Faut-il envisager la chute de l'intelligence collective ?
Définition de l'effet Flynn
On appelle effet Flynn l'accroissement lent (et que l'on a quelque temps cru inexorable) du rendement moyen à des tests de type QI observé depuis 100 ans dans les pays industrialisés. Ce qui se traduit dans la pratique par une meilleure mise en valeur du potentiel intellectuel des habitants de ces pays.
L'effet Flynn a été nommé ainsi en l'honneur de son promoteur, James R. Flynn et cité de cette manière, pour la première fois dans l'ouvrage The Bell Curve de Hernnstein & Murray. On peut cependant légitimement en retrouver l'origine dans la maxime latine de Juvenal : « Un esprit sain dans un corps sain » tirée à l'origine de l'esprit grec.
Ce phénomène étant essentiellement calculé à partir des tests de QI, il souffre de la même incertitude que ceux-ci, à savoir : les tests de QI mesurent-ils l'intelligence d'une personne, la projection de l'intelligence de celui-ci ou bien la réalisation du potentiel intellectuel d'une personne à un moment donné ? Un consensus existe cependant pour exprimer que les tests démontrent le niveau minimal d'une personne à un moment donné ce qui forme une bonne base de comparaison et c'est l'évolution positive des aptitudes intellectuelles chez les personnes testées qui a justement amené Flynn à formuler sa théorie. L'effet Flynn est donc un complément important des test de QI mais aussi l'élément moteur de leur recalibrage régulier vers le haut.
Causes possibles de l'effet Flynn
Il semble que ce soit une conjonction de facteurs :
- On pense à l'augmentation de la qualité de la nutrition. On a pu constater des gains de quelques points.
- L'allongement et la généralisation de la scolarité jouent un rôle certain, mais on ignore dans quelle mesure.
- Le fait que les parents accordent plus précocement de l'attention à leur(s) enfant(s).
- Le travail fait sur la pédagogie peut jouer, y compris par une diminution de la violence familiale longtemps considérée comme "éducative"
- La sécurité et l'hygiène publique peuvent également jouer un rôle important en diminuant le temps consacré à sa sécurité personnelle et sa santé
- Philippe Dumas défend l'idée que l'exposition intensive des tout jeunes aux objets des Tic (Technologie de l'Information et de la Communication) est un des facteurs-clé de l'effet Flynn (l'augmentation générale du Q.I. et de la demande de stimulation intellectuelle).
- Pour Francis Heylighen : « Un facteur plus général est que cette société dans l'ensemble fonctionne à un niveau intellectuel plus élevé, proposant à l'enfant curieux plus d'informations, de défis plus intellectuels, de problèmes plus complexes, plus d'exemples à suivre, et plus de méthodes de raisonnement à appliquer. Juste en utilisant les appareils quotidiens, tels que les fours à micro-ondes, et les thermostats, exige un type plus abstrait de raisonnement dont la génération plus ancienne est souvent incapable. La plus grande complexité de la vie est susceptible de stimuler une plus grande complexité d'esprit. L'utilisation croissante des ordinateurs pour l'éducation ou les jeux précoces est susceptible d'augmenter la connaissance générale, le raisonnement abstrait et l'agilité intellectuelle ».
Ne pas oublier que cet effet n'a pas pu être constaté en dehors des quelques pays industrialisés qui utilisent régulièrement les tests de Q.I. . L'évolution de ces pays dans les domaines sanitaires, éducatifs et autres doit donc forcément être pris en compte.
L'effet Flynn, est-ce fini ?
Stagnation et régression
L'effet Flynn semble désormais stagner voire légèrement régresser dans les pays industrialisés, c'est l'Angleterre qui rencontra cette situation la première dès la fin des années '80. Beaucoup de raisons sont avancées tant une immigration intense de personnes n'ayant pas encore bénéficié de l'effet Flynn, des changements dans la pédagogie et la politique, la pollution, un manque d'innovations, ... Il est également possible que le phénomène ait besoin d'une crise grave afin de rebondir, c'est assez courant dans les domaines historiques que de constater que des évolutions sont bloquées par une inertie sociale ou dogmatique que seule une crise grave et parfois sans aucun rapport permettra de résoudre. L'effet Flynn a également été très brutal en un siècle dû entre autres au fait que l'évolution potentielle de l'Humanité avait été contrariée pendant près de deux millénaires par des considérations sociales et des errements d'autoritarisme.
L'effet Flynn peut s'être arrêté dans certains pays industrialisé depuis le milieu des années 1990. Au Royaume-Uni, en ce qui concerne les adolescents, il pourrait même avoir stagné depuis les années 1980. Teasdale & Owen déclarent : « les analyses de tests d'intelligence de près de 500.000 jeunes Danois entre 1959 et 2004 montrent que l'augmentation a connu son apogée fin des années 1990 et aurait légèrement régressé jusqu'à un niveau d'avant 1991 ». Ils estiment qu'« un facteur lié à cette récente chute pourrait être un déclin simultané du nombre d'étudiants en avance de 3 ans pour les 16-18 ans ».
En 2004, Jon Martin de l'Université d'Oslo et ses collègues ont publié un article décrivant les résultats aux tests de QI des conscrits norvégiens entre 1950 et 2002 démontrant que l'amélioration des scores en intelligence générale s'est arrêtée après le milieu des années 1990 mais a régressé légèrement dans nombres d'autres tests.
Le Conservatoire national des arts et métiers s'est également fait écho d'un début d'inversion de l'effet Flynn.
Interprétations de cette régression
Il est possible que cette "panne" de l'effet Flynn soit due à une crise des systèmes, un manque d'idéal, la liberté étant quasiment atteinte, peu de gens ont encore des buts idéalistes, ceux qui restent sont majoritairement dans des systèmes idéologiques ou religieux ce qui signifie que leur développement est autant bridé, cadré que surveillé. Il existe aussi une crise des systèmes éducatifs qui à force de ne voir que l'élévation de la moyenne a oublié de soigner l'excellence qui est étouffée. Or sans excellence, la moyenne manque de modèle et de "lièvres" à suivre, sa progression est donc fatalement réduite à elle-même. il règne également une sorte d'autosatisfaction actuelle comme si le niveau actuel était déjà considéré comme bien suffisant. Philippe Dumas parle plutôt lui d'une sorte d'incompréhension, un fossé des générations mais d'un nouveau genre, plus absolu, pas exclusivement rebelle mais plutôt parce que basé sur des expériences du monde qui deviennent totalement différentes entre autres les influences omniprésentes des "technologies de l'information et de la communication" (TIC). Le Net et la télévision semblent d'ailleurs être des éléments contribuant à "la panne de l'effet Flynn", lorsqu'ils sont mal maitrisés.
Certains comme R. Lynn prétendent que l'effet Flynn a masqué un effet dysgénique dans la reproduction humaine au sein des nations industrialisées et que désormais le QI ne peut que continuer à descendre. De toute manière, si déclin il y a, il y aura d'autres causes que dysgéniques. En effet, les modifications génétiques chez les organismes complexes prennent énormément de temps, des siècles voire des millénaires. Ce qui signifie que l'effet Flynn est beaucoup trop rapide que pour être explicable de manière génétique (plus de 50% de l'effet Flynn est observable sur une soixantaine d'années). Des chercheurs ont prévenu que des expositions continues aux industries chimiques amènent à des attaques du système nerveux, spécialement chez les enfants, ce qui pourrait amener à une pandémie silencieuse de l'intelligence dans les nations industrialisées avec des désordres mentaux grandissants.
Prédictions sur les populations
Si l'effet Flynn est terminé pour la majorité, il va continuer pour les minorités, spécialement avec les immigrés ou les communautés mal intégrées qui n'ont pas encore bénéficié de ses bienfaits et qui plombent donc nos résultats actuels alors qu'ils vont les magnifier demain. Par exemple, William T. Dickens et James R. Flynn ont écrit dans leur article de 2006 "Les afro-américains réduisent leur retard de QI: des preuves par échantillons standardisés" que les noirs américains continuent de gagner 5 à 6 points de QI envers les blancs non-hispaniques entre 1972 et 2002. Ces gains sont d'ailleurs cette fois largement homogène pour toutes les aptitudes. J. Philippe Rushton et Arthur R. Jensen se sont attelés à démonter cette théorie mais ont du concéder 3.44 points de QI en questionnant l'exclusion de 4 tests indépendants qui démontraient une évolution basse voire négative du QI des noirs américains. J. Philippe Rushton et Arthur R. Jensen ont remis en cause les éléments de cette recherche et ont calculé un gain de nul à 3.44 points en réfutant l'exclusion de 4 tests indépendants de l'étude qui démontraient des gains nuls voire négatifs.
En conclusion, le constat après des décennies de tests passés au crible est sans appel: l'homme semble avoir atteint son seuil maximal d'intelligence... Cette hypothèse se vérifie essentiellement dans les pays développés, ou les limites biologiques et cognitives sont en stagnation (voire en régression, depuis les années 1990).