12 mai 2014 1 12 /05 /mai /2014 15:59

Un « spin doctor » est un conseiller en communication et marketing politique agissant pour le compte d'une personnalité politique, le plus souvent lors de campagnes électorales. C'est, en quelque sorte, un « mercenaire » de la communication vendant ses services au plus offrant...

 

-Stéphane fouks : Lobbyiste et leader de l'agence d'influence Havas-

 

 

Le terme est généralement porteur d'une connotation négative : la pratique a montré que le spin doctor n'agit pas toujours de façon morale notamment du fait de l'emploi de la technique dite du Storytelling. Dignes héritiers d'Edward Bernays, le premier des voleurs des théories de Sigmund Freud, ils sont également des professionnels du détournement et du maquillage de la vérité.

 

Étymologie

 

Il est vrai que la fonction est ancienne et s'est formalisée depuis les années 1930, même si le mot lui-même, « spin », n’a vraiment été popularisé qu’à partir de 1984 et du débat Ronald Reagan / Walter Mondale.

 

«To spin, en anglais, signifie « faire tourner ». Spin fait donc allusion à l’« effet », comme celui que l’on donne à une balle de tennis ou à la façon de faire tourner une toupie  ». En imprimant une torsion aux faits ou aux informations pour les présenter sous un angle favorable, les spin doctors dirigent donc l’opinion en lui fournissant slogans, révélations et images susceptibles de l’influencer, en mettant en scène les événements qui la réorientent dans le sens souhaité. En ce sens, leurs techniques d'influence proches du marketing commercial renouvellent les techniques de propagande classiques.

 

La commission générale de terminologie et de néologie française recommande depuis 2007 l'emploi des termes « façonneur d'image » pour traduire cette fonction. Le spin doctor, officiellement « conseiller en relations publiques », reçoit d’autres surnoms, tels que gourou, mentor, éminence grise, faiseur de présidents, doreur d'images ou docteur Folimage.

 

Pratique des Spin doctors

 

La mission du «Spin Doctor» est simple et directe : elle consiste à « dire et faire dire du bien de… », à adapter le message de leur candidat aux attentes supposées de l’électorat, à « enjoliver » l’apparence de leurs clients, à les rendre séduisants et populaires. Pour ce faire elle met au service de la communication politique une combinaison faite de techniques de narration (raconter une «belle histoire ») avec les principes de la publicité ou du marketing.

 
Par ailleurs certains spin doctors n'hésitent pas à recourir à des stratégies indirectes et plus «sournoises» : méthodes de discrédit d’un concurrent, de désinformation, de production d’évènements, de montage artificiel d’affaires en vue de défendre une cause ou d'en dénigrer une autre.

 

Le spin doctor exerce une influence considérable sur le discours, le programme et les initiatives de son client. En la matière, deux professionnels célèbres ont acquis une réputation sulfureuse, liée à des affaires de fuites ou de désinformation de la presse. Il s’agit de Karl Rove le conseiller de G. W. Bush, surnommé son « baby genius » et de Alastair Campbell pour Tony Blair. Tous deux ont joué un rôle crucial dans le « marketing » de la guerre en Irak, et bien sûr dans le style et le programme de leurs clients.

 

  • Sous l'Allemagne nazie, le ministre Goebbels a été le précurseur et l'initiateur d'une propagande systématique à grande échelle en faveur d'un régime totalitaire. Son action se caractérise par la justification et la promotion d'une idéologie cohérente et particulière au service d'un « Reich de mille ans ».
  • Aux États-Unis, le spin doctor est un personnage bien identifié. Des livres, des sites comme sourcewatch.org ou prwatch.org tiennent la chronique de leurs activités. Ils apparaissent dans des films ou des téléfilms. La campagne présidentielle américaine de 2008, la plus chère de l’histoire, a mis en vedette de nouveaux spin doctors comme David Axelrod, le conseiller de Barack Obama.
  • Au Mexique, Rafael Guillén Vicente, dit le « sous-commandant Marcos », usa de ces méthodes pour se faire connaître.
  • En France, on peut prendre l'exemple de :
    • Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était Président de la République, a bénéficié de l'habileté de plusieurs « doreurs d'images », notamment Thierry Saussez, Patrick Buisson ou encore Henri Guaino
    • François Mitterrand avec Jacques Séguéla, Jacques Attali et Jacques Pilhan. 

 

 

Entretien avec Luc Hermann : « Les “spin doctors” sont un danger pour la démocratie » 

 

En regardant vos documentaires, on a l’impression que la plupart des journalistes sont sous l’influence des conseillers en communication. Qu’en est-il exactement ?

 

 Oui, les spin doctors sont malheureusement en train de gagner la bataille de la communication. Leur méthode est très au point. Ils abreuvent les journalistes de toutes sortes d’informations pour les noyer et orienter leurs recherches. Il leur est ainsi plus facile de faire passer des mensonges, notamment sur des dossiers délicats.

 

On l’a vu dans les affaires DSK ou Cahuzac. Ils jouent sur l’urgence des journalistes à fournir de l’information à leurs rédactions, notamment les sites Web qui font de l’information en continu. Ensuite, ils savent que les journalistes ont tendance à se copier. Il y a malheureusement une forme de capillarité entre tous les médias. Enfin, ils capitalisent sur le fait que la plupart des journalistes manquent de pugnacité pour vérifier une information et la confronter à d’autres sources.

 

"En soulignant tout cela, on se rend compte qu’ils sont un véritable danger pour la démocratie."

 

Les différents communicants ont-ils facilement accepté de parler devant votre caméra ?

 

 Oui, la plupart ont accepté de venir témoigner sans poser de conditions. Seuls deux d’entre eux ont refusé et un troisième n’a pas voulu donner suite, malgré une longue conversation pour tenter de le convaincre. Mais les principaux spin doctors français sont là.

 

Le fait de parler peut aussi être pour eux une manière de redorer leur blason tout en ne disant pas grand-chose que l’on ne sache déjà…

 

 Le danger existait, mais je pense que nous avons su l’éviter. J’ai noté que certains étaient flattés d’être sollicités et ont fait preuve d’une certaine arrogance… Nous avons essayé de tirer tous les fils des histoires dont ils s’étaient occupées. La plupart ont parlé ouvertement, sans cacher leurs desseins. Ils défendent des intérêts privés et ça ne leur pose aucun problème d’utiliser des moyens parfois complexes pour arriver à leurs fins. D’ailleurs, beaucoup d’entre eux sont d’anciens journalistes et connaissent par cœur le fonctionnement d’une rédaction. Ils savent très bien comment s’y prendre pour faire l’ouverture des journaux de 20 heures… A titre d’exemple, aux Etats-Unis, on compte 4,6 communicants pour un journaliste !

 

Ont-ils demandé à revoir leurs interventions avant la diffusion ?

 

 Non. Ils savent ce qu’il faut dire et ne pas dire et font, très rarement, des dérapages… Certains qui ont vu les documentaires nous ont même félicités pour notre travail !

 

Sources: Le Monde.fr et Wikipédia.fr

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