Face à un État qu’il juge inefficace, Alexandre Jardin lance une initiative populaire pour « une révolution solidaire » : il appelle la société civile à refuser les fausses promesses et les discours extrémistes, et à montrer tout le génie dont elle est capable.
Alors ... Coup médiatique ou véritable volonté citoyenne ?
Pourquoi estimez-vous que notre époque est nulle ?
Ce qui se passe au sommet de notre État est indigne du génie de notre pays. Le pays est en train d’inventer toutes les solutions dont il a besoin, grâce à ses maires, ses associations, ses entrepreneurs. 8 % des Français font confiance aux partis politiques pour régler leurs problèmes. Or, ceux que j’appelle les « faizeux » passent à l’acte dans nos territoires, trouvent des solutions dont le pays ne sait pas tirer profit au niveau national. Le problème est qu’ils sont isolés : chacun travaille dans son coin. Il faut modifier cela. Échanger les bonnes pratiques et étendre au niveau national ce qui marche localement. Bref : laissez-nous faire !
« Laissez-nous faire » est le titre de votre livre où vous lancez un appel à ces « faizeux ». Vous oscillez entre colère et enthousiasme…
Oui, car le pays est au bord de la révolte, profession par profession. Demandez à toutes les professions comment elles vont mettre en place le compte de pénibilité ! Cette disposition part d’un bon sentiment et cela se termine en mesure technocratique imposée par Paris. La France est en train de mordre la poussière à cause du système normatif. Notre pays hésite entre les plus noirs sentiments et son enthousiasme à faire ! Ou l’on engage une révolution solidaire venant de nos territoires avec les entreprises, les associations, les mairies, ou bien on aura une révolution négative.
Comment fait-on une révolution solidaire ?
On a répertorié une centaine d’actions, comme « Lire et faire lire », et on les regroupe en « bouquets » d’actions pour proposer aux mairies des politiques publiques clés en main portées par la société civile avec des opérateurs compétents. En 2017, on fera l’inverse de ce que Nicolas Hulot a fait en 2007. Il a proposé un pacte aux candidats en leur disant : « Signez et faites-le ». Nous, nous leur demanderons de signer des contrats de mission et on leur dira de nous laisser faire. Un véritable contrat entre les partis et la société civile agissante pour passer à l’acte.
Sinon ?
Sinon nous irons à la présidentielle. Ce sera le signe de notre échec. Car notre but n’est pas de prendre des postes mais de transférer en 2017 des compétences aux gens légitimes, qui ont apporté la pertinence des modèles qu’ils proposent. La France regorge de solutions adaptées à l’ensemble de nos problèmes. Un exemple ? Les gens de « compte nickel » ont rebancarisé 100.000 personnes en un an ; des étudiants ont publié une carte des colocations ; d’autres organisent des dons de sang dans certains quartiers pour lutter contre les communautarismes arguant qu’il vaut mieux verser son sang dans des poches que dans la rue. Et ça marche !
Concrètement comment fait-on ?
On dépose une fiche sur le site bleublanczèbre.fr. Si le comité de sélection considère qu’il y a un potentiel pour l’ensemble du pays, l’action rejoindra l’un des « bouquets » de solution. Les gens peuvent aussi, dès maintenant, s’engager dans des programmes qui fonctionnent déjà. Agissez vous-mêmes, n’attendez plus rien d’en haut !
C’est un discours qui porte ?
Cela crée un sentiment d’enthousiasme fou !
Vous parlez et soutenez les démarches positives des Français. Jamais du négatif : des haines, des ressentiments, du racisme, du repli communautaire. Pourquoi ?
Car je pense que le pays est en train d’hésiter entre le positif et le négatif. Il suffit d’une masse critique de gens ultra-enthousiastes et courageux pour faire que l’histoire bascule dans le bon sens.
Le FN est arrivé en tête des élections européennes. Comment avez-vous réagi ?
Ce jour-là j’ai su qu’il fallait rassembler les « faizeux ». Car la France, ce n’est pas le tri des personnes et les palissades à nos frontières mais l’universalisme, le courage, l’audace. On n’a rien à voir avec un peuple de peur. Mais si on nie le problème, les classes populaires, les gens deviendront fous. Les élections européennes n’ont rien changé : les partis sont restés sur les vieux logiciels.
Que répondez-vous aux gens qui disent que vous êtes un doux rêveur ?
« Lire et Faire lire » n’est pas un programme de rêveur. Plus de 400.000 enfants en bénéficient et ce n’est pas un rêve.
Vous dénoncez l’immobilisme de Chirac, le réformisme factice de Sarkozy et le rien de Hollande…
Le problème n’est pas tant le politique que l’outil qui ne fonctionne plus. La loi Macron, dont on nous rabat les oreilles, ne sera pas opérationnelle avant la mi 2016 ! Les classes populaires ne peuvent plus attendre !
Qu’est-ce qui vous meut pour agir ?
Mon amour pour la France et le fait que je suis le petit-fils du bras doit de Pierre Laval. Je ne peux pas ne pas agir et attendre qu’une catastrophe arrive. Je sais familialement que cela peut arriver, que des gens malveillants peuvent arriver. Or chez tous nos « zèbres », il y a une authentique bienveillance.
Cette bienveillance était palpable dans les rues de France le 11 janvier, après les attentats de Paris…
C’est vrai mais l’esprit du 11 janvier n’a rien enclenché sur un plan pratique, opérationnel. C’est pour cela que j’insiste pour que les « faizeux » se rassemblent. Isolés, ils ne pourront pas grand-chose face à l’appareil d’État.
Des électeurs du FN peuvent-ils vous suivre ?
Il y a des gens qui sont tentés et qui se mettent à réfléchir car on leur parle concret. On n’a pas de baratin ni de programme. Ce sont nos actions qui parlent pour nous. La puissance du mouvement « zèbre » ne dépend que de la force de conviction des Français.
Pourquoi les appelez-vous des zèbres ?
Parce qu’ils sont joyeux comme tous ceux qui refusent la fatalité. Et puis ce sont de drôles de zèbres, ils sortent du cadre.
La France est en train de mordre la poussière. Notre pays hésite entre les plus noirs sentiments et son enthousiasme à faire !
Propos recueillis par Nathalie MAURET pour Est-Républicain.fr
Soutenir les zèbres : http://www.bleublanczebre.fr/
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