous n'en avons jamais fini, en fait. Car lire, ce n'est pas seulement déchiffrer, c'est aussi comprendre. Cela met en jeu une série d'opérations complexes d'analyse, de contextualisation, de reconstitution sur lesquelles nous ne savons presque rien. Comment parvient-on à s'approprier le sens d'un texte ?

 

On constate empiriquement que certains y parviennent sans effort, alors que d'autres restent en panne, de manière inexplicable. Sur tous ces sujets, nous sommes démunis : nous nous raccrochons à un mélange de routines plus ou moins obsolètes et d'inventions pédagogiques plus ou moins aveugles.

 

P. M. : De même qu'aucun métier ne se réduit à la somme des compétences nécessaires pour l'exercer, aucun savoir ne se réduit à la somme des compétences nécessaires pour le maîtriser. Les compétences graphiques, scripturales, orthographiques, grammaticales suffisent-elles pour entrer dans une culture lettrée ? Je n'en crois rien, car entrer dans l'écrit, c'est être capable de transformer les contraintes de la langue en ressources pour la pensée.

 

Ce jeu entre contraintes et ressources relève d'un travail pédagogique irréductible à l'accumulation de savoir-faire et à la pratique d'exercices mécaniques. Il renvoie à la capacité à inventer des situations génératrices de sens, qui articulent étroitement découverte et formalisation. Or, nous nous éloignons aujourd'hui à grands pas de cela avec des livrets de compétences qui juxtaposent des compétences aussi différentes que "savoir faire preuve de créativité" et "savoir attacher une pièce jointe à un courriel".

Que peut bien signifier alors "l'élève a 60 % des compétences requises" ? La notion de compétence renvoie tantôt à des savoirs techniques reproductibles, tantôt à des capacités invérifiables dont personne ne cherche à savoir comment elles se forment. Ces référentiels atomisent la notion même de culture et font perdre de vue la formation à la capacité de penser.

 

A l'heure où nous passons des connaissances aux compétences, quels sont les leviers politiques qui permettraient de réinventer l'école ?


M. G. : L'école est à réinventer, mais elle ne pourra pas le faire seule dans son coin. Ce n'est pas un domaine de spécialité comme un autre qu'il suffirait de confier aux experts pour qu'ils trouvent les solutions. Le problème éducatif ne pourra être résolu dans ces conditions. C'est une affaire qui concerne au plus haut point la vie publique, qui engage l'avenir de nos sociétés et ne peut être traitée que comme une responsabilité collective qui nous concerne tous, et pas seulement les parents d'élèves.

 

L'une des évolutions actuelles les plus inquiétantes réside dans l'installation au poste de commandement d'une vision purement économique du problème, élaborée et développée à l'échelle internationale.

Ce que résume l'écho donné aux résultats des enquêtes du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA), pilotées par l'OCDE. Le ministère de l'éducation nationale ne fait plus que répercuter des conceptions très discutables du type de performances auxquelles doivent tendre les systèmes éducatifs.

Très discutables, je le précise, y compris du point de vue de l'emploi et de l'efficacité économique. Qui peut prendre au sérieux le livret de compétences introduit au collège dans le but de mieux évaluer les acquis des élèves ?

 

Dans le travail comme dans le reste de l'existence, c'est avec de la pensée que l'on peut progresser, à tous les niveaux. La fonction de l'école, c'est tout simplement d'apprendre à penser, d'introduire à ce bonheur qu'est la maîtrise par l'esprit des choses que l'on fait, quelles qu'elles soient. C'est, de très loin, la démarche la plus efficace. L'illusion du moment est de croire qu'on obtiendra de meilleurs résultats pratiques en abandonnant cette dimension humaniste.

 

P. M. : Je suis entièrement d'accord avec Marcel Gauchet sur l'importance d'une mobilisation politique sur la question de l'éducation, qui dépasse d'ailleurs celle de l'école. Les programmes éducatifs des deux principaux partis politiques français ne proposent rien de plus que de nouvelles réformes scolaires : il n'y est nullement question de la famille, du rôle des médias, de la présence des adultes dans la ville, des relations transgénérationnelles...

 

Marcel Gauchet et Philippe Meirieu, alors que vous appartenez à des mouvances différentes, vous avez cherché à dépasser l'opposition entre "pédagogues" et "républicains", cette vieille querelle qui divisait les soi-disant partisans des savoirs de la transmission et ceux qui prônaient l'exclusive transmission des savoirs. Est-ce le signe de la fin d'un clivage tenace mais sclérosant ?

 

M. G. : L'opposition entre pédagogues et républicains me semble derrière nous. Je m'en félicite, car j'ai toujours travaillé à la dépasser. La divergence très relative entre Philippe Meirieu et moi-même tient simplement à la différence de point de départ. Philippe Meirieu part de la pédagogie, là où je pars d'une préoccupation plus politique.

 

Il est certes important de connaître le patrimoine pédagogique, mais je suis peut-être plus sensible que Philippe Meirieu au caractère inédit de la situation. Aucun discours hérité ne me semble immédiatement à la hauteur de la réalité scolaire dont nous faisons aujourd'hui l'expérience.

 

P. M. : A l'heure actuelle, l'essentiel est d'inventer une école qui soit délibérément un espace de décélération, un lieu d'apprentissage de la pensée et d'expérience d'un travail collectif solidaire. Or, sur ces questions, le patrimoine pédagogique m'apparaît d'une extrême richesse. Le clivage politique, quant à lui, se situe entre ceux qui chargent l'école de transmettre une somme de savoirs techniques garantissant à terme l'employabilité du sujet, et ceux pour qui l'école a une vocation culturelle qui dépasse la somme des compétences techniques qu'elle permet d'acquérir.

 

C'est là une question de société qui appelle un véritable débat démocratique.

 

Nicolas Truong - http://www.lemonde.fr/

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2 décembre 2013 1 02 /12 /décembre /2013 10:58

Un enfant, un parent, un ami proche qui tombe, gravement, malade, cela touche tout l'entourage. Qui bascule à son tour dans l'univers de la maladie. Comment traverser cette épreuve ? Comment aider au mieux celle ou celui qui affronte la maladie ? Le psychiatre Christophe Fauré est spécialisé dans l'accompagnement des malades et de leur famille. Auteur notamment de “Vivre auprès d’un proche très malade ”, il nous apporte ses conseils.

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Le cancer, une maladie lourde de conséquences

 

Comment accueillir la maladie de l'autre ?

 

Lorsque son enfant, son conjoint ou un parent proche, tombe gravement malade, il faut être conscient que c'est toute la vie du couple, de la famille qui va basculer. La maladie impose en effet ses contraintes, ses rythmes, son univers, médical et hospitalier.

 

Il est dès lors très important d'anticiper ces bouleversements afin de s'organiser, matériellement comme psychologiquement. Mais à l'annonce d'un cancer, d'un Alzheimer, ou de tout autre mal, s'enclenchent souvent des mécanismes puissants de protection. Le patient peut avoir tendance à minimiser ce qui lui arrive, voire, y opposer un déni total. Il peut aussi opérer une profonde régression, en refusant dès le départ de se battre, d'affronter le mal. Autre parade : l'isolation. Le malade occulte l'angoisse provoquée par la maladie, se coupe de ses émotions et arrive ainsi à parler avec un détachement stupéfiant de ses examens, traitements ou opérations diverses...

 

Il est très important, de la part de l'entourage, de comprendre et surmonter ces mécanismes de protection. Afin de mieux se préparer. Entrer dans la maladie, c'est ouvrir une parenthèse sans savoir quand ou comment elle se refermera. On sait que l'on en a pour longtemps. Et il faut très vite se convaincre que l'on ne pourra pas y arriver tout seul. Chacun aura ses limites, physiques, psychiques et matérielles. Il est donc primordial de les accepter et d'instaurer un dialogue et une écoute permanente avec le malade.

 

Comment aider le malade du mieux possible ?

 

Soyons lucides : la qualité de l'accompagnement d'un malade dépend de la qualité de la relation que l'on vivait auparavant, surtout au niveau du couple. Mais la maladie génère des pièges qu'il faut savoir éviter.

 

Il est notamment primordial de laisser ou de restituer au malade au patient sa capacité à décider. La maladie grave induit une série de deuils successifs pour celui qui en souffre : perte de son intégrité physique, perte éventuelle de son travail, altération de sa fonction au sein de la famille, diminution de son autonomie... Cette blessure narcissique est très éprouvante à vivre. Le malade doit donc toujours être considéré comme une personne à part entière, capable de prendre des décisions, ou, si son état ne le permet pas, qui doit être associée au maximum à ces prises de décisions. Faire des choix à sa place, ce n'est ni l'épargner ni le soulager, c'est l'infantiliser.

 

Attention aussi à la fusion toujours possible : à trop faire corps avec le malade, on détruit la distance nécessaire qu'il faut maintenir avec lui. Or, c'est cette distance qui permet de garder la tête froide et qui permet de rester utile et efficace.

 

La maladie grave est une épreuve douloureuse, comment ne pas se laisser submerger ?

 

En admettant cette réalité : vous ne pourrez pas tout faire tout(e) seul(e). Une maladie grave est une épreuve souvent longue dans laquelle il est nécessaire d'avoir tout un réseau sur lequel s'appuyer. Le réseau des proches bien sûr, amis et parents. Un deuxième cercle, constitué des copains, des voisins... Et un troisième réseau, celui des soignants, des associations ou des éventuels groupes de paroles.

 

Pour être efficace auprès de celui qui est malade, il faut combattre deux idées très toxiques : “je vais me débrouiller” et “si je demande de l'aide, ils vont penser que je ne suis pas à la hauteur”. Dans ces circonstances, il est bon de laisser un peu son amour-propre de côté. Se sacrifier pour l'autre n'est jamais une bonne chose et ne permet pas de tenir sur la distance.

 

Quand on vit la maladie d'un proche, plusieurs sentiments vous agitent : la peur, la douleur, la peine, mais aussi la colère d'une situation que l'on n'a pas choisie, que l'on subit. On en veut à l'autre d'être entraîné(e) dans cette “autre vie”, de se voir soudain confronté(e) à la souffrance, voire à la mort.

 

Tous ces ressentis sont normaux, il ne faut pas en éprouver de honte, mais il faut avoir quelqu'un à qui le dire. Des amis intimes, les groupes de parole d'une association ou un professionnel. Une thérapie de soutien s'avère souvent très bénéfique. Surtout si un pronostic vital est engagé.

 

Enfin, parler, maintenir une communication vraie avec celui que l'on aime et qui souffre, aide énormément et débouche souvent sur de véritables trésors : on se révèle l'un à l'autre, on s'apprend l'un à l'autre et l'on redécouvre ensemble l'essentiel.

 

Laurence Ravier - www.psychologies.com

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30 novembre 2013 6 30 /11 /novembre /2013 08:08

A l'heure du libre consentement, par la plupart des citoyens, à de nouvelles formes d'esclavage moderne... Où les plaisirs addictes et les écrans de toutes sortes pervertissent l'âme et les valeurs qui ont faits de nous des êtres libres... A l'heure où l'urbanisation et la normalisation des pensées anéantissent l'esprit critique des individus, dans le seul but de les infantiliser et de téléguider leurs émotions vers le "tous contre tous"... A l'heure où les universités se fourvoient dans une logique économique où les savoirs sont soumis aux seuls diktats des libertariens fondamentalistes... Je rappelle l'histoire de ces héros courageux de la résistance, qui [contrairement aux fourbes et aux lâches, aux delà des titres et des récompenses symboliques, au-delà d’une intelligence sacrifiée sur l’autel de la bêtise la plus abjecte] ont su donner de leurs vies pour sauver "le bien, le beau, le vrai", ces précieuses qualités qui sont le sens authentique de la vie et qui forment cette maturité noétique qui nous manque tant aujourd'hui !

 

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Jean Moulin - L'incarnation du courage face à l'inconsistance des individus réifiés

 

Origine de la résistance et biographie de la vie de Jean Moulin : Grand résistant mort sous la torture des collabos et des partisans de la Gestapo nazis.

 

Si l’on date la résistance extérieure, la France libre du 18 juin 1940, jour où le général de Gaulle a prononcé son premier discours de Londres affirmant que la France avait perdu une bataille, mais non la guerre, on ne date pas la résistance intérieure. Cette résistance est le fait d’hommes qui refusent l’occupation allemande et la défaite des armes. À une immense majorité, les Français bousculés sur les routes de l’exode avaient donné leur adhésion au maréchal Pétain. Le chef de l’État s’engage successivement dans la « révolution nationale » des Juillet 1940, dans la « collaboration » avec l’Allemagne (Montoire, octobre. 1940), puis dans la lutte contre la « dissidence » et la Résistance et dans le Service du travail obligatoire (S.T.O.) en Allemagne : chacune de ces étapes pousse un nombre croissant de Français au refus, puis au combat.

 

 L’occupation de la zone sud, en novembre 1942, amènera l’extension de la résistance dans cette zone et permettra paradoxalement l’unification progressive des mouvements des deux zones, dans une opposition politique et militaire tout ensemble à l’occupation nazie et au régime de Vichy. En zone sud, des Août 1940, Henri Frenay avait publié son premier manifeste, puis fondé le Mouvement de libération nationale (M.L.N.) ; celui-ci devient le mouvement Combat en 1941 (avec Claude Bourdet, François de Menthon, Pierre-Henri Teitgen, Georges Bidault) ; d’autres mouvements se créent dont, parmi les plus importants, Libération (novembre 1940) et Franc-Tireur (1941).

 

Leurs tendances unissent socialistes et militants d’action catholique. Si l’action directe reste longtemps limitée, la pensée d’une république nouvelle, aussi opposée à Vichy qu’à la IIIe République, s’élabore. Une résistance non militaire apparaît avec des mouvements comme Témoignage chrétien, commun aux deux zones. Une résistance intellectuelle se manifeste, à travers la parution, d’abord très limitée, d’une presse clandestine (Les Lettres françaises, édition de Minuit). En zone nord, occupée dès 1940, le caractère militaire de la résistance l’emporte. Les principales organisations sont : Organisation civile et militaire, Ceux de la résistance, Ceux de la libération.

 

Dès 1940 s’étaient créés des réseaux de renseignement liés à Londres. En octobre 1941, la résistance extérieure crée le Bureau central de renseignement et d’action militaire (B.C.R.A.) ; elle compte des hommes tels que Passy, Soustelle, Brossolette et Manuel, et va coordonner les envois d’armes et d’agents de liaison en France occupée. C’est là que commence la guerre des ondes : « Les Français parlent aux Français », de Londres, animée par un groupe de journalistes (Maurice Schumann, Jean Marin, Pierre Bourdan).


Affiche rouge. 

 

Placardée dans toute la France en février 1944 par l’occupant allemand pour attiser la haine raciste contre les « terroristes étrangers », cette affiche de propagande nazie a inspiré le célèbre poème d’Aragon L’Affiche rouge, interprété plus tard par Léo Ferré. 
 
La Résistance française

 

La Résistance française est née du refus d’abdiquer d’une poignée d’hommes et de femmes. Depuis Londres, les voix de la France libre sont diffusées chaque jour sur les ondes de la B.B.C. Elles sont tout d’abord peu entendues. Une partie de l’empire colonial d’Afrique se rallie pourtant aux Forces françaises libres dès 1940, malgré les échecs essuyés au Maroc, en Algérie et au Sénégal. En 1940 et 1941, plusieurs organisations clandestines se forment pour résister à l’ennemie nazis. 
 
D’abord paralysé par le pacte germano-soviétique, le Parti communiste clandestin n’avait pas tardé à durcir son opposition ; à partir de juin 1941, il jette toutes ses forces dans la résistance. Son organisme, le Front national, s’efforce de rallier des hommes d’autres tendances. Par des actions de sabotage et de provocation à l’égard des troupes d’occupation, ayant pour but de créer un climat d’insécurité, la résistance communiste amène les occupants à prendre des mesures de répression de plus en plus sévères (exécutions d’otages et déportations) ; décimée, elle y gagne pourtant de faire connaître son existence, sa force, et elle se voit sans cesse renforcée d’adhésions et de recrues nouvelles.

 

La propagande même des nazis allemands et des fascistes français, désignant le communisme comme l’ennemi principal, renforce encore son importance et son rôle. Le gouvernement de Vichy adopte des mesures de plus en plus impopulaires, telle la création de tribunaux d’exception s’érigeant pour condamner les résistants appréhendés ; une part grandissante de l’opinion, qui n’a pas participé à la résistance patriotique des premiers mois, juge sévèrement cette répression et assure aux résistants une sympathie qui va de plus en plus vers la complicité. La résistance communiste n’a aucun lien avec Londres et garde jusqu’au bout une indépendance aussi bien idéologique que militante. Pourtant, de Gaulle s’attache à unifier sous sa direction les mouvements de résistance.

 

Jean Moulin, parachuté en France le 1er janvier 1942, réalise en partie cette union et constitue le Mouvement uni de la résistance (M.U.R.). En 1943, encouragé par le ralliement de certains leaders politiques, de Gaulle provoque à Alger la réapparition des anciens partis, cela souvent contre les vœux des résistants. Le Conseil national de la résistance, qui tient sa première réunion à Paris, rue du Four, le 27 mai 1943, comprend des représentants des principales tendances : Parti communiste, Parti socialiste, Parti radical, démocrates chrétiens, tenants de la droite classique, auxquels se joignent des représentants syndicaux. En 1943, l’attente de la libération par les armées alliées est quasi générale, même chez ceux qui demeurent partisans du maréchal Pétain. En France, le S.T.O. fournit les maquis en jeunes réfractaires : se cachant dans les régions peu accessibles et dans les contrées où une végétation abondante masquait les mouvements de groupes (Savoie, Dauphiné, Limousin, Morvan, Jura, Auvergne), ils sont aidés puis pris en main par les mouvements de résistance qui leur fournissent vivres et papiers puis, les incluant dans l’action directe, leur procurent encadrement, armes et munitions.

 

À travers les maquis, la résistance prend elle-même des formes diverses, selon les tactiques adoptées. Créé en 1941 et ayant aux côtés des dirigeants communistes (Tillon, Joliot, Wallon, Pierre Villon) des hommes tels que Louis Marin et Jacques Debû-Bridel, le Front national engage ses maquis dans une action de harcèlement des forces allemandes et de la milice. À la différence, le Mouvement uni de la résistance et l’Organisation de résistance de l’armée préféraient conserver leurs maquis en réserve pour une action généralisée et concentrer leurs effets sur la transmission de renseignements aux Alliés et aux F.F.L. Les maquis de la résistance, interviennent en force à partir du débarquement allié en Normandie (juin 1944) ; soit en démantelant les réseaux de communications ferroviaires utilisés par les Allemands, soit en acceptant des engagements sur positions afin d’opérer une fixation des forces ennemies. Dans les actions de cette dernière sorte, les pertes subies furent souvent importantes. Plateau des Glières (Février et Mars 1944) où cinq cents maquisards sont attaqués par vingt mille soldats de la Wehrmacht ; mont Mouchet (juin 1944) où trois mille F.F.I. acceptent le combat ; Vercors, enfin (juin-août 1944), où sept cent cinquante des trois mille cinq cents hommes de la Résistance tombèrent dans un combat qui les opposa à deux divisions allemandes.


Une minute de silence


À Londres, en octobre 1941, le général de Gaulle et les cinq membres du Comité national français, ancêtre du Comité français de libération nationale, observent une minute de silence en hommage aux otages français de Châteaubriand exécutés.
 
Le général de Gaulle en 1944. 


Le général Charles de Gaulle (1890-1970), président du gouvernement provisoire de la République française, s’adresse à l’Assemblée nationale et s’installe à Alger, le 18 juin 1944. 
  Sabotages. Des membres de la Résistance française, placent des charges explosives sur des voies ferrées, en 1944. De nombreux actes de sabotage, furent commis au moment du débarquement en Normandie pour gêner les manœuvres des Allemands.  
 
L’engagement tardif des patriotes.


Des Français se pressent en foule à la mairie de Laval (Mayenne) afin de se déclarer membres de la Résistance après la libération de la ville par les forces américaines le 6 août 1944.  
 
Au cours du second semestre de 1943, les territoires de l’Empire français et les forces armées extérieures et intérieures étaient devenus dépendants du Comité français de libération nationale créé en juin et celui-ci prenait, le 4 avril 1944, le nom de Gouvernement provisoire de la République française. Dès lors, la Résistance formait un tout organique et recevait une nouvelle force de son insertion même dans la nouvelle structure politique. Le G.P.R.F. comprend une assemblée consultative au sein de laquelle on trouve des représentants de tous les mouvements de résistance ; aussi, au printemps 1944, l’union s’accomplit progressivement entre l’Armée secrète, l’Organisation de résistance de l’armée (O.R.A.) et les Francs-Tireurs et Partisans (F.T.P.).

Le général Koenig est nommé chef des Forces françaises de l’intérieur (F.F.I.) ; quant au C.N.R. il établit un programme politique, économique et social, et réclame une sévère épuration qui devait guider l’élaboration du nouveau gouvernement. En tout état de cause, la Résistance est unanime dans son refus d’un retour à la IIIe République. Mais la résistance la plus significative reste, peut-être, la résistance quotidienne souvent passive de quantité de Français qui s’efforcèrent de gêner et de contrarier l’ennemi par des actions et des omissions individuelles multipliées, qui montrent l’opposition d’un peuple à son asservissement.

Jean Moulin est né le 20 juin 1899 à Béziers, dans une famille de militants démocrates. Son père, franc-maçon, professeur et conseiller général radical-socialiste, l’incite à entrer dès l’âge de dix-huit ans dans l’administration préfectorale. Il met ensuite à profit ses relations dans le monde politique pour favoriser la carrière de son fils.


Jean Moulin, préfet.  


Après une courte mobilisation à la toute fin de la Première Guerre mondiale, Jean Moulin débute comme attaché au cabinet puis sous-chef de cabinet du préfet de l’Hérault (1917). Il est tour à tour chef de cabinet du préfet de la Savoie (1922), sous-préfet d’Albertville (plus jeune sous-préfet de France, 1925), de Châteaulin (1930), de Thonon (1933), secrétaire général de la préfecture de la Somme (1936), préfet de l’Aveyron (plus jeune préfet de France, 1937), puis d’Eure-et-Loir (1939). Son amitié avec Pierre Cot, jeune et brillant député radical, lui ouvre la porte des cabinets ministériels. À plusieurs reprises, il est chef de cabinet de Cot, au secrétariat d’État aux Affaires étrangères (1932), au ministère de l’Air (1936), puis du Commerce (1938). En tant que chef de cabinet du ministre de l’Air du Front populaire, à partir de l’été de 1936, il prend part aux livraisons clandestines d’armes et d’avions au gouvernement républicain lors de la guerre d’Espagne.

La réputation du préfet Jean Moulin auprès de son ministère de tutelle est celle d’un excellent administrateur, à tel point que le ministre de l’Intérieur du gouvernement formé le 17 juin 1940 par le maréchal Pétain à la suite de la demande d’armistice, envisage de le nommer directeur de la Sûreté. Projet abandonné lorsqu’on apprend son arrestation le soir même par le commandant allemand qu’il a dû accueillir dans sa préfecture de Chartres. Pour échapper aux brutalités qui lui sont infligées dans le but de lui faire avaliser un texte raciste et mensonger à l’égard des troupes coloniales, Jean Moulin tente de se suicider dans la nuit du 17 au 18 juin 1940. Soigné, libéré, il reprend ses fonctions à la tête de son département occupé, faisant preuve d’opiniâtreté tant à tenir tête aux Allemands et à protéger ses administrés qu’à remettre son département en état de marche. En vertu de ses opinions de gauche et de sa personnalité marquée, il est révoqué par le maréchal Pétain et quitte l’administration le 16 novembre 1940.


Sous l’autorité du général de Gaulle . 


Dès les premiers mois de l’Occupation, Jean Moulin a utilisé sa fonction pour se renseigner sur la Résistance naissante et se forger une fausse identité lui permettant de quitter la France pour chercher à l’étranger une aide pour les réfractaires. Les mois suivant sa révocation, il intensifie ses activités clandestines, rencontrant nombre de pionniers, dont Henri Frenay et François de Menthon. Son inventaire est modeste, mais il sait en dresser, dans un texte intitulé Rapport sur l’activité, les projets et les besoins des groupements constitués en France en vue de la libération du territoire national, un tableau sélectif qui présente les perspectives d’une résistance susceptible d’organisation et d’extension.
 
Jean Moulin quitte la France le 9 septembre 1941, muni d’un visa pour les États-Unis. Il choisit pourtant de se rendre en Angleterre, où il arrive le 20 octobre, via l’Espagne et le Portugal. Il se présente en émissaire des mouvements de résistance et sollicite l’aide des Britanniques et de la France libre. Sa rencontre avec de Gaulle, le 25 octobre 1941, est décisive. Alors qu’il ignorait presque tout de la France libre, Moulin est convaincu par le projet du général de maintenir la France dans la guerre au nom d’une légitimité supplantant la légalité de Vichy. Sa vision de la résistance métropolitaine emporte l’adhésion de De Gaulle, qui le charge, sous son autorité, d’une triple mission de propagande, d’unification militaire et de fédération politique des mouvements de Résistance de la zone libre.
 
Parachuté en France le 2 janvier 1942, Jean Moulin reprend les contacts établis avant son départ, distinguant trois groupes auxquels il apporte financement et soutien : Combat, Libération-Sud et Franc-Tireur.
 
Sa première tâche consiste, non sans difficulté, à faire reconnaître à des groupes nés indépendamment de la France libre l’autorité du général de Gaulle. Jean Moulin crée aussi des services centraux : radio, opérations aériennes, bureau de presse, comité général des experts (C.G.E.), noyautage des administrations publiques (N.A.P.) et exécute, malgré de nombreux obstacles, sa mission de coordination technique et d’unification militaire. Le 2 octobre 1942, le Comité de coordination, dont il est président, est créé à Londres, regroupant les trois mouvements sous les ordres du général de Gaulle.


Le Conseil de la Résistance.  


Ces résultats, difficilement acquis, sont brutalement remis en cause après le débarquement anglo-américain du 8 novembre 1942 en Afrique du Nord, les Américains cherchant à évincer de Gaulle au profit de l’amiral Darlan (13 novembre), puis du général Giraud (26 décembre).


Pour assurer de Gaulle du soutien des résistances métropolitaines et proclamer à l’extérieur la légitimité démocratique de celui-ci, Jean Moulin travaille au processus qui aboutit à la création du Conseil de la Résistance, institution clandestine représentative des mouvements de Résistance des deux zones (huit mouvements), des fractions résistantes des partis politiques de la IIIe République (six partis) et de deux syndicats. Lors de sa première réunion, le 27 mai 1943, le Conseil de la Résistance (connu par la suite sous le nom de Conseil national de la Résistance, C.N.R.) adopte une motion confiant l’autorité militaire à Giraud et l’autorité politique à de Gaulle. Parallèlement est mise sur pied, au cours du premier semestre de 1943, une Armée secrète, dont la direction est confiée au général Delestraint.
 
L’institutionnalisation de la Résistance et sa soumission à l’autorité du général de Gaulle ont suscité de terribles affrontements au sein de la Résistance métropolitaine et entre ses chefs et la France libre. Jean Moulin, nommé président des comités de coordination de zone sud et nord et du C.N.R., et commissaire national en mission (titre équivalent à celui de ministre), cristallise sur sa personne les dissensions internes, qui susciteront un certain nombre d’imprudences, aux conséquences parfois tragiques, de la part de dirigeants de mouvements, pris dans le tourbillon de leurs batailles. Ce sont ces imprudences qui, jointes à la trahison, mènent à l’arrestation de Jean Moulin à Caluire, le 21 juin 1943, par les services de la Gestapo de Lyon dirigés par Klaus Barbie.
 
Trahi une seconde fois en prison, Jean Moulin est identifié et torturé. Il tente probablement de se suicider pour échapper à ses tortionnaires. C’est dans un état désespéré qu’il est provisoirement transféré à Paris puis dirigé vers l’Allemagne. Il meurt durant le trajet. Son décès est déclaré en gare de Metz à la date du 8 juillet 1943.


Les polémiques.  


Jean Moulin est la cible périodique de calomnies. Celles-ci se sont alimentées des écrits d’Henri Frenay, chef du mouvement Combat, qui prétendit, dès 1950, que Jean Moulin avait « favorisé » les communistes dans la Résistance. En 1973, il reprit cette thèse dans ses souvenirs (La nuit finira), puis la systématisa en 1977, dans un essai polémique, L’Énigme Jean Moulin.
 
Discréditer le symbole de la Résistance (le général de Gaulle fit entrer Moulin en 1964 au Panthéon où François Mitterrand lui rendit hommage lors de sa prise de fonction en 1981), c’est discréditer, d’une part, de Gaulle, et, d’autre part, la Résistance et les valeurs de combat, de sacrifice et de liberté qu’ils incarnent.
 
La répartition de l’argent et des armes entre les composantes de la Résistance, le choix de ses collaborateurs, la composition des institutions qu’il créa, les directives militaires et politiques qu’il appliqua prouvent, à la lecture des archives, que Jean Moulin n’a pas favorisé les communistes et s’est même appliqué à les contenir, afin d’assurer l’autorité exclusive du général de Gaulle sur l’ensemble des Résistances. Frenay, d’ailleurs, n’a jamais prétendu démontrer le crypto-communisme de Jean Moulin, mais seulement exprimer son « intime conviction ». Toutefois, les glissements successifs de son raisonnement, l’utilisation de moins en moins nuancée qui en fut faite, et l’autorité morale dont il jouissait en tant qu’ancien chef de la Résistance ont non seulement donné du poids à son soupçon, mais, ont fourni des arguments à ses suiveurs. Ceux-ci s’abritent derrière lui pour calomnier Jean Moulin, jusqu’à en faire un espion soviétique voire, à l’opposé, un agent américain.
 
 La métamorphose des résistances en la Résistance, que Jean Moulin a soumise à l’autorité du général de Gaulle, évita pourtant à la France, lors de la Libération, l’humiliation d’une occupation alliée et la tragédie d’une guerre civile qui ensanglanta d’autres pays d’Europe occupés par les Allemands.

 

Par Paul Vaurs - http://www.innovation-democratique.org/

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 11:16

L’hyperréalité caractérise la façon dont la conscience interagit avec la réalité. Tout particulièrement, quand la conscience perd sa capacité à distinguer la réalité de l’imaginaire et commence à s’engager avec ce dernier sans comprendre ce qu’il fait, elle s’introduit alors dans le monde de l’hyperréel. La nature du monde hyperréel se caractérise par une amélioration de la réalité. Jean Baudrillard, Daniel Boorstin, Albert Borgmann et Umberto Eco sont de célèbres théoriciens de l’hyperréalité. Selon Baudrillard, le monde dans lequel nous vivons a été remplacé par une copie du monde, nous y recherchons des stimuli simulés et rien de plus.  

Par Néo trouvetout, blogueur ingénieux.

 

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 Jean Baudrillard - Sociologue et philosophe

 
SIMULACRE ET SIMULATIONS

 
Il est vain de tenter de résumer l’oeuvre de Baudrillard en quelques lignes, mais on pourra ici au moins s’essayer à une définition des termes simulation et simulacre.

La simulation se veut l’expérience du réel à travers ce qui nous en est rapporté (soit l’essentiel de l’expérience du réel tel que la vit un sujet contemporain), le simulacre en étant la représentation figurée (l’objet, l’image). Selon Baudrillard, les sociétés se sont à ce point reposées sur ces simulations, se sont à ce point constituées sur la base de ces signes de la réalité, qu’elles en ont perdu le contact avec le monde réel. Le simulacre, d’abord reconnu comme représentation du réel, s’est vu multiplié, systématisé par l’avènement industriel, contribuant à brouiller les repères entre l’image et ce qu’elle représente (ce qu’elle simule), jusqu’à ce que,  » dans la société post-moderne, le simulacre ne finisse par précéder et déterminer le réel.  »

 » Il ne s’agit plus d’imitation, ni de redoublement, ni même de parodie, mais d’une substitution au réel des signes du réel, c’est-à-dire d’une opération de dissuasion de tout processus réel par son double opératoire, machine signalétique métastable, programmatique, impeccable, qui offre tous les signes du réel et en court-circuite toutes les péripéties.  » (Jean Baudrillard. Simulacres et Simulation – Galilée 1981)

 

« VALEURS SIGNES » ET SOCIETE DE CONSOMMATION

 

Plusieurs aspects de l’hyperréalité peuvent être pensés comme une « réalité par proxy ». Par exemple, un amateur de films X vit dans le monde non-existant de la pornographie. Même si celle-ci n’est pas une description précise du sexe, pour les personnes qui les regardent, la réalité du sexe devient quelque chose de non-existant. Autre exemple : le M de McDonalds crée un monde avec la promesse d’une quantité sans fin de nourriture identique. En réalité, le M ne représente rien : la nourriture produite n’est ni infinie ni identique.
Les objets de consommation ont une valeur-signe, ce qui signifie qu’ils indiquent quelque chose au sujet du propriétaire, dans le contexte d’un système social (voir Baudrillard). Par exemple, un roi qui porte une couronne utilise celle-ci comme un signe indiquant qu’il est le roi (alors que dans la réalité, elle est dénuée de sens). La valeur-signe n’a pas de sens inhérent ou de valeur au-delà de ce qu’il convient. Ainsi, par exemple, les bijoux de la couronne ne valent rien jusqu’à ce que quelqu’un soit d’accord pour les vendre pour tant de diamants ou de pièces d’or. Alors que les valeurs-signes deviennent plus nombreuses, l’interaction devient de plus en plus basée sur des choses sans signification intrinsèque. Ainsi, la réalité devient de moins en moins importante, alors que l’échange des signes prend l’ascendant. Si des grains de sable sont mis un par un sur une table, à un certain moment arbitraire, les grains deviennent un tas de sable. De la même façon, quand la valeur-signe devient plus complexe, la réalité se transforme en hyperréalité et il devient alors de plus en plus difficile de distinguer ce qui est « réel ».

 

L’hyperréalité est significative comme paradigme éclairant la condition culturelle américaine. La consommation, parce qu’elle dépend de la valeur-signe (par exemple, une marque X montre que untel est à la mode, la voiture Y que untel est riche), peut être vue comme un facteur contribuant à la création de l’hyperréalité ou de la condition hyperréelle. L’hyperréalité trompe la conscience en la détachant de tout engagement émotionnel réel. A la place, elle opte pour des simulations artificielles et des reproductions sans fin d’apparences fondamentalement vides. Par essence (bien que Baudrillard lui-même s’opposerait à l’usage de ce mot), on trouve mieux l’épanouissement ou le bonheur dans la simulation et l’imitation d’un simulacre de la réalité, plutôt que confronté à une réalité « réelle ».

 

LIEUX HYPERREELS

 

Un lieu hyperréel, tel qu’un casino à Las Vegas, donne au sujet l’impression qu’il marche dans un monde imaginaire où tout le monde est en train de jouer. Le décor n’est pas authentique, tout est copie, l’ensemble ressemble à un rêve. Le casino, en revanche, encaisse l’argent et ceci n’est pas un rêve, mais on est plus disposé à le dépenser lorsque la conscience ne comprend pas réellement ce qui se passe. Autrement dit, bien que l’on puisse intellectuellement comprendre ce qui se passe dans un casino, la conscience n’arrive pas à concevoir la réalité de l’argent dépensé dans ce monde si loin du réel. Il est dans l’intérêt des décorateurs d’accentuer le caractère non-authentique du lieu, de sorte que l’expérience entière semble fausse. Le casino s’enrichit en faisant de l’argent un objet dénué de valeur intrinsèque. Il y a quelques temps sortait une application qui représente ce qui se fait de « mieux » dans le domaine de l’Hyperralité et l’on s’aperçoit combien les fabricants rivalisent d’ingéniosité pour nous y enfermer. On pouvait lire ceci sur un site traitant d’actualité des mobiles :

Qui ne s’est pas déjà perdu à Disneyland ou a fait un grand détour pour aller de Frontierland à Adventureland? (baissez tous la main). Soyez heureux, cela ne vous arrivera plus car la nouvelle application iPhone DisneyLand Paris est là pour vous aider. Outre un affichage du plan du parc, vous pourrez être guidé vers le point d’intérêt (POI) de votre choix (plus de 250) grâce à la réalité augmentée.

Et l’auteur poursuit : « je trouve l’idée sympa et on va voir de plus en plus d’applications de ce type et je pense surtout aux magasins/grandes surfaces. Il est toujours difficile de se repérer dans les rayons, acheter un paquet de pâtes devient un vrai parcours du combattant lorsque l’on ne connait pas l’endroit, et avec la réalité augmentée on pourrait enfin être guidés facilement (rappelez-vous des prototypes de caddies avec écran intégré) et pour les vendeurs un plus énorme : Mise en avant de promotions, proposition de produits similaires, … Les années à venir sont prometteuses » (Source : http://www.la-realite-augmentee.fr)

Effectivement tout est fait pour que nous évoluions comme un poisson dans l’eau ou plutôt dans un aquarium puisque bien évidemment tout est fait pour que nous restions dans les chemins balisés.

 

LE SEXE . UNE REALITE NON ASSUMEE ?

 
L’amour, la haine, etc…, ne sont pas en nous mais provoqués intentionnellement de l’extérieur. Nous croyons que c’est nous. Il en va de même pour le sexe qui est, avec l’argent, l’éducation et la politique, l’outil de contrôle principal. La progression de la pornographie, par la télévision et internet, est récente… les plus jeunes sont touchés, et très tôt dans les écoles, la question est abordée alors que les enfants ne comprennent pas même de quoi il s’agit. Le sexe occupe nos esprits, nous le voyons partout, nous en parlons et en pensons tout le temps. Or, tout est faux, le plaisir est « programmé » (mind control). Le « point G »… est entre le compas et l’équerre.

 

DE PLUS EN PLUS D’INFORMATIONS DE MOINS EN MOINS DE SENS

 

Selon Jean Baudrillard, « Nous sommes dans un univers où il y a de plus en plus d’information, et de moins en moins de sens. Trois hypothèses :
- ou l’information produit du sens (facteur néguentropique), mais n’arrive pas à comprendre la déperdition brutale de signification dans tous les domaines.
- Ou l’information n’a rien à voir avec la signification. C’est autre chose, un modèle opérationnel d’un autre ordre, extérieur au sens et à la circulation du sens proprement dit.
- Ou bien, au contraire, il y a corrélation rigoureuse et nécessaire entre les deux, dans la mesure où l’information est directement destructrice, ou neutralisatrice du sens et de la signification. La déperdition du sens est directement liée à l’action dissolvante, dissuasive, de l’information des media et des mass-media.
 

 
C’est l’hypothèse la plus intéressante, mais elle va à l’encontre de toute acception reçue. Partout la socialisation se mesure par l’exposition aux messages médiatiques. Est désocialisé, ou virtuellement asocial celui qui est sous-exposé aux media. Partout l’information est censée produire une circulation accélérée du sens, une plus-value de sens homologue à celle, économique, qui provient de la rotation accélérée du capital. L’information est donnée comme créatrice de communication, et même si le gaspillage est énorme, un consensus général veut qu’il y ait cependant au total un excédent de sens, qui se redistribue dans tous les interstices du social (…). Nous sommes tous complices de ce myhte. C’est l’alpha et l’oméga de notre modernité, sans lesquels la crédibilité de notre organisation sociale s’effondrerait. Or, le fait est qu’elle s’effondre, et pour cette raison même. Car là où nous pensons que l’information produit du sens, c’est l’inverse.

 

L’information dévore ses propres contenus. Elle dévore la communication et le social, et ceci pour deux raisons :
 
1. Au lieu de faire communiquer, elle s’épuise dans la mise en scène de la communication. Au lieu de produire du sens, elle s’épuise dans la mise en scène du sens. Gigantesque processus de simulation que nous connaissons bien. L’interview non directif, la parole, les téléphones d’auditeurs, la participation tous azimuts, le chantage à la parole : « Vous êtes concernés, c’est vous l’événement, etc. » De plus en plus l’information est envahie par cette sorte de contenu fantôme, de greffe homéopathique, de rêve éveillé de la communication. Agacement circulaire où on met en scène le désir de la salle, anti-théâtre de la communication, qui, comme on sait, n’est jamais que le recyclage en négatif de l’institution traditionnelle, le circuit intégré du négatif. Immenses énergies déployées pour tenir à bout de bras ce simulacre, pour éviter la dissimulation brutale qui nous confronterait à l’évidente réalité d’une perte radicale du sens.
[...]
 
2. Derrière cette mise en scène exacerbée de la communication, les mass-media, l’information au forcing poursuivent une irrésistible destructuration du social. Ainsi l’information dissout le sens et dissout le social, dans une sorte de nébuleuse vouée non pas du tout à un surcroît d’innovation, mais tout au contraire à l’entropie totale. Ainsi les media sont effecteurs non pas de la socialisation, mais juste à l’inverse de l’implosion du social dans les masses. Et ceci n’est que l’extension macroscopique de l’implosion du sens au niveau microscopique du signe. « 

   

LA ROUTINES DU MONDE « moderne » ET SES HABITUDES

  
Est-il normal d’aller au tribunal pour ne pas avoir attaché sa ceinture de sécurité pour sa propre vie ? D’avoir des points… que certains même, achètent et vendent… des points d’un papier contre d’autres papiers ! Est-il normal de regarde la météo ? Est-il normal d’avoir peur de la pluie, même si l’on est en train de nager dans la mer… est-il normal d’aller se protéger de la pluie alors que l’on sait que dans l’eau… on est mouillé ? Nous payons la douche… tandis que la pluie est gratuite… et nous achetons un parapluie ! Est-il normal de trouver un quelconque bonheur à cette vie ? Car il n’y a aucun plaisir, seulement la croyance au plaisir ! Est-il normal de ressentir de la tristesse si « Noël n’est pas réussi » ? Est-il normal de considérer cela comme réel ? Noël qui doit évidemment tomber exactement le 24 à minuit… pas le 23 ou le 25 ! Est-ce normal de devoir acheter des cadeaux à cette occasion, puisque tout le monde le fait ? Est-ce normal de ne jurer que par le tic tac de la montre ? Papier, religion, sexe et télé ! Tout est illusion, tout cela ne sert à rien, que l’on vive 10 ou 100 ans… Qu’aimons-nous dans la vie ? Puisque nous dormons 8 heures et travaillons 8 heures, il y a peu de chances que nous répondions « dormir » ou « travailler ». Alors pourquoi ne faisons-nous pas ce que nous aimons 24h/24 ? Et pourquoi, à midi pile, nous avons faim lorsqu’il « faut » manger ? « Il faut que j’y aille, c’est ma pause ! » Pourquoi, dès qu’il fait froid l’on entend « Couvre toi ! » alors que la sensation de froid est toute relative et la plupart du temps implantée ? Pourquoi dit-on « le travail c’est la santé », « il n’y a pas de sot métier » ?

Exemples d’hyperréalité:


Une boisson énergétique avec un parfum qui n’existe pas (« zeste de baies sauvages glacées »)
La pornographie (plus sexe que le sexe lui-même)
Un sapin de noël en plastique qui ressemble plus à un vrai sapin de noël
La photo de magazine d’un top modèle qui a été retouchée par ordinateur
Un jardin parfaitement taillé (naturel comme hyperréel)
Toute version massivement promue de faits présents ou historiques
La Guerre du Golfe, dans la mesure où l’Amérique l’a comprise : Baudrillard, en fait, prétend que la Guerre du Golfe n’a jamais eu lieu
Beaucoup de villes et endroits du monde qui n’ont pas évolué en tant qu’endroits fonctionnels, mais avec une certaine base de réalité, comme s’ils étaient des créations ex nihilo : Disney World, Célébration en Floride ou encore Las Vegas.
Télé et films en général, dû à la création d’un monde d’imagination et à la dépendance que le téléspectateur engage dans ces mondes imaginaires.
Les programmes de « télé réalité » qui n’ont rien à voir avec la réalité.

 

Le simulacre n’est jamais ce qui cache la vérité
-c’est la vérité qui cache qu’il n’y en a pas.
Le simulacre est vrai.

 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Hyperr%C3%A9alit%C3%A9

http://nemesisnom.info/conspirations/dans-les-entrailles-du-monde-reel/

Un blog à dévouvrir: http://www.neotrouve.com/

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21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 12:40
Les conditions de la séparation mère-bébé lors de l'accouchement orientent les psychologues, psychanalystes et pédopsychiatres dans leurs thérapies d'enfants. 
 
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C'est en cherchant à comprendre pourquoi Yaël, 3 ans et demi, se réveillait régulièrement la nuit en criant «Je ne suis pas fatigué!» que Myriam Ott Rabiet, psychologue clinicienne à Maisons-Alfort, a eu l'intuition de demander aux parents du petit garçon comment s'était déroulée sa naissance. Encore bouleversée par ce qui s'était passé, la maman raconta que son enfant, quelques minutes après la délivrance, avait dû être ranimé et placé sous assistance respiratoire un court instant. «Rien de vraiment grave, mais j'ai ressenti à ce moment-là une peur panique insurmontable», précisait la mère. Et, la con­sultation se poursuivant, elle avouait qu'elle-même s'était levée plusieurs fois chaque nuit le premier mois pour vérifier si Yaël respirait toujours. «Nous en avons déduit que ce petit garçon ne se réveillait pas “pour rien” mais qu'il cherchait ainsi à rassurer sa mère pendant ces longues nuits», poursuit Myriam Ott Rabiet. Une déduction qui orienta la prise en charge de l'enfant.

 

Problèmes d'endormissement, troubles alimentaires, terreurs inexpliquées sont quelques-uns des symptômes qui incitent ainsi la plupart des professionnels de la périnatalité et de la petite enfance à se faire préciser les conditions de l'accouchement pour y trouver une formidable source d'interprétation. «Mais même trente ans après, ce peut être une piste à explorer, estime Lise Bartoli, psychologue clinicienne et hypnothérapeute. Des adultes qui souffrent de syndrome d'abandon et surtout d'un grand manque de confiance en eux-mêmes ont intérêt à revisiter ces premières heures de leur vie et les conditions dans lesquelles ils ont été accueillis.»

«Accueillis.» Le mot est lâché. S'il est un terme essentiel pour comprendre ce qui peut différencier la mise au monde du petit humain de celle réservée aux autres mammifères, c'est bien celui-ci. Un accueil qui ne doit pas se limiter à la compétence technique et médicale, mais qui prend en compte la dimension psychique de l'événement à la fois pour la mère, le père et l'enfant.

 

Les psychanalystes, notamment, et Françoise Dolto en particulier, ont insisté sur l'importance de considérer le tout juste né comme un véritable sujet. Ainsi, elle recommandait aux soignants d'être particulièrement attentifs aux paroles prononcées pendant l'accouchement, car ces conversations donneraient la «bande-son» primordiale que l'enfant garderait inconsciemment en mémoire toute sa vie «Les paroles qui ont été dites s'écrivent comme des destins», écrivait-elle dans Naître… et ensuite? (Éd. Stock 1982). Les «attention, c'est un nerveux celui-là!» et autres jugements intempestifs peuvent aussi marquer la mère à tout jamais car elle se trouve pendant le travail dans un état de réceptivité augmentée.

 

Odyssée virtuelle

 

«Ce qui est déterminant, c'est que soit préservé et maintenu le fil de cet accordage si particulier entre la mère et son enfant, explique Myriam Ott Rabiet. Parfois, s'il y a naissance prématurée, séparation brutale avec l'enfant, dirigé sous couveuse par exemple, ce lien structurant risque d'être endommagé. Il faudra trouver d'autres moyens ensuite pour retisser et favoriser l'attachement : moments de corps-à-corps, d'échanges de regards, bains de paroles des parents à destination du nouveau-né sont ainsi favorisés dans les services de grands prématurés.» Et la psychologue en est persuadée: «On a toujours l'occasion de restaurer une relation qui a été perturbée.»

 

Dans le cas de Yaël, il s'est agi d'intervenir à plusieurs niveaux : des jeux ont servi de médiateurs à Myriam Ott Rabiet pour aider l'enfant à libérer ces émotions ; des séances de dialogue avec ses parents ont permis à ceux-ci d'exprimer ce qu'ils avaient enduré à la naissance de leur fils; celles-ci ont été accompagnées de consignes éducatives car «leur implication en ce sens est alors déterminante», affirme la psychologue.

Lise Bartoli, elle, travaille à un niveau plus symbolique, ainsi qu'elle l'explique dans son livre L'Art d'apaiser son enfant (Éd. Payot). Le recours à l'hypnose pendant les séances avec ses patients lui permet de défaire ces représentations «engrammées» depuis leur naissance. «Je peux proposer au patient, et quel que soit son âge, de se visualiser dans une grotte, un endroit chaud et convivial. Peu à peu, je l'accompagne avec ma voix dans ce voyage. Il doit se représenter en marche vers la lumière, sortant de cette grotte.» Parfois, au cours de cette odyssée virtuelle, Lise Bartoli encourage le patient à rencontrer son père ou sa mère et à entamer un dialogue avec eux. Une manière de régler les non-dits ou les sentiments refoulés depuis les premières heures de leur existence? «Comme nous travaillons à un niveau très profond, celui de l'inconscient, ces séances ont un réel impact dans la vie de ceux qui s'y sont prêtés. C'est comme s'ils avaient pu rejouer leur naissance», assure la thérapeute.

 

«La venue au monde est un cocktail éminemment complexe»

 

INTERVIEW - Myriam Szejer est pédopsychiatre et psychanalyste consultant en néonatalogie à l'hôpital Antoine-Béclère de Clamart. Elle a dirigé, avec le Pr René Frydman, la publication de l'ouvrage collectif La Naissance (Éd. Albin Michel). 

 

Pourquoi la psychanalyse s'est-elle particulièrement intéressée à la naissance ?

 

 Parce que c'est un moment évidemment fondateur : c'est là que se redistribuent toutes les cartes de la filiation et l'organisation de la famille. Surtout, on a très tôt pensé que la séparation initiale de la mère et de l'enfant laissait des traces sur le psychisme de l'individu qui vient au monde. C'est notamment toute la constitution du narcissisme primordial, et donc de la confiance en soi, qui en découle. Mais avec les progrès technologiques, on sait désormais qu'avant même la naissance, de nombreux déterminants sont déjà en place.

 

Par exemple ?

 

On est revenu sur une certaine vision idéale de la fameuse fusion mère-enfant pendant les mois de grossesse. Aujourd'hui, on observe plutôt la collaboration très sophistiquée de deux organismes indépendants l'un de l'autre. Ainsi, les bébés, qui ont déjà leur personnalité in utero - ils réagissent tous différemment aux stimulations -, perçoivent et mémorisent, chacun à leur manière, le stress de leur mère, et celle-ci va parvenir plus ou moins bien à protéger l'enfant. On peut ainsi avoir des grossesses très difficiles qui débouchent sur la naissance d'un bébé en pleine forme et vice versa, des accouchements pathologiques alors que les neuf mois précédents étaient idylliques. La naissance est donc un cocktail éminemment complexe, car composé à la fois de ce qui vient de la mère, du bébé, et ce qui est déterminé par l'environnement. D'ailleurs, on ne sait toujours pas qui déclenche le signal de l'accouchement.

 

Que sait-on de ce qu'éprouve le bébé pendant le travail ?

 

Pendant longtemps, on a considéré la naissance comme un traumatisme dévastateur, mais en réalité, s'il n'y a pas de pathologie particulière, le bébé est massé par les contractions qui le poussent vers le bas. Il se met dans un état de semi-sommeil, une forme d'hypnose qui va l'aider à traverser tout le processus sans souffrir jusqu'aux toutes dernières contractions, moment où il a été observé qu'il se réveille. Même le fameux «cri» dont on pensait qu'il était signe de douleur lorsque l'air arrive aux poumons peut très bien ne pas avoir lieu. Par contre, le bébé a besoin de retrouver à l'air libre certains éléments anténataux : bruits du cœur de la mère, odeur du liquide amniotique sur le téton maternel, voix familière de ses parents… Ces perceptions mémorisées sont fondamentales pour lui et agissent comme de véritables repères identitaires. C'est pour cela qu'aujourd'hui, l'un des premiers gestes de l'équipe est d'installer le bébé sur le ventre de sa mère pour une «mise au sein précoce».

 

Quelle est votre mission de psychanalyste sur le lieu de l'accouchement ?

 

Je suis appelée soit par l'équipe, soit par les parents lorsqu'il y a une situation difficile à gérer: une césarienne est programmée pour une mère en grande difficulté psychique, ou l'un des jumeaux attendus décède in utero… De manière générale, quand la mère n'est pas disponible psychiquement pour accueillir son enfant, mon rôle est d'expliquer au nouveau-né ce qui se passe et notamment le fait qu'il n'est pas responsable de la détresse de ses parents. L'équipe médicale étant elle-même stressée dans de tels moments, et souvent silencieuse, c'est au psychanalyste de permettre à la parole de circuler.

 

Par Pascale Senk - http://sante.lefigaro.fr/

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10 novembre 2013 7 10 /11 /novembre /2013 13:49

Emilie Piouffre, via l'association "L'appel des appels", lance un appel aux jeunes dans une société sans avenir... pour un monde plus humain.  Puisse cet appel s'étendre à tous les acteurs sociaux des régions de France.

 

 

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Comment fait-on pour commencer dans la vie ?

 

Cette interrogation est commune à de nombreux jeunes. Nous rencontrons de nombreuses difficultés pour entrer dans cette société. Nous affrontons un marché du travail, une société qui s'est tellement dégradée ces trente dernières années que nous, jeunes générations nées durant cette période sommes plutôt pessimistes et manquons d'espoir. En effet, la société est de plus en plus dure, impitoyable, cynique, compétitive et moins portée par le collectif, la fraternité et l'engagement politique. D'ailleurs, nous sommes accablés par le manque d’ambition de nos politiques, par cette vision à court terme. Nos gouvernants proposent des recettes, des bricolages, plutôt qu’une vision du monde à long terme. Subséquemment quelle vision du monde, quelle vision économique ont-ils ? Toutes les institutions sont en crise, toutes : justice, famille, partie politique. De plus, 23% d’entre nous, jeunes français, vivent en dessous du seuil de pauvreté. Nous sommes face à une culture de l’inespoir, de la désespérance, de spectateurs et de pessimistes. Bien que l'espérance de nos jeunes années laisse place au désespoir, que le sentiment ressenti soit emprunt d'injustice, d'impuissance ; il ne nous faut pas céder aux sirènes du pessimisme et du cynisme.

 

Nous sommes désillusionnés

 

Très bien ! Il faut sortir de l’illusoire pour entrer dans l’action car aucun engagement sérieux pour changer les choses, pour faire reculer l’injustice, pour améliorer la société ne peut se construire sans désillusion préalable, il faut savoir de quoi les hommes sont capables, ce que la richesse et le pouvoir peuvent produire d’indifférence et d’égoïsme, ce que le néolibéralisme signifie en terme d’exclusion pour pouvoir planifier une action utile en tenant compte des réalités.

 

Le monde qu’on nous lègue ne nous convient pas

 

C’est à nous d’expliquer ce que l’on attend. C’est à nous jeune génération de réaliser collectivement dans quel monde nous souhaitons vivre dans dix ans ou quinze ans et qu’on invite les politiques à s’en inspirer, à donner réalité à cette vision. Nous ne voulons plus rentrer dans le moule actuel qui se fissure de toute part : moralement, socialement, économiquement, écologiquement. Il faut donc nous engager : temps, idées, militantisme, subversion et toutes ces formes qui restent encore à inventer, à créer, à construire. Pour animer, changer notre société, il n’y a pas besoin de milliards, il y a juste besoin de nous. Il nous reste à chacun un pouvoir d’appréciation beaucoup plus large que celui qu’on pense. Il ne faut pas penser qu’on a délégué notre pouvoir complet à autrui. Le but de la société aujourd’hui est de nous faire croire que nos marges de manoeuvre sont étroites et que nous avons confié nos pouvoirs à plus fort que nous alors que ce qui est le plus fort c’est ce que l’on a à l’intérieur de nous !

 

L’appel des appels qui œuvre pour inventer le monde de demain

 

L’appel des appels est le lieu idéal pour retrouver l'espoir, la meilleure façon de dire non, de ne pas se résigner, de penser la société, le monde, l'avenir de façon positive. Pour que la démocratie existe, il faut que chaque électeur ait le sentiment qu’il contribue à construire l’avenir en tant que citoyen. Il nous faut penser l’avenir de façon positive, espérer de manière déraisonnable. Notre société civile se doit d’être dynamique, inventive, créatrice. Il est urgent et nécessaire de penser le monde différemment, de créer le monde de demain. Nous sommes capables de prendre le temps et de desserrer les trames du temps et de l'immédiateté. On ne doit jamais renoncer à l’effort de la pensée et de la réflexion. Nous devons cesser d’avoir honte et sans attendre nous devons livrer bataille. Alors rejoignez-nous et construisons ensemble le monde de demain.

 

Par Emilie Piouffre - Doctorante en psychopathologie. Sous la direction de Roland Gori - Psychanalyste et co-fondateur de L'appel des appels - http://www.appeldesappels.org/

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6 novembre 2013 3 06 /11 /novembre /2013 12:04

Perte du sens des réalités, intolérance à la contradiction, actions à l'emporte-pièce, obsession de sa propre image et abus de pouvoir : tels sont quelques-uns des symptômes d'une maladie mentale récemment répertoriée qui se développerait durant l'exercice du pouvoir.... "C'est le syndrome d'hubris".

 

success-coaching

 

Dans ses Discours sur la condition des grands, Pascal jugeait utile d’éduquer les futurs puissants en leur rappelant que leur détention du pouvoir tenait avant tout du hasard : « Surtout ne vous méconnaissez pas vous-même en croyant que votre être a quelque chose de plus élevé que celui des autres […] Car tous les emportements, toute la violence, et toute la vanité des Grands vient de ce qu’ils ne connaissent point ce qu’ils sont. » Le pouvoir exerce une fascination indéniable, autant sur ceux qui le subissent que sur ceux qui l’exercent. Assurément, l’exercice du pouvoir n’est pas une activité comme une autre et n’échoit pas au premier venu, mais les « Grands » se souviennent-ils suffisamment de leur condition de simple mortel ? Un livre et un article récents plaident pour l’instauration d’une nouvelle entité médicale qui concernerait les personnalités politiques dirigeantes : elles seraient « intoxiquées » par un étrange agent pathogène – le pouvoir – les conduisant à manifester un narcissisme pathologique.

 

Dans son livre In Sickness and in Power (Dans la maladie et le pouvoir) paru en 2008, David Owen examine le rôle de la maladie dans les prises de décision des chefs d’État durant les 100 dernières années. L’exercice n’est pas nouveau. On se souvient du livre de Pierre Accoce et Pierre Rentchnick, Ces Malades qui nous gouvernent, paru en 1978, qui avait relancé le débat classique sur le secret médical chez les hommes de pouvoir, et ce bien avant la révélation du cancer de François Mitterrand. Selon D. Owen, les chefs d’État tiennent entre leurs mains le destin des peuples et, de ce fait, leurs décisions doivent se fonder sur un sens du jugement solide et réaliste. Mais il va plus loin, et propose tout à fait sérieusement au lecteur et à la communauté scientifique de considérer l’idée d’une nouvelle entité clinique dont seraient victimes certains dirigeants précisément du fait qu’ils détiennent le pouvoir. L’idée provocante est également développée dans un article qu’il a cosigné avec Jonathan Davidson, psychiatre au Centre médical de l’Université Duke, à Durham aux États-Unis, récemment publié dans la revue de neurologie Brain. Cette maladie est nommée en anglais hubris syndrome.

 

Hubris, ou le syndrome de la démesure

 

Le concept d’hubris est tiré non seulement de la psychanalyse, mais également de la philosophie grecque – on le retrouve chez Platon et Aristote – On retrouve aussi ce concept au théâtre, où il permet de raconter de grandes épopées, où le succès monte à la tête du héros, qui prétend se hisser au rang des dieux ; il est alors impitoyablement remis à sa place par Némésis, la déesse de la vengeance. L’hybris grec renvoie à la démesure et à ses conséquences funestes. Malheureusement, il n’existe pas en français d’équivalent satisfaisant au mot anglais hubris. Une approximation serait « orgueil démesuré ». Mais le champ sémantique du terme anglais est beaucoup plus large : il associe narcissisme, arrogance, prétention, égotisme, voire manipulation, mensonge et mépris. Le terme renvoie également à un sentiment d’invulnérabilité, d’invincibilité et de toute-puissance, en y associant un certain pathétique. Comme le narcissisme, l’hubris désigne aussi un manque d’intérêt pour tout ce qui ne concerne pas le sujet personnellement, une absence générale de curiosité. La caractéristique principale de l’hubris est qu’il est visible de tous, sauf du principal intéressé et de ses fidèles. Adapté à la politique, on voit immédiatement se profiler quelques candidats au syndrome d’hubris, mais D. Owen se focalise surtout sur l’analyse des chefs d’État britanniques et américains.

 

D. Owen est les 14 symptômes de ce qu’il nomme "syndrome d’hubris"

 

Pour être atteint du syndrome, il faut présenter au minimum trois symptômes:


1 – Inclination narcissique à voir le monde comme une arène où exercer son pouvoir et rechercher la gloire.

• 2 – Prédisposition à engager des actions susceptibles de présenter l’individu sous un jour favorable, c’est-à-dire pour embellir son image.

• 3  -Attrait démesuré pour l’image et l’apparence.

• 4 – Façon messianique d’évoquer les affaires courantes et tendance à l’exaltation.

• 5 – Identification avec la nation ou l’organisation, au point que l’individu pense que son point de vue et ses intérêts sont identiques à ceux de la nation ou de l’organisation.

• 6 – Tendance à parler de soi à la troisième personne ou à utiliser le « nous» royal.

• 7 – Confiance excessive en son propre jugement et mépris pour les critiques et les conseils d’autrui.

• 8 – Impression d’omnipotence sur ce que l’individu est personnellement capable d’accomplir.

• 9 – Croyance qu’au lieu d’être responsable devant ses collègues ou l’opinion publique, le seul tribunal auquel il devra répondre sera celui de l’histoire.

• 10 – Croyance inébranlable que le jugement de ce tribunal lui sera favorable.

• 11 – Perte de contact avec la réalité, souvent associée à un isolement progressif.

• 12 – Agitation, imprudence et impulsivité.

• 13  - Tendance à accorder de l’importance à leur« vision », à leur choix, ce qui leur évite de prendre en considération les aspects pratiques ou d’évaluer les coûts et les conséquences.

• 14 – Incompétence « hubristique », lorsque les choses tournent mal parce qu’une confiance en soi excessive a conduit le leader à négliger les rouages habituels de la politique et du droit.

 
Par Sebastian Dieguez est neuropsychologue au Laboratoire de neurosciences cognitives du Brain Mind Institute de l’École polytechnique fédérale de Lausanne, en Suisse.

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