19 mai 2013 7 19 /05 /mai /2013 06:49

Objet de respect et de mépris, de savoirs et de rumeurs, de louanges et de critiques, l'eau du quotidien porte beaucoup de paradoxes.

 
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Léda et Jupiter métamorphosé en cygne Bas-relief en pierre situé sur la façade Est de la fontaine de Médicis (Jardin du Luxembourg).


Fonds mythologique profond, mythes littéraires, symboliques religieuses, tous ces éléments culturels sont présents dans notre inconscient. L'eau imaginaire, l'eau imaginée, l'eau désirée, celle que nous portons tous est nourrie de ces symboliques puissantes. Pour décrypter la nature complexe de ces attitudes face à l'eau, nous pouvons analyser les mythes de l'eau. Ainsi se clarifie la complexité des interrogations, ainsi s'éclairent les attitudes passionnelles.

 

Les mythes littéraires

  

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© Cargo/ImageZoo/Corbis

 

L'eau oscille entre la vie et la mort

  

C'est le miroir de la fontaine qui ouvre l'imagination. Pour l'Homme qui se mire et se cherche, l'eau devient un véritable écho visuel. On pense au célèbre Mythe de Narcisse, réinventé au cours des siècles par les poètes. Voici l'eau fraîche et claire de la rivière. Elle invite au bain, à la nudité permise, innocente. L'eau fraîche prend ici sa valeur abstraite de jeunesse, signifie le renouveau, le printemps. Et puis, il y a l'érotisme : la rivière qui ondule évoque la femme cygne de l'origine, cette Léda qu'a aimée Jupiter après l'avoir vue dans l'eau. Voici les eaux profondes, profondes comme des tombeaux, engloutissantes... C'est Edgar Poe, poète du fantastique et de la ligne frontière entre la vie et la mort, qui a le plus exprimé cette fascination pour l'eau de l'ombre, qu'il appelait l'ébène liquide. Cette fois, les eaux dorment, elles font silence, elles abritent non plus des enfants mais des morts. L'eau symbolise la mère et la femme En s'appuyant sur des œuvres littéraires et picturales, il ne fait aucun doute que l'eau est le premier symbole de la Mère nature.

 

A l'eau sont donc associées, au plus profond de chaque être, des images de bien-être et de nourriture qui le renvoient à son premier amour : sa mère. Chez les poètes romantiques, cette image maternelle se féminise ; Lamartine a beaucoup chanté son désir d'être bercé dans les bras d'une rivière-jeune fille. L'eau conduit la pureté Les mythes littéraires apportent la preuve que pour l'imagination humaine la pureté résume à elle toute seule toutes les valorisations et l'eau en est le symbole naturel. Il suffit à l'homme d'être aspergé d'eau en surface pour que tout son être soit purifié en profondeur. Cette purification rénovatrice se concrétise dans le mythe la fontaine de Jouvence. L'eau aspergée sur le visage réveille l'énergie de voir. Lorsque la pureté de l'eau est détruite, c'est la colère de l'homme. La description d'une eau impure provoque des adjectifs en forme d'injures (nitreuse, sulfureuse...) qui sont moins des constatations scientifiques qu'une analyse psychologique de la répugnance : en somme les grimaces d'un buveur. Tout comme l'eau pure représente le Bien, l'eau impure représente le Mal.

 

Le fond mythologique

 

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Auteur : Vassil - Médaillon représentant Jonas et la Baleine; façade de la cathédrale d'Amiens.

 

L'eau qui distingue - L'eau qui sépare le pur de l'impur n'agit pas par lavage quantitatif. Quelques gouttes suffisent à purifier le monde. Pas étonnant que dès l'Antiquité l'eau soit considérée comme indispensable aux cérémonies de purification. L'eau qui fusionne Dans l'univers de l'eau, on prend appui sur un schéma anthropologique éternel : l'inversion du contenant en contenu. L'eau avale pour mieux ressourcer. C'est le cas de Jonas qui nous redonne la possibilité de revenir dans les eaux amniotiques d'origine et de ressortir de la baleine avale-tout, chargé d'une vie nouvelle. La mère-eau est un thème qui apparaît aussi bien à Babylone, dans les pays baltes qu'en Inde. Les fontaines de fécondité se retrouvent de l'Asie à la Gaule en passant par la Russie. La catastrophe aquatique peut se prolonger par la renaissance : le Déluge où Noé est sauvé des eaux fonde une nouvelle humanité, les rituels funéraires où en lavant le corps on peut le ramener symboliquement à l'eau primitive.

 

Les symboliques religieuses

 

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La France des fontaines Près de 6000 sources existent en France. La façade atlantique concentre le plus grand nombre de fontaines. Au contraire, en descendant dans le Sud-Est, avec une véritable zone de silence entre Ardèche et Alpes de Haute Provence, les fontaines se raréfient. S'agit-il d'un déterminisme géographique ou d'un phénomène culturel ? L'historien fait remarquer que l'influence protestante a contribué à effacer dans le Sud les cultes païens des fontaines que le catholicisme breton a plus facilement intégrés... Les fontaines sont aussi des marqueurs d'espace. Elles instituent une frontière entre profane et sacré quand elles jouxtent l'église ou le cimetière. Elles délimitent les campagnes et les villes : dans toute la France, il n'existe qu'une soixantaine de fontaines en ville.

 

Elles délimitent également l'univers féminin du lavage (fontaine lavoir) de l'univers masculin du travail de la terre. Les ruisselets issus des fontaines coulent le plus souvent vers l'ouest, et suivent donc la course du soleil. Les rites de l'eau Aux processions vers une source sacrée et aux rites anniversaires qui font revivre le miracle de l'apparition de l'eau, s'ajoutent les rites de l'ingurgitation qui provoquent une précieuse immédiateté du transfert symbolique (ex des femmes stériles « prenant les eaux »). L'eau a toujours mis en jeu l'ensemble de la collectivité. Il y a un lien très net entre les dévotions rendues à l'eau et les fêtes des villages qui réunissaient tous les habitants. L'une de ces principales conjonctions était la nuit de la Saint Jean, au cours de laquelle les villageois rendaient hommage aux eaux régénératrices en dansant autour des feux. De même, parfois, les habitants de toute une région - par exemple dans les Landes- se réunissaient en pleine forêt pour se baigner ensemble dans des grandes baignoires chauffées au fourneau, en une sorte de moment d'intense thérapie collective.

 

L'eau dans les religions monothéistes Si dans les traditions païennes et celtiques, l'eau des sources et des fontaines signifie l'abondance et la guérison, les trois religions monothéistes se sont formées au contact de la rareté de l'eau, précieux don de Dieu. Les images bibliques fondamentales que sont les sources de l'Eden ou le Déluge ont produit des symboliques et des rites qui sont encore en pratique aujourd'hui. Symboliques et pratiques judaïques Dans le judaïsme, la valeur principale que prend l'eau est celle de la pureté avec des rites purificatoires très nombreux. Ainsi, après la destruction du temple, l'importance de l'eau s'étend des pratiques des prêtres à celles du peuple juif tout entier, la purification ayant alors valeur d'aide à la reconstruction du temple. Ce sont donc non seulement les prêtres qui doivent se laver les mains après avoir lu les textes sacrés mais chaque fidèle, pour bien séparer ses activités religieuses de ses activités profanes. Aujourd'hui encore, nombre de fêtes comprennent un ou plusieurs moments de lavage des mains : prière de Pâque, de Rosh Ashana (le nouvel an).

 

L'eau des Evangiles L'ensemble des textes du Nouveau Testament se présente comme un « accomplissement de l'Ancien Testament », c'est-à-dire un prolongement des mêmes valeurs et symboles. En ce sens, l'eau chrétienne poursuit l'eau judaïque en lui donnant sa spécificité, notamment autour des thèmes centraux de l'eucharistie et de la résurrection. Évidemment, cette eau est indissociable de la figure de Jésus. Ainsi, c'est le baptême qui fonde le plus symboliquement le christianisme. Ce rite est accompli par Jésus lui-même, qui se soumet à l'immersion dans le Jourdain sous la conduite de Jean le Baptiste. C'est son contact avec l'eau qui révèle sa divinité et par conséquent le caractère fondamental de son acte : plonger et ressurgir de l'eau, tel est le sens profond du message christique. Cependant, comme le note l'historien des religions Odon Vallet, le christianisme ne s'est pas contenté dans sa façon d'utiliser et de diviniser l'eau de poursuivre le judaïsme d'origine. Il s'est également inspiré des religions dites premières. Ainsi, chez les Mayas Quiché, on aspergeait la tombe des défunts comme aujourd'hui le prêtre catholique pratique une aspersion aux enterrements. L'eau dans le Coran Dans l'islam, l'eau occupe également une place essentielle. Elle accompagne et symbolise les appels du Prophète à la pureté, notion centrale de cette culture. Selon Mahomet, la pureté c'est déjà la moitié de la foi, et se purifier est le premier acte d'engagement de tout musulman.

 

La purification est permise tout particulièrement par la pratique des ablutions. Dès les temps mythiques de la séparation d'Israël et d'Ismaël, l'eau intervient. En effet, lorsqu'Hâdjar, la servante d'Abraham qui porte son fils, est abandonnée dans le désert, elle n'est sauvée que par le jaillissement d'une source aux pieds de son enfant. Le murmure de l'eau -zam zam- donne son nom au premier puits sacré de l'islam : le zam-zam. Le Coran raconte aussi que Mahomet, recevant la parole de l'ange Ibraîl, demande qu'on le couvre d'une cape et qu'on l'asperge d'eau. C'est cet exemple originel que chaque musulman est invité à son tour à suivre. La pratique de l'ablution intervient ainsi de nombreuses fois dans la vie d'un musulman pratiquant : au moins une fois lors des cinq prières quotidiennes, et au cours des moments exceptionnels que sont les accouchements, les rites funéraires ou les mariages.

 

La légende

 

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La licorne : la pureté sublimée Féérique, fabuleuse, la licorne est dépeinte comme un cheval blanc, doté d'une corne torsadée au milieu de son front. Elle est évoquée pour la première fois par l'historien grec Ctesias, vers 389 av JC, sur la base de récits de voyageurs. Elle symbolise la puissance, la beauté, la noblesse et la pureté. Sa corne unique lui donne des pouvoirs incroyablement mystérieux. La légende nous raconte que sa corne pouvait séparer les eaux polluées, déceler les impuretés et les poisons et purifier les points d'eaux infestés par les vermines et serpents.

 

Voir l'ouvrage pour en savoir plus:

L'eau – Mythes et Symboliques, Jules Gritti. Eau - mythes et symboliques

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