4 juin 2011 6 04 /06 /juin /2011 19:05

Prise d’otages et enlèvements,
quand faut-il craindre le syndrome de Stockholm ?


A travers le monde, les prises d'otages sont devenues monnaie courante. Au cours de leur captivité, certains prisonniers développent ce qu'on appelle le syndrome de Stockholm. Mais que cache ce nom énigmatique ?

  

Ce syndrome définit un curieux phénomène psychique qui incite les victimes d’enlèvement à manifester une certaine sympathie vis-à-vis de leurs ravisseurs. Pourquoi porte-t-il le nom de la capitale suédoise ? Parce qu’il a été observé pour la première fois en août 1973 dans cette ville chez plusieurs employés de banque du Crédit suédois. Bien qu’ils aient participé bien malgré eux à un hold-up manqué, ces derniers avaient défendu leurs agresseurs et même, pour certains, témoigné en leur faveur lors du procès qui avait suivi leur arrestation. Mieux, une employée du Crédit suédois allait même par la suite devenir la femme d’un des attaquants de la banque.

 

Mariages et adhésions

 

Le syndrome de Stockholm, décrit en 1978 par le psychiatre F. Ochberg auquel on doit cette dénomination, peut parfois être d’intensité si forte qu’il conduit certaines anciennes victimes à épouser la cause des voleurs ou des terroristes ou à participer à leurs actions. Cela fut, par exemple, le cas de Patricia Hearst, qui n’a pas hésité à attaquer une banque avec ses anciens agresseurs devenus complices. Il arrive même que le meurtre d’otages ou de policiers ne puisse remettre en cause ce puissant courant d’empathie.

En décembre 1999, pendant le détournement de l’avion indien, qui a connu de multiples escales imprévues entre New Delhi, Lahore et Dubaï, certains passagers semblent également avoir développé des sentiments positifs envers leurs ravisseurs. Néanmoins, le nombre de syndromes de Stockholm paraît avoir globalement diminué ces dernières années.

 

Plus fréquent chez les femmes jeunes

 

Cette réaction psychique est d’autant plus courante que la captivité a duré longtemps, que la victime est jeune, de sexe féminin et que le groupe des otages n’est pas uni d’un point de vue psychologique. Mis à part ces quelques caractéristiques, les personnes sujettes à ce syndrome ne semblent pas présenter de traits psychologiques particuliers. Mais ce comportement est bien sûr plus volontiers rencontré lorsque les auteurs de l’acte terroriste n’ont pas agressé physiquement leurs victimes et que la cause ayant motivé la prise d’otages ou le détournement peut être “justifiée” sur le plan idéologique.

Le syndrome est aussi bien observé à titre individuel que collectif et n’épargne pas les terroristes, qui peuvent éprouver, eux aussi, des sentiments favorables vis-à-vis de leurs otages. Son apparition est expliquée en partie par la promiscuité dans laquelle vivent agresseurs et victimes ainsi que par la dépendance psychologique de ces dernières vis-à-vis des premiers. En effet, pour limiter le stress et la peur de la mort, des défenses psychiques particulières peuvent se mettre en place chez les personnes enlevées ou détenues en otage et un sentiment d’identification aux agresseurs peut se développer.

Le syndrome de Stockholm disparaît le plus souvent quelques semaines après la libération des victimes mais, parfois, il peut persister et modifier leur vie. Il n’est pas utile de chercher à le prévenir, si toutefois on pouvait le faire ce qui est loin d’être prouvé, car il préserve très probablement la vie de certains otages en diminuant leur tendance à développer des comportements violents.

 

Prendre en charge les victimes

  

Quoi qu’il en soit, une prise en charge psychologique ou psychanalytique des victimes doit être effectuée après leur libération, afin d’éviter un stress post-traumatique et limiter les sentiments de culpabilité qui peuvent apparaître, en particulier si d’autres personnes demeurent prisonnières ou ont été exécutées. En favorisant l’extériorisation des émotions, cette aide psychologique leur permettra également de prendre plus facilement contact avec la nouvelle réalité qui les entoure.

 

Dr. Corinne Tutin

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